Augmentation de la précarité en France : au café des Petits Frères, les prix cassés continuent d’attirer

62% des Français disent connaître ou avoir connu une situation de pauvreté selon le baromètre annuel du Secours populaire publié jeudi 12 septembre, un chiffre en augmentation de 4 points par rapport à 2023. Si l’inflation est passée sous la barre des 2% en août, les difficultés des Français n’ont pas diminué. Au café des Petits Frères, les petits prix attirent tous publics, dont une majorité de personnes sans domicile fixe, sans emploi ou aux faibles revenus. Reportage dans le 17e arrondissement de Paris.

Le café des Petits Frères, situé au 47 rue des Batignolles à Paris. Crédits : ER.

“C’est pas cher ! Je recommande le café à plein de monde” s’exclame Bernadette, une habituée du café des Petits Frères. Chaque jour, le même rituel se répète : cette quadragénaire s’assoit près de son compagnon, profite d’un café chaud et joue au scrabble, l’un des jeux proposés par le café. “Moi je suis sans domicile fixe (SDF), on ne peut pas profiter de ça dans la rue”. Au 47 rue des Batignolles, elle profite surtout des petits prix, comme la centaine de personnes qui poussent la porte rouge du café tous les jours. Presque tous ont un point en commun : la précarité, qui n’a cessé d’augmenter en 2024 selon le baromètre annuel du Secours populaire publié jeudi 12 septembre. Réalisée en mai 2024 auprès de 996 personnes représentatives de la société française, cette étude montre aussi une augmentation du seuil de pauvreté subjectif moyen : un Français se considère pauvre avec moins de 1 396 euros par mois, 19 euros de plus qu’en 2023

Si la précarité augmente, le café géré par l’association des Petits Frères des Pauvres a toujours proposé ses services à petits prix. “Un expresso c’est 50 centimes, et on fait des formules petit déjeuner à 2 euros avec un jus accompagné d’une baguette ou d’un croissant” explique Sylvie Primel, bénévole depuis trois ans au sein de l’association. “C’est fondamental” réagit cette ancienne contrôleuse de gestion, alors que 62% des Français disent connaître ou avoir connu une situation de pauvreté, soit 4 points de plus que l’an dernier. Ici, le bruit de la machine à café se mélange aux discussions des habitués, aux parcours de vie souvent morcelés.

Des difficultés pour se nourrir

“Lorsque j’étais SDF, je venais ici pour les prix, maintenant je viens pour le wifi gratuit”

“Jusqu’à l’été 2024, j’ai bénéficié des aides des associations du quartier qui donnent à manger” raconte Léo (le prénom a été modifié), attablé au fond du café. Ce cinquantenaire se présente comme une victime collatérale du Covid : de 2004 à 2021, il travaille en tant que téléconseiller, jusqu’à ce que les mauvaises conditions de travail induites par la crise sanitaire ne le fassent tomber en dépression. S’ensuivent un licenciement, la rue, et les difficultés pour se nourrir. “Lorsque j’étais SDF, je venais ici pour les prix, maintenant je viens pour le wifi gratuit”, explique Léo, venu pour effectuer des recherches d’emploi sur son ordinateur. À quelques mètres de lui, Cédric s’assoit au comptoir jaune près de l’entrée. Ancien informaticien de 50 ans, cela fait dix ans qu’il n’a pas travaillé. “Quand je suis arrivé à Paris ça m’est arrivé de bénéficier des distributions alimentaires, je n’exclus pas de le refaire” confie-t-il. 

Ici, les habitués du quartier viennent partager un moment de convivialité.

Malgré leurs difficultés financières, tous deux réussissent aujourd’hui à se nourrir trois fois par jour. Pourtant, ce n’est pas le cas de tous les Français : 30% d’entre eux rencontrent des difficultés à se procurer trois repas journaliers en 2024, tandis qu’un parent sur trois se prive pour nourrir ses enfants selon le Secours populaire. 

Ça ne me surprend pas, la pauvreté guette tout le monde : vous divorcez, vous perdez un job et même en ayant un job c’est compliqué ” réagit Sylvie Primel, entre deux commandes. “C’est essentiel d’avoir plus d’endroits de ce type” ponctue la bénévole. Pour son collègue Joseph Dupuis, ingénieur à la retraite et bénévole depuis huit ans, “les personnes qui viennent au café ont toujours été les mêmes : nous avons des habitués, des touristes … mais ce sont surtout des personnes d’un certain âge qui viennent ici.” Si la précarité augmente chez les Français, le café n’a pas connu une augmentation de son affluence. 

Un café ressource

“Je me laisse un peu aller…l’accès n’est pas évident : je n’ai pas de médecin traitant”

Autre conséquence de cette précarité : 43% des Français disent rencontrer des problèmes pour payer leurs frais médicaux. Une pauvreté qui éloigne aussi souvent des services de santé : un Français sur trois rencontre ainsi des difficultés pour y accéder. “Je me laisse un peu aller…l’accès n’est pas évident : je n’ai pas de médecin traitant” avoue Cédric. La situation est tout aussi compliquée pour Léo, qui rencontre des difficultés administratives et ne touche plus la complémentaire santé solidaire depuis l’année dernière.

Entre deux demandes de déjeuners, Joseph et Sylvie troquent parfois leurs tabliers pour aider les clients dans leurs démarches administratives. “Ce n’est pas notre vocation première, mais on essaye de faire au mieux” explique désabusée la bénévole. “Le problème c’est qu’il y a beaucoup d’aides en France mais que les démarches sont compliquées pour y accéder : il y a des gens pour qui c’est difficile” poursuit son collègue.

Si le café s’installe au cœur du quartier cossu du 17e arrondissement, la fragilité financière concerne surtout les ruraux, dont 69% ont déjà connu ou été sur le point de connaître la précarité durant leur vie, selon le Secours populaire. Du lundi au samedi, la trentaine de bénévoles de l’association continue de se relayer au comptoir du café des Petits Frères, depuis 1996.

Elisa Robuchon

Pourquoi la recherche de logements étudiants semble encore plus compliquée cette rentrée ?

(Photo de PASCAL GUYOT / AFP)

Sur les bancs de la fac plusieurs jeunes étudiants se trouvent être sans domicile fixe à Paris. Une problématique qui inquiète les associations mais aussi les agences immobilières qui remarquent un réel manque de propositions de locations par rapport aux années précédentes.

« Je n’ai jamais vécu un truc pareil. Etre obligée de dormir à l’hôtel le jour de la rentrée », déclare Noa Perret, 21 ans étudiante en master de journalisme à Paris. « Je viens de Haute- Savoie, je ne connaissais pas du tout Paris avant. Et depuis trois semaines je suis toujours obligée de loger à l’hôtel avec mon copain car nous n’avons toujours pas trouvé de logement. » Mi-septembre, les cours ont bien repris dans les différentes universités de Paris pour autant de nombreux étudiants sont encore en recherche active d’un lieu où domicilier le temps de leurs études. C’est également le cas de Yan Daniel, qui vient également d’arriver sur Paris depuis près d’un mois. « Pour l’instant je squatte le canapé de mon cousin à Asnières. J’ai de la chance d’avoir un plan de secours mais je ne veux pas profiter de l’hospitalité », explique-t-il tout aussi embarrassé que Noa, qui se voit mal aller dormir chez ses amis étudiants locataires de studios dans la capitale.

Une année exceptionnelle

Chaque année la question du logement étudiant est une réelle problématique en France. Pour autant cette année scolaire 2023-2024 semble plus compliquée que les précédentes. « Cela fait 32 ans que je fais ce métier. J’en ai vu passer des crises mais depuis deux ans c’est de plus en plus compliqué », affirme Cyril de Lachaise, président de l’agence immobilière de LACHAISE dans le 5ème arrondissement de Paris. « Le problème n’est pas le nombre d’étudiant qui reste environ le même chaque année mais le nombre de logements en location qui diminue. » Une baisse des propositions de logements qui s’expliquent par plusieurs raisons. Tout d’abord, l’impossibilité pour les professionnels de l’immobilier de proposer à leurs clients les logements considérés comme passoires thermiques. Depuis le 1er janvier 2023 le seuil maximal de consommation d’énergie finale d’un logement est fixé à 450 kWh/m2 et en janvier 2025 ce sera aux logements classés F, ceux consommant entre 331 et 450 kWh/m² par an d’être interdits à la location. « Certains bailleurs ont anticipé leurs travaux pour 2025. Ils préfèrent attendre et voir avec leur diagnostiqueur de performance énergétique pour les mettre aux normes avant 2025. Ces logements sont donc pour l’instant indisponibles », explique Emmanuelle Devevey chargée des locations chez Orpi.

Pas assez de logements Crous


Pour de nombreuses associations, les passoires thermiques ne sont pas les seuls fautifs. « 5300 logements construits en 2022 contre 7 000 en 2017. » C’est ce qu’a annoncé cette semaine La Fondation Abbé-Pierre appelant à un réveil du gouvernement autour de la question de la précarité étudiante. Selon l’association seulement 25% des étudiants boursiers et 6 % de l’ensemble des 2,7 millions d’étudiants peuvent être logés au sein des résidences Crous. Droit au Logement dénonce quant à eux le profit qu’essaient de tirer les bailleurs de la Coupe du monde rugby. « Beaucoup de locations à l’année, de locations étudiantes de 9 mois, seront donc indisponibles jusqu’à fin octobre, car les bailleurs ont prolongé leur saison d’été grâce à la coupe du monde, particulièrement autour du stade de France, mais aussi  dans les 8 autres métropoles », déclarent-ils dans un communiqué appelant à manifester le 30 septembre pour la baisse des loyers et de l’énergie.

Plus d’une centaine d’appels par annonce

Des logements qui se font de plus en plus rares et des étudiants obligés de scruter chaque nouvelle annonce dans la crainte de la voir leur échapper dans la minute qui suit. « Je paie des abonnements sur des sites d’annonces en ligne chaque mois mais le parc locatif est tellement saturé qu’on n’a accès à rien. Avec la reprise des cours la recherche est encore plus compliquée. On n’a pas le temps d’être toute la journée sur l’ordinateur », déplore Yan. Un phénomène remarqué par les agences immobilières qui peuvent recevoir des centaines d’appels dès la publication d’une location. « J’ai déjà eu 350 appels pour un 18 m² », affirme Emmanuelle Devevey qui contrairement à Cyril de Lachaise continue d’en proposer sur internet. « Cet été je ne mettais plus sur internet les studios. Je ne peux pas gérer autant d’appels. Je les proposais seulement à la première personne qui se présentait à l’agence mais ça crée encore plus d’inégalités à l’accès au logement finalement. »

 

Alyssia Gaoua

 

 

 

 

 

 

Fin de la trêve hivernale : trois questions à Rachid El Assaoui, travailleur social au Secours islamique France

Alors que la fin de la trêve hivernale débute aujourd’hui, Rachid El Assaoui s’attend à voir des « nouveaux pauvres ». 

 

Rachid El Assaoui est travailleur social au Secours islamique. Il est spécialisé sur le département de Seine-Saint-Denis (93). © DR

Comment analysez-vous la fin de la trêve hivernale ? 

Beaucoup de monde n’aura plus de logement. Plus ça va aller, plus on aura des personnes dans la rue. Dans un premier temps, il n’y avait que des hommes. Là, on va avoir des femmes et même des familles. On rencontre des personnes qui perdent leur travail, et qui se retrouvent du jour au lendemain dans la rue. Je les appelle les nouveaux pauvres.

Comment vous organisez-vous au Secours islamique ? 

On a mis en place trois maraudes alimentaires en plus des trois maraudes sociales que nous faisons habituellement. On fait aussi des distributions de colis alimentaires deux vendredis par mois, et on les a élargi aux étudiants de l’université Paris 8 (Seine-Saint-Denis) depuis le mois de mars.

Les jeunes font donc partie de ces « nouveaux pauvres » …

Oui. Avant on n’avait pas affaire à des étudiants. La plupart d’entre-eux viennent de l’étranger, ils n’ont pas accès aux bourses. Un jeune qui vivait encore chez sa mère a perdu son boulot dans la restauration. Sa mère touchait seulement le RSA, et elle ne pouvait plus le gérer. Il a dû partir, et il s’est retrouvé à la rue. Au 115, il n’y a plus de choses de faites pour les enfants en bas âge.

Baptiste FARGE

Jeunes sportifs de haut niveau, salaires de bas niveau

En France, les jeunes athlètes de haut niveau doivent suivre des études tout en pratiquant leur sport de façon intensive. Des conditions délicates pour trouver un futur emploi. La loi Braillard en 2015 a tenté d’apporter des solutions pour régler ce problème, mais certains doutent de son efficacité.

 

Près de la moitié. C’est la part de sportifs professionnels ou sportifs de haut niveau (SHN) qui gagnent moins de 500€ par mois. Bien loin de l’image des sportifs aux salaires mirobolants et aux contrats d’image démesurés, la réalité du sport de haut niveau en France est beaucoup moins mirifique.

Le symbole : en août, le journaliste Patrick Montel révèle en direct sur France 2 la situation précaire de Mamadou Kassé Hann. Le meilleur spécialiste français du 400m haies est sans emploi, en plein transfert du footballeur Neymar au PSG, contre 222 millions d’euros et un salaire de 36 millions d’euros par an. Un exemple qui fait écho à d’autres, comme celui de sportifs obligés de recourir à un appel aux dons pour financer leur participation aux JO de 2016, faute de travail ou de rémunération suffisante.

L'athlète français Mamadou Kassé Hann. Crédits Marie-Lan Nguyen Wikimedia Commons
L’athlète français Mamadou Kassé Hann. Crédits Marie-Lan Nguyen Wikimedia Commons

Un « double projet » souvent négligé

Des études menées par des syndicats ou des fédérations sportifs confirment cette impression. Selon le rapport Karaquillo sur le sport de haut niveau en 2015, 75% des anciens basketteurs n’ont pu utiliser leurs droits à la formation professionnelle, afin de financer leur insertion sur le marché du travail après leur carrière. De même, 57 % des coureurs cyclistes professionnels français en activité affirmaient en 2012 ne pas avoir de projet professionnel.

En cause : les jeunes sportifs, qui rêvent d’accéder aux sommets, se focalisent sur leur discipline en négligeant les études. La pratique d’une activité physique intense et chronophage ne permet pas non plus à des jeunes d’étudier dans les mêmes conditions que les autres. Alors même que « le nombre de sportifs en formation qui parviennent à accéder au haut niveau demeure infime », comme l’affirme Jean-Pierre Karaquillo dans le rapport.

Une grande majorité de jeunes athlètes, n’ayant pas réussi à percer dans le sport, se retrouve ainsi sans qualifications pour trouver un emploi. Une situation étonnante au vu de la législation du sport français, qui oblige les jeunes SHN à poursuivre un « double projet ». En clair : à pratiquer leur sport intensivement tout en suivant des études. L’Insep (Institut national du sport et de la performance) et les CREPS (centres d’entraînement nationaux), notamment, disposent ainsi de conventions avec des universités pour y intégrer leurs sportifs dans des cursus. 60% des sportifs professionnels ou de haut niveau en France sont ainsi en formation.

Des membres de l'équipe de France de tae-kwondo s'entraînent à l'Insep. Crédits Alain Bachelier Flickr.
Des membres de l’équipe de France de tae-kwondo s’entraînent à l’Insep. Crédits Alain Bachelier Flickr.

Sportifs absentéistes recherchent travail

Mais même en ayant achevé son cursus universitaire, le jeune sportif professionnel (salarié par un club pour exercer son activité sportive) ou de haut niveau (pas nécessairement rémunéré) n’est pas non plus un « employable » classique. La pratique intense de son sport l’empêche d’avoir des horaires réguliers pour travailler. Il doit aussi souvent s’absenter lors des périodes de compétition. Enfin, le risque d’indisponibilité lié à des blessures est beaucoup plus fréquent. Autant de caractéristiques susceptibles d’effrayer un employeur.

A lire aussi sur la reconversion de carrière : Thomas Poitrenaud : « Avoir été sportif de haut niveau, c’est avoir l’esprit d’équipe pour les entreprises »

En 2014, le Premier ministre de l’époque, Manuel Valls, annonce vouloir se saisir du problème. « À l’exception de quelques sportifs bénéficiant d’une forte exposition médiatique, les futurs membres des équipes de France ne perçoivent pas de revenus suffisants pour subvenir à leurs besoins », déclarait-il. Le secrétaire d’Etat aux sports, Thierry Braillard, commande alors un rapport pour tenter d’apporter des solutions.

 

Hélène Lefebvre, championne de France d'aviron. Crédits département du Val-de-Marne.
Hélène Lefebvre, championne de France d’aviron. Crédits département du Val-de-Marne.

Une loi ambitieuse

Le rapport Karaquillo, qui se fonde sur une étude approfondie de la situation financière des sportifs de haut niveau, présente différentes pistes pour améliorer les formations des SHN, allouer des ressources financières, sécuriser leur situation professionnelle … Les préconisations en direction des jeunes sportifs insistaient sur la nécessité de mieux préparer leur avenir professionnel et de faciliter leur futur accès à l’emploi. La plupart ont été adoptées en 2015 dans la loi Braillard sur le sport de haut niveau.

Au niveau des études, tout d’abord, pas question d’abandonner le fameux « double projet » à la française. Il s’agit plutôt d’améliorer le dispositif. Les fédérations et clubs professionnels doivent maintenant assurer le suivi d’orientation de leurs athlètes, en créant par exemple des postes de référent professionnel. Parmi les autres mesures : davantage de conventions avec des formations universitaires proposant des aménagements, via la reconnaissance pour les jeunes SHN d’un statut similaire aux étudiants salariés. Enfin, il y aura plus de dérogations aux conditions d’accès à certaines formations, ou des exemptions de concours.

Une fois les études terminées, il convenait aussi de faire tomber les difficultés auxquelles les athlètes font face pour trouver un emploi. La mesure phare : la généralisation des CIP (Conventions d’insertion professionnelle), ces contrats de travail qui permettent aux athlètes de travailler à temps partiel tout en étant rémunérés à temps plein. Du côté des clubs professionnels, le CDD « sport » remplace le CDD « d’usage », supposément moins précaire : la durée du contrat ne peut pas être inférieure à la durée d’une saison sportive, et les clubs doivent assurer le suivi professionnel de leurs sportifs.

A lire sur la mise en pratique du « double projet » : Alex Fava, escrimeur professionnel et chargé de com’

Les sportifs mis de côté

Ces mesures ont suscité beaucoup d’espoir chez les athlètes de haut niveau. S’il est encore trop tôt pour juger de leur efficacité, certains spécialistes regrettent que la loi ne serve pas l’intérêt des sportifs. Sur le site Theconversation.fr, Sébastien Fleuriet, professeur de sociologie à l’Université Lille 1, affirme que le rapport Karaquillo aurait en fait été commandé pour satisfaire les clubs professionnels, réticents à voir le CDI gagner du terrain face au « CDD d’usage ».

« Un article [de la loi] vient consacrer la naissance d’un nouveau type de contrat, le contrat à durée déterminée … « spécifique », (…) imitant en tout point le CDD d’usage et venant le remplacer de manière parfaitement légale. cette loi n’a donc guère pour vocation effective d’améliorer le sort des sportifs de haut niveau. Il s’agit plutôt de conforter les employeurs du monde sportif dans leur stratégie du tout CDD. »

Même son de cloche chez l’avocate spécialisée dans le sport Tatiana Vassine, qui regrette aussi des avancées limitées à un petit nombre. « La loi a permis à environ 150 athlètes de bénéficier du Pacte de performance (dispositif mis en place par l’Etat en 2014 pour inciter certaines entreprises à embaucher des athlètes, ndlr). Certes, ce n’est pas rien, mais par rapport au nombre des sportifs, cela ne règle pas le problème. »

De surcroît, la loi n’aurait pas réglé le problème de la disponibilité variable des athlètes. « Seules les entreprises entrant dans le cadre du Pacte de performance sont concernées par cette problématique. Les aides d’Etat peuvent se montrer incitatives pour embaucher. Mais la réalité, c’est que la plupart de mes clients non professionnels sont toujours confortés à une précarité importante, et ont de grandes difficultés à mêler vie sportive et professionnelle. »

Douglas De Graaf