Depuis la COP 24 les équipes de Franceinfo ont lancé le #Alertepollution. Derrière cette initiative qui allie signalements citoyens et enquêtes journalistiques on retrouve Julie Rasplus Directrice des informations et Mathieu Dehlinger co-coordinateur de l’opération. “Les signalements vont des décharges sauvages jusqu’aux usines douteuses, il y a de tout, aussi bien du très local que des entreprises beaucoup plus grosses.” décrit Julie Rasplus. Aujourd’hui le # réunit plus de 3000 signalements que les journalistes doivent encore analyser et traiter. Les signalements citoyens mis en commun avec la pression médiatique ont déjà permis de faire évoluer les situations, jusqu’à parfois même les résoudre. Selon Mathieu Dehlinger “Les citoyens cherchent à communiquer mais aussi et surtout à obtenir des réponses. Avec ces signalement ont met en face de leur responsabilité les régions, l’État, les industriels.”
À 18 ans, Augustin Épaud, étudiant en première année d’histoire à la faculté de Lille, s’apprête à voter pour la première fois aux élections européennes du 26 mai. L’Europe, un sujet sur lequel il tente de s’informer, sans vraiment y comprendre grand chose. « Je ne me sens pas particulièrement européen », avoue-t-il,« pourtant j’ai conscience de la chance qu’on a de vivre dans l’Union Européenne, surtout en tant que jeune. Mais selon moi, l’Europe n’est pas assez concrète ». Opacité, éloignement, manque de communication et d’attractivité… Autant de défauts que cite Augustin Épaud lorsqu’on lui demande quelle image il se fait de l’Europe. Il ira voter, il l’assure, mais ne sait pas encore pour qui. Aucun des candidats ne l’a véritablement séduit, et le contenu des programmes manque selon lui de visibilité. « Je pense voter « écolo », car c’est une des grandes préoccupations actuelles et c’est au niveau européen que les choses peuvent bouger », glisse-t-il néanmoins. Il doute que le scrutin mobilise largement les électeurs. « Je n’ai pas de crainte ni d’espoir particulier. J’espère juste que l’extrême-droite ne fera pas un score trop élevé ».
Le syndicat national de joueurs de rugby Provale, créé en 1998, offre notamment un suivi juridique et médical à ses quelque 500 adhérents, entre témoignages et conseils d’anciens auprès des plus jeunes et accompagnement à la reconversion des joueurs en fin de carrière. “On insiste auprès des jeunes sur le fait que le corps est leur outil de travail et qu’il faut prendre soin de soi, explique son vice-président Laurent Semperé, joueur au Stade Français. Dans la culture de ce sport, il n’est pas admis de dire quand on a mal. On pense que pour se dépasser, il ne faut pas parler de ses souffrances.”
La structure veille particulièrement à ce que les joueurs préservent leur intégrité physique et alerte sur les dangers, notamment en organisant une à deux visites annuelles dans les clubs. “Les jeunes que l’on forme découvrent souvent les risques. Lorsqu’un joueur confirmé apporte son témoignage, cela a du poids car il connaît le fonctionnement du système de l’intérieur.” L’organisation insiste également sur l’importance de ne pas délaisser une formation scolaire parallèle à la pratique sportive.
Depuis le début de l’année 2019, c’est quasiment une femme tous les deux jours qui a été tuée par son conjoint. Ce chiffre est en augmentation, malgré des campagnes de prévention. Les associations dénoncent un manque d’accompagnement des victimes, tant au niveau de la police que de la justice.
C’est à Vidauban, commune du Var, que Dalila a été tuée. Samedi 6 avril, vers 21 heures, cette infirmière libérale de 50 ans, décède dans sa voiture. Le responsable : son mari, interpellé deux jours plus tard par les gendarmes. La mère de trois enfants appelle la police quelques heures avant le drame, après avoir été menacée par son mari. Les gendarmes conseillent à Dalila de se réfugier chez un voisin, ce qu’elle fait. Son mari serait revenu entre-temps au domicile et lui aurait tiré dessus. Le meurtrier avait déjà été condamné à huit mois de prison avec sursis pour des violences sur sa précédente compagne, selon Le Monde. Il devait être jugé en août pour des violences sur Dalila.
Le meurtre de Dalila est le 42ème féminicide depuis le début de l’année. Un chiffre en nette augmentation : en 2018, à la même période, le nombre de féminicides s’élevait à 32, rappelle L’Obs. L’affaire de Vidauban a suscité de vives émotions et est devenu le symbole de ces violences conjugales, qui entraînent la mort d’environ 130 femmes par an en France. Un phénomène complexe en hausse qui s’expliquerait notamment par le manque d’accompagnement des femmes battues et la difficulté de quitter un conjoint violent.
Depuis 2013, l’association “Osez le Féminisme !” a fait des féminicides son cheval de bataille. “A l’époque, nous avions monté une campagne “Reconnaissons le féminicide”, explique Céline Piques, porte-parole de l’association.
“Le féminicide est le meurtre d’une femme car c’est une femme. La violence patriarcale et masculine s’exerce particulièrement dans le domaine familial, dans la plupart des cas, il s’agit de femmes tués par leur conjoint ou ex-conjoint”, continue Céline Piques.
Le sexisme est reconnu depuis 2017 parmi les circonstances aggravantes d’un délit, mais le terme “féminicide” reste absent du code pénal. L’association “Osez le féminisme!” milite pour “une reconnaissance du mot lui-même”.
Le flou sur les termes s’accompagne d’une différence de chiffres entre le décompte des associations et le ministère de l’Intérieur qui publie chaque année le nombre de féminicides. En 2017, 109 femmes auraient été victimes de féminicides selon les chiffres officiels, qui prennent en compte uniquement les femmes mariées ou pacsées. Quant aux associations, elles s’accordent sur le nombre de 130 et dénoncent une technique de “communication”.
“Le ministère veut faire croire que les chiffres sont en baisse, mais cela ne trompe pas grand monde chez les associations”, plaisante Céline Piques.
“Nous ne possédons pas par exemple le nombre de femmes qui se suicident à la suite de violences. Les chiffres du gouvernement sont partiaux et il faudrait avoir des outils statistiques pour analyser en détail ces violences”, continue-t-elle.
“Un manque de moyens”
Les associations s’accordent sur le caractère “systémique” des violences conjugales qui peuvent aller jusqu’au féminicide et déplorent le manque de moyens accordés pour lutter contre ce phénomène. Pour Jean-Michel Taliercio, chargé de mission au sein de l’association “Dans le Genre Égales”, le féminicide “est un fléau national qui coûte beaucoup d’argent à la société. Il faut se dire que tant que le problème existe, il faut mettre des moyens pour qu’il soit réglé.” En 2018, le budget du secrétariat à l’Égalité entre les femmes et les hommes s’élevait à 30 millions d’euros environ, soit 0,006% du budget total de la France. Une broutille pour Céline Piques : “Il faut se rendre compte du phénomène dont on parle : 220 000 femmes sont frappées chaque année en France par leur conjoint. Les associations fonctionnent avec quelques dizaines de milliers d’euros par an et ne sont pas en capacité de traiter des centaines de milliers de cas. Elles font un travail formidable mais elles n’ont absolument pas les moyens à la hauteur des enjeux. Il suffit de comparer à n’importe quel autre budget de l’Etat, le secrétariat à l’Egalité entre les femmes et les hommes est de loin le plus petit budget de tous les secrétariats d’Etat et des ministères.”
Ce manque de moyens se traduit notamment par des failles dans l’accompagnement des femmes victimes de violences conjugales quand elles veulent quitter leur conjoint abusif. C’est le cas de Mélanie, aide soignante en psychiatrie qui a vécu plusieurs années avec son conjoint qui la frappait, ainsi que ses enfants qu’il a abusé sexuellement.
“Quand j’ai quitté mon conjoint, je suis allée voir le centre d’hébergement de VIFFIL pour demander un logement d’urgence. On m’a dit qu’il y avait un délai de 10 mois, et j’ai demandé ce que j’étais censée faire en attendant. On m’a rétorqué : “ Retournez chez vous, avec votre mari”.
J’ai expliqué qu’il était violent et on m’a répondu : “ Un départ, ça se prévoit”, explique-t-elle. “Aujourd’hui il a une arme, il peut savoir où j’habite, c’est des informations qu’il peut trouver et s’il le veut, il me tuera. Et l’Etat en sera responsable. J’ai alerté et il ne s’est rien passé”, déplore Mélanie qui explique regretter “d’avoir déposé plainte [contre son ex-conjoint] car ce sont les victimes qui en pâtissent”.
La formation des policiers questionnée
Dès le commissariat, les victimes ne se sentent pas assez accompagnées. “Les structures pour prendre en charge, accueillir les victimes et former les juges et les policiers n’ont pas d’argent”, déplore Céline Piques. Louise Delavier, responsable de la communication pour l’association “En Avant Toutes” fait le même constat : “Tout le système manque de moyens, dont la police. Il n’y a vraiment pas assez d’argent pour que les associations puissent former la police. Ce n’est pas une formation d’une semaine qui va faire changer les choses, il faut une formation continue pour les policiers, tant c’est un phénomène complexe”.
Anissa, qui a subi des violences psychologiques et physiques, a porté plainte en 2017. “Quand je suis allée au commissariat, j’avais plus de 500 pages de SMS de menaces qu’il [son ex-conjoint] m’avait envoyé. J’ai expliqué la situation à la policière, qui m’a répondu : “ moi, ça ferait longtemps que je serai partie”. Anissa explique que son enfant a également été maltraité, élément écarté par la policière : “Elle m’a dit : “ qui n’a jamais mis de gifles à son enfant ?”. Quant aux associations, Anissa s’en méfie : “Une longue bataille judiciaire a commencé avec mon ex. Je suis allée au CIDFF (Centres d’Information sur les Droits des Femmes et des Familles) pour voir s’ils pouvaient m’aider. On m’a dit que mon jugement était très bien, que je n’avais pas à me plaindre et que beaucoup de femmes étaient dans une situation bien pire que moi”. Virginie a eu une expérience similaire avec la police. “Quand je suis allée porter plainte pour la première fois, le policier était gentil, il m’a bien accueillie.
Pour la deuxième plainte, suite à des coups de mon ex-conjoint sur les enfants, on m’a dit : “il a eu une réaction de père”.
C’est moi qu’on a jugé pour ne pas avoir levé la main sur mes enfants”, soupire-t-elle. Des failles qu’un commissaire francilien confiait à Libération, en novembre 2018, “Sur les enquêtes, on n’est pas à la ramasse, mais sur l’accueil complètement. Les plaintes pour viols et agressions sexuelles sont en général traitées par les policiers généralistes.”
“Les juges n’appliquent pas les lois”
Un sentiment d’abandon de la part des pouvoirs publics que partage Fanny, qui a subi 3 ans de violences conjugales de son ex-mari. “L’Etat ne prend pas le temps de réfléchir à de nouvelles mesures, car les gens qui les prennent ne savent pas ce qu’on endure en tant que victimes. Nous ne sommes pas intégrées aux décisions alors qu’on est les premières informées”, explique cette cadre dans le marketing. “L’Etat devrait miser beaucoup plus sur la justice, les juges n’appliquent pas les lois. Il y a un énorme problème en France avec la justice”, continue Fanny qui a demandé une ordonnance de protection contre son ex-conjoint, sans effet. “Pour l’ordonnance de protection, j’ai reçu un avis négatif, parce que pour les juges, les plaintes ne sont pas suffisamment caractérisées. Ce sera quand il m’aura tué que ça sera assez caractérisé. Il n’y aucune justice en France, les victimes ne sont pas reconnues alors que j’ai fait ce qu’il faut, j’ai porté plainte”, s’indigne-t-elle.
Virginie s’est également sentie “abandonnée” par la justice. “J’ai subi des violences verbales et physiques, les enfants aussi. J’ai déposé plainte qui a abouti à un rappel à la loi deux mois après. Mon ex-conjoint a été convoqué devant le délégué du procureur qui lui a rappelé que ce qu’il avait fait n’était pas bien”, raconte cette mère de deux enfants.
Ça faisait un boucan de dingue.
Pendant 30 mn. Pas 1 voisin n’a bougé. Tout le monde trouvait ça normal. Même la police d’Aix.
Après on s’étonne pourquoi je ne suis pas partie.
Parce-que quand j’alertais personne ne m’écoutait. Et l’autre me menaçait, me surveillait. pic.twitter.com/XtdhvJddOU
“J’ai déposé 5 plaintes, deux ont abouti. J’ai fait une demande d’hébergement auprès de l’association SOS Solidarité, mais j’ai dû la décliner car je demandais en parallèle une ordonnance de protection. Il a fallu choisir entre hébergement et protection”, s’indigne-t-elle.
Quelques semaines après, c’est la douche froide : Virginie apprend que son ordonnance de protection a été refusée car son ex-conjoint nie les violences. “La juge a estimé que la relation n’était pas assez claire”, conclue-t-elle.
Le gouvernement a annoncé en octobre 2018 le “premier plan de lutte contre les violences conjugales” qui comporte cinq volets dont une campagne de prévention télévisuelle et sur les réseaux sociaux. On y trouve également un objectif de 100% de réponses au 3919, le numéro d’écoutes pour les victimes de violences conjugales, ainsi que le lancement d’une plateforme de signalement en ligne de violences sexistes et sexuelles. Enfin, une plateforme de géolocalisation des places d’hébergement d’urgence accessible aux professionnels va être mis en place, ainsi qu’un dispositif de partage d’alertes entre professionnels de la justice, de la police, de la santé et les travailleurs sociaux.
Aujourd’hui, les magistrats peuvent suivre deux formations pour se sensibiliser à ces questions : l’une sur « les violences au sein du couple », l’une sur « les violences sexuelles ». L’Ecole Nationale de la Magistrature (ENM) a également mis en place une séquence pédagogique sur les violences conjugales pour sa promotion 2018.
Quand les réseaux sociaux prennent la relève
Face aux carences des pouvoir publics, certains militants n’hésitent pas à venir en aide aux victimes. Depuis 2016, une page Facebook, “Féminicide par compagnon ou par ex”, gérée par un collectif d’une quinzaine de militantes féministes recense tous les cas de féminicides. “Le fait que les chiffres des meurtres de femmes soient publiés en fin d’année ne nous convenaient pas, on trouvait que c’était trop tard. On s’est aperçues que dans les médias, les familles des victimes étaient extrêmement démunies. Elles ne sont pas accompagnées après ces meurtres qui sont dus à des manquements du système judiciaire et policier. On a donc voulu rendre hommage à ces victimes et à leurs familles en les nommant”, explique Julia, une des administratrice de la page. Le collectif reçoit même directement des messages de familles de victimes, parfois avant la presse. “Nous avons du créer un groupe privé pour les familles, car nous recevions trop de messages par jour”, continue Julia. Quand on lui demande pourquoi le nombre de féminicide augmente, Julia dresse une analyse cinglante :
“On ne souhaite pas s’adresser aux violents, les hommes sont préservés. Quand une femme est victime de violences, c’est elle qui se retrouve enfermée dans un foyer, quand elle a la chance de pouvoir être exfiltrée de son logement. Les hommes bénéficient d’une impunité de la société et de la justice avec des peines de sursis. Si la loi était réellement appliquée, il y aurait des peines de prison ferme”.
De son côté, Sophia Sept, militante Fémen, mène depuis des années une campagne contre le féminicide. Il y a deux mois, elle entend une scène de violences conjugales chez ses voisins. Elle enregistre les cris de la victime et publie la vidéo sur Internet, qui devient virale et est notamment reprise par Le Parisien.
“Quand la police est arrivée, ils ont juste contrôlé l’identité de l’agresseur. Cinq minutes après, les cris ont repris, je les ai rappelés et ils m’ont dit avoir fait le nécessaire, que c’était juste une violente dispute. »
« J’ai posté la vidéo sur Twitter, pour dire à la communauté qu’il ne faut pas avoir peur de témoigner”. Depuis, des femmes victimes de violences conjugales contactent Sophia via les réseaux sociaux. “Certaines recherchent un logement d’urgence, je fais jouer la communauté et je trouve des militantes qui les hébergent, les prennent en charge. J’essaye de palier aux associations qui manquent de moyens […] Tout le monde est démuni, c’est le système entier qui est à revoir.”
Du côté des victimes, l’aspect destructeur de ces violences est important et continue bien après la séparation avec leur ex-conjoint violent. “J’ai peur tout le temps, j’ai été détruite. Je fais des cauchemars, je ne dors plus. Je ne veux pas rencontrer d’homme, je n’ai plus confiance”, confie Anissa. Virginie craint pour sa vie depuis que son ex-conjoint a défoncé sa porte à coups d’épaule en février. “C’est le dernier rempart contre lui qui cédait”, confie-t-elle.
“Je n’ai plus de vie, je vis les stores baissés. J’ai un bracelet connecté en permanence qui me géolocalise en cas d’urgence. Je sors de chez moi par une porte dérobée. J’ai mis en place plein de stratégies jusqu’au jour où je n’aurais pas un pas d’avance sur lui [son ex-compagnon] et là, qui sait ce qu’il pourra se passer.”
La jeune femme compte néanmoins continuer à se battre : “Je n’ai plus rien à perdre à part ma vie. Je le fais pour moi, pour ma fille et pour toutes les autres femmes”.