Profession : Bookeur

Bookeur, agent ou chasseur de tête, il est l’homme de l’ombre des agences de mannequins. C’est lui qui fait le lien entre les modèles et le client. Sa Mission : découvrir de futurs mannequins. Objectif : leur décrocher des contrats et gérer leur carrière. Un bon bookeur se doit, en plus d’aimer la mode, de comprendre les tendances actuelles et déceler ce petit truc chez une personne qui fait d’elle un mannequin potentiel.

Quand ce ne sont pas les mannequins qui viennent directement vers lui, le bookeur sort trouver de nouvelles « proies ». Cette technique s’appelle le scouting. Berix Enesa, bookeur depuis six ans à l’agence Bananas Models à Paris, spécialisée chez les hommes, explique les tenants du scouting :

 

 

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Sarafina Spautz et Antoine Colombani

Profession : Mannequin

Anaëlle, mannequin depuis quatre ans, raconte ses hauts et ses bas dans le monde de la mode.

C’est par un concours de circonstance que Anaëlle est entré dans le monde du mannequinat il y a quatre ans. Elle avait 18 ans, venait tout juste d’avoir son bac et s’apprêtait à commencer des études de graphisme, lorsqu’une chasseuse de tête la contacte sur Facebook. Elle lui demande de monter sur Paris, lui crée un book et un mois plus tard, la jeune fille partait à l’étranger pendant un an. La Turquie, Singapour, le Japon, Londres… Anaëlle parcourt le monde et fait des shootings pour différentes marques. Du haut de son mètre 74, elle défile très peu car il lui manque un centimètre pour avoir la taille minimale. Un défaut qui lui convient très bien puisqu’elle n’est pas très à l’aise sur les podiums. Elle réalise l’un de ses rêves : poser pour Chanel. Mais devenir mannequin l’a également forcé à faire des sacrifices.

Aujourd’hui, elle n’envisage plus du tout le métier de graphiste. Elle sait qu’elle ne pourra pas être mannequin éternellement et prépare l’après-carrière bien que cela lui fasse peur. Elle fait des études par correspondance, a obtenu son BTS management et compte maintenant passer son Bachelor marketing. Elle n’a pas d’idée précise sur le métier qu’elle souhaiterait faire, une chose est sûre “ce sera pour travailler dans le luxe, en particulier le domaine de la mode”.

En attendant elle nous livre sa vie en tant que mannequin, l’ambiance lors des shootings et l’influence grandissante d’Instagram dans le monde de la mode qui l’inquiète.

Le marché de la réalité virtuelle : une main de fer dans un gant de velours ?

Technologie révolutionnaire par son expérience d’immersion quasi totale, la réalité virtuelle ne parvient toujours pas à s’imposer en termes de ventes. Les investissements massifs des géants du numérique dans le secteur, cependant, pourraient prochainement changer la donne.

Il suffit de s’allonger sur une plateforme, de tendre les bras, et d’enfiler le casque de réalité virtuelle pour se glisser dans la peau d’un oiseau. Battez les ailes, et vous survolerez les rues de New-York ou de Paris. Voler comme un oiseau et admirer ces mégalopoles du point de vue des volatiles, un rêve qui semblait fou il y a encore plusieurs décennies. Il est devenu une réalité il y a un an à la bibliothèque MK2 de Paris, où une première salle de réalité virtuelle a ouvert ses portes en France.

La réalité virtuelle permet à un utilisateur, souvent grâce à l’aide d’un casque spécial, de vivre physiquement dans un environnement artificiel. Dans l’industrie du jeu vidéo, des capteurs retranscrivent à l’écran les mouvements physiques du joueur pour lui permettre d’évoluer en interaction avec l’univers virtuel. En clair : la promesse d’une immersion totale avec un « ailleurs ».

Une participante visite "virtuellement" l'atelier recréé d'un artiste au musée de Montmartre. Crédits Jean-Pierre Dalbéra.
Une participante visite « virtuellement » l’atelier recréé d’un artiste au musée de Montmartre. Crédits Jean-Pierre Dalbéra.

Une véritable révolution pour le divertissement … mais pas seulement. L’archéologie, l’immobilier, le tourisme, l’éducation, le management … Autant de secteurs que vient bouleverser l’apparition de la « VR » (virtual reality, réalité virtuelle en français). Car l’univers dans lequel est plongé l’utilisateur n’est pas seulement imaginaire, il peut aussi être bien réel.

Prenez des photos dans un lieu physique, scannez-les dans un casque de VR et vous pourrez permettre à un utilisateur à l’autre bout du monde, muni d’un casque, de visualiser ce lieu en 3D ou à 360°. C’est ce que compte proposer Air BnB prochainement pour ses visites d’appartements à louer. En entreprise, la VR permet par exemple à des employés situés dans des locaux différents de travailler ensemble sur un même projet virtuel.

Un marché encore poussif

Les avantages permis par la VR ne sont donc pas que ludiques, ils offrent de nouvelles expériences pour le public comme les entreprises. Pourtant, malgré un potentiel impressionnant (le blog spécialisé Digi-Capital parle d’un marché de 30 milliards de dollars en 2020), le secteur a du mal à décoller. Et ce malgré les investissements majeurs de grosses entreprises, les GAFA (Google, Amazon, Facebook, Apple) en première ligne.

« L’économie de la réalité virtuelle et augmentée ne pèse pas lourd actuellement (14 milliards de dollars de dépenses en 2017 selon le cabinet d’études IDC, un marché de 7 milliards de dollars pour la même année selon Goldman Sachs, ndlr) », tranche Julien Bergounhoux, journaliste spécialiste de la réalité virtuelle au média techno l’Usine digitale. « C’est encore un marché très jeune : la VR est apparue dans les années 1990, mais a été délaissée rapidement faute de succès. Ce n’est que l’an dernier qu’il a repris de l’ampleur, grâce aux investissements des GAFA notamment (injection de 542 millions d’euros de Google dans la start-up de VR MagicLeap, rachat de l’entreprise Oculus par Facebook pour 2 milliards d’euros en 2014). Mais même avec ça, l’impact reste mesuré, pour l’instant. »

Le casque standard de réalité virtuelle pour ordinateur, l'Oculus Rift de Facebook. Crédits BagoGames.
Le casque standard de réalité virtuelle pour ordinateur, l’Oculus Rift de Facebook. Crédits BagoGames.

En cause : une faible adoption de la part du public. « Graphiquement, l’expérience reste perfectible, et le prix est encore trop élevé (400€ pour le casque VR standard pour jeu vidéo sur ordinateur, l’Oculus Rift de Facebook, ndlr). Seulement 1 million de casques pour PC seront vendus cette année, et 8 millions de casques pour smartphones Samsung, alors qu’ils ne coûtent que 130€ et s’utilisent partout avec le portable. »

Ces lunettes de réalité virtuelle s'utilisent avec un portable Samsung. Crédits Jean-Pierre Dalbéra.
Ces lunettes de réalité virtuelle s’utilisent avec un portable Samsung. Crédits Jean-Pierre Dalbéra.

Décollage (bientôt) imminent ?

Pourquoi donc miser autant dans une technologie loin d’être extrêmement rentable ? Pour Julien Bergounhoux, les GAFA et autres entreprises espèrent un retour sur investissement à plus long terme. « La VR, selon moi, c’est la plateforme de technologie majeure du futur. Avec les affinements techniques à venir, c’est une technologie qui va se généraliser par sa qualité. Une entreprise comme Facebook, qui a raté le train du smartphone, se doit de se positionner dessus, et c’est ce qu’elle fait en finançant prochainement des contenus VR pour 1 milliard de dollars. »

Derrière cette apparente volonté des GAFA de se positionner en leaders d’un secteur qui compte d’encombrants concurrents comme Sony, HTC et une myriade d’entreprises asiatiques, se cache une stratégie plus concrète : l’utilisation de la VR comme moyen plutôt que fin pour attirer le public. « Avec respectivement Facebook Spaces et Jump comme propres plateformes de réalité virtuelle, Facebook et Google entendent fidéliser leurs utilisateurs, pour éviter qu’ils n’aillent voir ailleurs. »

Autre raison de placer ses pions dans la VR : « l’effet wahou ». « Une chaîne comme Arte, qui a dépensé 500 millions d’euros dans le documentaire en réalité virtuelle Notes on blindness, raisonne en termes d’image. Celle qui est cataloguée comme une chaîne « ancienne » veut devenir « branchée ». Cela séduit un nouveau public plus jeune, ça attire les investisseurs et ça crée du buzz. »

Douglas De Graaf

Baptiste, 22 ans, devenu mannequin par hasard

Baptiste

PORTRAIT. Baptiste est entré dans le monde du mannequinat il y a maintenant cinq ans. En 2017, pour la première fois, être mannequin est devenu son unique activité.

Baptiste nous a donné rendez-vous dans sa chambre, au cinquième étage d’un modeste deux étoiles de la rue de Maubeuge, à deux pas de la Gare du Nord. Pas tout à fait apprêté, le jeune homme d’un mètre 89 nous accueille timidement dans une odeur de parfum frais, cabine de douche encore chaude. La pièce est mal éclairée,  juste de quoi distinguer deux grands yeux bleus et, quand il nous tend sa main, la finesse de longs doigts aux ongles soigneusement coupés. Une des ampoules au-dessus de son lit ne fonctionne plus. Baptiste passe un pull noir, enfile son trois quarts beige et nous voilà descendre les cinq étages les uns derrière les autres. Direction : le verre le plus proche.

L’apollon fait partie de ce qu’il appelle lui-même « le monde des mannequins commerciaux, moins prestigieux que le monde des ‘’model fashion’’. C’est moins bien payé mais il y a plus de travail parce qu’on dépend moins des modes et des goûts des designers. » Pour lui, pas de grande campagne d’affichage mondiale, juste une publicité à la télévision et très peu de podiums. La plupart du temps, il pose pour des catalogues, des boutiques en ligne ou dans les pages mode de magazines. Des shootings certes prestigieux mais qui ne rapportent pas un sou, « juste beaucoup de visibilité. »

Heureux hasard

Comme beaucoup, il est tombé dans le mannequinat presque par hasard. « Lors de ma première année de fac (à la catho de Lille en Biologie) ma copine m’a demandé que je l’accompagne dans une agence où elle espérait être prise comme mannequin. Comme mon père prenait beaucoup de photos, je me suis dit que tant qu’à faire, autant venir avec un book. Je n’avais jamais posé. Finalement, c’est moi qui ai été retenu… », dit-il dans un pincement de lèvres rieur. « Mon premier contrat c’était une seule petite photo dans un coin de catalogue, pour Castorama. J’avais gagné 150 euros. »

A l’époque, Baptiste décroche peu de contrats. « Ce genre de jobs à Lille est plutôt destiné à des hommes mûrs. J’avais tout juste 20 ans, et je faisais bien mon âge, » raconte-t-il. Pour gagner de l’argent, Baptiste fait comme beaucoup d’étudiants : des petits boulots. L’été, il est animateur dans des centres ou en colonies de vacances, ça lui rapporte alors « au moins autant que le mannequinat. » Autant dire pas grand-chose. Sa licence terminée, il commence un Master en Management et développement durable et descend à Paris pour collaborer avec de nouvelles agences. Les shootings se font moins rares, les aller-retour nombreux, mais il continue les cours, jusqu’à ces derniers partiels, l’an dernier.

New-York-Miami-Florence

« Je venais de décrocher un gros contrat à Londres, c’était une super opportunité, mais j’avais un examen le même jour. C’était l’un ou l’autre. J’ai choisi Londres. » Voilà donc bientôt deux ans que Baptiste s’écume sous les flashs des photographes, entre la Grèce, New-York, Miami, Florence, Lille et Paris. Pour cette première année pleine, il dit avoir gagné aux alentours de 40 000 euros.

Comment ? Comme après ces trois derniers jours, dans les studios du site vente-privee.com. Afin de garnir les rayons numériques de trois photographies par article, Baptiste a dû jongler avec 70 à 90 tenues chaque jour. « Pour les sites des Galeries Lafayette c’est la même chose, sauf que ce n’est pas trois mais cinq photos qu’ils veulent pour le site. Entre celles qui sont ratées et tout le reste, on arrive à près de 1 000 photos par jour. » Pour ses services, les deux sites internet paient le même tarif : « 1 300 euros par jour, c’est le ‘’minimum conventionnel’’ comme on dit. Sur le total, il faut retirer 33 % pour l’agence qui me mandate et 31 % de charges et de cotisations sociales. Il me reste environ 400 euros, en général je m’en tire plutôt pour 500. » Non, Baptiste ne se plaint pas.

Vieillir

En février dernier, il décide de quitter la maison familiale, à Bailleul, et choisit de louer un appartement à Lille, « pour économiser le temps de trajet jusqu’à la gare. » Une expérience qui fut de courte durée. « Je ne l’ai gardé que trois mois, je n’ai même pas eu le temps de le décorer. Quand je rentre dans le Nord, je préfère encore retourner chez mes parents. »

Sa mère le suit partout sur les réseaux sociaux, même si « ça me soule de raconter ma vie sur internet, on est un peu obligés, » explique-t-il. Elle aime tout, commente tout, partage tout. « Mon père est plus pragmatique, il est content bien-sûr mais ce qu’il veut par-dessus tout c’est que je ne me retrouve pas sans rien demain. » Car Baptiste en a conscience, « c’est très dur d’en faire son métier toute sa vie. On ne choisit pas comment vieillir. »

Sarafina Spautz et Antoine Colombani