Malgré la moiteur de cette fin de mois de mai à Asnières-Gennevilliers, une quarantaine de sympathisant ou militants de la République En Marche s’étaient déplacés dans un bar de la ville pour échanger avec leur candidat, Adrien Taquet dans la deuxième circonscription des Hauts-de-Seine. Il s’agissait du tout premier “Café Taquet” organisé par le mouvement désormais parti politique. Un événement “très En Marche”, souligne le candidat, pour son côté informel où le tutoiement est encouragé. La boisson en question est prise au bar La Rotonde à Asnières, bien loin de la brasserie du même nom appréciée par Emmanuel Macron et située dans le sixième arrondissement de Paris, mais la coïncidence prête à sourire.
Pour introduire la soirée, Adrien Taquet met les pieds dans le plat : “Je vais vous raconter pourquoi je suis là, et vous expliquer pourquoi Asnières et Colombes-sud.” C’est en effet l’ombre qui plane au dessus de la campagne du quarantenaire proche du président : celle du “parachute”. Cette expression qu’on utilise pour stigmatiser un candidat qui se présente à la députation sans attaches avec le territoire qu’il compte représenter à l’Assemblée. Face à cette accusation, Adrien Taquet offre quatres réponses :
- L’élection législative est nationale : “un député incarne l’intérêt général et non pas l’intérêt particulier”, un statut renforcé depuis la suppression du cumul des mandats qui interdit à un maire d’être aussi député. De plus, il est cohérent de donner une majorité au président élu pour lui permettre de gouverner.
- La compétence face aux problématiques du territoire: Il reconnaît être « parachuté », mais a tout de même vécu 25 ans dans les Haut-de-seine » Les problématiques que rencontrent le territoire ne sont pas très différentes des problématiques auxquelles j’ai pu être confronté par le passé en tant qu’entrepreneur et salarié. “Quand on est dans un territoire très agricole où le député est le seul lien avec Paris, ça peut poser des problèmes, mais ici nous sommes prêt de Paris” explique-t-il.
- Le renouvellement des visages et l’intérêt d’ouvrir un territoire à de nouveaux regards sur les problématiques.
- Les problématiques du territoire peuvent trouver des réponses dans le programme d’Emmanuel Macron. Et Adrien Taquet d’éggrainer la suppression du Régime Social des Indépendants (RSI), les emplois francs, la suppression de la taxe d’habitation, l’éducation, la sécurité…
Mais l’argumentaire peine à convaincre les militants. Confrontés sur le terrain à ce manque d’ancrage local de leur candidat, ils ont du mal à rassembler autour de sa candidature. Lorsqu’arrivent les questions, Jérôme Chicheportiche, 47 ans, lunettes carrées, bouc grisonnant et veste en cuir, prend la parole pour aborder cette problématique. Deux autres personnes feront part, elles-aussi de leurs inquiétudes au candidat vis à vis de ce sujet.
“Je suis un petit soldat d’ En Marche! depuis pas mal de temps, et on va se parler franchement. Tu n’existais pas (sur la circonscription) pendant qu’on faisait la campagne d’Emmanuel Macron. Et quand on tracte sur les marchés on nous demande : mais qui est Adrien Taquet ? Sur le terrain, on n’arrête pas de se prendre des “c’est un parachuté, il ne vient pas d’Asnières.”
Rapidement, les sympathisants commencent à débattre. Il y a là un point éminemment stratégique à discuter. Car cet argument est utilisé par les adversaires du candidat de la majorité présidentielle contre leur candidat, notamment du côté des Républicains où la campagne est menée par Marie-Dominique Aeschliman dont la famille est largement connue des habitants de la circonscription. Un des slogans de sa campagne, “agir pour Asnières” trouve un écho parmi la population, au grand damne des militants En Marche ! “On ne peut pas lutter sur le côté parachutage face à la famille Aeschlimann qui, comme des Bernicles, sont collés à leur rocher” plaisante Jérôme Chicheportiche. “On ne va pas changer la culture des gens comme ça” se désole un autre militant.
Là est pourtant le défi auquel sont confrontés les militants. Faire changer une culture du vote qui donne la primeur au “local” lors de l’élection législative. Pas un amour, juste une “habitude propre aux petites cités” explique Jerôme qui a pensé à une solution : “Il faut faire du côté parachuté une force. Le parachuté, ça peut être aussi l’étranger qui vient nous sauver la vie”. Le militant de conclure : “Ce sera compliqué, c’est sûr, mais je ne serai pas là si ce n’était pas jouable. Par contre, il faut vraiment s’activer maintenant.”
Gaël Flaugère
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