Pétrole : une pénurie aux conséquences incertaines

L’AIE prévoit une «importante pénurie de l’offre» de pétrole au 4e trimestre 2023. Getty – Kirill Gorskov / EyeEm

L’Agence Internationale de l’Energie (AIE) prévoit une importante pénurie de l’offre d’hydrocarbure dans son rapport mensuel. Cette annonce intervient alors que le directeur de cette organisation a annoncé au Financial Times le déclin de la demande mondiale de pétrole d’ici à la fin de la décennie.

L’addition à la pompe risque encore d’être salée. L’Agence internationale de l’énergie (AIE) prévoit une « importante pénurie de l’offre » de pétrole sur les trois derniers mois de l’année 2023 dans son nouveau rapport. Elle entrainerait un déficit de la ressource, déjà au plus haut avec un baril au-dessus des 88 $, pouvant amener à une hausse des prix dans les stations essences.

L’annonce de l’AIE a fait flamber lundi les cours sur les marchés : en séance, les deux références de l’or noir ont atteint un niveau inédit depuis la mi-novembre 2022. « Avant avec la pandémie, on avait eu un temps où la chute des prix avait conduit à un prix historiquement bas. Désormais, les pays producteurs, notamment l’Arabie Saoudite veulent trouver un juste prix, leur convenant ainsi qu’aux Occidentaux », souligne Paul Tourret, économiste.

Ajustement durable du marché

Pour cela, l’Arabie saoudite, la Russie, ainsi qu’une partie des pays producteurs ont décidé de continuer de limiter leurs productions. Cette restriction de la demande devrait mécaniquement amener les prix à la pompe à la hausse, déterminés par les ressources disponibles dans les sols mais aussi les taxes et les marges des distributeurs. « Le prix du pétrole est poussé à la hausse par la persistance d’une offre insuffisante sur le marché au cours des troisième et quatrième trimestres », expliquent les analystes de DNB à l’AFP.

« Ceux à quoi nous assisons, c’est un véritable ajustement du marché »

Paul Tourret, économiste à l’Inserm

Pour autant, cette décision ne devrait pas résorber l’offre mondiale en 2023 qui augmentera de 1,5 million de barils par jour grâce aux États-Unis, à l’Iran et au Brésil. « En 2024, la demande mondiale de pétrole devrait croître de 2,2 millions de barils par jour », annonce l’Organisation des pays exportateurs de pétrole dans son propre rapport, sans changement par rapport à son estimation précédent. Une évolution globale qui est loin d’être un épiphénomène. « Ceux à quoi nous assisons, c’est un véritable ajustement du marché, qu’on aurait dû avoir il y a près de 30 ans. La seule chose qui nous sauve par rapport au choc pétrolier de 1973, c’est la productivité, qui croit contrairement à l’époque », analyse Paul Tourret.

Une pénurie durable ?

Cette annonce intervient alors que pour la première fois, l’AIE entrevoit une baisse durable de la demande pour l’ensemble des énergies fossiles « dans les prochaines années » selon le directeur exécutif de l’institution de l’OCDE, Fatih Birol dans les colonnes du Financial Times. Ce qui est loin de faire consensus parmi les économistes.

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Déjà en juillet 2008 en pleine crise économique, tous les experts et économistes étaient convaincus que le pic du pétrole, moment où la production va commencer à décliner par rapport à la demande, était atteint, après la poussée de fièvre qui avait fait grimper le prix du baril jusqu’à 150 dollars. Le lien de cause à effet entre cette pénurie et cet effondrement de la demande n’est pas avéré. « L’avantage si on prend ce pic pétrolier et même ce pic de décroissance pétrolière, il va nous permettre d’accélérer  la transition énergétique grâce à un prix élevé. Ce n’est pas encore pour aujourd’hui », conclut Paul Tourret.

Adrien-Guillaume Padovan

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