Patient ou client ? La controverse de la vente en ligne de médicaments

Gain de temps, absence de déplacement, prix plus bas, meilleure comparaison, ce sont les arguments avancés par les défenseurs de la vente de médicaments en ligne, permise et encadrée par la loi depuis juillet 2013.

Pourtant, si le prix est l’argument principal des pionniers du e-médicament, 80% des pharmaciens d’officine se disent défavorables à la vente de médicament sur Internet, selon une enquête réalisée en 2014 par Le Quotidien du pharmacien.

L’absence de consensus du milieu professionnel réside au cœur même d’une définition, celle de l’acheteur de médicaments. S’agit-il d’un patient ou d’un client, ou des deux en même temps ? Avec la révolution numérique, le sujet est placé au cœur d’un réseau de soin et de communication, il est désormais mieux informé et plus autonome. Cela lui confère ainsi un pouvoir comparable à celui qu’il occupe en tant que client dans les relations commerciales de la vie quotidienne. Alors que le terme patient fait pour certains référence à une relation de « paternalisme médical » où le sujet est passif, celui de « client » est souvent évité à cause de sa connotation marketing. Les spécialistes de l’e-santé coupent ici la poire en deux et parlent alors d’usager.

Mais le médicament n’est pas un produit de consommation comme les autres, du moins pas en France, où cette pratique reste marginale avec seulement 235 pharmacies qui pratiquent aujourd’hui la vente en ligne de médicaments, sur les quelques 23 000 que compte l’hexagone (voir la liste).

La  nouvelle législation française est plus stricte que celles existantes en l’Angleterre, de la Hollande ou des Etats-Unis par exemple. Elle autorise seulement la vente de médicaments sans prescription, sur des sites rattachés obligatoirement avec une pharmacie physique, et ce pour éviter la contrefaçon.


« Dans les grandes villes, il y a une pharmacie à chaque coin de rue, et puis quand on est malade on a besoin de son médicament tout de suite, on ne veut pas attendre quarante-huit heures, temps de la livraison, avant d’être soigné. Je pense que l’on n’est pas allé encore assez loin dans le domaine », explique Lionel Reichardt, consultant en e-santé et créateur du blog pharmageek.com qui enregistre plus de 70 000 vues par mois.

Outre les coûts de livraison et la difficulté de choix, la vente de médicaments en ligne conduit à une perte de service, même si l’internaute peut contacter un pharmacien via le site. Non seulement le pharmacien assure une mission d’accompagnement, il assure aussi une mission de vigilance liée aux risques des médicaments. Grâce à la carte Vitale, le professionnel a accès au dossier médical du patient et peut par exemple connaître les éventuelles interactions médicamenteuses. Il peut aussi prévenir d’un risque de surconsommation qui augmente avec le Web.  En effet, la banalisation de la pharmacie comme commerce, les opérations de remises et de prix cassés se multiplient et l’internaute est incité à faire des stocks, en prévision des jours prochains.

Leticia Farine

 

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