Décryptage : la mode des web radios Hip-Hop

OKLM Radio est la plus connue mais pas la première des web radios. Elles pullulent sur internet, se déclinent sous plusieurs formes, se multiplient comme des cailloux dans la chaussure de Skyrock, Générations, ou du Mouv’, les radios FM qui ont le monopole du Hip-Hop en France. No Fun, Zone 26, Radio RapTz ou Piiaf, les web radio Hip-Hop, séduisent et rassemblent de plus en plus d’audience. Comment expliquer ce phénomène ? D’abord, un point commun est essentiel pour toutes ces radios : la liberté de ton. On ne s’interdit rien. La seule règle est la pertinence et la qualité du son diffusé. Mehdi Maizi, animateur de l’émission « La Sauce » sur OKLM Radio et du podcast No fun résume : « On veut donner la parole à tous ceux que l’on trouve bons, qu’ils soient en train d’éclore ou non. »

Ces nouvelles radios profitent également du peu de contraintes dont elles sont sujettes. « On est obligé de diffuser 40% de morceaux en français, de respecter un cahier des charges et de rendre des comptes au CSA » précise Fred Musa, tête d’affiche de Skyrock. Elle peut aussi se targuer d’être écoutée par 4 millions d’auditeurs par jour, pendant qu’OKLM, la plus connue des WebRadios a été téléchargée environ 1 million de fois. Dj Diemone, membre du collectif Scred Connexion explique cela par « un vide médiatique». « Générations ou Skyrock ne passent que du rap commercial et ne font plus découvrir d’artistes. Aux Etats-Unis, il y a des radios qui passent du rap en continue et pas forcément connu. ». Désormais, en France, les web radios font la même chose.

 

Clément Dubrul et Ryad Maouche

Booba, le patron du « game »

Lorsque l’on s’intéresse à cette question des rappeurs-entrepreneurs, il est difficile de passer à côté d’Elie Yaffa alias Booba. Elu « Businessman de l’année » par le magazine GQ en 2016, le natif de Boulogne-Billancourt s’est imposé comme l’exemple à suivre.

 

Booba Unkut
Booba se fait égérie de sa propre marque Ünkut

 

Plus d’un million d’albums vendus en vingt ans de carrière, « le Duc de Boulogne » est clairement devenu l’un des poids lourd du rap français ces dernières années. Pour obtenir et conforter ce statut, le rappeur de 40 ans a très vite décidé d’investir dans d’autres secteurs que la musique. Dès 2004, il annonce la création de sa marque de vêtements streetwear : Ünkut. Une initiative qui va révéler au grand jour le côté businessman du rappeur qui s’est beaucoup inspiré de ses homologues américains Jay-Z ou Puff Diddy.

En bon chef d’entreprise, il comprend très vite les règles de ce nouvel environnement. Tout d’abord, il a fait en sorte de créer une marque qui n’est pas adressée uniquement à ses fans mais à un public beaucoup plus large. Le nom Ünkut (qui signifie littéralement « non-coupé », « non-censuré ») ne fait aucune référence au rappeur lui-même. Ensuite, tout se joue dans la communication. Booba insère de nombreuses références au sein même de ses chansons : « Si ton polo c’est pas du Ünkut, négro, ne le mets pas » affirme-t-il dans sa chanson B2OBA sortie en 2009. De plus, au sein de ses clips ou sur les réseaux sociaux, le rappeur ne porte que des vêtements Ünkut. L’image du rappeur est donc éternellement associée à cette marque dont il fait exclusivement la promotion. Enfin, il obtient une énorme visibilité lorsque certaines stars du football comme Karim Benzema ou Cristiano Ronaldo s’affichent en portant des vêtements Ünkut.

 

Une stratégie parfaitement bien huilée qui a permis à la marque de devenir une référence incontournable de la mode streetwear dès les années 2010. Avec 450 points de vente, cinq boutiques officielles et une clientèle très variée, qui ne se limite pas aux jeunes de banlieue, le pari est plus que réussi pour Booba. De quoi lui faire pousser des ailes et le conduire à élargir son champ d’activité en dehors de la musique. Un parfum en 2014, sa radio et sa chaîne de télé « OKLM » en 2015, et même son propre whisky en 2017, le « boss » veut étendre son empire. Celui qui a annoncé qu’il arrêterait la musique aux alentours de 45 ans, peut déjà envisager l’avenir sereinement.

 

Clément Dubrul et Ryad Maouche

Le Ramadan a les yeux plus gros que le portefeuille

C’est à partir du 26 mai que commence la période de jeûne en France.

Pour Saïda Djemel, aide-soignante franco-algérienne de 51 ans qui vit à Poitiers (Nouvelle Aquitaine), le Ramadan  est une période de dépenses : « Pendant le Ramadan, nous achetons 70 euros de viande par semaine. Quand on ajoute les boissons, friandises, Assortiment_de_gâteaux_de_fantaisie_de_Constantinelégumes… tout cela coûte cher ». Mais pas question cependant pour Saïda d’établir un budget pour économiser : « Après avoir jeûné toute la journée, cela fait du bien de prendre un bon repas en famille. C’est aussi une période de fête dont on aime profiter ! »

Par ailleurs, le mois de Ramadan est un moment où il faut se montrer généreux : le croyant doit faire l’aumône (Zakat en arabe), qui fait également partie des Cinq pilliers de l’islam.

Cet acte de générosité peut pendre différentes formes, comme l’explique Saïda : « On peut donner de l’argent à une association, ou encore porter des repas à la mosquée qui les distribue aux pauvres ». Les personnes qui ne peuvent faire le Ramadan (femmes enceintes, raisons de santé…) doivent donner l’équivalent du prix d’un repas par jour selon leur habitudes de consommation.

La fin du Ramadan est célébrée par l’Aïd el Fitr qui aura lieu le 6 juillet cette année.

Asmaa Boussaha et Alice Pattyn

Le pèlerinage à La Mecque : un tourisme religieux en vogue

Cette année à la Mecque, entre 2 et 3 millions de musulmans du monde entier sont attendus dès le 2 juin pour le grand pèlerinage. On estime que 20 000 à 30 000 musulmans français s’y rendent chaque année. Depuis quelques décennies, ce voyage est devenu un business.

Il existe en réalité deux pèlerinages : le petit pèlerinage, « Umra », peut s’effectuer tout l’année et le grand pèlerinage, « Hajj », qui doit s’effectuer sur une période bien précise.

Kaaba_2Un voyage qui n’est plus signe de « fin de vie »

Omar Saghi, enseignant à SciencesPo Paris et auteur d’un livre sur le pèlerinage* expliquait en 2012 que ce voyage sacré a adopté les codes du tourisme : « Les agences doivent fidéliser les pèlerins car ils comparent désormais les offres […] Elles gèrent les groupes de pèlerins comme des groupes de touristes ». Un tel changement de pratiques est dû, selon lui, à l’évolution des pèlerins. Autrefois réservé aux personnes âgées ayant économisé pour accomplir le voyage en terre sainte, le pèlerinage à la Mecque a perdu son caractère unique et sa connotation de « fin de vie ». Désormais, parmi les pèlerins, il y a des jeunes couples qui n’hésitent pas à faire le voyage plusieurs fois.

Organisation millimétrée… et lucrative

Le grand nombre de fidèles attendus obligent l’Arabie Saoudite à prendre des mesures de sécurité importantes. Le royaume met en place des quotas par pays pour la distribution des visas. De plus, il est impossible d’organiser seul son séjour, celui-ci étant extrêmement codifié et ritualisé. Il faut passer par une agence de voyage, spécialisée ou non. Les mosquées françaises mettent également en place une aide logistique.

Ce « tourisme religieux » s’avère très lucratif. « Selon les formules et les hôtels, nous proposons des voyages entre 4500€ et 11000€. Cela prend en compte le billet d’avion et la vie sur place », explique Amina Harar, conseillère voyage dans une agence spécialisée dans l’organisation des pèlerinages à Paris. «Nous proposons aussi une assistance médicale».

Le pèlerinage est depuis plusieurs années un enjeu de taille pour l’Arabie Saoudite, qui cherche à diversifier son économie essentiellement basée sur les hydrocarbures. Celui-ci aurait rapporté 40 milliards d’euros en 2015, d’après une étude effectuée par la Chambre de commerce de La Mecque. Le pays a également lancé en 2013 des travaux d’agrandissement du lieu saint et espère accueillir 20 millions de visiteurs annuels d’ici à 2020, ce qui représenterait un bénéfice de 80 milliards d’euros.

* Paris-La Mecque. Sociologie du Pèlerinage (Editions PUF, 2010)

Asmaa Boussaha et Alice Pattyn