À Bagneux, donner une seconde chance aux NEET (2/4)

L'encadrement des jeunes consiste très souvent à leur redonner confiance, en eux-mêmes et en l'avenir. Julien Percheron
L’encadrement des jeunes consiste très souvent à leur redonner confiance, en eux-mêmes et en l’avenir. Julien Percheron

118 centre de réinsertion professionnelle compose le réseau des Écoles de la deuxième chance. Le but, comme ici à Bagneux, offrir une solution à ceux qui sortent du système scolaire sans diplôme ni qualification.

Dans les couloirs de cette école un peu différente, les travaux des années précédentes ornent les murs. Biographie de Lionel Messi, histoire de l’hôtel Hilton à Paris ou de la coupole Art Nouveau des Galeries Lafayette. Christian Larandière est le chef de site de Bagneux. Ici, on ne parle pas de professeurs, d’élèves ou de cours, mais de formateurs, de stagiaires et d’ateliers. Lunette rondes vissée sur le nez, son collier de barbe accompagne un large sourire.

« Ces jeunes sont arrivés il y a une semaine, dit-il en désignant quelques jeunes réunis autour d’une formatrice, on les fait entrer au compte-goutte, pour permettre l’individualisation de la formation. Chacun va suivre un parcours personnalisé en fonction de ses atouts et lacunes, mais aussi du métier qu’il choisit » explique le chef de site.

Avec 10 mois de cours, à raison de 35 heures par semaine, l’objectif est double : mettre les élèves à niveau dans les matières élémentaires et accéder à l’emploi ou à une formation qualifiante en alternance. « On est la marche qui leur permet d’entrer en CAP ou en Bac Professionnel » poursuit Christian Larandière.

« On cadre, on motive, on remobilise en permanence »

 

A quelques mètres de là, une autre salle, à l’ambiance studieuse. Sur la porte : Atelier Insertion Professionnelle. Ces stagiaires, arrivés en début d’année, travaillent leur CV. Au milieu de la pièce, Sandrine Araujo, formatrice. Brune, les cheveux bouclés et le regard bienveillant, elle s’adresse à Angel Cada, 20 ans, il arbore un T-shirt Star Wars et des lunettes loupe.

« Il faut que tu prennes conscience de tes compétences » dit-elle au d’une voix rassurante, penchée sur sa fiche de synthèse. Dessus, des triangles qui se croisent : mes valeurs, les valeurs que je rejette, mes intérêts, mes compétences et connaissances… L’an passé, Angel échoue en Terminal STMG et fait une dépression. Son redoublement est un échec, il fait une seconde dépression, plus violente. « Ici, on apprend des choses vraiment utiles » confie-t-il.

Après un premier stage “moyen” dans la vente, Angel se projette plus dans la logistique. « J’aimerai bien faire mon prochain stage à La Poste ou chez L’Oréal » sourit-il. C’est la grande particularité de cette école : trois semaines d’ateliers, trois semaines de stage. Juste à côté, un autre stagiaire fait mine de travailler son CV, légèrement affalé sur sa table. A 18 ans, Tyron n’a pas obtenu son Bac STMG.  « Les stages permettent d’acquérir des expériences et de se faire une idée d’où l’on voudrait faire l’alternance plus tard » explique le jeune homme, fan d’automobile, du PSG et des mangas.

L'atelier d'insertion professionnel est un temps pour que chacun avance dans ses recherches de stage. Julien Percheron
L’atelier d’insertion professionnel est un temps pour que chacun avance dans ses recherches de stage. Julien Percheron

Ce qui plaît aussi à la majorité des stagiaires, c’est l’indemnisation. Certes ils touchent aux alentours de 320 euros par mois. Mais ils gagneraient 100 euros de plus en préférant la Garantie Jeune. Pour cette raison, le dispositif de réinsertion professionnelle, sorte de pôle emploi pour les jeunes, attire bien plus que les écoles de la seconde chance.

Un phénomène que déplore Sandrine Araujo : chaque année, les écoles de la seconde chance ne sont pas remplies. « Je travaillais avant en Mission locale, se souvient-elle, il n’y a qu’un mois d’atelier puis deux rendez-vous hebdomadaire. Et les jeunes touchent les 400 euros, avec deux présence. Alors qu’ici, on donne beaucoup d’énergie, énormément même. On cadre, on motive, on remobilise en permanence. On est toujours derrière pour dire : tu vas y arriver » dit-elle, en serrant ses poings.

Une volonté partagée par les six formateurs de l’Ecole de Bagneux. D’ailleurs, chaque année, plus de 60% des jeunes stagiaires signent un contrat de travail ou suivent une formation professionnelle qualifiante dans un métier qu’ils ont choisi. 

L’ensemble du dossier à retrouver ici :

Les NEET, une catégorie sociale qui inquiètent les pouvoirs publics (1/4)

Le risque pour les NEET : basculer dans la pauvreté et l’exclusion (3/4)

Alexis, le sport et le deal (4/4)

Galerie photographique : Une matinée à l’école de la deuxième chance

Julien PERCHERON