Derrière la crise du lait, une économie trouble

Depuis près de dix jours, les producteurs laitiers français protestent contre les prix appliqués par la grande distribution. Ils réclament une plus grande transparence dans les tarifs, mais surtout, une revalorisation de leur travail. Car s’ils sont les premiers maillon de la chaîne, ils ne sont pas ceux qui en profitent le plus, au contraire. Les éleveurs bovins vendent à perte, tandis que la grande distribution, elle, augmente ses marges.

 

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Pour résoudre la crise, le Premier ministre a réuni, ce lundi, des dirigeants de Carrefour , Casino, Auchan, Cora, Intermarché, Lidl et Système U, au moment où de nouveaux barrages étaient érigés par les éleveurs. Conscient des généreuses marges que s’octroient les acteurs de la grande distribution, Manuel Valls leur a demandé de ne pas anticiper une baisse des prix des produits agricoles dans les négociations commerciales qui s’achèveront le 1er mars, de poursuivre les actions de valorisation des produits locaux, d’entrer dans des partenariats avec leurs fournisseurs et d’accentuer la contractualisation. Des propositions qui pourront peut-être résoudre une crise qui dure maintenant depuis deux ans.

Nivin POTROS.

Pourquoi les producteurs de lait sont à bout de souffle ?

Les dirigeants de la grande distribution avaient rendez-vous ce lundi matin à Matignon avec Manuel Valls, Emmanuel Macron et Stéphane Le Foll pour parler de la crise agricole. Une réunion qui intervient après plusieurs jours de mobilisation.

Entre 150 et 200 producteurs laitiers de Loire-Atlantique déversent des centaines de litres de lait, le 01 avril 2010, sur une place du centre de Nantes, pour manifester contre le prix du lait. "Un avertissement" car "on ne passera pas l'année 2010 comme on a vécu l'année 2009", a assuré un responsable de l'Association des producteurs de lait indépendants (APLI) de Loire-Atlantique, qui appelait à la manifestation. AFP PHOTO FRANK PERRY / AFP / FRANK PERRY
Entre 150 et 200 producteurs laitiers de Loire-Atlantique avaient déversé des centaines de litres de lait, le 1er avril 2010, à Nantes. (Photo AFP / FRANK PERRY)

Opérations escargot, barrages, routes bloquées, transport en commun perturbés… Depuis près de 10 jours, une partie de la France est paralysée par des manifestations agricoles. Les producteurs laitiers, porcins, bovins ou de canards protestent contre la chute des prix d’achat. Tous réclament l’instauration d’un tarif minimum et une transparence sur la détermination des prix. Ils en appellent au gouvernement.

Parmi les manifestants, les producteurs laitiers sont de ceux qui donnent le plus de la voix. Et pour cause : depuis avril 2015, les 70 568 exploitations laitières en France tournent au ralenti, les producteurs ne rentrent plus dans leurs frais, les prix du lait dégringolent. Les producteurs laitiers souffrent d’une crise que rien ne semble pouvoir freiner. Les raisons de la crise sont multiples mais cinq d’entre elles semblent néanmoins plus importantes que les autres.


1. La fin des quotas laitiers européens

Pendant trente et un an, les producteurs laitiers des 28 états membres de l’Union européenne (UE) ont été soumis à un système de régulation très stricte. Les producteurs ne pouvaient pas vendre autant de lait qu’ils le souhaitaient. Le but était de contenir un souci de surproduction. Mais le 1er avril 2015, le robinet de lait européen s’est rouvert. Les quotas ont été supprimés,  la concurrence entre États membres a repris. Autorisés à produire plus, les acteurs de la filière laitière inondent le marché de lait. Mais l’offre ne suit pas la demande : les producteurs sont obligés de vendre moins cher, voire à perte, pour ne pas jeter leur stock.

2. Des subventions mal distribuées

A cela s’ajoute la question des subventions européennes. L’Europe a longtemps distribué des aides, sans forcément tenir compte des niveaux de productions. Les années de vache maigre comme celles d’opulence, les agriculteurs ont obtenu les mêmes aides financières. Mais à l’heure des premières restrictions budgétaires, et face aux divergences de vues des différents États membres, l’Europe revoit ses subventions à la baisse. Une baisse à l’impact significatif quand on sait que les subventions européennes représentent jusqu’à 20% du chiffre d’affaires des agricultures en 2012. Les États ont donc dû compenser en ajoutant de l’argent sur la table. Un plan d’aide accordé initialement aux éleveurs a été mis en place par Stéphane Le Foll, le ministre de l’Agriculture. Au total, plus de 825 millions d’euros sont distribués aux agriculteurs. Une somme qui ne résoudra pourtant pas la crise.

3. Le scandale chinois

La Chine, grande consommatrice de lait, souffre depuis plus de sept ans d’une crise de confiance. En 2008, un scandale du lait de vache frelaté éclate. Certains lots de lait produits en Chine (notamment le lait infantile) auraient contenu pendant 10 mois de la mélamine toxique afin de les faire apparaître plus riches en protéines. Depuis, les Chinois ont considérablement diminué leur consommation de lait, même européen. Les importations peinent à augmenter. Plus de 94 000 Chinois souffriraient aujourd’hui d’une maladie liée à la contamination du lait.

4. L’embargo russe

En août 2014, Vladimir Poutine décrète un embargo sur les produits agro-alimentaires en réponse aux sanctions européennes contre des secteurs de l’industrie russe dans le cadre du dossier ukrainien. Un an et demi plus tard, la filière laitière européenne en souffre toujours. En 2015, les ventes de produits transformés à base de lait ont reculé de 78 %, soit une perte de 29 millions d’euros pour la filière laitière. Les cours du beurre et du lait en poudre ont également chuté de 30 %.

5. L’illusion 2014

L’année 2014 est synonyme de dérèglement climatique en Nouvelle-Zélande. Le premier producteur laitier mondial subit les foudres du climat. Le réchauffement inhabituel des eaux du Pacifique-Est (+ 4 à 6°C), nommé El Niño, a provoqué une baisse de la production laitière néo-zélandaise. La Chine, l’un des plus grands importateurs de lait, se tourne alors vers l’Europe. Les exportations montent en flèche. Les cours du lait augmentent : les 1000 litres de lait sont vendus 400 euros, contre 300 euros actuellement. Les producteurs européens investissent à tour de bras dans de nouveaux équipements, persuadés de voir leur carnet de commandes exploser. Mais l’utopie ne dure qu’un temps. La Chine, qui a beaucoup stocké, ne commande plus et la Nouvelle-Zélande se remet de sa crise climatique.

Une crise conjoncturelle et structurelle qui pourrait bien perdurer. En plus des conditions de travail qui se dégradent, les agriculteurs doivent faire face à une crise des vocations. Le métier d’éleveur, perçu comme ingrat et mal payé, n’attire plus. Depuis 2000, le nombre d’exploitations laitières a diminué de 34% par rapport à 2000. Un chiffre qui devrait augmenter si aucune solution n’est trouvée à la crise actuelle. Mais derrière la crise laitière, se joue une autre bataille. Celle des marges imposées par la grande distribution.

Nivin Potros

Rassemblement des « faucheurs de chaises » autour du procès Cahuzac

Une action a été menée par les faucheurs de chaises ce matin à Paris en marge de l’ouverture du procès Cahuzac. L’occasion pour ces militants altermondialistes de pointer la responsabilité des banques dans la fraude fiscale.

Crédit MIGUEL MEDINA / AFP
  Procès Cahuzac: les faucheurs de chaises dans la rue  Crédit MIGUEL MEDINA / AFP

Leurs méthodes sont atypiques. Les « faucheurs de chaises », qui, comme leur nom l’indique, dérobent des chaises dans les banques pour dénoncer l’évasion fiscale, se sont réunis ce lundi matin à proximité du Palais de justice en marge du procès Cahuzac, qui s’ouvrait aujourd’hui. Ils ont emmené avec eux 196 chaises, symbolisant chacune des 196 parties présentes à la COP21. Leur but : dénoncer l’immobilisme économique face aux enjeux climatiques. Elles avaient toutes été volées ces derniers mois lors de « réquisitions » au sein de succursales d’agence de banques accusés de favoriser la fraude fiscale. Durant ces précédentes actions, plusieurs membres ont été interpellés puis placés en garde à vue.

Parmi les 150 militants altermondialistes sur place, plusieurs associations étaient représentées avec des membres de l’Attac, Les Amis de la Terre, Action non violente (ANV)-COP21 et Bizi. Ils entendaient profiter du prétexte de l’actualité pour relancer le débat sur la responsabilité des banques. « Les banques françaises sont massivement impliquées dans les paradis fiscaux et personne ne leur demande des comptes. Le gouvernement nous brandit le chiffre de 2,5 milliards d’euros récupérés provenant de fraudes, mais on sait que l’évasion fiscale représente entre 60 et 80 milliards d’euros. » a ainsi dénoncé l’économiste et porte-parole d’Attac Thomas Coutrot, des propos rapportés par Le Monde. Bloqués par les CRS, ils sont finalement repartis aux alentours de 11h, laissant leurs 196 chaises derrière eux.


LD

Combien coûterait un Brexit ?

David Cameron marche sur la corde raide. Mercredi 3 février, devant le parlement britannique il s’est efforcé de convaincre les députés qu’un accord avec l’UE était indispensable. La sortie de l’Union divise profondément l’opinion et même le propre parti du premier ministre. Entre les eurosceptiques de l’Ukip et les pro-Europe, chacun y va de sa propre prédiction quant aux conséquences d’une telle rupture. Entre apocalypse économique annoncée et promesse d’un renouveau britannique, difficile d’y voire clair.

Si le Royaume-Uni sort de l’Union européenne à l’horizon 2018, quel horizon peut-on entrevoir pour les années à venir ?

Trois scénarios sont possibles.

  • Selon le Bertelsmann stiftung, un think tank allemand (pro Europe), en sortant de l’Union européenne, le Royaume-Uni pourrait perdre jusqu’à 14% de son PIB arrivé en 2030. C’est l’équivalent de 313 milliards d’euros. Selon Open Europe (libéral), la perte du PIB atteindrait seulement – 2,2%.
  • Deuxième scénario : si le Royaume-Uni signe des accords de libre-échange avec l’UE, lui permettant de maintenir le marché unique établi jusqu’ici, son PIB pourrait varier de +0,8 à -0,6% de son PIB, toujours selon Open Europe.
  • Troisième cas de figure, le plus optimiste : le Royaume-Uni pourrait gagner 1,55% de son PIB à condition d’établir, une fois la sortie de l’UE négociée, des accords commerciaux avec le reste du monde, principalement l’Asie.

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