Délai supplémentaire pour le président sud-africain, embourbé dans des affaires de corruption

Le parquet sud africain donne un répit supplémentaire au président de l’Afrique du sud, Jacob Zuma, empétré depuis plusieurs années dans de nombreux scandales de corruption. Une décision qui pourrait faire jurisprudence.

Plus de 783 chefs d’inculpation de corruption. Lundi, le parquet sud-africain s’est déclaré défavorable au rétablissement de 783 chefs d’inculpation de corruption contre le président Jacob Zuma, une décision « destinée à gagner du temps », selon l’opposition, pour protéger un président embourbé dans d’autres scandales.

La décision de la Haute Cour est susceptible de faire jurisprudence et « remet en cause les pouvoirs discrétionnaires du procureur », a déclaré Shaun Abrahams pour justifier sa décision. »C’est tellement important que j’estime nécessaire une décision de la Cour suprême d’appel » sur le sujet, a-t-il ajouté lors d’une conférence de presse à Pretoria. « S’il y a des suggestions que j’ai pu succomber à des pressions pour prendre ma décision, je peux assurer le public aujourd’hui que ces allégations sont absolument ridicules et complètement infondées », a-t-il affirmé, anticipant des critiques qui n’ont pas tardé.

L’appel du parquet est une « tactique évidente pour gagner du temps et protéger Jacob Zuma », a réagi de son côté le principal parti d’opposition, l’Alliance démocratique (DA), qui avait saisi la Haute Cour. Les raisons avancées par le procureur général pour faire appel relèvent de la « farce », a affirmé la DA, accusant Shaun Abrahams d’être avant tout « préoccupé par protéger à tout prix le président ». Jacob Zuma « sera jugé un jour et la justice l’emportera, quels que soient les tours de passe-passe » de l’État, a estimé la DA.

« Le président est tranquille »

Les 783 chefs d’inculpation de corruption en question sont liés à une énorme commande d’armement public de 4,8 milliards de dollars (4,3 milliards d’euros) conclue à la fin des années 1990 par le gouvernement sud-africain avec plusieurs entreprises, dont le Français Thomson-CSF (devenu Thales), le Suédois Saab et le Britannique BAE Systems.

La décision du parquet intervient alors que le président Zuma, dont le mandat expire en 2019, est embourbé dans plusieurs scandales qui le fragilisent. « La seule personne à qui profite cette décision est le président », a relevé Gareth Newham, analyste à l’Institut des études sécuritaires (ISS) à Pretoria. « Il est très improbable que le ministère public l’emporte devant la Cour suprême d’appel parce que la décision de la Haute Cour avait été prise à l’unanimité », a-t-il estimé auprès de l’AFP. « Mais cela prendra environ une année avant que l’affaire soit entendue », donc pour l’instant « le président est tranquille », a-t-il conclu.

Cette décision arrive à point nommé pour le chef de l’État et l’ANC, à trois mois d’élections municipales cruciales où l’opposition espère gagner des points dans un climat politique et économique plombé. L’opposition, qui demande sa démission, l’accuse également de miner l’économie sud-africaine, qui a été récemment rétrogradée à la troisième place en Afrique par le cabinet KPMG. Depuis plusieurs mois, des voix au sein de l’ANC – dont des vétérans et amis de l’ancien président Nelson Mandela – s’élèvent pour demander le départ de Jacob Zuma, mais le parti lui reste jusqu’à présent fidèle.

 

Constance Léon

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *