Syrie : « Le recours à l’option militaire n’est pas une garantie de succès » pour la communauté internationale

Lors de la réunion en urgence du Conseil de sécurité à New York, lundi 9 avril, la France et les Etats-Unis ont accusé le régime syrien d’être derrière l’attaque présumée chimique survenue à Douma samedi. Les deux pays ont fait planer la menace de frappes punitives. Benjamin Hautecouverture, maître de recherche à la Fondation pour la recherche stratégique (FRS) à Paris, expert en sécurité internationale, apporte son éclairage sur la situation.

Maître de recherche à la Fondation pour la recherche stratégique (FRS) à Paris, expert en sécurité internationale.
Benjamin Hautecouture, maître de recherche à la Fondation pour la recherche stratégique, est revenu pour le Celsalab sur une éventuelle escalade militaire en Syrie. Crédits : DR

 

Celsalab : Dès le mois de mai 2017, Emmanuel Macron avait déclaré à Vladimir Poutine, alors reçu à Versailles, que l’utilisation d’armes chimiques en Syrie était pour lui une « ligne rouge », et que le recours à de telles armes « par qui que ce soit » ferait l’objet d’une « riposte immédiate », y compris par la France seule. Cette ligne rouge vient d’être franchie pour la deuxième fois. Pensez-vous qu’Emmanuel Macron va choisir de réagir ou de renoncer à cet engagement ? 

Benjamin Hautecouture : La France est, avec les Etats-Unis, le seul pays à avoir adopté une position ferme vis-à-vis de l’utilisation des armes chimiques dans le conflit syrien depuis 2013. Cette position a été dans une certaine mesure à l’origine de la réaction russe provoquant l’adoption forcée par la Syrie de la Convention sur l’interdiction des armes chimiques (CIAC) en septembre 2013 et le démantèlement de son arsenal déclaré. Face à la recrudescence des cas d’emploi de l’arme chimique dans le monde, y compris en Syrie, l’initiative française d’un partenariat international contre l’impunité d’utilisation d’armes chimiques, présentée le 23 janvier dernier à Paris est une réaction politique qui peut fédérer beaucoup Etats et formaliser un front commun international. Plus de trente Etats et organisations internationales soutiennent déjà l’initiative. C’est un mécanisme souple qui permet de référencer les personnes physiques et morales impliquées dans des programmes chimiques militaires, une forme de partenariat qui est un premier pas face à l’ampleur des dégâts en cours en Syrie.

La question qui se pose après les allégations d’emploi de l’arme chimique par le régime syrien, samedi 7 avril, est celle d’une action concertée visant à établir des éléments de preuve s’agissant des responsables des attaques chimiques en Syrie. Sans preuve, il est impossible d’établir des responsabilités, et donc de mettre en œuvre une réponse ciblée. C’est bien ce manque de preuve entérinée de manière collective par le Conseil de sécurité des Nations unies qui permet au régime de Bachar El Assad et à son allié russe de se tenir sur la frontière étroite de ce qui est licite et de ce qui ne l’est pas.

Celsalab : Le ton est encore monté d’un cran entre la Russie et les Occidentaux. Pensez-vous que l’on puisse toujours espérer une amélioration de la situation grâce à des actions diplomatiques ? L’ONU peut-elle cesser d’être paralysée ou peut-on penser qu’il ne reste plus que le recours à la force, alors que Trump et Macron viennent de s’entretenir par téléphone pour la deuxième fois en deux jours et ont souhaité « une réaction ferme » de la communauté internationale ?

Benjamin Hautecouture : Schématiquement, les Nations unies sont paralysées dans le dossier syrien depuis novembre 2017. Depuis lors, la fin contrainte du mandat de la mission baptisée « Mécanisme d’enquête conjoint » (Joint Investigative Mechanism, JIM), de l’ONU et de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC), mise en place par la résolution 2235 du Conseil de sécurité du 7 août 2015 et reconduite en 2016 (résolution CSNU 2319 du 17 novembre 2016), ne permet plus à un organe doté d’un mandat onusien de mener sur place un travail de vérification visant à établir des faits et à déterminer des responsabilités. Le JIM était spécifiquement « chargé d’identifier les personnes, entités, groupes ou gouvernements qui ont perpétré, organisé ou commandité l’utilisation comme armes, en République arabe syrienne, de produits chimiques, y compris le chlore ou d’autres produits toxiques ». Fin octobre 2017, le Conseil de sécurité n’est pas parvenu à adopter un projet de résolution visant à renouveler d’un an le mandat du JIM arrivant à expiration le 16 novembre 2017 du fait du veto exercé par la Russie.

Au regard des obstructions russes permanentes au sein du Conseil de sécurité (la Russie a utilisé son droit de veto à onze reprises depuis 2011 dans le dossier syrien), on voit mal comment la « communauté internationale » telle que représentée par l’organe exécutif des Nations unies pourrait adopter une « réaction ferme ». Si réaction ferme il y a dans les prochains jours ou les prochaines semaines, se sera donc sans doute via une coalition internationale d’Etats préoccupés par l’utilisation des armes chimiques sur le théâtre syrien. La forme que peut prendre une telle réaction passe notamment par le recours à la force. Mais le recours à l’option militaire n’est pas en tant que tel une garantie de succès. On se souvient que la base militaire aérienne syrienne d’Al-Chaayrate avait été bombardée début avril 2017 par 59 missiles de croisière Tomahawk tirés depuis les navires américains USS Porter et USS Ross en réponse à l’attaque chimique de Khan Cheikhoun. Or à l’évidence, cette réaction militaire, bien entendu condamnée par la Russie à l’époque, n’a pas suffi.

Pensez-vous qu’une alliance militaire entre la France et les Etats-Unis soit à envisager ? La Grande Bretagne pourrait-elle aussi y participer?

La demande de réunion d’urgence du Conseil de sécurité formulée par la France et neuf autres Etats issus de toutes les régions du monde, la réaction officielle du Service européen d’action extérieure (SEAE) et les réactions des Etats du Golfe persique indiquent déjà qu’une forte pression est exercée sur le régime syrien et sur ses alliés iranien et russe. Alors que le secrétaire américain à la Défense rappelle que toutes les options sont sur la table, y compris une nouvelle option militaire, la question sera d’abord de savoir si un nouvel organe d’enquête sur le terrain pourra être mis en place dans les prochaines semaines. En seconde analyse, la question de la constitution d’une alliance militaire contre la Syrie se pose comme élément de pression sur la Russie pour que cet Etat ne bloque pas, une nouvelle fois, la mise en œuvre d’une initiative collective visant à établir des éléments de preuve sur le terrain.

Propos recueilli par Chloé Sartena

Vélo électrique : les raisons d’une success-story en France

En quelques années, le VAE (vélo à assistance électrique) s’est imposé comme un des moyens de transport les plus pratiques en ville. Prise de conscience écologique, inconvénients de la voiture, harmonie entre le plaisir et l’effort… Retour sur une affaire qui roule.

Alternative à la voiture sans les contraintes du vélo classique, le VAE séduit de plus en plus de Français.
Offrant une alternative à la voiture sans les contraintes du vélo classique, le VAE séduit de plus en plus de Français. Crédit photo: DR.

Une ascension rapide comme l’éclair. En quelques années seulement le vélo électrique a su se faire une place dans le cœur des Français: avec plus de 130 000 ventes en 2016 contre 6 000 environ en 2006, la France a vu le nombre de boutiques proposant des VAE exploser. Un phénomène également dû aux initiatives municipales comme à Paris où la maire PS Anne Hidalgo a voté au début de son mandat un plan Vélo destiné à réduire le nombre de voitures dans la capitale.

Prise de conscience

Harry Dabi, directeur de la boutique Velair située dans le 17e arrondissement, n’est pas surpris par ces bons chiffres: « C’est une activité en pleine expansion, surtout à Paris d’ailleurs, ça fait partie des métiers d’avenir! » Le gérant a ouvert son magasin de vélos il y a de ça trois ans. Pour lui pas de doute, le changement des comportements des clients y est pour quelque chose : « Les gens en ont marre de la voiture, entre les PV, la façon de se garer… Le vélo ça les accommodent, ça leur met moins de contraintes que les voitures. Et puis c’est ludique et on a la possibilité de faire un peu de sport. Et avec le vélo électrique, il y a l’avantage de la rapidité en continu ».

 

 

Avec des vélos électriques dont les prix peuvent aller de 1000 à 1500 €, le gérant classe ses produits en moyenne gamme. Des prix loin d’être abordables pour tous. « J’ai beaucoup de professionnels qui viennent, des avocats aussi qui veulent se rendre au Palais de Justice avec, ça leur évite les embouteillages. Mais j’ai également une clientèle de quartier qui s’en achète pour se promener le week-end. C’est aussi ça la force du vélo : à chacun son usage. »

Et en matière d’écologie? Cette question peut se poser d’emblée, dès lors qu’elle paraît intrinsèque au concept du VAE. Mais Harry Dabi ne trouve pas que celle ci joue un grand rôle dans la vente des vélos électriques, « mais ça va le devenir, c’est une évidence… »

Prime pour l’achat

Pour le commerçant, un autre aspect n’est pas à négliger : les subventions. En 2017, la ministre de l’Environnement Ségolène Royal avait lancé une aide financière pouvant aller jusqu’à 200€. Pour obtenir cette aide, les nouveaux propriétaires de vélo électrique devaient solliciter la prime dans les six mois qui suivaient l’achat. Une prime modifiée en janvier dernier et qui est désormais seulement accessible aux personnes non imposables et habitantes de certaines villes qui subventionnent elles aussi cet achat. Une décision visant à éviter, selon le gouvernement, que des foyers aisés puissent bénéficier de cette aide dès lors qu’ils auraient pu s’équiper sans. Des conditions fortement durcies qui ne passent pas pour de nombreuses associations cyclistes ; celles-ci estiment que les habitants de zone rurale sont laissés pour compte.

 

 

Priorités : SAV et assurance

Mais à entendre les clients, beaucoup ne semblaient pas au courant de cette aide : « J’ignorais que cela existait », témoigne Marianne, 47 ans. Cette habitante de Montfort-Sur-Meu (Ille-et-Vilaine) a récemment fait l’acquisition d’un vélo électrique, un bon compromis pour elle : « Je ne me sentais pas capable de faire le moindre trajet à vélo pas électrique et j’avais envie de trouver une alternative à la voiture ». Alors pour se rendre au travail en cette période de grève de la SNCF, elle n’a d’autre choix que de prendre son deux-roues pour faire 46 kilomètres (aller et retour). Elle ne regrette pas son choix. « Ma seule inquiétude c’est le stress de ne pas avoir assez de batterie, je suis déjà tombée en panne une fois… »

Ce qui inquiète le plus les usagers, c’est en effet les soucis techniques qu’ils peuvent rencontrer avec leurs vélos. « Il faut surtout qu’on ait un service SAV qui soit sans problèmes. On se doit de répondre à nos clients quand il y a un problème sur leurs vélos électriques. Ils ne s’attendent pas seulement à acquérir un bien mais également à retrouver un service », explique Harry Dabi. Le gérant en vient même à penser qu’il faudrait assurer les vélos électriques, « ce ne serait pas une mauvaise idée ». Une bonne idée pour le deux-roues… et le cycliste.

 

Hugues Garnier

Escrime : pour Jérémy Fafa Keryhuel, « les JO seraient la consécration de toutes ces années de travail »

L’escrimeur franco-ivoirien Jérémy Fafa Keryhuel est aujourd’hui le seul représentant de la Côte d’Ivoire pour les épreuves internationales au fleuret. Âgé de 23 ans, le 37ème mondial pourrait bien participer aux Jeux Olympiques si ses résultats se maintiennent. Portrait d’un athlète motivé et autodidacte.

Jérémy Fafa Keryhuel, qui fait partie de l'équipe de Côte d'Ivoire, est aujourd'hui 37ème mondial. © Augusto Bizzi / Fédération internationale d'escrime
Jérémy Fafa Keryhuel, qui fait partie de l’équipe de Côte d’Ivoire, est aujourd’hui 37ème mondial. © Augusto Bizzi / Fédération internationale d’escrime

C’est lorsqu’il passe en voiture, avec son père, devant un panneau publicitaire pour des cours d’escrime que Jérémy Fafa Keryhuel découvre un sport dont il ne connaissait rien. Il est alors âgé de cinq ans. C’est peut-être l’image de Zorro, sur le panneau, qui lui donne envie d’essayer. Personne dans sa famille ne connaît réellement cette activité sportive, « très peu médiatisée en France », regrette-t-il. Pourtant, il se lance dans le club de sa ville, l’US Le Pecq, et son agilité surprend. Un an plus tard, il commence les compétitions : « J’ai tout de suite adoré ça ». Il ne s’est jamais arrêté depuis. Aujourd’hui 37ème au classement mondial à 23 ans, il est le seul représentant de la Côte d’Ivoire pour les épreuves internationales senior au fleuret. Si ses résultats se maintiennent, il est en bonne voie pour participer aux Jeux Olympiques de 2020 à Tokyo.

Jérémy Keryhuel est né à Paris le 28 octobre 1994, d’un père français et d’une mère ivoirienne. Il grandit dans les Yvelines, au Pecq, où il habite et s’entraîne encore aujourd’hui. À 15 ans, il intègre l’équipe de France en catégorie cadet et commence à voyager en Europe, puis dans le monde. Les résultats sont au rendez-vous : il est premier au classement national junior en mai 2014 et plusieurs fois champion de France en équipe.

© Augusto Bizzi / Fédération internationale d'escrime
© Augusto Bizzi / Fédération internationale d’escrime
L’équipe de Côte d’Ivoire : un tournant

Dès 2010, il s’intéresse à la situation de l’escrime en Côte d’Ivoire. Il prend contact avec la Fédération ivoirienne d’escrime et lui fait don de fleurets et de vêtements de combat. À son arrivée à Abidjan, il se rappelle « d’une foule qui l’attendait à l’aéroport ». « Certaines personnes m’ont même offert des fleurs », ajoute-t-il. Une image qu’il n’oubliera jamais. Là-bas, il s’entraîne avec les joueurs ivoiriens et combat même contre le maître d’armes de la Fédération, qu’il bat. Il devient une star de l’escrime dans le pays d’origine de sa mère. Cette dernière est d’ailleurs un soutien de taille pour lui : elle l’aide et l’accompagne dans ses démarches. « Elle est un peu comme mon agent », plaisante-t-il.

En mai 2017, il prend la décision de quitter l’équipe de France pour intégrer celle de Côte d’Ivoire. « C’était une décision difficile car même si cela m’offre des opportunités, la structure et la prise en charge ne sont pas les mêmes », raconte-t-il. En effet, la Fédération ivoirienne d’escrime touche peu de fonds. Quand il part en compétition à l’international, Jérémy Keryhuel voyage seul, sans coach ni médecin : « Cela m’oblige à être autonome, à me gérer tout seul ». D’autant plus que l’escrimeur n’a pas que le sport à gérer. Il est également en première année de master à l’École de Management Léonard de Vinci à Paris, en marketing digital et analyse de données. « C’est parfois compliqué de gérer le sport à haut niveau et les études, ça demande un investissement particulièrement important », confie-t-il.

Objectif JO 2020

Aujourd’hui, son objectif est d’être sélectionné pour participer aux Jeux Olympiques de Tokyo en 2020 : « si je fais les JO, ce serait un rêve qui se réalise, mais aussi la consécration de toutes ces années de travail ». Cette sélection est envisageable, dans la mesure où son classement actuel lui permettrait d’y participer. « Mais un retournement de situation est possible, c’est pourquoi je dois rester concentré », explique-t-il. Il connaît ses forces et ses faiblesses : « Même si j’ai des qualités d’appui et que je ne baisse jamais les bras, je dois encore travailler mon mental et ma tactique ». Amoureux de la compétition, il ne se lasse pas de voyager aux quatre coins du globe pour combattre ses adversaires, qui sont parfois ses anciens coéquipiers de l’équipe de France. « L’escrime, c’est une famille de personnes qui vivent les mêmes choses que toi. On se motive et on se soutient quel que soit le pays qu’on représente. »

Justine HAGARD

Tour d’Espagne 2018 : Cofidis convié avec trois équipes espagnoles

L’équipe française Cofidis et les formations espagnoles Caja Rural-RGA, Burgos-BH et Euskadi-Murias ont été invitées pour le Tour d’Espagne 2018, ont annoncé mardi les organisateurs qui ont privilégié la fibre nationale au détriment d’équipes régulièrement conviées, comme les Français de Direct Energie. Pour cette 73e édition de la Vuelta, le peloton sera composé de 22 équipes, les 18 formations de première division (World Tour) étant qualifiées d’office.

Cofidis a l’avantage de pouvoir aligner des leaders espagnols comme Jesus Herrada ou Dani Navarro sur cette Vuelta, qui sera courue du 25 août au 16 septembre entre Malaga et Madrid. Caja Rural est également une habituée de l’épreuve espagnole, tandis que Burgos-BH et Euskadi Murias présentent des profils plus inexpérimentés.

Le Tour d’Espagne 2018 s’élancera de Malaga par un contre-la-montre individuel avant de s’achever trois semaines plus tard à Madrid.

Imen Mellaz avec AFP