Assises : « Babu avait un cœur d’or »


En ce deuxième jour d’audience, Mohamed Fayed s’est exprimé et les différents experts qui ont travaillé sur l’enquête ont témoigné. Un point sur le procès « Babu », jeune homme qui avait été électrocuté dans le métro.

Six témoins absents. La seconde journée du procès « Babu » a encore eu du mal à démarrer. Le Président de la Cour a lu les dépositions des amis de Rajinder Singh, témoins directs de la scène. Tous concordent: Babu aurait bu deux bière à la débauche avant de prendre le métro avec ses amis. Il aurait repris Mohamed Fayed, qui importunait des jeunes femmes:  » Il parlait mal à une fille, je ne comprends pas le français mais on voyait sur sa bouche qu’il lui parlait mal et qu’elle n’aimait pas ça. »  La dispute aurait éclaté, l’accusé aurait invectivé Babu à descendre: « On voyait que l’arabe voulait en découdre » affirme le premier témoin en parlant de Mohamed Fayed. il se seraient poussés mutuellement avant que Babu ne tombe sur la voie. Ils se serait ensuite précipité pour le sortir de là alors que deux d’entre eux poursuivaient Mohamed Fayed qui avait pris la fuite:  » je savais que c’était dangereux mais il fallait que j’aide mon ami » a déclaré l’un d’entre eux. Tous sont d’accord: « C’était quelqu’un de sympa, ce n’était pas quelqu’un de violent« . Pourtant, aucun ne prétend avec certitude que Mohamed Fayed ait eu l’intention de tuer Babu.

« Je ne sais pas si c’était volontaire, j’ai juste vu que la dernière poussée était très violente »

Sur les jeunes femmes que Mohamed Fayed aurait ennuyé, aucune n’était présente mais le Président a également lu la déposition de l’une d’entre elle, avec qui l’accusé prétendais avoir eu des relations sexuelles:  » il a voulu m’enlacer et m’embrasser, je l’ai repoussé, nous les asiatiques n’aiment pas ce genre de gestes, il avait un comportement bizarre, il m’a offert des bonbons. Il dit n’importe quoi nous n’avons jamais eu de rapports sexuels » soutient-elle.

Enfin un témoin présent

Un vieil homme de 70 ans s’avance vers la barre. C’est le seul témoin direct de la scène présent au procès. Le 30 septembre 2011, il voit les médias prendre l’affaire Babu en main. « la version dite à la télévision n’était pas la vraie version, j’ai voulu dire la vérité« . Et le voilà devant nous, « je me rappelle très bien de la scène, dit-il,  c’était un groupe de quatre personnes, je ne comprenais pas ce qu’ils disait mais j’ai très vite compris que c’était une bagarre, les indiens étaient saouls, un faisait face à l’accusé, les autres étaient à l’écart« .

A la chute de Babu, le vieil homme se serait précipité vers l’alarme pour couper le courant. S’il ne peut pas être sûr des intention de Mohamed Fayed, il est persuadé d’une chose : «  Il a bien vu la chute, il a pris son sachet et il est parti en courant. Sur le visage de Fayed on ne voyait pas qu’il avait peur et puis quand on a peur on s’en va. Il a eu l’occasion de partir, je ne sais pas pourquoi il est resté« . Quand les avocats lui demanderons pourquoi Babu est tombé, il n’en démordra pas:

« C’est à cause de l’alcool« 

La parole aux experts

Le médecin légiste est d’abord intervenu pour faire son rapport : «  l’examen a permis de révéler que la victime était morte par électrocution. On a également constaté un fort taux d’alcool dans son sang. Il est évident que certaines capacités comme tenir debout peuvent être altérées » a-t-il précisé. Puis c’est au tour du psychiatre qui avait suivi Mohamed Fayed après son interpellation par la police. Selon lui, « M. Fayed ne présente aucun anomalie mentale ou psychique, il ne représente aucun danger pour la société s’il est relâché. Nous n’avons pas remarqué de comportement défiant ou agressif. Est-ce que sa version est vraie ou pas ? Nous n’avons pas le pouvoir du répondre. » L’examen scène par scène de la vidéo par l’expert audiovisuel conclu quant à lui:  « Babu pousse une dizaine de fois l’accusé à quelques secondes d’intervalles, par contre une seule poussée à suffit à Mohamed Fayed pour faire chuter Babu sur la voie. Il l’a poussé énergiquement, la victime a été déséquilibrée ». Il faut tout de même préciser que l’expertise de la vidéo est difficile car la scène se déroule en arrière-plan.

« Je voulais parler de sa mémoire »

Le témoignage le plus bouleversant de ce second jour de procès est sans doute celui de Jean-Louis Necemte, première partie civile. Lorsqu’on lui demande pourquoi il est venu il répond, un sanglot dans la voix, au bord des larmes: « je voulais parler de Babu car c’était mon ami, sa disparition me touche encore beaucoup. Je voulais parler de sa mémoire. C’était quelqu’un de très gentil, de très calme, jamais je ne l’ai vu hausser le ton, il aimait rendre service. » Babu connaissait Jean-Louis depuis 5 ans, il passait parfois les vacances chez lui avec sa compagne. Les larmes finissent par couler lorsqu’il raconte:  » la première fois qu’il est venu, quand on l’a raccompagné à la gare, il m’a embrassé et il m’a dit j’ai été reçu comme un frère. Ça m’a touché parce qu’on avait rien fait d’exceptionnel, il avait du cœur, je pense que si il s’est passé quelque chose c’est qu’il a été agressé verbalement. Je perds quelqu’un de très important et j’ai encore du mal à penser qu’il n’est plus là. »

« Je leur ai dit que je ne cherchais pas les problèmes »

Mohamed Fayed a enfin pu s’exprimer et décrire les faits selon sa propre version. Les choses étaient compliquées par sa mauvaise pratique du français, même son interprète avait du mal à comprendre: « c’est parce que je suis stressé que je n’arrive pas à bien m’exprimer. » Il en est ressorti que Babu l’aurait agressé, et qu’il n’aurait fait que se défendre. « C’est lui qui m’a abordé en me demandant pourquoi je jouais avec mes clé. Il m’a insulté, je n’ai pas répondu à ses insultes, j’ai continué mon chemin.  Finalement j’ai remarqué qu’ils étaient accompagnées d’autres personnes, le métro était bondé, beaucoup de monde voulait descendre en même temps, on était bousculés, je me suis retrouvé sur le quai. Ils étaient plusieurs à m’entourer, au début je leur ai parlé de façon très correcte. »

« Ils sentaient tous l’alcool, j’avais peur mais je ne voulais par leur montrer« 

Au moment où les choses dégénèrent, l’accusé dit n’avoir pas répondu aux coups de Babu, être tombé puis l’avoir poussé en se redressant pour se protéger. « Je leur ai dit que j’étais égyptien que je ne cherchais pas les problèmes. » Quant à son comportement avec les femmes, il se défend : « J’ai l’habitude de parler beaucoup avec des femmes, je leur ai proposé des bonbons, je ne les ai pas embêtées. Je n’ai pas importuné de femmes à l’intérieur de la rame, j’étais au téléphone » et de conclure: « Je ne voulais pas le tuer, je suis désolé ».

Ce sera aux jurés de décider quelle version est la vraie. Mohamed Fayed risque jusqu’à 15 ans de prison. Le verdict sera rendu demain.

Alexis Perché

Roland-Garros J3 : ce qu’il faut retenir à 17h

À 17h, 11 des 18 Français en lice lors de la 3e journée du tournoi de Roland-Garros avaient joué leur match. Entre le défilé des tenues zébrées et les coups de génie de Rafael Nadal, les spectateurs ont assisté à une journée haute en couleur.

Les Français du jour

6 victoires, 5 défaites pour les 10 Français engagés jusqu’à 17h. On a presque envie de faire les difficiles en comparant ce bilan du jour au sans-faute réalisé la veille par les Tricolores.

A l’inverse, les têtes d’affiches féminines Alizé Cornet (6/1, 6/0 contre Flipkens) et Kristina Mladenovic (6/2, 6/4 contre Schiavone) ont séduit par la qualité de leur jeu, ce qui laisse espérer de belles choses pour la suite de la compétition. Virginie Razzano y est elle aussi allée de sa victoire (4/6, 6/1, 6/0 contre Soylu). Quant à la toute jeune bombardière Océane Dodin, elle a réussi à prendre un set à l’ancienne vainqueur du tournoi Ana Ivanovic (6/0, 5/7, 6/2). De belles promesses pour l’avenir. Cornet, Mladenovic et Razzano rejoignent Caroline Garcia et Myrtille Georges au deuxième tour. Et si c’était l’année des Françaises ?

Chez les messieurs, Lucas Pouille a fini par prendre la mesure de Julien Benneteau (6/3, 4/6, 6/4, 7/6), après l’interruption de leur match la veille. Le jeune Nordiste a véritablement explosé cette année et capitalise sur son excellent parcours au Masters 1000 de Rome (demi-finaliste). On continue à penser que la surprise française cette année à Roland Garros, ce sera lui. Autre espoir, autre victoire. Quentin Halys, 19 ans (encore plus jeune que Pouille), a écrasé Hyeon Chung (6/1, 6/4, 6/4) et tentera de poursuivre son bonhomme de chemin au deuxième tour. A noter enfin la victoire de Nicolas Mahut, facile contre Berankis (7/6, 6/2, 6/1).

Les favoris du jour

Les favoris du jour, eh bien ils n’ont pas traîné. 3 jeux à Groth, 5 à Lu. C’est ce qu’ont respectivement laissé Rafael Nadal (6/1, 6/1, 6/1) et Novak Djokovic (6/4, 6/1, 6/0) à leur adversaire. Et en plus, Nadal nous a gratifié de quelques coups spectaculaires, comme ce magnifique tweener!

Difficile d’évaluer leur état de forme contre ces joueurs de seconde zone, mais, une chose est sûre, le « Taureau de Majorque » et le « Djoker » sont prêts. Pas Andy Murray. Le Britannique, qui arrivait pourtant en pleine confiance après son titre à Rome contre Novak Djokovic, est passé à deux doigts de l’élimination. Le n°3 mondial a connu un sérieux retard à l’allumage face à l’imprévisible Radek Stepanek, avant de finalement s’imposer (3/6, 3/6, 6/0, 6/3, 7/5). Pour juger de sa capacité à remporter le tournoi, on attend de voir sa réaction lors des prochains tours.

La tendance du jour

Ou plutôt de cette édition 2016, est sponsorisée par l’équipementier Adidas. La marque aux trois bandes a revêtu ses athlètes d’une tenue zébrée intégrale (de la casquette aux chaussures en passant par la robe ou le polo). Une touche stylée qui électrise!

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La Serbe Ana Ivanovic, tombeuse d’Océane Dodin, parée de la tenue zébrée de son sponsor Adidas

Le chiffre du jour

0. Comme le nombre de jeux inscrites par l’adolescente française Tessah Andrianjafitramo, contre la Chinoise Zhuang. A 17 ans, la jeune espoir repart de Roland en vélo (un 6/0, 6/0 s’intitule « double roue de bicyclette » dans le jargon), pour sa première apparition dans le tableau principal. Cruel. On espère que vous serez là l’année prochaine pour l’applaudir quand elle inscrira son premier jeu à Paris.

La surprise du jour (qui n’en est peut-être pas une)

La tête de série n°3 à la trappe ! Angélique Kerber, vainqueur de l’US Open et au jeu parfaitement adapté à la terre battue, disparaît dès le premier tour à Paris. L’Allemande était blessée à l’épaule. Son bourreau ? La Néerlandaise Kiki Bertens, classée au-delà de la 50ème place mondiale, mais en pleine bourre actuellement. On se rappelle notamment les parpaings qu’elle enfilait à la pelle au service lors de la demi-finale de Fed Cup contre la France. Demandez donc à Caroline Garcia et Kristina Mladenovic.

 

Douglas de Graaf et Winny Claret

Visite surprise du fisc français chez Google, à Paris : pourquoi ?

« Doublette irlandaise » et « sandwich hollandais ». Ce ne sont pas des spécialités culinaires, mais le nom des différents systèmes d’optimisation fiscale pour lesquels, sans doute, le fisc français a fait une descente aujourd’hui dans les locaux parisiens de Google.

Selon les informations du Parisien, une perquisition serait en cours au siège de Google à Paris, dans le cadre d’une enquête pour fraude fiscale. Une centaine de fonctionnaires du fisc et de la brigade nationale de répression de la délinquance fiscale (BNRDF) ont pénétré dans les locaux, avec le renfort de cinq magistrats du parquet national financier.

Pour tout comprendre au système d’optimisation fiscale de Google (et de nombreuses autres grandes compagnies), laissez-vous guider par cette cartographie interactive en cliquant sur la première flèche à droite.

Pierre Laurent

Brésil : Michel Temer, président depuis une semaine et déjà impopulaire


La grogne monte contre Michel Temer, nouveau président par intérim du Brésil, qui en une semaine a réussi à se mettre à dos une partie de la population Brésilienne. En cause : les conditions obscures de son arrivée au pouvoir ainsi que le plan d’austérité qu’il compte mettre en place.


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Le 12 mai dernier, Dilma Rousseff, présidente du Brésil était destituée provisoirement par un vote de la chambre des députés. Accusée d’avoir maquillé les comptes publics pour dissimuler le déficit du pays, la dirigeante du PT, le parti des travailleurs créé par l’ancien président Luis Inàcio « Lula » Da Silva, est remplacée le temps de l’enquête par son ancien vice-président Michel Temer. Depuis sa prise de pouvoir considérée par certains comme un « coup d’état », l’homme politique centriste a opéré un virage conservateur par rapport à la gouvernance de Dilma Rousseff.

Le plan d’austérité de Michel Temer révolte les étudiants et les artistes

Deux jours après son arrivée à la présidence, Michel Temer décide de supprimer le ministère de la culture. « Toute la classe artistique était révoltée » déclare João Pedro, étudiant en master de cinéma à Sao-Paulo. « C’est ce qui a lancé les manifestations. Tous les grands lieux culturels de la ville étaient occupés par la population ». Sous la pression de la rue, Michel Temer est revenu sur sa décision il y a deux jours. Le ministère de la Culture sera donc maintenu.

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Manifestation contre Michel Temer à Sao Paulo @AliceYanni
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Les femmes contre le coup d’état – Sao Paulo @AliceYanni

Mais la mobilisation ne cesse pas pour autant. En effet, d’autres réformes d’austérité sont toujours envisagées, à contrepied de la politique sociale de Dilma Rousseff. Le but : économiser 64.9 milliards de réais (17.03 milliards de dollars) selon le ministre de la planification Nelson Barbosa. «Le budget de l’éducation va diminuer drastiquement, ainsi que celui de la santé » explique João Pedro. « Le gouvernement veut fermer toutes les écoles qui se trouvent en périphérie de la ville » s’insurge Alice, étudiante française en sciences-politiques à Sao Paulo. « C’est un drame pour les gens pauvres qui devront faire des heures de trajet pour avoir accès à l’éducation », ajoute-t-elle. Du coup, certains collégiens occupent leurs établissements et de nombreuses facs sont bloquées. Tous les jours, des manifestations rassemblent des milliers de personnes dans les rues.  « Les droits sociaux conquis par le PT sont piétinés, se révolte João Pedro. Michel Temer veut effectuer un retour en arrière de vingt ans sur les avancées sociales du pays »

La destitution de Dilma Rousseff est considérée par certains comme anti-démocratique

A Sao Paulo, l’argument social ne convainc pas tout le monde. « C’est l’une des villes les plus développées du Brésil, remarque João Pedro. La classe moyenne y est très importante, ces gens-là se fichent pas mal des aides sociales. » Pourtant, ce n’est pas parce qu’ils n’approuvent pas la politique de l’ex-présidente que les paulistanos soutiennent Michel Temer. « Beaucoup de ceux qui participent aux manifestations pro-Dilma sont simplement insatisfaits d’une destitution qu’ils considèrent comme anti-démocratique. » explique-t-il.

Leda Cartum, est traductrice et écrivain à Sao Paulo. Elle n’aurait jamais voté pour Dilma Rousseff, pourtant, elle la défend aujourd’hui. « Dilma n’est pas plus corrompue que les autres. Elle l’est même moins, c’est pour ça qu’elle a été renversée », estime-t-elle. Si Leda admet que Dilma Rousseff a sans-doute effectué le pédalage budgétaire dont elle est accusée pour masquer le déficit des comptes publics, elle rappelle que l’ancienne présidente n’a jamais trempé directement dans des scandales de corruption : « au contraire de Michel Temer qui a été identifié comme l’un des récipiendaires de pots de vins dans l’affaire Petrobras» L’entreprise de pétrole avait été le cœur d’un scandale d’attribution de marchés frauduleux qui avait éclaboussé une bonne partie de la classe politique Brésilienne, dont le vice-président de l’époque. Comme beaucoup d’autres brésiliens, Leda n’hésite pas à qualifier la destitution de l’ancienne présidente de « coup d’état ». « Les politiciens menacés par le plan anti-corruption lancé par Dilma Rousseff ont orchestré sa chute » accuse-t-elle. Une hypothèse corroborée par la mise à l’écart récente d’un proche de Michel Temer, Romero Juca, accusé d’avoir tenté d’étouffer l’enquête sur le scandale Petrobras.

Un futur incertain

Alice s’inquiète : « Il y a une véritable effervescence depuis la destitution de Dilma. Personne ne sait ce qu’il va se passer dans un mois. » Pour João Pedro « Il faut des élections au plus vite. On n’a pas le temps d’attendre les cent-quatre-vingt jours de procès qui décideront définitivement du sort de Dilma Rousseff. » Selon un sondage récent, seuls 1 à 2% des brésiliens voteraient pour Michel Temer s’il se présentait aux élections. C’est dans ce contexte politique chaotique que se préparent les Jeux Olympiques, qui auront lieu dans deux mois et demi au Brésil.

Claire-Marie Germain