Une vitrine saccagée. Dans cette petite rue tranquille de Rennes, la librairie Le Failler a été dégradée à répétition depuis une semaine. Les décorations des vitrines aux couleurs du drapeau LGBT ont été arrachées. Elles avaient été installées à l’occasion du Mois des fiertés, une célébration internationale qui rappelle chaque année le combat pour les droits LGBT+. Des salariés auraient aussi été pris à partie en garnissant la vitrine le 1er juin, subissant des insultes homophobes, comme le rapporte 20 Minutes. Contactée, la librairie confirme les faits, mais temporise. « Je ne crois pas que c’était vraiment de l’homophobie. Les perturbateurs avaient l’air de collégiens venus faire n’importe quoi », assure une employée de la boutique.
Le 17 mai dernier, le gouvernement et Santé publique France ont lancé une campagne de lutte contre les discriminations et les violences subies par les personnes LGBT+. Des affiches ont été déployées en France, sans convaincre la plupart des membres de la communauté LGBT+. Ni certaines communes.
Depuis désormais quinze jours, les arrêts de tram ou de métro sont illustrés par des slogans comme « oui, mon pote est gay », « oui ma fille est lesbienne » ou encore « oui ma petite-fille est trans ». Dans le cadre de son plan national d’actions pour l’égalité, contre la haine et les discriminations anti-LGBT, le gouvernement et Santé publique France ont lancé une campagne de communication. Il s’agit, à partir d’affiches mettant en scène une personne hétéro et une autre affiliée aux LGBT+, afin de « montrer la diversité des sexualités et des identités de genre et de valoriser leur acceptation pour susciter davantage l’adhésion de tous les publics ».
Jérémy, lycéen à Mouvaux, près de Lille, est gay. Il se dit satisfait de cette démarche. Selon lui, « c’est un petit pas vers la tolérance et l’acceptation de soi ». D’après le jeune homme de 18 ans, « il n’y a pas de bonne ou de mauvaise façon de porter le message du moment que l’on impose rien à personne et que l’on essaie de faire comprendre aux autres comment être plus tolérants ».
Non mais là il y a quoi de choquant? Pour le coup la campagne est un message de tolérance mêlant hetero cis et personnes lgbtqia+ pour montrer qu’il y a 0 différence. Faut arrêter de s’enfoncer dans le communautarisme excessif qui est tout aussi problématique. https://t.co/zEJG9ojAUI
« La personne discriminée n’est pas en charge du discours »
Pour autant, beaucoup de personnes se revendiquant comme LGBT+ ne l’entendent pas de la même oreille. D’après Lou, bi-sexuel et étudiant, « cette campagne est un échec ». Selon l’homme de 22 ans, « la personne discriminée n’est pas en charge du discours, elle est un objet, et elle est représentée comme anormale dans le discours puisque membre de la communauté LGBT+ ».
Même son de cloche chez le politiste Lionel Cordier. « C’est une campagne dirigée vers les hétérosexuels, explique-t-il. Elle joue sur la notion de tolérance, il n’y a aucune réflexion sur le fonctionnement de l’homophobie. Elle agit juste sur l’idée que les hétéros doivent nous accepter, ça reste un propos au ras des pâquerettes politiquement. »
Vu cette campagne dans une gare auj. Ce qui me gêne un peu c’est que la personne LGBT+ n’a pas de visage et ne s’exprime pas. La personne au centre de l’affiche (photo+texte) est celle qui ne subit pas la discrimination (a priori). C’est donc pour elle que c’est dur à porter? https://t.co/AxtulxMuv4
« Même dans des représentations qui se veulent positives, les gays ne sont pas représentés comme des sujets autonomes »
Ainsi, selon Lou, « pour faire changer les mentalités, il faut exprimer clairement dans l’espace public ce que vivent les personnes LGBT+ », et ne pas se contenter du slogan de cette campagne : « À nous de faire la différence. »
Lionel Cordier ajoute qu’il est nécessaire de modifier les illustrations des LGBT+. « Même dans des représentations qui se veulent positives, les gays ne sont pas représentés comme des sujets autonomes, regrette-t-il, par contre pour les affiches de lutte contre l’homophobie, quand ce sont des personnes en souffrance là on les représente. Mais on voit très peu l’agresseur. ».
Une campagne paternaliste et faussement bienveillante. Tolérer une personne, c’est estimer qu’on lui fait une fleur mais qu’elle ne le mérite pas. Les LGBT n’ont pas à être tolérés en tant que sous-citoyen-ne-s mais acceptés comme citoyen-ne-s à part entière ! https://t.co/QBTI5lVl3I
— Coré-Perséphone 🦄 🏳️🌈 🏴 (@Petite_Core) May 26, 2021
Une campagne rejetée par certaines communes mais pour d’autres raisons
Autre élément, la campagne suscite des désapprobations dans certaines communes de France, et notamment à Versailles (Yvelines). Trois conseillers municipaux, Céline Jullié (En avant Versailles), François Billot de Lochner (Liberté politique) et Constance Prazel (Liberté politique) ont signé une lettre pour demander au maire de Versailles, de retirer ces affiches.
Selon Actu.fr, le trio municipal estime que « cette campagne, sous couvert d’appel à la tolérance, expose aux yeux de tous, et en particulier des enfants, des situations sexuelles et familiales qui n’ont pas à être promues ni encouragées ».
Une réaction qui n’étonne pas Lionel Cordier « À Versailles, c’est toujours la même chose. Il faut vraiment empêcher ces municipalités réactionnaires de faire obstacle aux campagnes de sensibilisation ».
Mardi 10 octobre est à marquer d’une pierre blanche pour les homosexuels du Kosovo. La toute première marche des fiertés, ou Gay Pride, a été célébrée ce mardi dans les rues de la capitale. Un événement particulièrement important dans un pays où une grande part de la population reste homophobe.
Environ 300 personnes étaient réunies ce mardi 10 octobre dans les rues de Pristina, la capitale du Kosovo. La parade, nommée « In The Name Of Love » (« Au Nom de l’amour », d’après la chanson U2) était riche en bannières, drapeaux arc-en-ciel, musiques et slogans, comme en témoignent certains tweets de journalistes.
Hundreds of people attended Kosovo’s first ever Pride Parade, including President Thaci, w/ celebrations for the historic occasion still underway in Pristina pic.twitter.com/Dmg6w898Mk
D’autres marches de plus faible ampleur avaient été organisées au cours des trois dernières années, marquant l’affirmation de la communauté LGBT au sein du pays indépendant depuis 2008. Organisée par neuf ONG, cette marche est la première à se dérouler de façon aussi visible et officielle.
Le Président Hashim Thaçi a fait une apparition au départ de la marche. L’occasion de faire part du soutien de son gouvernement envers cette démarche et d’insister sur l’importance de l’égalité de toutes les communautés dans le pays. « Nous ne devons pas laisser quiconque au Kosovo subir la peur et la menace de la part de n’importe quelle personne ou de n’importe quel groupe » a-t-il déclaré.
Il a ensuite publié plusieurs images de la manifestation sur son compte Twitter. En revanche, l’absence du premier ministre a été soulignée.
Une large partie de la population, majoritairement musulmane et conservatrice, est toujours hostile à la communauté LGBT. Si la manifestation s’est déroulée sans incident, sur les réseaux sociaux, les propos haineux ont, eux, débordés de toute part.