Paris : la manifestation des agents d’accueil de la Philharmonie a tourné court

Ce jeudi 1er juin, la Philharmonie de Paris organisait un gala, dans un contexte tendu. Des employés en grève depuis octobre 2022 ont tenté de manifester, avec une « casserolade » qui n’aura pas duré plus de vingt minutes, suite à l’intervention des forces de l’ordre.

Après s’être déclaré en grève en octobre 2022 pour contester des conditions de travail qu’il jugeait insatisfaisantes, le dernier contrat de Mathieu n’a pas été renouvelé. « Pour moi, c’est une évidence qu’ils continuent à virer les gens qui ont fait grève. » Mathieu, 21 ans, est venu manifester ce jeudi 1er juin à la Philharmonie de Paris qui organisait un gala événement.

Pour rythmer la soirée, une « casserolade » était prévue par des agents d’accueil en grève qui, depuis plus de huit mois, tentent de faire entendre leur voix contre leurs conditions de travail. Jeudi 1er juin dans la soirée, la manifestation n’a duré qu’une vingtaine de minutes avant d’être rapidement dispersée par une large présence policière.

 

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Des employés écartés

Mathieu a travaillé à la Philharmonie en tant qu’agent d’accueil. Pendant un an, il a enchaîné des contrats mensuels pour y travailler. Pour lui, nombreux sont ses collègues qui subissent une discrimination après avoir exercé leur droit de grève en octobre dernier. « On a été trois à se faire virer en décembre, on ne nous a pas renouvelé nos contrats » constate-t-il.

C’est pour alerter sur cette situation qu’il s’est rendu, ce jeudi 1er juin, devant la Philharmonie, qui fêtait La nuit de l’Ourcq. Au programme : Mika et Benjamin Millepied, pour une soirée dont le prix des places s’élevait jusqu’à 1 700€ avec comme partenaires Total Energie et L’Oréal.

Une main d’œuvre sous-traitée

Pour le recrutement et la gestion de ces agents d’accueil, la Philharmonie fait appel à une entreprise de sous-traitance : City One. Les employés grévistes contestent ce qu’ils estiment être un mauvais traitement : des paniers repas à la valeur insuffisante, des salaires trop bas, des heures supplémentaires oubliées…

Thibaud de Camas, directeur adjoint de l’institution, confiait à Libération cette réalité difficile en novembre 2022 : « On peut être amenés à choisir une entreprise qui a des règles sociales dures. C’est en partie le problème qu’on a avec City One. » Christophe Pons, bottait en touche. Ce délégué syndical CGT de la Philharmonie affirmait :  » Nous avons pris conscience de l’illisibilité des bulletins de salaire. (…) Tout est mélangé, et c’est comme ça qu’ils grattent de l’argent sur le dos de ces jeunes ». Le représentant syndical résumait : « (Ils) sont mal accompagnés, mal managés, ils sont traités comme du bétail ». L’agence City One n’a pas répondu à nos questions.

La présence policière coupe court à la manifestation

Pour ces employés et ex-employés de l’agence, la lutte continue. Ils étaient une vingtaine ce premier soir de juin pour une « casserolade » comme cela se fait de plus en plus. L’ambiance était bon enfant, malgré la présence policière. Les gardiens de l’ordre ont confisqué au moins une casserole.

À 20h pile, la petite troupe s’est animée, avec bien peu d’ustensiles de cuisine. C’était en frappant dans leurs mains qu’ils scandaient « Même si Macron ne veut pas, nous on est là« . Autour, la présence policière s’est durcie, des agents à moto, garées plus loin, sont venus en renfort et leur nombre dépassait largement celui des quelques manifestants. Lourdement équipés, les policiers ont éloigné les manifestants du parvis de la Philharmonie et les ont encerclés pour les forcer à prendre le métro, n’ouvrant aucune autre issue. Au total, la manifestation n’aura pas duré plus d’une vingtaine de minutes.

shad de bary

Saint-Denis : la Pride des banlieues célèbre les fiertés des quartiers populaires

Ce samedi 3 juin aura lieu la troisième édition de la Pride des banlieues à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), une marche militante visant à mettre en avant les revendications des personnes LGBTQIA+ des quartiers populaires.

Samedi 3 juin, le cortège de la Pride des banlieues défilera dès 14h dans les rues de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis). Crédit : La Pride des banlieues/Twitter

« Placer les marges au centre des luttes ». Telle est la volonté du collectif de la Pride des banlieues, créé en 2019 par des membres de l’association Saint-Denis au centre. L’objectif : déconstruire le supposé obscurantisme des quartiers populaires face aux questions LGBTQIA+ et rendre visibles les personnes LGBTQIA+ des quartiers populaires, notamment de Seine-Saint-Denis. Il s’agit de porter les revendications propres à ces territoires afin de « dégager des solutions aux problématiques vécues par les habitants de Seine-Saint Denis de façon autodéterminée », a expliqué Mihena Alsharif, membre du comité d’organisation dans un billet de blog sur Mediapart.

Pour cause, dans les quartiers populaires, l’homophobie et la transphobie sont souvent couplés à d’autres discriminations et les personnes concernées ne se sentent pas toujours représentées dans la traditionnelle Marche des fiertés parisienne. « Lorsqu’on est LGBTQI+ en quartiers populaires, aux LGBTphobies viennent s’ajouter le racisme, la précarité et l’abandon des services publics. Nos revendications prennent donc en compte ces enjeux qui s’intersectionnent », détaille Yanis Khames, l’un des coordinateurs de la Pride des banlieues dans les pages du média Komitid.

Un accès élargi à la PMA, la revendication centrale en 2023

Après une première édition en 2019 et une seconde en 2022, centrée sur la question du logement pour les personnes LGBTQIA+ des quartiers populaires particulièrement touchées par le mal-logement, cette année la revendication mise en avant est celle de la PMA pour tous et toutes. En effet, malgré l’ouverture de la procréation médicalement assistée aux femmes seules et aux couples de femmes en 2021, les hommes trans, qui peuvent pourtant dans certains cas porter un enfant, en sont toujours exclus. Le collectif pointe aussi du doigt les inégalités face au droit à la PMA, notamment pour les personnes non-blanches, qui font face à des délais d’attente plus longs pour accéder à un don de gamètes en raison de l’obligation d’appariement.

Plusieurs personnalités publiques ont d’ores et déjà apporté leur soutien à l’évènement comme l’humoriste Tahnee, l’acteur et réalisateur Océan, ou encore l’actrice Adèle Haenel.

L’année dernière, 10 000 personnes avaient rejoint le cortège dans les rues de Saint-Denis, soit trois fois plus qu’en 2019. Suite à ce succès, le collectif d’organisation de la marche est devenu un mouvement actif tout au long de l’année. Dans cette optique, Yanis Khames, a écrit un livre, intitulé Les marges au centre de la lutte (Double ponctuation, 2023) qui est sorti en mai dernier. Dans celui-ci, il pose les bases théoriques et pratiques du mouvement, afin d’expliciter leur démarche.

Marie SCAGNI

Insertion professionnelle : des personnes en situation de handicap aidées pour obtenir une alternance

« Parlez de votre handicap, mais seulement en termes positifs lors des entretiens d’embauche », conseille François de Malliard, chargé de la Mission handicap chez Cap Emploi. Ce vendredi se tenait au 40 quai de la Rapée à Paris, le forum annuel pour aider les personnes en situation de handicap sur la voie de l’alternance, proposé par les associations, Cap Emploi, Agephip et l’Apec.

 

Le 2 juin 2023, à Paris (12e). À l’APEC, un forum a pris place pour l’insertion en alternance de personnes en situation de handicap. Crédit : Juliette Roussel

 

Au 13e étage d’un immeuble longeant la Seine près de Gare de Lyon à Paris, Samuel, souffrant de problèmes d’asthme très conséquents, participe à un forum d’insertion en alternance pour personnes handicapées. « Ma valeur ajoutée ? C’est d’être RQTH » (reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé, ndlr), répond le jeune homme au regard espiègle, quand on l’interroge sur ses qualités.

Dès 9h, il a participé à quatre ateliers afin de prendre confiance en lui, savoir se présenter, répondre aux questions difficiles, ainsi que comparer des offres d’alternance. « Je veux surtout faire du X design web en tant que chargé de projet ou designer », explique le jeune homme de 24 ans.

Aux côtés de consultants, sur des fauteuils en cuir de couleur, il a notamment appris comment se vendre en entretien d’embauche. Par exemple, une membre de l’association lui a conseillé de mettre en avant le fait qu’il soit déjà en alternance aujourd’hui pour sa troisième année de licence et qu’il sait donc comment agir en entreprise. « Vous avez sûrement dû accomplir des challenges lors de votre année, mettez-les en avant quand on vous pose des questions sur vous », lui recommande Keira Outsmani, du groupe APEC. Samuel arrive ensuite à mettre en avant trois qualités : autonomie, persévérance et sérieux.

Des futurs alternants très diversifiés

« Le forum ça permet surtout de me rassurer. L’année dernière j’avais trouvé mon entreprise surtout grâce au campus, mais aujourd’hui je pense que j’avais besoin de prise en charge pour apprendre à mieux me vendre », avoue Samuel. Il a déambulé avec trois autres personnes en situation de handicap entre les stands de conseil.Tous n’ont ni le même âge ni le même domaine d’études.

Mohamed, par exemple, a 50 ans et est en pleine reconversion professionnelle « Je quitte le domaine de l’assurance pour aller vers celui de l’immobilier », commente-t-il avec le sourire. Lui souffre de maux de dos, et doit donc avoir un fauteuil ergonomique au travail. Il a appris comment le mentionner en entretien d’embauche subtilement avec François de Malliard, représentant de Cap emploi. Ce dernier lui a donné une technique : « Vous devez faire la méthode sandwich ; une bonne nouvelle, une moins bonne, et pour finir quelque chose de positif« . Donc, pour annoncer son mal de dos, Mohamed devra dire : « Je peux travailler sans problème 8h par jour, mais je dois avoir ce modèle de fauteuil là pour m’aider, et Cap Emploi propose de le financer« .

En plus de ces conseils, l’enjeu du jour est double pour les 13 participants du forum. Après s’être amélioré le matin en entretien, en présentation et en rédaction de CV,  l’après-midi c’est face aux entreprises que le vrai travail commence. Elles sont une quinzaine à être partenaires des associations mobilisées et chacune propose une trentaine d’offres. Samuel, lui, en a profité pour s’inscrire à deux entretiens : l’un pour l’entreprise de publicité Publicis en web design et l’autre en chef de projet pour le comité des Jeux olympiques de Paris 2024. Une occasion de mettre à profit les conseils du matin.

Donner « concrètement » des solutions aux recruteurs

Mélissa Devenat, alternante à l’APEC, est là pour conseiller les futurs alternants. Elle a été recrutée suite au forum de l’année dernière et témoigne de son parcours. « L’accès à l’emploi et à l’alternance est encore plus compliqué pour nous, parce qu’un recruteur veut toujours prendre la meilleure personne pour un poste et nos conditions nous limitent parfois« , atteste-t-elle. Pour lutter contre ces difficultés, une seule manière : être concret lorsqu’on parle de son handicap. « Cela ne sert à rien de dire toute sa maladie ou son handicap, il faut juste concrètement expliquer quelles sont les solutions adaptées à nos problèmes« . Cette manière de ne pas laisser les entreprises démunis, d’apporter une solution directe permet, selon cette jeune femme, de montrer sa force et sa capacité d’adaptation.

Melissa Devenat, est actuellement en alternance à l’APEC, suite au forum de l’année précédente. Crédit : Juliette Roussel

Cette journée de forum d’insertion sous forme d’initiation de 8h permettra à certains d’avoir une alternance avec les entreprises présentes, ou au moins un premier contact. C’est aussi l’occasion pour d’autres personnes handicapées de s’inscrire à l’APEC et donc de bénéficier d’un réel suivi personnel plus poussé sur du long terme.

À lire aussi : « L’alternance comme entrée dans le monde du travail pour les salariés handicapés »

Juliette Roussel

Après Tumblr, le retour des « pro-anorexie » sur Tik Tok

Ce vendredi 2 juin se tient la Journée Mondiale des Troubles du Comportement Alimentaire (TCA). Si depuis des années les réseaux sociaux tentent de réguler les contenus pour éviter la propagation d’un discours en faveur de la perte drastique de poids, le phénomène persiste, notamment sur Tik Tok. 

L’application Tik Tok, très appréciée des jeunes, regroupe aussi des contenus dangereux, comme des comptes pro-anorexie / Crédits : Pixabay

En rentrant chez elle après les cours, Nina, 19 ans, se jette sur son téléphone pour parcourir inlassablement les dernières vidéos publiées sur Tik Tok. Elle s’est inscrite en 2020, « pendant le confinement« . L’application composée de vidéos courtes et de musiques utilise des codes proches de ses prédécesseurs, Tumblr et Instagram : une grande importance est donnée à l’esthétique et le contenu est très en lien avec les tendances actuelles. Doté d’un algorithme très sensible, Tik Tok oriente ses propositions en fonction des préférences des utilisateurs.

Dès le confinement, Nina raconte s’être trouvée emportée par un flux de contenus l’incitant à profiter de ce temps libre pour perdre du poids : « Entre les vidéos de plats sains et les programmes sportifs, j’ai commencé à culpabiliser« . Elle commence alors à restreindre son alimentation et à faire énormément d’exercice physique. Après quelques mois, une autre habitude s’installe : « J’ai commencé à me peser une fois par semaine, puis une fois par jour, et ensuite c’est devenu obsessionnel« . La jeune femme raconte qu’elle a mis beaucoup de temps à se défaire de ses troubles alimentaires. Aujourd’hui, elle a pris du recul sur son expérience : « J’ai compris que j’avais déjà été influencée par les réseaux sociaux quand j’avais 13 ans : je me trouvais grosse alors que j’avais une corpulence normale, je ne pensais pas que je retomberais dans ces travers aujourd’hui« .

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L’émergence d’une communauté pro-anorexie sur les réseaux sociaux a commencé sur Tumblr vers 2010.  Sur certains blogs, les citations tourmentées et les rapports quotidiens de perte de poids accompagnent les photographies de silhouettes décharnées. Portant le nom d' »Ana », la maladie est personnifiée. À la fois douloureuse et familière, elle réunit de nombreux adolescents en souffrance. En 2012,Tumblr a dû adopter une nouvelle politique de modération face au fléau en interdisant l’apologie de la maigreur. Les utilisateurs n’ont pas le droit de « poster du contenu qui glorifie l’automutilation, l’anorexie, la boulimie et le suicide« .

 

Tumblr a vu naître les premières publications pro-anorexie sur les réseaux sociaux / Crédits : Tumblr

« Je reposte car Tik Tok a supprimé »

Le mouvement du « body positive », prônant l’acceptation de soi, a occupé une certaine place sur les différents réseaux sociaux, mais il n’a pas remplacé les contenus pro-anorexie. La plateforme a aussi pris soin de supprimer tous ces contenus et d’afficher un message d’alerte : « Si toi ou une personne que tu connais êtes préoccupé(e)s par ton ou vos images corporelles, la nourriture ou l’exercice physique, il est important que tu saches que de l’aide est disponible et que tu n’es pas seul(e)« .

Elle propose ensuite quelques conseils et peut renvoyer à des numéros d’urgence comme Suicide Ecoute. Cependant, les utilisateurs arrivent à contourner l’interdiction et à publier des contenus incitant à la perte de poids. Les hashtags #proama et #size0 remportent un certain succès. Ysabel Gerrard, maîtresse de conférence à l’université de Sheffield, souligne au magazine britannique DAZED : « Il ne faut pas plus de 30 secondes pour trouver un contenu pro-trouble de l’alimentation sur Tik Tok et une fois qu’un utilisateur suit les bonnes personnes, leur page For You sera rapidement inondée de contenus provenant d’utilisateurs similaires« .

@ellie_higgins_ Reposting as tik tok deleted #mentalhealth #ED #depressed #proama ♬ original sound – ✨ Ellie ✨


En 2021 en France, 72% des 18-24 ans pensent que les troubles alimentaires les touchent particulièrement et l’anorexie mentale observe un pic d’incidence entre 13-14 ans et 16-17 ans selon un communiqué de la Fondation pour la Recherche Médicale. Aussi, selon les statistiques fournies par Tik Tok, 72% des utilisateurs français de l’application ont moins de 24 ans en 2022. En somme, le public de Tik Tok est majoritairement à risque face aux troubles du comportement alimentaire et bien que la plateforme tente de réguler ses contenus, le nombre de vidéo et l’ingéniosité des utilisateurs permettent toujours de partager des idées dangereuses.

Léa warrin

 

@unculturedswinewho im 5’2 #fyp ♬ So You Think I’m Skinny? – Derk The Dog