Remplir les cœurs ou se remplir les poches ? Tinder se présente comme « meilleur site et application de rencontre 100% gratuit ». Pourtant, en 2019, le site a généré plus d’un milliard de dollars de chiffres d’affaires. Abonnements payants et publicités représentent une part significative des revenus des applications de rencontres. Cependant, le modèle économique de ces sites est aussi fondé sur la collecte de données personnelles.
La période de confinement, entraînant une augmentation du nombre d’abonnés, est donc devenue « une mine d’or » pour la collecte des données personnelles et souvent très intimes. Jessica Pidoux, doctorante en sociologie des rencontres en ligne, prend l’exemple de l’application Grindr qui recense les « données VIH » de ses utilisateurs. De son point de vue d’utilisatrice, Christine remarque qu’en s’inscrivant sur DisonsDemain, ses données se sont aussi retrouvées sur Meetic affinity : « C’est très embêtant, je n’ai jamais souhaité m’inscrire sur ce site ».
A l’exception de Christine, aucun de nos dix interlocuteurs n’a pourtant abordé la question des données personnelles. Et pour cause, selon Jessica Pidoux, très peu d’utilisateurs sont conscients de cet enjeu. Pourtant le confinement a été pour beaucoup une période de socialisation en ligne : le travail sur Zoom, les amis sur Skype et les amours sur Tinder. En basculant sur Internet, notre vie sociale a généré la mise en ligne d’une quantité croissante de nos données. Jessica Pidoux perçoit ainsi la crise sanitaire comme une période cruciale en ce qui concerne l’usage de ces informations : « Les applications de rencontres, en faisant un profilage de données intimes, ont un rôle à jouer dans cette pandémie. Et rien de cela n’est discuté ».