Hervé Mathoux : « Le paysage du journalisme sportif évolue dans le bon sens »

Dans le cadre de notre enquête sur la place des femmes dans le journalisme sportif, Hervé Mathoux, journaliste pour Canal+ et présentateur de l’émission “Canal Football Club” depuis 2008, dresse un bilan plutôt positif et constate une évolution du statut des femmes à l’écran ces dernières années.

Hervé Mathoux et son équipe Frédéric Antonetti, Marie Portolano, Pierre Ménès, Olivier Dacourt, Dominique Armand
Hervé Mathoux et son équipe dans l’émission « Canal Football Club » / © Thierry Gromik/Canal+

« Quand je suis arrivé chez TF1, en 1990, il n’y avait que deux femmes journalistes sportives : Marianne Mako et Clarence Rodriguez. Ce sont des pionnières. La vraie révolution a eu lieu il y a sept ou huit ans : de nombreuses femmes ont pris l’antenne, et pas seulement pour faire l’agrément. C’est le cas de Nathalie Iannetta, Astrid Bard et Isabelle Moreau. Cependant, il ne faut pas nier la réalité : les émissions grand public se sentent un peu obligées de mettre des femmes à l’écran si elles veulent que tout le monde s’y retrouve. D’un autre côté, de plus en plus de femmes vont sur le terrain, comme Margot Dumont ou Christelle Schneider. Je pense que le paysage du journalisme sportif a vraiment évolué dans le bon sens. Le vrai sujet, maintenant, c’est l’utilisation du physique des femmes dans les émissions de télévision. Leur âge aussi : aujourd’hui, on se demande si une femme de 55 ans peut continuer à faire de la télé. Cela ne fait que traduire un sujet plus large dans la société. »

Hervé Mathoux / © Thierry Gromik/Canal+
Hervé Mathoux / © Thierry Gromik/Canal+

Propos recueillis par Justine HAGARD & Émilien DIAZ

Journalisme sportif : quelle place pour les femmes ?


Souvent remise en cause, la légitimité des femmes dans le journalisme sportif n’est toujours pas parfaitement acquise. Les chiffres tendent à montrer une évolution positive. Mais au sein des rédactions sportives, les femmes demeurent assignées à des fonctions où l’image prédomine. Quelle est aujourd’hui leur véritable place au sein de ce paysage essentiellement masculin ? Enquête.

Agathe Roussel (Canal+) durant une interview en 2012
Agathe Roussel et Gael Monfils lors d’une interview en 2012 / © Canal+

À l’approche de la Coupe du Monde de football en Russie, l’ensemble des diffuseurs ont présenté leur dispositif pour couvrir l’événement. Comme de coutume, les émissions quotidiennes, magazines et matchs en direct feront la part belle aux journalistes sportifs bien connus du grand public. Grégoire Margotton, Christian Jeanpierre ou encore Denis Brogniart officieront sur les antennes de TF1, quand Christophe Josse, Alexandre Ruiz et Benjamin Da Silva leur feront concurrence sur beIN SPORT.

Mais quid des femmes dans cet environnement ? Elles seront minoritaires, puisque seules Nathalie Iannetta et Charlotte Namura accompagneront les 10 journalistes et chroniqueurs masculins choisis par TF1 pour la Coupe du Monde. Même son de cloche du côté de beIN SPORT, où seulement deux femmes, Claire Arnoux et Vanessa Le Moigne, figurent parmi la liste des 35 noms de journalistes, consultants et animateurs dévoilée par la chaîne qatarie lors de la présentation de son dispositif. Elles seront peut-être un peu plus, si l’on compte les journalistes-reporters envoyées directement sur le terrain par beIN Sport, comme Margot Dumont et Anne-Laure Bonnet. RMC, en revanche, a choisi de retenir uniquement des hommes. 

Une question d’image ?

Cette situation, loin d’être paritaire, contraste avec la tendance à la féminisation du journalisme sportif apparue ces dernières années. « Les journalistes sportives s’imposent à la télévision »écrivait Paris Match à ce sujet en mai 2016, quelques semaines avant l’Euro de football. Si les Estelle Denis, Carine Galli et autres Alessandra Bianchi occupent effectivement une place de plus en plus importante à la télévision, les coulisses des rédactions sportives souffrent encore de disparités criantes. Certes, la proportion de femmes au sein des rédactions sportives est passée de 5 à 10% entre 2000 et 2016, mais l’inégalité demeure.

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La légitimité des femmes dans les médias sportifs est donc  loin d’être évidente, comme le reconnaît Hélène Legrais, ancienne journaliste sportive pour France Inter et véritable pionnière de la profession en France : « Je suis désolée de constater qu’aujourd’hui, les femmes journalistes sont cantonnées à certains rôles. Je pense que la société a reculé. Je croyais  que l’élan était lancé. Mais en fait, il y a encore beaucoup de travail à faire. J’imaginais qu’en 2018, il y aurait autant de commentateurs que de commentatrices, mais il n’y a qu’à regarder la Coupe du Monde : il n’y aura que des tandems masculins ».

Plus que la place des femmes dans le journalisme sportif, c’est surtout l’utilisation de leur image qui suscite des interrogations. « Quand je vois les femmes aujourd’hui, je me dis qu’on en faisait davantage à mon époque, dans les années 80. Certes, il y a plus de femmes dans les émissions de sport en 2018, mais on les voit essentiellement en plateau ou alors sur le bord du terrain pour faire les interviews à la mi-temps et à la fin des matchs. En revanche, je ne vois pas de journalistes femmes qui commentent en direct comme nous pouvions le faire à l’époque… » , regrette Hélène Legrais. Elle compare la nouvelle génération de journalistes sportives à celle qu’elle a elle-même côtoyée au début des années 1980, période charnière dans la féminisation de la profession en France. Propulsées sur le devant de la scène par l’ancien directeur des sports de France Inter, Pierre Loctin, Marianne Mako, Nathalie Debrock et Hélène Legrais ont été les premières à couvrir le sport masculin au même titre que les journalistes hommes. Une véritable révolution, à l’époque, pour celle qui s’est ensuite exilée du côté d’Europe 1, avant de terminer sa carrière de journaliste sportive lors des Jeux Olympiques de Barcelone, en 1992 : « Nous n’étions que deux femmes en France à couvrir le foot pour les multiplex : Marianne Mako et moi. C’était nouveau et tout à fait exceptionnel. Sur le Tour de France par exemple, nous n’étions que 6 femmes toutes nationalités confondues », se souvient-elle.

Ostrowski
Hélène Legrais et le basketteur Stéphane Ostrowski / Photo DR

Au début des années 2000, les producteurs d’émissions sportives, par soucis d’image, ont fait le choix de propulser davantage de femmes à l’antenne. Celles-ci se trouvant souvent cantonnées à la présentation et aux interviews. Agathe Roussel, ancienne journaliste spécialisée dans les courses hippiques et le tennis, est aujourd’hui directrice adjointe au service des sports de Canal+. Elle se souvient de cette période : « C’était une volonté, amener une touche de féminité à l’écran. Cela peut se comprendre car nous, les femmes, nous n’avons pas la même approche et le même contact avec les gens, ce qui peut faciliter les interviews ».

Pour autant, elle affirme que cela a permis aux femmes de faire leur entrée dans ce milieu : « Cela fait du bien d’avoir des femmes dans une équipe. Certes, c’est un peu caricatural. Avoir les filles aux interviews et les hommes aux commentaires… On tombe un peu dans les clichés. Mais cela nous a permis de faire nos preuves ». Quant à la quasi inexistence de commentatrices, Agathe Roussel admet que la voix des femmes peut poser problème : « Certaines filles ont une super voix, comme Hélène Cougoule qui commente la voile, par exemple. Dans une ambiance folle, les femmes ont tendance à pousser leur voix, à monter dans les aigus. Et ce n’est pas toujours agréable à l’antenne. Mais certains hommes rencontrent le même problème, c’est juste que les femmes l’ont plus souvent ».

Les femmes journalistes sportives semblent donc se heurter à la barrière du commentaire. Toutefois, un autre élément pourrait être à l’origine des disparités hommes-femmes : l’âge. En effet, les premières journalistes sportives à avoir occupé des postes clés à la télévision et dirigé des émissions de sport arrivent à un tournant de leur carrière, où se pose la question de leur pérennité à l’antenne. Estelle Denis (41 ans), Astrid Bard (40 ans), Nathalie Iannetta (46 ans) ou encore Isabelle Moreau (41 ans) sont les figures de proue d’une génération qui a donné un nouveau souffle au sport sur nos écrans.

Comme l’explique Agathe Roussel, leur âge pourrait « poser problème » dans les années à venir : « Les journalistes femmes commencent à arriver dans la zone d’âge dite “à risque, c’est-à-dire la quarantaine. La question de savoir si elles doivent rester à l’antenne ou non va donc se poser, et je suis curieuse de voir comment cela va évoluer. Si cela n’appartenait qu’à moi, évidemment ces journalistes resteraient à l’antenne, car elles sont toutes compétentes. Je pense qu’on pourra dire qu’elles auront vraiment réussi quand on les laissera vieillir à l’antenne. C’est notre prochain défi, en France », admet la directrice adjointe des sports de Canal+. Selon elle, la culture française en matière de médiatisation du sport se situe aujourd’hui à mi-chemin entre le système anglo-saxon et le système italien. Dans le premier cas, les femmes sont davantage mises en avant pour leurs compétences. Dans le second, pour leur plastique.

Faire face aux préjugés

C’est d’ailleurs l’un des principaux problèmes. Souvent jugées sur leur physique, les journalistes sportives doivent sans cesse faire leurs preuves pour gagner en crédibilité face à la multitude de journalistes hommes qui arpentent les stades et les zones mixtes chaque week-end : « Je me souviens d’une fois où il m’est arrivé d’écrire, après un match, que la rencontre n’était plus vraiment du foot mais plutôt de la boxe, car il y avait eu énormément de cartons rouges », raconte Hélène Legrais, évoquant son expérience au journal L’Indépendant à Perpignan. « L’entraîneur de l’équipe en question était furieux, il m’avait insulté et m’avait dit : “vous n’y connaissez rien, vous êtes une fille”. Sauf qu’il ne savait pas que j’avais fait 5 ans de football. Alors je lui ai demandé le ballon et je me suis mise à jongler. Il n’a pas bronché, et le président du club est même venu me présenter ses excuses ».

Cette anecdote révèle un mal plus profond : ces clichés misogynes qui ont freiné la progression des femmes dans le domaine du journalisme sportif. Bien que souvent félicitée et reconnue pour son travail en radio, Hélène Legrais a eu l’occasion de le constater au cours de ses 10 ans de carrière : « J’ai travaillé sur le Tour de France avec un collègue d’Europe 1 qui me traitait de groupie parce que j’avais un rapport différent avec les cyclistes », explique la catalane d’origine.

L’ancienne journaliste raconte également qu’il était peu fréquent de responsabiliser les femmes sur des événements importants, comme si leurs compétences étaient forcéments inférieures à celles des hommes : « Je me souviens d’une fois où je couvrais la Coupe d’Europe de football. J’étais allée à divers endroits pour couvrir les matchs et la France s’était qualifiée pour les quarts de finale. À ce moment là, Eugène Saccomano m’avait dit : “Là, c’est les quarts de finale, c’est sérieux, c’est nous qui faisons”. Il a fallu se battre contre cela ».

Bien que moins présents aujourd’hui, ces préjugés demeurent difficiles à supporter au quotidien. Pour autant, ils n’entravent pas la motivation de jeunes femmes qui souhaitent se diriger vers le journalisme sportif, à l’image de  Chloé Ronchin, étudiante en master à l’Institut Français de Presse et apprentie au sein de la chaîne CNEWS : « J’ai bien senti que lorsqu’on est une femme dans une rédaction d’hommes, il faut prendre sur soi. Cela ne m’a pas découragé : j’ai décidé de passer au-dessus de ces préjugés et de m’en servir pour les déconstruire. Je me suis dit que si l’on doutait de mes compétences, j’allais leur prouver que je m’y connaissais ».

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Les préjugés continuent effectivement de toucher les journalistes sportives. Agathe Roussel explique pourquoi, selon elle, les critères physiques peuvent cantonner les femmes à certains rôles : « Honnêtement, je ne me souviens pas avoir vécu des actes misogynes quand j’étais journaliste. L’avantage que j’ai eu, c’est que je n’étais pas une bimbo. Je n’étais pas assez jolie pour que l’on doute de ma compétence. Et à l’époque, il ne valait mieux pas être trop jolie lorsqu’on on était une femme à l’antenne », reconnaît-elle. Par ailleurs, son quotidien de directrice adjointe des sports aux côtés de Laurent Jaoui lui montre combien les préjugés sont ancrés au plus profond des mentalités : « C’est amusant de voir vers qui les journalistes se tournent quand ils rentrent dans notre bureau, en fonction des sujets qui les amènent. Quand les journalistes hommes ont une demande importante, ils viennent parler à Laurent. La génération des quarantenaires préfère s’adresser à lui, sauf quand ils ont des problèmes de vêtements ou de maquilleuse. Ce qui n’est pas le cas des trentenaires qui viennent plus facilement vers moi ».

Vers une évolution positive ?

En effet, la nouvelle génération de journalistes semble faire bouger les lignes. Agathe Roussel se réjouit de travailler avec des trentenaires à Canal+. Elle remarque une réelle évolution des mentalités : « Je suis très confiante car je côtoie tous les jours des jeunes journalistes  qui n’ont aucun préjugés envers les femmes ». De même, elle constate un changement dans le partage des rôles des journalistes : autrefois cantonnées à un rôle secondaire, les femmes s’affirment de plus en plus à l’antenne. « Pendant les Jeux Olympiques de 2016, nous avions mis en place un système avec des couples de présentateurs mixtes. Ce qui m’a plu, c’est que l’homme n’était pas toujours le leader. C’était par exemple le cas du duo Isabelle Ithurburu/Arnaud Bonin. Isabelle menait la présentation », se souvient-elle, « Même chose avec Astrid Bard. Si on la met en plateau, c’est elle la patronne. Les rôles commencent à s’inverser un peu et c’est extrêmement appréciable ».

Comme le témoigne la présence régulière de journalistes sportives expertes dans des émissions de débat, les femmes ont acquis une vraie légitimité aux yeux du public et des spécialistes masculins. Pour Chloé Ronchin, leur simple présence est signe qu’un changement est en cours, même si leurs rôles sont parfois réducteurs : « Au début, je me suis dit qu’on les mettait là pour faire le pot de fleur et dire “vous voyez, il y a des femmes”. Mais en fin de compte, elles jouent quand même un rôle et elles aident vraiment à changer les représentations qu’on a sur les femmes et le sport », souligne-t-elle.

Le présentateurs sportif Hervé Mathoux va plus loin dans cette affirmation. Pour lui, la présence des femmes dans l’espace médiatique sportif s’est banalisée. Autrefois considérées comme des « curiosités », comme le rapporte Hélène Legrais, les femmes font désormais partie intégrante du paysage journalistique du sport, à l’antenne comme sur le terrain : « Les sportifs ont l’habitude de croiser des femmes dans les zones mixtes. C’est devenu normal. Ce n’est plus exceptionnel ».

Hélène Legrais aux commentaires d'un match de basket
Hélène Legrais aux commentaires d’un match de basket / Photo DR

Dans un contexte marqué par l’affaire Weinstein, certaines journalistes sportives issues de l’ancienne génération se remémorent des souvenirs qui auraient probablement eu d’autres conséquences aujourd’hui. Le sport est depuis longtemps un milieu plutôt hostile envers les femmes. Les hommes y règnent en maîtres. Certains abusent de leur pouvoir et cherchent à montrer leur prédominance, ce qui a pu donner lieu à des situations extrêmement inconfortables et difficiles à vivre pour les femmes. « Au début de ma carrière, les sportifs ont essayé de me déstabiliser car ils voulaient savoir si j’étais vraiment là pour faire mon travail. Une fois, dans les vestiaires, un joueur est sorti de la douche et a enlevé sa serviette devant moi avant que je fasse l’interview », raconte Hélène Legrais. « Si tout cela s’était passé aujourd’hui, au vu du climat actuel, il y aurait eu 2 ou 3 fois où j’aurais pu aller voir mon supérieur pour dénoncer des faits de harcèlement sexuel. À l’époque, je n’avais pas conscience que ce type de comportement était généralisé. Est-ce que j’ai eu raison d’agir comme je l’ai fait plutôt que de dénoncer ? C’est la question que je me pose aujourd’hui.»

À lire également : notre interview d’Aurélie Bresson, fondatrice du magazine Les Sportives.

Emilien DIAZ & Justine HAGARD

Les violences sexuelles et sexistes en débat à l’Assemblée le 15 mai prochain

Marlène Schiappa
La secrétaire d’État à l’Égalité femmes-hommes Marlène Schiappa, portera le texte le 15 mai. (Crédits : Capture d’écran/ Youtube)

 

L’Assemblée nationale débattra le 15 mai prochain du projet de loi contre les violences sexistes et sexuelles, qui doit instaurer la verbalisation du harcèlement de rue et renforcer l’interdit de relations sexuelles avec un mineur de moins de 15 ans. Le projet de loi, qui a été annoncé début octobre et a pris une résonance particulière après l’affaire Weinstein, doit être « voté par le Parlement avant l’été », a déclaré le 21 mars Marlène Schiappa, secrétaire d’Etat à l’Egalité femmes-hommes, qui porte le texte avec sa collègue de la Justice, Nicole Belloubet.

Allongement à 30 ans des délais de prescription pour les crimes sexuels sur mineurs, création d’un outrage sexiste, renforcement de la pénalisation des actes sexuels commis sur les mineurs ou du cyberharcèlement: ses dispositions doivent permettre de « renforcer l’arsenal juridique » pour « assurer à chacun le respect de sa dignité et la protection de son intégrité physique et psychique », a précisé la secrétaire d’État après la présentation en Conseil des ministres.

Le texte s’attire des critiques, notamment des magistrats, qui dénoncent entre autres « de nouvelles lois inapplicables et incohérentes, susceptibles de susciter la déception de nos concitoyens » (USM, majoritaire).

 

Théo Meunier avec AFP

 

« Dear cat callers », le compte instagram qui dénonce le harcèlement de rue

Pour montrer l’ampleur du harcèlement de rue, une jeune habitante d’Amsterdam a créé un compte Instagram sur lequel elle poste des selfies pris avec tous ceux qui la sifflent et l’interpellent dans l’espace public.

« Puisque beaucoup de personnes ne savent toujours pas avec quelle fréquence et dans quel contexte le harcèlement arrive, je montrerai mes harceleurs pendant un mois entier », explique Noa Jansma dans la présentation de son projet #dearcatcallers (chers harceleurs de rue). En un mois, elle a pris 24 selfies avec des hommes qui l’ont interpellée alors qu’elle se trouvait dans l’espace public. Son objectif : réagir face à cette pratique masculine souvent paralysante pour les victimes. « Les femmes ne savent toujours pas répondre à un commentaire sexiste. Poursuivre sa route semble être la seule solution, mais cela n’a aucune conséquence pour les harceleurs. Je voulais faire quelque chose qui me donne du pouvoir sur eux », explique cette étudiante de 20 ans.

Sur les photos, on voit Noa Jansma, l’air écoeurée et ses harceleurs, eux, souriants. « Pssst, hey, tu me donnes ton numéro ? », « Tu veux m’embrasser ? », dans la description de ses selfies elle cite ces hommes qui l’importunent. « Ils ne sont pas du tout méfiants parce qu’ils trouvent ce qu’ils font tout à fait normal », analyse-t-elle dans une interview donnée au média hollandais Het Parool. Tous les harceleurs n’apparaissent pas sur les photos. Effrayée par certains, Noa Jansma n’a pas osé les photographier.

#dearcatcallers

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Le projet de Noa Jansma s’est terminé après un mois, fin septembre. Elle encourage pourtant les femmes à reprendre son hashtag et à suivre son initiative pour montrer l’étendue du problème qui les concerne quasiment toutes.

En France, le harcèlement de rue est défini comme «des manifestations du sexisme qui affectent le droit à la sécurité et limitent l’occupation de l’espace public par les femmes et leurs déplacements en son sein». Marlène Schiappa, secrétaire d’Etat chargée de l’Egalité entre les femmes et les hommes, souhaite d’ailleurs la création d’une loi pour pénaliser ces comportements.

Malgo Nieziolek