Malgré le véto de Moscou, les Occidentaux continuent leurs menaces contre Damas

Les Occidentaux maintiennent intacte leur détermination à riposter fermement à l’attaque chimique présumée imputée au régime de Bachar El Assad et faisaient toujours planer mercredi la menace de frappes militaires en Syrie malgré un veto russe à l’ONU.

Emmanuel Macron, Theresa May et Donald Trump envisagent de frapper le régime de Damas. (© Number 10)
Emmanuel Macron, Theresa May et Donald Trump envisagent de frapper le régime de Damas.  (© Number 10 – Licence)

La confrontation entre les Etats-Unis et la Russie sur le dossier syrien s’est durcie : Moscou, soutien indéfectible de Damas, a posé mardi son veto au Conseil de sécurité à un projet de résolution américain visant à créer un mécanisme d’enquête indépendant sur le recours aux armes chimiques en Syrie. L’ambassadeur de Russie aux Nations unies, Vassily Nebenzia, a justifié le 12e veto russe en sept années d’un conflit qui a fait plus de 350.000 morts, par la volonté de « ne pas entrainer le Conseil de sécurité dans des aventures ».

Mais en face, les Occidentaux, Etats-Unis et France en tête, ont redoublé de détermination après avoir déjà fait clairement planer la menace de représailles militaires. « La France mettra tout en oeuvre contre l’impunité chimique », a assuré l’ambassadeur français François Delattre. La France annoncera donc « dans les prochains jours » la « décision » sur sa riposte, en coordination avec les alliés américain et britannique, a précisé à Paris le président Emmanuel Macron.

S’inscrivant dans cette fièvre diplomatique, Donald Trump et la Première ministre britannique Theresa May sont aussi « tombés d’accord », lors d’une conversation téléphonique, « pour ne pas laisser l’usage d’armes chimiques se poursuivre », a rapporté la Maison Blanche. Le président américain, qui avait promis lundi une décision « très bientôt », a annulé un déplacement prévu en fin de semaine au Pérou afin de continuer à gérer le dossier syrien, renforçant le sentiment d’une action imminente.

La classe politique française divisée

La France doit-elle intervenir ? Le dilemme s’était déjà posé pour François Hollande, avec Barack Obama, en 2013, quand la Syrie avait franchi la fameuse « ligne rouge ». Peu suivie, la France avait laissé Damas agir. Invité du journal de 20 heures de France 2 mardi soir, François Hollande s’est aligné sur la position de l’exécutif, qui promet une réponse forte. « Ne rien faire serait une impunité et conduirait le régime de Bachar El Assad à continuer à massacrer son peuple. » Mais ces menaces sont loin de faire l’unanimité dans la classe politique française.

Interrogé par RFI, le président de Debout la France Nicolas Dupont-Aignan rappelle l’intervention américaine en Irak en 2003. « Je regrette tellement Jacques Chirac et Dominique de Villepin. Eux n’avaient pas fait la connerie du siècle d’intervenir en Irak. Et ils veulent nous refaire le coup des armes chimiques en Syrie ? C’est une honte. D’abord on vérifie« , a-t-il martelé. Une position partagée par la présidente du Front National, qui s’est dit étonnée de l’absence d’enquête approfondie sur le sujet.

Colin Gruel avec AFP

 

 

 

Combien coûterait un Brexit ?

David Cameron marche sur la corde raide. Mercredi 3 février, devant le parlement britannique il s’est efforcé de convaincre les députés qu’un accord avec l’UE était indispensable. La sortie de l’Union divise profondément l’opinion et même le propre parti du premier ministre. Entre les eurosceptiques de l’Ukip et les pro-Europe, chacun y va de sa propre prédiction quant aux conséquences d’une telle rupture. Entre apocalypse économique annoncée et promesse d’un renouveau britannique, difficile d’y voire clair.

Si le Royaume-Uni sort de l’Union européenne à l’horizon 2018, quel horizon peut-on entrevoir pour les années à venir ?

Trois scénarios sont possibles.

  • Selon le Bertelsmann stiftung, un think tank allemand (pro Europe), en sortant de l’Union européenne, le Royaume-Uni pourrait perdre jusqu’à 14% de son PIB arrivé en 2030. C’est l’équivalent de 313 milliards d’euros. Selon Open Europe (libéral), la perte du PIB atteindrait seulement – 2,2%.
  • Deuxième scénario : si le Royaume-Uni signe des accords de libre-échange avec l’UE, lui permettant de maintenir le marché unique établi jusqu’ici, son PIB pourrait varier de +0,8 à -0,6% de son PIB, toujours selon Open Europe.
  • Troisième cas de figure, le plus optimiste : le Royaume-Uni pourrait gagner 1,55% de son PIB à condition d’établir, une fois la sortie de l’UE négociée, des accords commerciaux avec le reste du monde, principalement l’Asie.

Continuer la lecture de « Combien coûterait un Brexit ? »

David Cameron et la vision Britannique de l’Union européenne

Les différentes étapes de l’adhésion du Royaume-Uni à l’Union européenne est symptomatique des relations particulières que l’île entretient avec ses partenaires continentaux depuis la création de l’Union. 

La question du « Brexit » soulevée par David Cameron suite à sa réélection crée une vague d’inquiétude auprès des acteurs de la diplomatie continentale. Si le but affiché par le premier ministre anglais n’est pas la sortie de l’Union, mais bien la renégociation des conditions d’application des traités, la menace d’une sortie britannique est prise au sérieux par les chefs d’Etat européens.

Suppression de  « l’union sans cesse plus étroite » 

Parmi les souhaits affichés par le résident du 10 Downing Street, plusieurs font débats.

Tout d’abord le Premier ministre britannique souhaite réduire l’immigration européenne, dont le Royaume-Uni serait la principale victime. Il souhaite aussi supprimer la clause dite de « l’union sans cesse plus étroite » qui permet aux dirigeants européens d’induire une politique qui tend toujours plus vers un fédéralisme puissant de l’Union. Enfin, dans le même esprit, David Cameron souhaite renforcer le rôle des parlements nationaux qui pourraient ainsi bénéficier d’un « carton rouge ». Ce carton rouge permettrait d’aller plus loin que le « carton jaune » actuel qui offre la possibilité aux parlements de demander à Bruxelles de revoir les textes que les parlements jugent insuffisants.

Depuis le début de l’aventure européenne les britanniques ont bénéficié d’une situation particulière marquant une réelle différence avec les mastodontes continentaux (France et Allemagne notamment) qui eux espèrent plus qu’une unique intégration économique.

Gaspard WALLUT

 

L’Europe des Britanniques de France

« Grexit » ou encore « Brexit », ces nouveaux mots ont fait leur apparition il y a peu de temps mais ils sont symptomatiques des maux que l’Union européenne connaît en ce moment. Les velléités de sortie de l’Union exprimées par David Cameron qui brandit cette menace auprès des chefs d’états européens lors de sa tournée post-électorale met en lumière ces visions différentes d’une Europe qui peine à devenir la fédération dont rêvaient les pères fondateurs. Mais qu’en pensent les Anglais qui vivent l’Europe au quotidien ? 

Dans les pubs anglais de Paris, les discussions sur la sortie du Royaume-Uni vont bon train / Photo Joits

 

Il est 19 heures passées, et ce lundi soir au Cricketer Pub, situé rue des Mathurins, près de la Madeleine, la bière coule à flot. Le robinet de Guinness est grand ouvert et si les deux serveuses sont ukrainiennes, c’est bien l’anglais qui résonne fort entre les quatre murs de ce haut lieu de la culture britannique dans la capitale française. Des étudiants se mélangent aux hommes d’affaires et aux touristes de passage à Paris.

Théo Gauchet est un jeune Franco-britannique de 25 ans. Après avoir vécu vingt ans à Birmingham, il vit et travail désormais à Paris. Le « Brexit » (ou Britain Exit – pour une sortie de l’Union européenne du Royaume-Uni), il en entend parler dans son entourage mais « ne comprend pas vraiment pourquoi ce débat arrive sur la place publique ». L’Europe, il l’aime et « espère vraiment que les anglais ne feront jamais la bêtise d’en sortir après le vote de 2017″. Parce que la question est là.

La question de la sortie de l’UE centrale dans la vie politique britannique

David Cameron, fraîchement réélu à la tête du gouvernement britannique (voir encadré), en a fait une promesse de campagne. La question sera posée au peuple anglais à l’occasion d’un référendum en 2017. Si l’échéance n’est pas immédiate, la question de la sortie de l’Union européenne est bien présente au Royaume-Uni.

Sophie Pedder, correspondante à Paris pour The Economist, explique que le résident du 10 Downing Street a cédé aux sirènes de la démagogie. « Pour s’assurer une réélection David Cameron devait attirer à lui les électeurs du UKIP de l’europhobe Nigel Farage », explique-t-elle. La question de la sortie de l’UE est centrale en ce moment dans la vie politique britannique. Mais selon la journaliste, « David Cameron, comme les financiers et patrons britanniques, ne veut absolument pas d’une sortie de l’Union. Les conséquences seraient réellement négatives. Pour l’économie, mais aussi pour la cohérence de la politique étrangère du Royaume ».

Michael Nosvorthy, lui, est un patron anglais « marié depuis plus de 25 ans avec une Française ».  Il vit avec sa femme dans le sud de la France mais ses enfants vivent et étudient à Londres. Il se rend dans ce pub à chaque fois qu’il vient à Paris pour le travail. Et pour lui l’Europe est une évidence. « Il suffit de regarder une carte du monde pour éluder la question » semble-t-il s’énerver.

« Comment pourrions nous être crédibles auprès de nos partenaires en demandant le beurre, l’argent du beurre et la crémière ? »

Mais pour Jennie, 28 ans, qui travaille dans la finance à la « City », et ses amis en vacances à Paris, la vision semble bien différente de ces « Anglais de France » comme elle le dit en souriant. « L’Angleterre subit des vagues d’immigration très importantes, et notre vision de ce que doit être l’Union européenne est éloignée de celle que peuvent avoir les Français et les Allemands. »  Elle ne connaît pas la clause dite « d’une Union sans cesse plus étroite entre les peuples européens » mais ses revendications semblent se diriger vers cette question que David Cameron juge centrale. La suppression de cette clause impliquerait de facto un véritable frein à une intégration politique plus importante. Il s’agit pour lui de mettre un terme aux envies de fédéralisme des pays véritablement pro-européens comme la France ou l’Allemagne, et oublier définitivement l’idée des pères fondateurs qui rêvaient des « Etats-Unis d’Europe ». Elle semble d’accord avec David Cameron qui souhaite un « Better Deal » pour les britanniques.

Ce « meilleur accord » consisterait en une révision en plusieurs points des traités instituant la Constitution européenne. Mais les autres pays de l’Union (dont la France) ne souhaitent absolument pas avoir à soumettre un nouveau texte à un référendum populaire : l’échec du précédent vote est encore trop présent. Soit tout le monde se met d’accord, soit le Royaume-Uni bénéficie de nouvelles spécificités qui lui seront propres. Michael, qui n’avait pas entendu parler de ce « Better Deal » est « atterré ». Comment pourrions nous être crédibles auprès de nos partenaires en demandant le beurre, l’argent du beurre et la crémière ? Il faut arrêter de se sentir supérieurs aux autre nations européennes. » Les propos de Michael, Théo les approuve, mais Jennie et ses amis ne semblent pas du tout les entendre.

Le travail entamé par David Cameron lors de sa tournée européenne doit lui permettre de plaider le « oui » auprès des citoyens britanniques qui, en fonction des accords qu’il aura obtenus, seront soit comme Théo et Michael d’accord pour rester dans l’union, ou comme Jennie et ses amis, pour la sortie d’une Union qu’ils jugent inutile.

Gaspard WALLUT.