Transports, économie, éducation… ce que l’on sait à la veille de l’annonce du plan de déconfinement

Après plusieurs semaines de concertation, le gouvernement s’apprête à présenter son plan de déconfinement mardi devant les députés.  L’occasion de revenir sur les mesures déjà annoncées par l’exécutif sur le sujet.

Frontispice de l’Assemblée nationale à Paris(MomentaryShutter/Flickr)

Le lundi 13 avril, le président de la République avait promis qu’un plan de déconfinement serait présenté à l’Assemblée nationale « d’ici quinze jours ». Deux semaines jour pour jour après cette déclaration, Édouard Philippe et Jean Castex, le « M. Déconfinement » du gouvernement, vont présenter la « stratégie nationale » qui devrait permettre aux Français de sortir progressivement de chez eux à partir du 11 mai et de lutter contre l’épidémie de coronavirus. Les mesures serviront à uniformiser les annonces faites ces dernières semaines par les membres du gouvernement. Petit bilan pour s’y retrouver.

  • Transports 

C’est un casse-tête que doit résoudre Élisabeth Borne : comment faire respecter la distanciation sociale dans les transports en commun ? Le déconfinement devrait passer par une augmentation du trafic, fortement réduit depuis la mise en place du confinement pour lutter contre l’épidémie de coronavirus. « On est entre 10 % et 30 % de l’offre normale de transports en Île-de-France et en région », affirme la ministre de la Transition écologique. En ajoutant « qu’il faut remonter au maximum » tout en s’assurant « qu’il n’y ait pas trop d’affluence dans les transports ». Pour essayer de résoudre ce dilemme, la ministre propose de maintenir le télétravail quand cela est possible et de privilégier le vélo. L’objectif est d’éviter la surcharge de passagers aux heures de pointe.

Élisabeth Borne est aussi revenue sur l’aide de 7 milliards d’euros accordée par l’État à Air France. « Ce n’est pas un chèque en blanc », a t-elle prévenu. La ministre souhaite que la compagnie aérienne réduise « les émissions de CO2 par passager, de 50% les émissions de CO2 sur les vols domestiques d’ici 2024, via l’utilisation de biocarburant ». Six semaines après le début du confinement, 95% du trafic de l’entreprise est à l’arrêt laissant craindre des plans de départs chez les salariés.

  • Économie

En plus d’un prêt à Air France, le gouvernement à débloqué 5 milliards d’euros pour soutenir le constructeur automobile Renault. Le prêt sera « garanti par l’État » a confirmé Bruno Le Maire. Le ministre de l’Économie a aussi déclaré que qu’une décision concernant les bars et les restaurants ne serait pas prise avant « fin mai« . L’accès au fonds de soutien mis en place par le gouvernement sera élargi aux entreprises employant jusqu’à 20 salariés et réalisant jusqu’à deux millions d’euros de chiffre d’affaires dans l’hôtellerie et la restauration, fermées en raison du Covid-19, a annoncé également Bruno Le Maire. En outre le montant de l’aide sera doublé à 10 000 euros pour « l’ensemble de ces entreprises ». Le ministre de l’Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin, a aussi annoncé la suspension des charges pour ces secteurs entre mars et juin. « C’est une annonce importante pour un secteur qui souffre«  a ajouté le ministre.

Les députés et le sénateurs ont par ailleurs adopté un nouveau plan de soutien à l’économie pour surmonter la crise. Jeudi 23 avril, le Parlement a définitivement adopté le deuxième projet de loi de finances rectificative (PLFR) présenté par l’exécutif en un mois. Le texte a plus que doublé l’enveloppe du plan de soutien à l’économie, à 110 milliards d’euros – dont plus de 40 milliards de dépenses publiques, le reste consistant en des reports de charges et garanties de prêts. Le gouvernement n’exclut pas un troisième plan en fonction de l’évolution de la crise.

  • Éducation

La réouverture des écoles le 11 mai s’accompagne d’une certaine cacophonie. Jean-Michel Blanquer avait déclaré que « tout le monde ne rentrera pas au même moment », anticipant une rentrée en décalée selon les classes. Le ministre de l’Education nationale a également indiqué que les classes devraient se faire à partir du 11 mai par petit groupe de 15 élèves au maximum. L’Élysée a précisé dans la foulée que la rentrée se ferait sur la base du volontariat, un véritable casse-tête pour les élus locaux.

Les épreuves du brevet et du baccalauréat ne pourront avoir lieu. Pour le brevet, la moyenne des notes obtenues pendant les trois trimestres sera retenue, à l’exception des notes obtenues pendant la période de confinement. Concernant le bac toutes les épreuves sont suspendues au profit du contrôle continu à l’exception des oraux de français pour les élèves de première.  Les candidats libres et les élèves du privé hors contrat, eux, pourront se présenter à la session de septembre. Il y aura un rattrapage courant juillet pour les élèves entre 8 et 10 de moyenne.

Etienne Bianchi

Des politiques discrets lors de la manifestation anti-PMA

La manifestation anti-procréation médicalement assistée de dimanche à Paris a peiné à rassembler les responsables politiques. Pourquoi la PMA a-t-elle mobilisée moins d’élus qu’en 2013, quand certains s’affichaient (fièrement) derrière des banderoles contre le mariage pour tous ?

La manifestation anti-PMA a rassemblé plus de 70.000 personnes ce dimanche 6 octobre dans les rues de Paris (AFP)

74.500 personnes étaient dans la rue ce dimanche à Paris, selon un comptage Occurence commandé par le compte d’un collectif de médias. Une mobilisation beaucoup plus faible qu’en 2013, où 300.000 personnes (selon la police) et 1.400.000 (selon les organisateurs) s’étaient mobilisées lorsqu’il s’agissait de manifester contre le mariage pour tous. Les politiques aussi étaient moins présents ce dimanche.

Selon un sondage Ifop publié mi-septembre, c’est chez les sympathisants Les Républicains que le soutien à la PMA est le plus faible, à seulement 40 %. Il est également minoritaire chez les sympathisants du Rassemblement national (47 %) alors qu’il est majoritaire chez les sympathisants des Insoumis, d’Europe Ecologie-les Verts, de La République en Marche. 

La démobilisation… un choix stratégique ?

Marine Le Pen n’est pas sortie. Seuls Nicolas Bay et Marion Maréchal Le Pen représentaient le RN dimanche après-midi. Même constat du côté des Républicains, très mobilisés en 2013 mais presque absents du cortège anti-PMA ce dimanche 6 octobre. A l’époque, on trouvait notamment en tête de cortège parmi les députés UMP, Valérie Pécresse, Jean-François Copé, Thierry Mariani, Laurent Wauquiez, Christine Boutin. Seuls François-Xavier Bellamy et Julien Aubert étaient présents dimanche dernier.

Pourquoi les élus LR ont-ils boudés la manifestation ? « Le contexte n’est pas du tout le même qu’au moment des manifestations anti mariage pour tous», affirme Bruno Cautrès, politologue au CEVIPOF. « En 2013, le fait d’avoir un président de gauche a particulièrement mobilisé la droite. La droite cherchait, après la défaite de Nicolas Sarkozy, un sujet fortement mobilisateur pour montrer que la droite sarkozyste était toujours là », poursuit-il. Pour ce politologue, le parti LR est toujours en convalescence et a du mal à se réinventer « Il y a une dimension stratégique, la droite veut davantage investir les thématiques économiques plutôt que d’enfourcher tous les combats conservateurs. »

Un cas emblématique de cette discrétion stratégique est celui de Christian Jacob, favori à la succession de la présidence du parti les Républicains. En déplacement dans l’Ain, il a fait savoir qu’il ne serait de toute façon pas allé manifester. Pour Bruno Cautrès, le député LR reste volontairement en retrait : « Il est en campagne et reste donc en retrait sur ces thématiques. Il fait passer le message de “je me tiens à l’écart de la politique politicienne mais je suis sur le terrain.” »

« Nous les attendons lors des prochains rassemblements »

Claire Avalle, responsable de la communication des Associations catholiques de France ne se dit pas déçue par la faible participation des élus « Il y a quand même eu certains maires, quelques représentants, mais ils sont là à titre personnels. Nous souhaiterions plutôt qu’ils prennent conscience des risques que comportent cette loi. Notre but n’est pas de mobiliser un maximum d’élus aux manifestations mais de les empêcher de voter la loi bioéthique. » Claire Avalle rappelle pourtant que les élus n’avaient été nombreux en 2013 que lors des deuxième et troisième mobilisations, elle conclut « ça n’était que notre premier rassemblement, nous les attendons lors des prochains »

Les associations ont annoncé dimanche soir les cinq prochaines dates des rassemblements pour contester la loi Bioéthique. Il faut donc peut-être attendre le 1er décembre avant de confirmer que les élus de droite ne s’affichent pas dans les rassemblements anti-PMA, pour des raisons personnelles ou stratégiques.

Camille Kauffmann

Attaque au couteau : Christophe Castaner fragilisé

Le ministre de l’Intérieur sera entendu jeudi, à 9h, par la commission des Lois du Sénat, une semaine après l’attaque qui a fait quatre morts à la préfecture de police de Paris.

Depuis l’attaque au couteau qui a touché jeudi la préfecture de police de Paris, Christophe Castaner est sous le feu des critiques. Il avait en effet déclaré, peu après la tuerie, que l’assaillant, Mickaël Harpon, « n’avait jamais présenté de difficultés comportementales » ni « le moindre signe d’alerte ».

Informations démenties quelques jours plus tard avec la parution d’un rapport de la direction du renseignement, qui indique que des signes de radicalisation ont été rapportés dès 2015, après l’attaque contre Charlie Hebdo.

« Je suis affirmatif dans le fait qu’aucun signe n’était apparu dans le dossier administratif de l’individu qui laisse penser qu’il puisse être radicalisé. Je vous le redis et je le dis hélas car si un signe était apparu, peut-être aurions nous pu éviter cela », s’est défendu le ministre de l’Intérieur.

Qui veut la démission de Christophe Castaner ?

Les Républicains (LR) et le Rassemblement National (RN) souhaitent l’ouverture d’une commission d’enquête à l’Assemblée nationale.

« L’affaire est très grave », souligne Christian Jacob (LR). Il faut la prendre « très au sérieux parce qu’elle engage la sécurité, l’efficacité de nos services de renseignement », a-t-il insisté.

Pour Marine Le Pen (RN), une commission d’enquête pourrait permettre « d’établir l’ensemble des responsabilités, dans ce qui apparaît déjà comme un scandale d’État, alors que des membres de la DDRP (ndlr : Direction du renseignement de la préfecture de police de Paris) évoquent des pressions pour ne pas évoquer les alertes antérieures sur la radicalisation » de l’auteur de la tuerie.

Christophe Castaner dénonce un « procès politique » à son égard. « C’est un dysfonctionnement d’Etat. Un scandale d’Etat, je ne sais pas à quoi ça correspond », a déclaré le ministre de l’Intérieur.

Dimanche sur TF1, le ministre de l’Intérieur, qui conserve le soutien du Premier ministre Edouard Philippe, a déclaré que la question de sa démission ne se posait pas.

Plusieurs auditions parlementaires

Mardi, Christophe Castaner devra s’expliquer à huis clos devant la délégation parlementaire au renseignement, selon son président Christian Cambon.

Jeudi, une commission sénatoriale, présidée par le sénateur LR Philippe Bas, se penchera sur les « conditions ayant permis le déroulement » de cette attaque, ainsi que sur les « éléments relatifs à la radicalisation de son auteur » et les « signes qui auraient pu faire apparaître cette radicalisation dans le cadre professionnel ».

Le ministre de l’Intérieur sera interrogé sur « les conséquences qui en ont été tirées » et « sur les mesures administratives prises ou envisagées à l’égard des individus qui ont contribué à cette radicalisation ».

Ces attaques fragilisent encore un peu plus Christophe Castaner. Précédemment c’est sa gestion des violences en marge des manifestations des Gilets jaunes qui avait été critiquée, ou encore sa communication sur la disparition de Steve à Nantes.

Handicap : toutes les personnes sous tutelle pourront voter aux européennes

Les personnes sous tutelle pourront désormais voter. Crédit : Rama.
Depuis mars 2019, les personnes sous tutelle peuvent désormais voter, ce qui concerne plus de 385 000 personnes. À l’occasion des élections européennes ce dimanche 26 mai, toutes les personnes porteuses de handicap mental notamment pourront donc passer par l’isoloir, une première pour certaines d’entre elles.

« Les personnes sous tutelle étaient considérées jusque là comme des sous-citoyens, il était impératif de leur reconnaître le droit de vote », explique Céline Simonin, chargée des affaires internationales à l’Unapei, l’Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales, et de leurs amis qui rassemble plus de 500 associations. Depuis 2009, les personnes majeures sous tutelle disposaient d’un droit de vote mais celui ci pouvait être retiré par un juge des tutelles. Des personnes porteuses d’handicap intellectuel sont concernées, mais aussi les personnes atteintes de troubles psychologiques et ayant des problèmes de santé mentale.

Avant la promulgation de la loi, le 25 mars 2019, ce droit de vote était régulièrement retiré par la justice, pour des motifs illégitimes selon l’Unapei. Plus de 275 000 personnes ont ainsi été radiées des listes électorales depuis 2009, et peuvent désormais retrouver automatiquement leurs droits. « Les méthodes de ces retraits étaient douteuses : dans 80% des cas d’annulation de droit, la décision n’était pas clairement appuyée par des justifications dans les rapports », indique Céline Simonin. Les juges recourraient notamment à des bilans médicaux inaptes à évaluer les capacités intellectuelles de vote des personnes handicapées selon l’organisation. Ils sollicitaient également des interrogatoires qui pouvaient mettre l’intéressé dans une situation inconfortable et stressante. « C’était aussi une mesure discriminante, insiste la membre de l’Unapei. Tous les autres citoyens ne subissent pas ce genre de contrôle, alors que plusieurs d’entre eux sont moins bien informés pour aller voter que certaines personnes handicapées. »

Dispositifs adaptés

Un ensemble de dispositifs, déjà mis en place, a été complété par de nouvelles mesures, comme la formation du personnel d’accueil dans les bureaux de vote. La rédaction de programmes politiques en version Facile à Lire et à Comprendre (FALC), un mode d’écriture à la syntaxe simple et appuyé sur des images, a également été lancé cette année, mais s’adresse plus largement aux personnes qui ont des difficultés de lecture et de compréhension. Des associations membres de l’Unapei ont réalisé des vidéos explicatives autour du droit de vote à destination du grand public et des concernés. Depuis 2014, un accompagnateur peut aider le votant si besoin, mais celui-ci ne doit pas être son tuteur professionnel. Un dispositif qui constitue un « dernier garde fou contre le risque d’influence » selon Céline Simonin (voir infographie ci-dessous).

Car certains détracteurs voient dans la mesure le risque que les personnes handicapées se laisser influencer par leur entourage dans leurs choix politiques. L’UNAPEI veut mettre fin à cette défiance. « Tout le monde est susceptible d’être influencé, commente Céline Simonin. Le même argument était utilisé par les opposants au droit de vote des femmes ! » La France n’est d’ailleurs pas la première à promulguer cette loi, pour laquelle l’organisation a milité depuis plusieurs années : la Norvège, la Suède et le Royaume-Uni notamment ont déjà adopté le texte il y a plusieurs années.

Une belle avancée malgré un court délai d’adaptation

En France, la mise en place complète de cette nouvelle mesure va prendre du temps, c’est pourquoi l’Unapei s’investit dans la sensibilisation, notamment auprès des personnels de bureaux de vote qui n’ont pas tous pris pour le moment le pli de la nouvelle législation. Du côté des votants aussi, le délai d’inscription sur les listes a été court. Les personnes concernées par cette loi ont en effet bénéficié d’un bref délai pour s’enregistrer : elles avaient jusqu’au 16 mai pour réaliser cette démarche, mais il est impossible pour le moment d’estimer le nombre d’inscrits.

Les associations accueillent donc cette avancée avec un grand optimisme, mais attendent la participation des personnes mises sous tutelle surtout à l’horizon des municipales, en 2020. D’ici là, elles seront attentives aux propositions du Parlement européen à venir en matière de handicap. « Cette loi représente un grand pas en avant pour les droits des personnes handicapées, mais la campagne européenne a été raccourcie par le grand débat national et le handicap a été peu présent dans les discussions, explique Céline Simonin. On va se rapprocher des Parlementaires européens pour les encourager à aller dans le fond des sujets. »

Maëlane Loaëc