Éoliennes : les raisons des crispations françaises

Emmanuel Macron inaugure ce jeudi 22 septembre, le premier parc éolien français en mer. Avec 80 éoliennes au large de Saint-Nazaire, le parc est le premier d’une longue série avec en vue, l’horizon zéro carbone de 2050. Malgré la nécessité de sobriété énergétique, le gouvernement se heurte à une opinion publique de plus en plus défavorable à l’énergie éolienne. 

« On doit pouvoir faire deux fois plus vite que ce que l’on vient de faire « , a annoncé Emmanuel Macron, ce matin du jeudi 22 septembre. Le chef de l’État a visité le premier champ éolien offshore de France au large de Saint-Nazaire. Depuis le début des premiers travaux en 2012 jusqu’à son inauguration, le parc a cristallisé les débats autour de cette énergie.

Rapidement, des opposants saisissent la Cour administrative d’appel de Nantes en 2017. Les deux associations, Association pour la protection du site et de l’environnement de Sainte-Marguerite et le Groupement des résidents secondaires de La Baule, déboutés, iront jusqu’au Conseil d’État. Après 21 mois d’attente, le Conseil d’État donne finalement son feu vert le 6 juin 2019 pour la construction.

L’éolien, une énergie jugée « inefficace »

Qu’est ce qui est reproché à l’énergie éolienne ? « C sont des moyens de production inefficaces. Cette énergie renouvelable est non-pilotable. C’est à dire que la source d’énergie, le vent, est intermittente. Il faut remplacer les énergies intermittentes par des moyens de production efficace », assure Alain Doré porte-parole du collectif Défense de la Mer, qui regroupe les deux associations opposantes au projet.

Le vent instable, pose donc des problèmes d’approvisionnement s’il est la seule source d’énergie. Pour Alain Doré, « la production électrique est déjà à 93% décarbonée, grâce au nucléaire et à l’hydraulique ». Nul besoin d’investir dans des énergies renouvelables intermittentes qui risqueraient de poser des problèmes de stabilité du réseau électrique.

Une énergie jugée inesthétique, bruyante, dangereuse pour la santé, posant des problèmes d’ondes électromagnétiques… Le portrait dressé des éoliennes par leur détracteurs est amer. Pourtant, le seul véritable danger actuellement prouvé concerne les oiseaux.

Un risque accrue chez les oiseaux

« Pour les éoliennes terrestres, il y a un impact sur les oiseaux de bocages et les chauves-souris. Les premiers ne parviennent pas à éviter les palmes et les secondes implosent à cause de la pression même sans les toucher. Pour les éoliennes offshore, le risque est centré sur les oiseaux migrateurs », explique Guy Bouris, président de la Ligue de Protection des Oiseaux de Loire-Atlantique. Il n’est pas contre les éoliennes mais plaide pour « des études d’impact sérieuses » avant la création d’un parc et de pouvoir être en discussion avec les instances locales pour interrompre le fonctionnement lorsque c’est nécessaire. « Ce qu’on a du mal à évaluer, c’est le risque cumulatif : un parc éolien au large, ça va, mais dix, ce sera compliqué pour les oiseaux à éviter ».

Aujourd’hui, près de 70% des projets éoliens sont poursuivis en justice notamment par des associations. En France, près de 8000 éoliennes sont répartis sur 1942 parcs.

« pas cher, réversible et déployable rapidement »

En 2021, les énergies renouvelables ont assuré 24% de la production électrique,(hydraulique, éolien, solaire, bioénergies), le nucléaire 69% et les combustibles fossiles 7%. Selon Habib Leseney, expert de l’éolien à Eoltech, une entreprise de simulation d’éolien, l’énergie éolienne reste une des meilleures solutions pour l’avenir. « Pas cher, réversible, et déployable rapidement », il l’oppose à l’énergie nucléaire, principale source de l’énergie française. « L’EPR de Flamanville n’est toujours pas en service et a couté très cher depuis des années ». Quant à l’absence de possibilité de stockage de l’énergie par les éoliennes, « en réalité, toutes les énergies ne peuvent pas être stockées, mais quand il n’y a pas de vent, les panneaux photovoltaïques prennent le relai, c’est l’effet de foisonnement », balaie Habib Leseney. Les croyances de l’héritage pro-nucléaire sont tenaces, « on est le pays qui a un problème avec l’éolien », ajoute l’employé.

Pourtant, près de 3/4 des Français auraient une bonne image de l’énergie éolienne (France énergie éolienne, novembre 2020). La multiplication des recours en justice sont réalisés par des associations locales et des riverains. Les Français ne semblent pas avoir de problème avec les éoliennes, tant que ce n’est pas près d’eux. Un syndrome « not in my garden » jamais très loin.

 

Johanne Mâlin

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