Tous les adultes bientôt vaccinés ? Pas si simple

Depuis le lundi 31 mai, tous les adultes peuvent se faire vacciner contre le Covid-19. Pour autant, la montée en puissance de la campagne vaccinale pourrait ne pas être aussi forte qu’espérée. Ni les centres de vaccination, ni les pharmacies, qui peuvent depuis le 28 mai administrer le vaccin Moderna, ne sont pour le moment en mesure d’accélérer la cadence.

Ce lundi 31 mars, Liam Sorley, jeune Canadien de 21 ans, a pu se faire vacciner au Stade de France © Glenn Gillet

« J’ai passé au moins deux heures sur mon téléphone à rafraîchir Doctolib hier soir, mais j’ai fini par avoir un rendez-vous ! », exulte Liam Sorley. Cette piqûre, ce Canadien de 21 ans, Parisien depuis un an et demi, l’attendait depuis longtemps. Avec l’ouverture de la vaccination aux 18 ans et plus à partir du lundi 31 mai, il a enfin pu réserver un créneau pour une première injection.

Pour lui, ce sera le vaccinodrome du Stade de France, à Saint-Denis, qui a atteint depuis un mois un rythme de croisière à 12 000 piqûres par jour. Un peu déçu car il espérait « se faire vacciner sur la pelouse« , Liam voit tout de même le verre à moitié plein : « Cette injection, c’est un peu comme une libération. En plus, je suis cuisinier et je n’ai pas trouvé de travail à Paris depuis le début de la pandémie. Alors maintenant que les restaurants rouvrent, ça va peut-être m’aider à être embauché. Je ne sais pas si les patrons demanderont aux employés d’être vaccinés, mais je trouverais ça compréhensible », partage le jeune homme.

« On a réservé tout de suite »

Il n’est pas le seul à avoir sauté sur les réservations dès ce week-end pour espérer être vacciné aujourd’hui : « Une amie qui travaille dans le centre nous a dit samedi qu’il y avait des places disponibles. On a réservé tout de suite », expliquent Elise Gaubert, 27 ans, et Clara Morel, 29 ans. Pour les deux jeunes femmes, friandes de concerts, le vaccin fera office de sésame : « On sait que ce sera obligatoire pour les festivals de cet été. Même si on ne sait pas encore auxquels on ira, ça donne une raison de plus pour le faire ! », justifie Elise.

Après l’injection, Liam, Elise et Clara attendent dans l’espace de surveillance médical, au milieu d’une centaine d’autres néo-vaccinés. Les quinqua et sexagénaires ont beau y rester majoritaires, tous les âges sont représentés, notamment dans ceux qui ne pouvaient, jusqu’ici, pas être vaccinés. « Ça fait déjà quelques semaines qu’on accueille tout le monde sans limite d’âge ou de comorbidité », explique Saliah Ikheteah, qui s’occupe de la partie administrative qui précède la vaccination. « On a eu des gens qui venaient de Lyon ou de Chartres parce qu’ils savaient qu’ils pourraient se faire vacciner ici. On a toujours eu des doses qui restaient et on en aura encore, même si la vaccination est vraiment ouverte à tout le monde maintenant ». Le Stade de France, comme beaucoup de vaccinodromes français, fonctionne déjà à plein régime, ou presque. Le rythme de vaccination ne devrait donc pas augmenter significativement.

Les pharmacies à la peine

Question approvisionnement, il semble toutefois que tout le monde ne soit pas logé à la même enseigne. C’est notamment le cas des pharmacies, qui ont depuis vendredi 28 mai l’autorisation de réaliser des injections du sérum de Moderna, un vaccin à ARN messagé plus facile à stocker que le Pfizer. « Pour l’instant, on a que deux flacons et le fournisseur m’a appelé vendredi pour me dire que je ne pourrai pas en commander aujourd’hui », témoigne Luc Minel, gérant d’une pharmacie dans le 17ème arrondissement de la capitale. « On a une liste des gens qui sont passés à la pharmacie et qui nous ont demandé, mais on préfère attendre d’avoir un peu plus de stock pour organiser des créneaux réguliers », détaille-t-il.

Nombreux sont les pharmaciens qui, faute d’avoir reçu assez de vaccins Moderna, tardent à commencer les injections. © Glenn Gillet

À la Pharmacie de Liège, dans le 8ème arrondissement, un seul flacon est arrivé. Sortira-t-il bientôt de sa solitude ? Derrière leur comptoir, les professionnels sont pessimistes : « Le grossiste nous a dit qu’on aurait sûrement des doses en fin de semaine mais il nous disait la même chose au début pour AstraZeneca, alors qu’au final on a attendu beaucoup plus que ça », partage une pharmacienne qui préfère rester anonyme.

Objectif : 70% de vaccinés

Plus que d’augmenter le nombre de personnes vaccinées par jour, la stratégie du gouvernement est surtout d’empêcher un ralentissement de la campagne de vaccination. En effet, alors que de plus en plus de Français sont vaccinés, les inquiétudes montent au sommet de l’État sur le risque d’un « plafond de verre » vaccinal. Il s’agirait d’une situation où malgré un grand nombre de doses disponibles, on ne trouverait plus suffisamment de personnes à vacciner, en raison d’un scepticisme voire d’une opposition aux sérums. Il s’agit d’une situation déjà observée aux États-Unis, où la barre des 50% de vaccinés peine à être dépassée.

La couverture vaccinale doit être d’au moins 70%, voire 80%, pour permettre une réelle immunité collective. Pour y arriver le plus rapidement possible, les autorités françaises tablent déjà sur l’ouverture de la vaccination aux 16-17 ans, déjà possibles dans d’autres pays comme Israël, le Canada ou encore les États-Unis, qui vaccinent dès l’âge de 12 ans. Pour Alain Fischer, président du Conseil d’orientation de la stratégie vaccinale anti Covid-19, ce n’est plus « qu’une affaire de jours ».

Lire aussi: Covid-19, Singapour va commencer à vacciner les enfants.

Gabriel Attal a également évoqué la possibilité, refusée jusqu’ici, de se faire vacciner sur son lieu de vacances. Le porte-parole du gouvernement indiquait vendredi 28 mai qu’un « plan pour l’été » serait annoncé dans « les prochains jours ».

Glenn Gillet

 

Covid-19 : Singapour va commencer à vacciner les enfants

Les enfants âgés de 12 ans ou plus, pourront se faire vacciner contre le coronavirus à Singapour à partir de jeudi 3 juin. Lee Hsien Loong, le Premier ministre de l’île, s’est dit inquiet des nouveaux variants qui affectent plus les jeunes.

Les enfants à partir de 12 ans pourront être vaccinés dès jeudi à Singapour. © Mat Napo

De plus en plus d’enfants sont infectés par le coronavirus à Singapour a indiqué Lee Hsien Loong, le dirigeant du pays, lors d’un discours télévisé. Les lieux de contamination ? Les écoles et les cours du soir. Par conséquent, le pays d’Asie du sud-est commencera jeudi à vacciner les écoliers à partir de 12 ans.

« Profiter des vacances de juin pour vacciner les écoliers »

L’autorité de régulation sanitaire locale a approuvé le vaccin Pfizer/BioNTech pour les enfants de 12 à 15 ans, préalablement autorisé qu’à partir de 16 ans. « Les enfants n’ont pas été gravement malades mais les parents naturellement sont inquiets. Par conséquent, nous allons profiter des vacances de juin pour vacciner les écoliers », déclare le Premier ministre Singapourien. Depuis la mi mai, les écoles du primaire au secondaire sont fermées dans ce pays de l’Asie du sud-est. Suite à un rebond du nombre de contaminations au coronavirus, l’île a renforcé les restrictions sanitaires. Celles-ci devraient être allégées après le 13 juin, si le nombre de cas transmis localement diminue.

Après les quelque 400 000 écoliers et étudiants du pays, les autorités ont annoncé vouloir vacciner les adultes jusqu’à 39 ans, dernier segment des 5,7 millions d’habitants de Singapour restant à vacciner.Grâce à des contrôles très stricts depuis le début de la pandémie, le pays dénombre un peu plus de 62 000 cas de coronavirus et déplore 33 morts.

Alors que dans l’Hexagone, la vaccination des mineurs n’est pas encore à l’ordre du jour, le vaccin Pfizer/BioNTech est autorisé pour les plus de 16 ans en Europe. Aux Etats-Unis et au Canada, le vaccin peut être injecté aux enfants entre 12 et 18 ans. Pour l’Organisation mondiale de la santé (OMS), vacciner les mineurs n’est pas une priorité. L’objectif étant de pouvoir donner le maximum de doses possibles aux pays les plus pauvres.

Nolwenn Autret

Déficit public français : un record attendu en 2021

 

Le déficit public de la France est attendu à 9,4 % du Produit intérieur brut (PIB) en 2021 d’après le ministre de l’Économie, des Finances et de la Relance, Bruno Le Maire. Du jamais vu pour l’économie française.

Un déficit de 50 milliards d’euros de plus que prévu. © Markus Spiske/Unsplash

Une dette record. La France prévoit un déficit public de 9,4% du Produit intérieur brut (PIB) en 2021, a déclaré le ministre de l’Économie Bruno Le Maire sur France 2 lundi 31 mai. Ce déficit inédit résulte des dépenses de l’État pour soutenir l’économie française depuis le début de la crise du Covid-19.

Initialement prévu à hauteur de 8,5 % du PIB, c’est donc une révision à la hausse qui a été annoncée ce lundi. Ce record est lié à différents facteurs : « Nous reportons un certain nombre de dépenses de 2020 à 2021 », a précisé le ministre. La hausse du déficit résulte aussi de l’aide apportée par l’État à différents secteurs sinistrés, « même si progressivement nous allons supprimer ces aides », a-t-il ajouté. Enfin, une partie du plan de relance sortira des caisses de l’État pour s’intégrer dans l’économie nationale au cours de l’année.

La dette publique en France depuis 2017. Lecture : En 2017, la dette publique brute française s’élevait à 98,3 % du Produit intérieur brut (PIB).

«  La prolongation de l’effort »

Le déficit français devrait atteindre 220 milliards d’euros en 2021, soit près de 50 milliards de plus que prévu initialement dans le budget voté dans la loi de finances. D’après Bruno Le Maire, ce déficit est « la prolongation de l’effort que nous avons fait pour protéger notre économie et en même temps l’accroissement de cette relance économique que nous voulons ».

Le gouvernement doit par ailleurs présenter un projet de loi de finances rectificative mercredi, corrigé de 15 milliards d’euros de mesures d’urgence supplémentaires pour les entreprises en difficulté notamment.

La dette publique est annoncée à hauteur de 117,2 % cette année, contre 115,1 % l’an dernier, qui était déjà une record pour la France. Par ailleurs, le ministre de l’Économie s’est dit « convaincu » que la France aura une croissance de 5 % cette année.

Joséphine Boone

Convaincre les Français de se faire vacciner : le futur défi du gouvernement

Alors que les laboratoires américains Pfizer ont annoncé lundi 9 novembre être en bonne voie pour proposer un vaccin contre le Covid-19, un sondage publié quatre jours plus tôt montre que près de la moitié des Français refuserait de se faire vacciner. La France est l’un des pays les plus anti-vaccins au monde, et le fait que le vaccin contre le Covid-19 ait été créé dans l’urgence attise les complotismes.

Selon l’Ipsos, 46% des Français refuseraient de se faire vacciner contre le Covid-19. Illustration : Ludovic Marin / AFP

Près de la moitié des Français refuserait de se faire vacciner contre le Covid-19 à sa sortie. C’est le résultat publié par l’institut de sondages Ipsos jeudi 5 novembre. Parmi la quinzaine de pays sondés début octobre, la France est celui où l’intention de se faire vacciner est la plus faible, à 54%. C’est aussi le pays où les personnes sondées auront le plus tendance à attendre quelques temps avant de se faire vacciner. Un tiers des Français pense attendre au moins trois mois après la sortie du vaccin.

Avec l’annonce lundi 9 novembre par l’entreprise pharmaceutique Pfizer de la mise au point d’un vaccin efficace à 90%, mais aussi les revendications des laboratoires américains Moderna et de chercheurs russes, l’espoir de l’arrivée prochaine d’un vaccin contre le Covid-19 se concrétise enfin. Mais cette réticence française aux vaccins vient noircir le tableau. En effet, les épidémiologistes jugent que pour que toute la population soit protégée, il faudrait qu’au moins 60 ou 70% des Français soient vaccinés, ce chiffre variant beaucoup selon les estimations.

La confiance des Français envers les autorités sanitaires se dégrade depuis plus de dix ans

Ce rejet des vaccins plus répandu en France que dans les autres pays n’est pas une nouveauté. Françoise Salvadori et Laurent-Henri Vignaud ont co-écrit le livre Antivax, La résistance aux vaccins du XVIIIème siècle à nos jours, qui est paru en 2019. « Cette méfiance n’est pas propre à la situation actuelle, explique Françoise Salvadori au CelsaLab, qui est maîtresse de conférence en immunologie. On date cette augmentation de la méfiance vis-à-vis des vaccins à partir des années 2008 et 2009, au moment de la grippe A-H1N1. Il y a eu un gros bug de communication, avec un discours qui a pu paraître alarmiste. Les vaccins ont été mal présentés et mal distribués. »

Selon la chercheuse, il y a de nouveau un problème de communication entre l’État et les Français : « Il y a un manque de confiance général des Français envers leurs autorités politiques et sanitaires, et je pense que la gestion de la crise actuelle ne va pas augmenter cette confiance. Il faudra des années pour compenser ce manque ». Françoise Salvadori fait référence à la communication sur les masques et les tests, au sujet desquels le gouvernement est revenu sur ses propos.

Le scepticisme des Français face au futur vaccin contre le Covid-19 augmente en effet avec le temps, puisqu’un autre sondage de l’Ipsos, sorti au début du mois de septembre, montrait que 59% des Français seraient prêts à se faire vacciner, contre 54% aujourd’hui.

Crainte des effets secondaires ou rébellion face à l’autorité

Parmi les arguments avancés par les personnes sondées, les plus récurrents sont la crainte des effets secondaires et la peur que le vaccin ait été conçu à la va-vite. La méfiance pourrait aussi être accrue par le fait que le vaccin proposé par Pfizer ou par Moderna utilise une technologie encore peu répandue, qui consiste à injecter de l’ARN messager pour indiquer à nos cellules de créer des antigènes, au lieu d’injecter un échantillon du virus lui-même.

Laurent-Henri Vignaud, qui est historien des sciences, a étudié les types de populations qui sont sensibles aux arguments anti-vaccins : « C’est une opinion qui a prospéré dans les classes moyennes éduquées. Le premier profil courant est plutôt féminin, d’âge moyen et de classe moyenne, dans un cadre familial. Ce sont des familles refermées sur elles-mêmes, qui mettent leurs enfants dans des écoles hors contrat. Le second profil est plutôt masculin, d’âge plus avancé, célibataire et sans enfant ». Si le premier profil qu’il décrit considère que tout ce qui est extérieur à la famille est un danger, et notamment les vaccins, le deuxième refuse toute autorité de l’État sur les individus.

Dans le cas du Covid-19, Laurent-Henri Vignaud reconnaît que c’est ce second profil qui risque d’être le plus fréquent. En effet, des adultes seront amenés à se faire vacciner, alors que le reste du temps, les personnes anti-vaccins sont souvent des parents qui s’opposent aux vaccins obligatoires pour leurs enfants. « C’est précisément cette catégorie de personnes qui est particulièrement présente sur les réseaux sociaux, continue le chercheur. On pourrait être confronté à une forme de mouvement « gilets jaunes » sanitaire, comme c’est déjà le cas avec les anti-masques. »

En deux mois, la part des Français prêts à se faire vacciner contre le Covid-19 est passée de 59% à 54%. Illustration : Vincenzo Pinto / AFP

Les deux chercheurs considèrent que la communication du gouvernement sera cruciale dans l’acceptation ou le rejet de ce vaccin par les Français. La possibilité de le rendre obligatoire a déjà été évoquée, notamment par le député Européen Yannick Jadot. Mais selon Françoise Salvadori, cela paraît peu probable car le vaccin ne sera dans un premier temps pas disponible en quantités suffisantes, et parce qu’aujourd’hui, les seuls vaccins qui sont obligatoires sont ceux que l’on fait à un très jeune âge. « Il faudra un discours clair et honnête de la part de l’État, plutôt que des batailles politiques qui n’aident pas les gens à prendre leur décision », conclut la chercheuse.

Julie Bringer