Levothyrox : Les effets indésirables proviennent d’un « dosage mal adapté »

L’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) met hors de cause la nouvelle formule du Levothyrox. Selon un rapport de l’ANSM, publié ce jeudi, les effets indésirables liés au médicament seraient liés à un « déséquilibre thyroïdien » causé par le changement de traitement, et non à la nouvelle formule elle-même.

Crédit photo : Wikimedia
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Cette affaire ne devrait pas améliorer la confiance des Français envers l’industrie pharmaceutique. Depuis le changement de formule du Levothyrox, médicament prescrit à 3 millions de Français pour compenser le manque d’hormones thyroïdiennes, ils étaient nombreux, dès le mois de mars, période à laquelle la nouvelle version du Levothyrox a été mise en vente, à se plaindre des effets secondaires. L’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a recensé plus de 14.000 signalements d’effets indésirables chez les patients. Mais aucun organisme ne les croyait. Jusqu’à la médiatisation du phénomène, en septembre dernier.

Nouvelle formule : Le mannitol et l’acide citrique ont remplacé le lactose

La polémique sur le Levothyrox a attiré l’attention sur un composant incontournable des médicaments : les excipients. Ce sont ces substances qui ont été modifiées pour la nouvelle formule commercialisée par le laboratoire Merck Serono. Le mannitol a alors remplacé le lactose, présent dans l’ancienne formule, et connu pour être mal toléré par un certain nombre de personnes. L’acide citrique anhydre a également été ajouté dans la composition de la nouvelle version du médicament. Selon l’Ansm, « l’acide citrique permet de contre-carrer les effets secondaires de la lévothyroxine ». Une formule « plus stable dans le temps », en déduit alors l’un de ses membres.

La molécule, quant à elle, n’a pas été modifiée. « La lévothyroxine, c’est une hormone de substitution. Certes, elle créée un déséquilibre hormonal, soit en hausse, soit en baisse, chez certains patients, mais elle n’est pas considérée comme néfaste », explique Ambre, docteure en pharmacie à Levallois-Perret, dans les Hauts-de-Seine. « L’objectif pour le patient, comme après toute prise de médicament, c’est de réeffectuer un contrôle, un ou deux mois après la première prise, pour réajuster le dosage.  Mais en tout cas, le mannitol est censé stabiliser la molécule », poursuit-elle.

Le problème lié à la pénurie du médicament est inhérent à de nombreuses pharmacies : « Les médias ont annoncé le lundi 2 octobre que l’on allait voir le retour de l’ancien Levothyrox. Le souci, c’est que toutes les pharmacies n’en sont pas approvisionnées. Par chance, la nôtre l’est, mais nous sommes approvisionnées au compte-goutte et nous ne pouvons pas répondre à la demande des patients ». 

« Les patients avaient raison »

La nouvelle formule du Levothyrox a été créée à la demande de l’Agence nationale de la sécurité du médicament. « Nous avions reçu des signaux comme quoi il y avait des fluctuations assez importantes, chez certains patients, après la prise du médicament », explique un membre de l’Ansm, qui ne souhaite pas communiquer son nom. « Nous avons alors commandé des analyses auprès des laboratoires. Le constat est tombé : les patients avaient bel et bien raison », explique-t-il. 

Toutefois, l’agence du médicament a pris soin de mettre en place un numéro vert (0 800 97 16 53) pour informer les patients. Ce mercredi, plus de 300 000 personnes ont signé une pétition pour un retour à l’ancienne formule, considérant la nouvelle comme « dangereuse » pour eux.

Marie Lecoq

Les fonctionnaires de santé dénoncent des « conditions de travail intenables »

Baisse des effectifs, blocage des salaires, regroupement des hôpitaux : les soignants se sont rassemblés ce mardi 10 octobre pour protester contre les mesures gouvernementales sur la fonction publique. Pour la première fois depuis une dizaine d’années, l’ensemble des syndicats de la santé ont marché côte à côte.

« On veut des sous et du personnel ! », lance Catherine, puéricultrice à l’hôpital Necker à Paris. « Nos conditions de travail sont devenues intenables, nous travaillons trop souvent sur nos jours de repos », ajoute Johanna, sa collègue. En grève, elles sont venues toutes les deux manifester ce mardi 10 octobre contre les mesures annoncées par le gouvernement. Pour la première fois depuis la loi Bachelot en 2009, une dizaine de syndicats de praticiens hospitaliers s’unissent pour battre le pavé ensemble.

« Mon salaire n’a pas bougé depuis dix ans »

Aux alentours de 14 heures, la place de la République se remplit doucement. Les blouses blanches se rassemblent, sortent les pancartes d’un camion à l’effigie du syndicat Sud Solidaires. Sur l’une d’entre elles est inscrit, en lettres capitales, « L’hôpital n’est pas une entreprise ». Patrick, 55 ans, distribue les tracts aux passants. « C’est pour les générations futures que je suis là aujourd’hui, lâche cet agent logistique. Les salaires sont bloqués, les CDD ne sont pas titularisés… Entrer dans la fonction publique aujourd’hui, c’est devenu tellement plus compliqué ».

Patrick, 55 ans, agent logistique, tracte sur la place de la République avant le début de la manifestation. (L.D)

Patrick pointe du doigt les plans d’austérité successifs, le regroupement des hôpitaux qui « signe la mort de l’hôpital de proximité ». Il engage la conversation dès qu’il le peut avec les passants, aux abords de la place. « Les horaires de travail ne sont plus respectés. Mon salaire n’a pas augmenté depuis dix ans. Nous ne sommes pas responsables de la dette, que le gouvernement aille chercher l’argent ailleurs », poursuit Patrick.

La crainte de la privatisation

Médecins, pharmaciens, dentistes, personnels paramédicaux et employés administratifs sont présents dans le cortège. Tous sont concernés par le gel du point d’indice et le rétablissement du jour de carence qui n’indemnise plus le premier jour de congé maladie. Les soignants s’inquiètent d’une baisse de leur pouvoir d’achat, mais ils sont nombreux à demander, en priorité, des conditions de travail décentes. « Nous voulons dire stop à la baisse des effectifs et à la privatisation de la santé. La question des salaires est importante mais elle reste secondaire », estime Marie-Christine, ancienne cadre de santé à Meaux et déléguée syndicale des fonctionnaires autonomes (FGAF).

L’hôpital dans lequel elle travaillait, à Meaux, est déjà en fusion avec d’autres établissements de santé. « On en voit déjà les effets, assure Marie-Christine. Au mois d’août, 40 postes d’ASH (assistantes de soin, NDLR) ont été supprimés. Le gouvernement compte sur notre bonne volonté. Ce n’est plus tenable. »

Parmi les soignants qui manifestent, le secteur public, davantage représenté, n’est pas seul. « Une convergence des revendications est possible avec le privé, mais n’oublions pas qu’ils n’ont ni les mêmes moyens, ni les mêmes salaires », commente Catherine.

 

Léa DUPERRIN

Augmentation du tarif des généralistes : la mesure ne satisfait pas les intéressés

Plaque de médecin généraliste, Crédits : Julien Percheron
Plaque de médecin généraliste, Crédits : Julien Percheron

 

Depuis le 1er mai, consulter son médecin généraliste coûte 25 euros et non plus 23. Cette revalorisation de deux euros de leur tarif de base est destinée à rendre plus attractive la profession auprès des étudiants en médecine. Il s’agit aussi de lutter contre les déserts médicaux. 

Cela fait six ans que les médecins généralistes l’attendaient. Depuis le 1er mai, le tarif de base de leur consultation a augmenté de deux euros. « On a enfin rattrapé une partie du retard lié à l’inflation« , salue le docteur David Calmes, membre du syndicat des Médecins généralistes de France (MGF). Une revalorisation davantage perçue comme une remise à niveau qu’une véritable augmentation. « Contrairement à nos tarifs, le coût de la vie et du travail n’ont pas arrêté de grimper« , souligne Stéphane Journeau, médecin dans la commune de Verson en Haute-Normandie. Celle-ci n’affecte pas les 95% de Français détenteurs de mutuels. « Le coût n’est pas ce qui fait obstacle pour accéder aux soins« , poursuit Stéphane Journeau.

Les praticiens évoquent des patients plutôt compréhensifs. « On ne valorise pas assez leur travail alors qu’ils font des études très longues et qu’on leur confie notre santé« , plaide Nicole Fighiera, habitante de Levallois-Perret (Hauts-de-Seine). Ces deux euros de plus, elle est prête à les avancer mais à une condition. « Il faut une vraie consultation, pas juste passer 10 minutes dans leur cabinet« , poursuit-elle. Rythme de travail intense, emploi du temps surchargé… Les médecins généralistes déplorent devoir enchaîner les consultations pour rentrer dans leur frais. « Le seul moyen pour eux de rentabiliser leur activité est de faire de l’abattage, soit recevoir 30 à 40 patients par jour« , assène David Eiss, médecin spécialiste à l’hôpital américain de Neuilly-sur-Seine.

La désertification médicale s’aggrave

La mise à niveau des tarifs de base avec ceux des praticiens spécialistes est la mesure principale de cette nouvelle convention tarifaire signée entre l’Assurance maladie et les médecins généralistes. Une revendication du syndicat MGF qui vise à redorer le blason d’une profession délaissée par les étudiants en médecine. « Lorsqu’on forme 100 d’entre eux, seuls huit s’installent ensuite en libéral« , pointe Stéphane Journaux. Établi à Verson depuis plus de vingt ans, il s’alarme de la désertification médicale. Selon lui, elle commencerait même à s’étendre aux villes de province de taille plus importantes. « J’ai des patients qui viennent de Caen pour se soigner car ils n’obtiennent pas de rendez-vous dans un délai proche plus près de chez eux« , témoigne-t-il. Pour pallier cette situation, la convention médicale prévoit également une aide financière destinée aux praticiens libéraux qui s’établiraient dans ces déserts médicaux.

Ces avancées restent toujours insuffisantes selon le syndicat MGF. « Nos tarifs sont parmi les plus bas d’Europe« , avance David Calmes. Sur le reste du continent, la consultation est facturée quarante euros en moyenne. Cet écart est en partie responsable de la pénurie de vocations, analyse le syndicaliste. « De plus, la charge de travail augmente sans arrêt. Contrairement aux vétérinaires et aux dentistes, la plupart des médecins généralistes n’ont pas les moyens d’embaucher des assistants« , renchérit-il. Un état des lieux de la situation confirmé par Stéphane Journeau. Ce dernier fustige la « paperasserie » entraînée par la généralisation du tiers-payant. « L’État n’a pas augmenté nos tarifs pendant six ans mais, quand il s’agit de nouvelles procédures administratives, on aimerait bien qu’il nous délaisse un peu plus« , dit-il, amèrement.

Anaïs Robert

« L’épilepsie fait peur aux enseignants »

Si la loi de 2005 sur l’accessibilité oblige l’éducation nationale à accueillir tous les enfants handicapés, les parents dénoncent encore des enseignants trop réfractaires à l’arrivée d’un petit épileptique, voire des enfants carrément exclus. Une appréhension liée à une méconnaissance de la maladie. 

«J’ai une fille dont personne ne veut », déplore Raphaëlle Thonnat, maman de Caroline, 12 ans. Pourtant quand on la voit, Caroline est une petite fille « normale ». Sauf qu’elle souffre d’épilepsie. Depuis 10 ans, Raphaëlle a arrêté de travailler, pour pouvoir assurer les trajets entre école le matin, rendez-vous chez l’orthophoniste, le pédopsychiatre ou autre spécialiste l’après-midi. Mais aujourd’hui cette mère divorcée est à bout.

Tabassée par les camarades dans la cour d’école

Caroline a d’abord était scolarisée dans le public, mais c’était « trop dur », se souvient Raphaëlle. « Les enseignants ne faisaient pas l’effort de comprendre ses moments d’absence», regrette-t-elle. Dans la cour de récréation, elle se faisait tabasser par les autres enfants, qui la traitaient de feignasse car elle n’était présente que le matin*, et était traitée de débile à cause de ses absences. Alors Caroline a intégré l’école privée catholique Thérèse Chappuis. « Le corps enseignant avait à l’époque un beau discours. Mais hier, la directrice m’a envoyé un mail m’expliquant que ma fille ne satisfaisait pas les exigences du collège et que je ferais mieux de me renseigner pour un autre établissement», dit-elle désespérée.

A entendre Delphine Dannecker, le cas de Caroline semble banal. «  Il y a un grand nombre d’enfants refusés à l’école, en crèche, ou en club sportif », explique cette mère d’un petit garçon épileptique et par ailleurs responsable communication de l’association Epilepsie France.

Les associations demandent une directive nationale pour une meilleure formation des professeurs à l’épilepsie

Pourtant, en France, la loi de 2005 impose à toutes les écoles publique de recevoir tous les enfants », rappelle Christine Cordiolani, médecin conseiller technique de l’académie de Versailles. « Bien souvent à l’arrivée au collège, les élèves épileptiques ne veulent pas parler de leur maladie. Certains menacent même de se suicider si les parents en parlent à l’infirmière ou au directeur d’établissement », explique cet ancien médecin scolaire. « Or ce défaut d’information, c’est le pire. Il faut dédramatiser et surtout faire en sorte que le professeur sache réagir. »

Justement, en octobre, la fondation française pour la recherche sur l’épilepsie a demandé à Najat Vallaud-Belkacem une directive nationale à ce sujet. La requête : « que les futurs professeurs soient formé aux gestes à adopter face à une crise d’épilepsie et soient capables d’informer leurs élèves à ce sujet », résume Emmanuelle Allonneau-Rouberti, présidente de la fondation.

Dans les faits, aucune réglementations n’empêche la venue d’associations dans les classes. Reste que les enseignants sont parfois réfractaires. Le professeur Rima Nabbout, spécialiste de l’épilepsie a essayé à plusieurs reprises de se rendre dans les classes d’élèves épileptiques pour sensibiliser à la maladie et répondre aux questions des autres élèves. Elle a enregistré refus sur refus.

Une maladie qui fait peur

« On ne peut que constater une méconnaissance incroyable autour de ces maladies dans les écoles et dans la société en général alors qu’elle concerne 1% de la population », note Stéphane Auvin, neuropédiatre spécialiste de l’épilepsie. « L’image de l’épilepsie a toujours été extrêmement négative, souvent rapprochée à la possession du diable… L’image de quelqu’un en crise d’épilepsie est très chargée émotionnellement, car on est face à un sentiment de mort imminente. Alors la maladie fait peur », analyse le docteur.

Cette méconnaissance est à relier au nombre de spécialistes apte à la prise en charge de cette maladie : en France on compte 250 neuropédiatres et environ 500 neurologues pour environ 500 000 malades.  « Nous sommes beaucoup trop peu », déplore le docteur Derambure, epileptologue et directeur de la ligue contre l’épilepsie.

 

Marine Brossard

 

*Caroline bénéficie d’horaires adaptées