Taxe d’habitation : le sujet de la discorde

Emmanuel Macron l’avait promis. 80% des Français, soit 22 millions de personnes, devaient bénéficier d’un abattement de 30% en 2018. Cependant, les habitants de plus de 6 000 communes ont vu leur taxe d’habitation stagner ou augmenter.

Stupeur vendredi matin, lorsque Bercy a dévoilé la liste des communes qui ont augmenté leur taxe d’habitation. S’en est suivie une vague de critiques sur Twitter avec le hashtag #BalanceTonMaire, créé par les militants d’En Marche et repris par des habitants concernés par l’augmentation. Pas de doute pour le ministère de l’Economie, certaines communes ont profité de la baisse de 30% de la taxe d’habitation pour faire des économies supplémentaires :« La baisse est bien appliquée comme prévu, mais il y a des taux qui ne dépendent pas de l’État et certaines municipalités en ont profité pour les augmenter ». Les maires justifient cette augmentation par la baisses des dotations de l’État aux collectivités territoriales, mais Bercy réfute :« Il n’y a jamais eu de baisse des dotations ».

Pourquoi les municipalités peuvent-elles augmenter la taxe d’habitation ?

Dans le cadre de la décentralisation, les municipalités disposent de prérogatives fiscales qui leur sont propres. Libre aux communes d’augmenter leur taux communal comme bon leur semble. Certaines communes qui sont en grande difficulté ont augmenté leurs taux à hauteur de 30% comme Grand-Charmont (Doubs) et à plus de 20% à Puget-sur-Agens (Var) comme le montre le fichier de l’ensemble des taux votés en 2018 par les communes mis en ligne par Bercy.

Extrait de l'ensemble des taux votés en 2018 par les communes
Extrait de l’ensemble des taux votés en 2018 par les communes

Résultat final, 55 villes de plus de 10 000 habitants ont augmenté la taxe d’habitation. Le premier prix est décerné à Maizière-Les Metz avec 18.02% d’augmentation.

Qui bénéficie réellement d’une baisse ?

Si la polémique a très vite enflé sur les réseaux sociaux, 18 millions de foyers profitent désormais d’une baisse de leur taxe d’habitation. Sans compter les 6 millions de personnes qui bénéficiaient déjà d’une exonération. Cependant, les célibataires dont le revenu de référence est supérieur à 28 000 euros, un couple sans enfant ou une personne seule avec un enfant ayant un revenu supérieur à 45 000 euros ne pourront pas obtenir de baisse.

La pression monte entre Bercy et les municipalités

Depuis la proposition de la suppression de la taxe d’habitation sur trois ans soit 30% tous les ans, les maires de France manifestent leur mécontentement. Interviewé par le Figaro le 11 octobre, le vice-président de l’Association des maires de France, André Laignel (PS), accuse l’Etat de vouloir exercer une « tutelle morale » sur les élus locaux.

Face à la vive polémique qui a agité Twitter, l’Association des maires de France a publié un communiqué sur le réseau social demandant des excuses suite à l’utilisation du hashtag #BalanceTonMaire, se justifiant encore une fois des raisons de l’augmentation : « 85 % des communes n’ont pas augmenté leurs taux de taxe d’habitation. Les 15 % qui l’ont fait n’ont pas été motivées par des considérations de politique nationale, mais par la recherche de financements nécessaires à l’accomplissement de leurs missions dans un contexte de baisse de leurs moyens. Elles l’ont fait dans le cadre des responsabilités qui leur sont confiées par la loi et qui participent de la libre administration des collectivités locales garantie par la Constitution. »

Pour François Cornut-Gentille, député LR de la Haute-Marne et ancien maire de Saint-Dizier, il s’agit avant tout d’une tactique politicienne :« Tout le monde joue sur les mots, lorsque l’État dit qu’il n’y a pas eu de baisse de dotations, sur le papier c’est vrai. Mais, il y a eu une redistribution qui a largement pénalisé deux tiers des communes. » Bercy accuse ainsi les municipalités de ne pas participer à cette mesure sociale, une vérité bien plus complexe pour François Cornut-Gentille :« Les communicants de Macron étaient à la recherche d’une proposition populaire, le plus rapidement possible. Et cette mesure n’a pas été travaillée, ni fiscalement, ni politiquement avec les municipalités. » L’État devra alors trouver 10 milliards d’euros pour financer la suppression de la taxe d’habitation et espérer que les communes participent à l’effort.

 

Capucine Japhet

 

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