Au Mondial de la moto, on mise sur la sécurité 2.0

En France, le nombre de motards tués sur la route a augmenté en 2017. Reportage à Porte de Versailles où prévention et sécurité sont omniprésents.

Plusieurs startups française allie nouvelles technologies et prévention routière. Ici le feu connecté de Cosmo Connected. ©Hugues Garnier

Plusieurs startups française allie nouvelles technologies et prévention routière. Ici le feu stop pour casque de Cosmo Connected. ©Hugues Garnier

“On verra quand j’aurai 18 ans.” Pour le moment, Léo joue les curieux. Avec ses camarades de classe, ce lycéen passe la journée au Mondial de l’auto… et de la moto. C’est la première fois cette année que les deux salons se tiennent au même endroit au même moment. Même si la voiture vole la vedette au deux-roues, ce dernier a droit à son propre pavillon Porte de Versailles.

Là encore, les constructeurs se sont donné rendez-vous : Honda, Kamasaki, Yamaha… les motos japonaises sont de sortie. Tout comme les emblématiques marques américaines Triumph ou Harley Davidson. Les stands adoptent des couleurs vives et fluos, diffusent des playlists rock et country et proposent moult goodies et animations. Objectif : séduire la future clientèle. Mais les plus jeunes sont réticents à l’idée de conduire plus tard en deux-roues. “A la maison mes parents sont stricts : pas de motos pour mon frère et moi!”, explique Léo, non sans une certaine incompréhension.

669 motards tués en 2017

Trop risqué, trop vulnérable, trop dangereux. Ici au pavillon 3 les familles sont moins nombreuses, les visiteurs sont majoritairement des hommes, aussi bien âgés que jeunes. Si le marché de la moto se porte relativement bien en France, le nombre de morts sur deux-roues a augmenté de 9% l’année dernière. Avec 669 motards tués sur les routes l’année dernière, les motocyclistes ont représenté près de 20% des morts sur la route. Un chiffre énorme alors que les deux-roues ne constituent que 2% du trafic motorisé en France selon la Sécurité Routière. L’une des raisons : l’absence d’équipements.

Les stands de prévention et de sécurité se sont multipliés depuis quelques années. Equipements motos, gilets airbags… même les assurances ont leur propre emplacement. Parmi ces dernières le leader AMV qui propose à tous les visiteurs du salon de remporter des dorsales, unique protection contre les lésions de la colonne vertébrale en cas d’accident. Bien qu’indispensables, elles ne sont pas obligatoires contrairement au port des gants.

Feu stop connecté et écran GPS oculaire

Plusieurs startups françaises se sont penchés sur la sécurité des motards. R-Pur et son masque antipollution, le gant connecté de Liberty Racer… Des accessoires faciles à adopter et qui fonctionnent via une application sur son smartphone. C’est le cas notamment de Cosmo Connected. Cette jeune boîte française a lancé l’année dernière un feu de stop facile à attacher derrière son casque. “Dès que le motard ralentit ça s’allume. Comme c’est sur le casque c’est à hauteur des yeux des automobilistes qui sont derrière lui. C’est le comme le principe d’un troisième feu stop d’une voiture”, précise Alexandra Weil, responsable du stand. Outre sa fonction d’allumage, l’accessoire possède également une fonction de détecteur de chute et alerte des proches ou des secours en cas d’accident.

Pour l’avant du casque, il y a Eyelights. Un application qui récupère votre vitesse, la distance qui vous sépare de la prochaine intersection et prochainement les zones de dangers et de radars fixes. De nombreuses informations qui sont ensuite envoyées directement à votre lunette GPS. “Cela vous évite de regarder constamment votre guidon et votre compteur, vous avez les yeux sur la route”, explique la startup. Une sécurité additionnelle qui a tout de même un prix : 650 € pour ce GPS oculaire. 

H.G. 

Trottinettes : « Le trottoir tout entier leur appartient ! »

Les trottinettes sont de plus en plus nombreuses en ville, les accidents liés à leur usage aussi. Entre 2016 et 2017, la Sécurité routière a enregistré une hausse de 23% du nombre de blessés. Sont pointés du doigt, notamment, des incivilités et un manque de respect des consignes de sécurité de certains “trottinettistes”.

Les accidents de trottinettes et de rollers ont fait 284 blessés et 5 tués en 2017
Les accidents de trottinettes et de rollers ont fait 284 blessés et 5 tués en 2017. Crédit : RSCT

 

Cheveux dans le vent et sacoche sur le dos, ce jeudi 11 octobre, Jules trace sa route au volant de sa trottinette électrique. Quatre mois qu’il en est l’heureux propriétaire, et ce trentenaire est complètement conquis. Plus écologique que la voiture, plus pratique que le vélo et plus rapide que la marche à pied, Jules ne tarit pas d’éloges sur son « petit bijou ». Pour lui, c’est simple, sa “trot”, « c’est le nec plus ultra » pour ses petits trajets du quotidien.

Un mode de déplacement bien pratique qui ne serait pourtant pas sans danger : selon Le Parisien, le nombre d’accidents de trottinettes et de rollers (bien que la pratique du second soit en nette perte de vitesse) a fortement augmenté en 2017. Chiffres de la Sécurité routière à l’appui, le journal recense 284 blessés et 5 tués dans des accidents de trottinettes, contre 231 blessés et 6 tués un an plus tôt. Soit une augmentation de 23% de blessés.

Port du casque boudé

Si Jules «regrette» le nombre croissant d’accidents dénombrés, pour lui, le problème ne vient pas de la monture, mais de son cavalier. « Ce sont des petits bolides qui vont vite, donc ça peut vite mettre des étoiles dans les yeux des gens et faire oublier les règles les plus basiques de sécurité. A partir du moment où on fait attention aux piétons autour de nous, il n’y a pas de problème. » Et si Jules ne s’embarrasse pas du port d’un casque – recommandé, mais non obligatoire pour les adultes et les enfants de plus de 12 ans -, ce n’est pas par manque de prudence, mais plutôt, selon lui, parce que ce n’est “ pas vraiment utile” : « Je roule majoritairement sur la rue, du coup aucun risque de me faire accrocher par une voiture. Et puis, je ne vais pas très vite. Je dépasse rarement les 10 km/h. »

Ce dédain face au port des équipements de sécurité serait plutôt commun parmi les usagers de trottinette, modèle standard comme électrique. C’est en tous cas la conclusion à laquelle est arrivé cet employé du magasin de sport Décathlon de La Défense, à Paris : « On vend des casques et des protections pour trottinettes, mais ça ne part pas très bien. Les parents en achètent pour leurs enfants, mais pas pour eux. »

Oscar, 12 ans, en a un, lui, justement, de casque. C’était la condition sinequanone pour pouvoir utiliser sa trottinette électrique, reçue en cadeau d’anniversaire cet été. Et s’il préférerait ne pas avoir à le porter, il se plie aux ordres sans trop rechigner. Une parade victorieuse devant son école au volant de son mini-bolide vaut bien une coupe de cheveux un peu défaite. Il faut dire qu’au collège Danton, à Levallois-Perret, où étudie le jeune homme, la popularité des trottinettes n’est plus à faire. Des roses, des bleues, des noires et des personnalisées, la rue annexe à l’établissement est submergée par une armada de patinettes. Mais, comme le fait remarquer Oscar fièrement, ils ne sont qu’une poignée d’élèves à disposer du modèle électrique. Pas vraiment surprenant quand on sait qu’un enfant n’a légalement pas le droit de conduire une trottinette électrique avant ses 14 ans, mais Oscar l’affirme, ce n’est pas l’âge qui compte, c’est le « talent du rider (ndlr : du conducteur) ».

Ras-le-bol des piétons

Si Jules comme Oscar assurent redoubler de sécurité avec leur trottinettes dans l’espace public, plusieurs piétons, eux, ne cachent pas leur énervement. « Pour eux, le trottoir tout entier leur appartient ! » râle Manon. Poussette à bout de bras, cette mère d’un petit de huit mois explique craindre qu’une trottinette percute un jour le landau de son bébé. « Les trottinettes sont dangereuses, mais les électriques, c’est pire ! C’est rapide et silencieux, on ne les entend pas arriver. Mais une fois qu’ils vous tombent dessus, c’est le piéton qui risque le plus de dégâts. »

Un ras-le-bol partagé par Malik, qui redoute à chaque coin de rue de tomber nez contre guidon avec une trottinette électrique. « C’est arrivé à un ami. Le type sur la trottinette n’a pas fait attention en tournant » raconte-t-il, avant de trancher : « On devrait interdire leur usage en ville, tout simplement ».

Christiane, elle, n’est pas aussi catégorique. Si la retraitée reproche aux “trottinettistes” des comportements pouvant mettre en danger « les personnes âgées et les jeunes enfants », instaurer des règles claires quant aux « devoir de sécurité » des trottinettes lui semble être l’objectif le plus pressant. Avec en premier lieu l’interdiction de rouler sur les rues piétonnes, et, surtout, « l’obligation du port du casque » pour tous les usagers.

 

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Axelle Bouschon

Pour devenir riche grâce à la téléréalité, mieux vaut miser sur Les Marseillais que sur L’Amour est dans le pré

Le salaire versé aux candidats varie grandement en fonction des émissions de téléréalité.

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Onze célibataires enfermés dans un loft et filmés 24h/24 par des caméras infrarouges. Dès son lancement, le concept sulfureux et voyeur du Loft, considéré comme la première émission de téléréalité française, déchaine les critiques. Mais les très bonnes audiences du programme – 4 900 000 téléspectateurs en moyenne pour la première saison, avec un pic à près de 7 300 000 auditeurs pour la finale – se chargent d’assurer sa pérennité.

Tête d’audience

Dix sept ans plus tard, et une pléthore de téléréalités diffusées depuis, le genre a fait son nid dans la grille de programmation télévisuelle française. Des émissions envoyant leurs candidats à l’aventure à l’autre bout du monde (Koh-Lanta et Pékin Express, respectivement lancés en 2001 et 2006), aux concours culinaires (Top Chef (2010), Masterchef (2010)), en passant par les speed-datings revisités (La Belle et ses Princes (2012), Les Princes de l’Amour (2014), La Villa des coeurs brisés (2015)…), la téléréalité se décline de toutes les façons. Avec parfois des succès qui dépassent toutes les attentes, et font de ces programmes des vraies poules aux oeufs d’or pour les chaînes qui les diffusent.

Ainsi, Koh-Lanta (8 127 000 téléspectateurs en moyenne), Star Academy (7 700 000 téléspectateurs en moyenne) et l’Amour est dans le pré (6 326 000 téléspectateurs) trustent les premières positions en terme d’audience moyenne, permettant ainsi à leur chaîne de diffusion (TF1 pour Koh-Lanta et Star Academy et M6 pour L’amour est dans le pré) d’obtenir des parts de marchés importantes sur le créneau première partie de soirée (près de 40% pour Koh-Lanta, 30% pour Star Academy et 27% pour L’amour est dans le pré). Les émissions de cuisine Masterchef (5 227 583 téléspectateurs en moyenne) diffusée sur TF1 et TopChef, (4 051 000), sur M6, remportent également de très bons chiffres d’audience (24,5%  et 18,4% de parts de marché).

Les audiences moins élevées des Chtis (962 000 téléspectateurs en moyenne), des Marseillais (855 000), ou encore des Princes de l’amour (660 000) s’expliquent en partie par la plage horaire de diffusion de ces programmes, fixée à l’avant soirée (entre 18 et 20h, et qui précède donc la première partie de soirée, le prime-time, qui rassemble le nombre le plus élevé d’audimat). Les scores ne prennent également pas en compte la consommation en différée, parfois considérable pour ces minis-séries quotidiennes. Replay compris, l’audience moyenne pour la saison 6 des Marseillais  grimpe ainsi à près de 1,4 millions de téléspectateurs.

Candidats et salariés

Depuis 2009 et sur décision de  justice, « candidat » de téléréalité est devenu un métier à part entière. La société de production se voit donc contrainte de rédiger un contrat de travail  pour ces postulants, considérés comme des intermittents du spectacles. Le gain financier que peut espérer un candidat est néanmoins tout à fait relatif à l’émission qu’il rejoint.

En tête de liste du classement,  Les Anges (NRJ12), L’Ile des vérités (NRJ12), et la Villa des coeurs brisés (NT1), qui verse en moyenne 2000 euros par semaine à ses candidats, suivis de près par Les Marseillais (1900 e/semaine). Si ces émissions semblent donc être les plus généreuses avec leurs candidats, il est cependant essentiel de distinguer le salaire perçu par un « ancien », qui a déjà pris part à l’émission ou une autre téléréalité par le passé et donc connu du public, et un « nouveau » candidat.

Ainsi, les stars de la téléréalité recrutés au casting des anges peuvent toucher jusqu’à quatre fois le montant des « inconnus » : Amélie Neten, figure emblématique de l’émission, aurait ainsi perçu 40 000 euros pour le tournage de la septième saison des Anges (4 000e/semaine), contre un peu plus de 10 000 euros pour Somayeh Rashidi, (1 000 e/semaine) « ange anonyme » de la saison. Pour les Chtis et les Marseillais (tous deux produits par la société Banijay), la différence serait de 12 000 euros (2 400e/semaine) pour les « anciens » contre 7 000 euros (1 400e/semaine) pour les « nouveaux ».

Secret Story (TF1), qui rémunère en moyenne ses candidats 500 euros par semaine passée dans l’émission, continue de payer les participants éliminés à hauteur de 350 euros par semaine jusqu’à la fin du tournage. Koh-Lanta (TF1) attribue également une prime d’après tournage aux candidats, pour que ces derniers ne divulguent pas le nom du gagnant avant la diffusion de l’émission.

Les téléréalités de cuisine font figure de mauvais payeurs : avec un salaire de 287 euros par semaine versés aux candidats, Top Chef (M6) fait à peine mieux que Masterchef (TF1) et ses 250 euros alloués par semaine.

Quant à L’amour est dans le pré (M6), l’émission de rencontre pour agriculteurs tournée sur une année ne rémunère tout simplement pas ses participants.

Si la somme versée aux candidats varie donc sensiblement selon les émissions, et n’est pas forcément relative à la popularité de ces dernières :

Grosses audiences ne riment donc pas forcément avec haut salaire : si Koh-Lanta (TF1) enregistre le nombre le plus important de téléspectateurs, l’émission n’arrive qu’en dixième position en terme de salaire attribué à ses candidats (550 e/semaine en moyenne). Un montant qui peut sembler bien bas  quand on sait que la chaîne a amassé plus de 27 millions de revenus publicitaires pour l’émission sur la saison, les spots de publicités pouvant être facturés jusqu’à 87 000 euros les trente secondes.

A l’inverse, la Villa des coeurs brisés (NT1), avant-dernier au classement en terme d’audience, avec 495 000 téléspectateurs en moyenne, verse la rémunération la plus importante, de 2 000 euros par semaine en moyenne.

Certains candidats ne cachent pas leur mécontentement face à des salaires qu’ils jugent trop bas. Frédéric Bayard, candidat de la saison 1 de Masterchef, avait ainsi jugé la rémunération versée (allant de 2 600 à 3 000 euros pour l’ensemble du tournage) en inadéquation avec le temps et l’implication demandé aux candidats (tournage répartis sur 100 jours avec des horaires pouvant aller de 6h30 à minuit).

Finalement, pour espérer s’en mettre plein les poches, les candidats de Koh-Lanta, MasterchefTop Chef, Pékin Express, ou encore Star Academy ont finalement plutôt intérêt à remporter le jackpot de leur émission respective.

Marketing d’image et placement de produits

Si certains candidats de téléréalité « ancien » peuvent être grassement payés pour prendre part à une émission – Jessica Thivenin et Julien Tanti des Marseillais auraient ainsi touché 65 000 euros chacun pour six semaines de tournage pour Les Marseillais VS le reste du monde 2, quand Le Parisien rapporte que Nabilla Benattia aurait reçu la somme de 200 000 euros pour le tournage de sa téléréalité éponyme, Allô Nabilla -, le vrai business du milieu s’effectue en dehors de l’émission.

Les placements de produits sur les réseaux sociaux sont ainsi devenus une véritable manne financière pour ces « stars de la téléréalité ». Une photo ou vidéo avec un produit peut ainsi rapporter quelques centaines voire milliers d’euros à un candidat. Un prix versé par la marque proposant le produit et déterminé en fonction de la taille de la « communauté « , c’est-à-dire le nombre de « followers » du candidat. Jessica Thivenin, starlette de la téléréalité française aux 3,4 millions de followers Instagram, toucherait ainsi quelques 24 000 euros par mois simplement grâce aux placements de produits.

Axelle Bouschon

Le business opaque d’Instagram

Et si la plateforme de partage de photos et de vidéos Instagram n’était en réalité qu’un immense spot à visée publicitaire ? Depuis près de deux ans, marques et agences sont unanimes: le réseau social est le nouvel outil incontournable pour vendre grâce aux nouvelles égéries 2.0: les influenceurs.
Feed (publications) Instagram @Paulettedittout (33,6 K abonnés)
Feed (publications) Instagram @Paulettedittout – 33,6 K abonnés

Ils s’appellent Stylnoxe, Callmevoyou, Paulettedittout, ou encore Paola Locatelli. Hommes ou femmes âgés de 14 à 50 ans , leur point commun est de rassembler une communauté d’abonnés sur instagram, large de 5000 à plus d’un million de comptes. Véritables stars émergées grâce aux réseaux sociaux, ils se sont fait connaître par leurs blogs ou leur chaîne Youtube, sur lesquels ils ont commencé quelques années plus tôt à partager leur vie de férus de mode, d’écologie ou de cuisine. Ceux qu’on appelle les influenceurs plaisent pour le rapport amical qu’ils entretiennent avec leur audience.

Des dizaines de colis par jour

Cette relation n’a pas longtemps laissé les annonceurs indifférents. Depuis deux ans, les marques approchent ces égéries peu coûteuses correspondant à leurs produits, en proposant des partenariats publicitaires.  “J’ai été contactée par les marques quand j’ai commencé à avoir 5000 followers sur insta” raconte Heloïse Monchablon, maquilleuse professionnelle reconvertie en “inspiratrice” à temps plein spécialisée dans la beauté bio et naturelle.

Depuis, comme beaucoup d’autres confrères sur Instagram, son quotidien est rythmé par les dizaines de colis offerts chaque semaine par des marques, quand d’autres proposent des partenariats sur plusieurs jours, semaine ou bien à l’année. L’objectif : demander aux instagrammeurs de publier une ou plusieurs photos en positionnant le produit de façon précise, en mentionnant le nom de la marque dans la description. En échange de ces services ? Le produit en cadeau et une rémunération fixée au pro-rata du nombre d’abonnés, une fois la publication instagram validée par la marque. “En règle générale on doit te rémunérer à 10% de ton nombre d’abonnés, donc moi normalement c’est 150 euros par photo. Mais c’est rare qu’on me paie, car malgré ce ratio je reste une petite influenceuse” explique Callmevoyou, influenceuse à 15 000 abonnés. Si le contrat relève davantage de la “collaboration”, la jeune bloggeuse reçoit dans sa boîte mail environ 50 propositions par jour. Une façon de monétiser sa présence sur les réseaux sociaux, sans en faire un moyen de revenu principal.

 

 

De nombreuses plateformes de mises en relation entre marques et influenceurs existent depuis peu afin de permettre aux blogueurs qui le souhaitent de demander eux-même un partenariat. Parmi elles, le site Octoly fait figure de référence chez les micro et nano influenceurs, ayant respectivement moins de 100 000 et 20 000 abonnés. Avec pour slogan “Faire de ta passion un succès” en première page de leur site, Octoly propose une application où les jeunes égéries peuvent choisir, en fonction de leur audience, des produits qu’ils souhaiteraient recevoir chez eux en échange d’une ou plusieurs photos.

 

“On gère toute leur vie professionnelle de A à Z”

A plus de 33 000 abonnés, Paulettedittout reçoit “beaucoup, beaucoup, beaucoup de produits à tester. On ne peut même pas tout montrer, publier”. L’auteure du blog culinaire “pas de salades entre nous” en a fait son activité principale. Sur instagram, la plupart de ses contenus font désormais référence à une marque, souvent bien éloignée du monde de la cuisine. Citroën, Oral-B, Clinique, Netflix, ou Nespresso: les sponsors de la vie de la jeune femme sont aussi variés que nombreux. Si elle assure travailler uniquement avec les marques qui lui plaisent, l’honnêteté de son expérience de consommatrice critique est dure à évaluer.

Conseil ou placement de produit? Les influenceurs jouent sur l’ambiguïté de leur statut, et se révèlent être de vrais professionnels dans ce qui apparaît devenir l’un des business les plus florissants. Face à eux, de très nombreuses agences de conseil en publicité qui assurent la mise en relation entre l’instagrameur et les marques ont vu le jour. Et le travail ne manque pas, puisque le marché des influenceurs représente aujourd’hui près de 10 000 influenceurs, et 30% du contenu total d’instagram. Label d’influence, l’agence Foll-ow travaille à la fois pour des influenceurs et pour des marques, soucieuses par ailleurs de ne pas se faire piéger par de “faux influenceurs” . Le label représente une vingtaine de “talents” français avec des profils rassemblant au minimum 100 000 abonnés. « On gère toute la partie opérationnelle, donc toute leur vie professionnelle de A à Z : de la validation à la modification du texte qu’ils vont devoir dire sur la photo pour qu’il soit adapté à l’influenceur, savoir si tous les éléments lui convienne ou non, la date de publication,  et la création de contenu. Au besoin on a une équipe créative qui est là pour les aider” explique Sarah Le Menestrel, en charge du pôle Influence pour le label. Prenant une marge fixe de 30% sur chacun des contrats de partenariat avec une marque, les agents assurent en échange une gestion 360 degrés de la vie de leurs “chouchou”, pour qui ils se rendent disponibles à toute heure du jour et de la nuit.

 

 

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Une partie des « talents » français représentés par le label d’influence Foll-ow. Ces influenceurs ont au moins 100 000 abonnés.

Outre les cadeaux offerts par les marques pour séduire les influenceurs dans l’espoir de créer un partenariat, il y a des rémunérations dont les fourchettes sont variables. « Les blogueurs ont leur propre grille tarifaire, ils sont un peu tous alignés selon leur audience” explique Caroline Fulgraff, consultante digitale chez ZMIROV.  “De 10 000 à 30 000 abonnés tu touches en moyennes 250 euros, jusqu’à 70 000 tu peux avoir entre 500 et 1100 euros, et au delà les montants s’élèvent de 800 à 1300 euros” explique-t-elle. Mais pour les influenceurs dépassant les 100 000 abonnés, les tarifs peuvent se négocier à hauteur plusieurs de milliers d’euros. Institutionnalisés depuis peu, ces contrats reposent sur l’assurance que les influenceurs possèdent un statut d’auto-entrepreneur, afin qu’il ou elle puisse déclarer ses revenus. Un prérequis qui ne peut se vérifier partout, puisque tous ne travaillent pas en relation avec des agences.

 

Autre point d’interrogation, celui du statut des mineurs, qui sont de plus en plus nombreux à devenir célèbres sur Instagram. L’agence Foll-ow en compte près d’une dizaine, dont la plus jeune, Paola Locatelli, 715 000 followers et qui vient de fêter ses 14 ans. Théoriquement sous l’autorité de leurs parents, ils ne possèdent pas toujours de statut clair, ce qui embarrasse certaines agences. “Les mineurs ne sont pas toujours au courant de leur statut d’auto entrepreneur donc on leur fait des formations, et parfois on prend même leurs parents au téléphone” explique sereinement Caroline Fulgraff. Reste à savoir si tous les parents sont au courant de cette activité professionnelle, qui pour la plupart se résume à des photos “lifestyle”.

Services, hôtels et restaurants sur le coup

Au-delà du maquillage, nourriture, vêtements et bijoux, les entreprises de service ont également flairé la tendance. Les influenceurs et influenceuses sont invités dans les hôtels et restaurants en échange de posts, stories, et témoignages. “J’organise bientôt un voyage presse pour des influenceurs. L’hôtel leur offre 2 nuitées et 2 dîners et nous on leur paye les billets de train et on leur offre une enveloppe et en échange ils publient deux posts sur l’hôtel et deux posts sur la marque Havaïanas” détaille Caroline Fulgraff. Consommation gratuite et vie de star, certaines “grande” influenceuses sont mêmes invitées sur le tapis rouge du festival de Cannes, ou bénéficient de tarifs très intéressants dans la prestigieuse clinique des champs-elysées pour se faire refaire le postérieur en échange d’une publication sponsorisé.

 

 

Mais en coulisses, certains veillent à ne pas accepter n’importe quels partenariats, malgré la dépendance financière au réseau des influenceurs de métier. Heloïse de Chablon est lucide : « Je tiens à être bien sûre des produits que je partage. Il ya de fortes chances de devenir une publicité ambulante. Et vis à vis des autres marques; si on accepte tout, on a plus de valeur…on est plus intéressant. » Paulettedittout regrette que “certaines marques, qui se croient un peu au-dessus de tout, demande beaucoup pour pas grand-chose. Quand on vient te demander pour travailler, sans parfois de budget, et qu’on te traite un peu comme de la m**** j’avoue, que maintenant, c’est plutôt: merci, au revoir !” Les demandes de collaboration trop directives ou intrusives sont connues des influenceurs, cibles des marques qui se positionnent sur le business récent du marketing d’influence, terriblement efficace et désormais incontournable pour les entreprises.

 

« Le marketing d’influence est en train de révolutionner la manière de faire de la communication” constate une cheffe marketing du groupe L’oréal, « avant tu faisais une grosse pub à la télévision avant le 20 heures, ton chiffre explosait. Maintenant on est obligés de miser aussi sur l’influence”. Cette stratégie “sans égérie” font émerger de petites marques qui bouleversent les plus grosses. La marque de cosmétiques NYX par exemple, née de cette digitalisation, dispose d’un spectre d’audience immense avec entre autre 6 499 272 références de la marque sur instagram. Ce principe du “bouche à oreille” numérique est « le meilleur moyen publicitaire que tu puisses avoir pour les petites entreprises, qui n’ont pas les moyens de se payer des gros spots publicitaires” conclut une responsable marketing digitale d’une start-up berlinoise.

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Clara Losi et Caroline Baudry