En France, les Américains préfèrent Bernie Sanders

A l'étranger, les démocrates ont massivement voté pour Bernie Sanders (Phil-Roeder. Flickr-Creative Commons)
A l’étranger, les démocrates ont massivement voté pour Bernie Sanders (Phil-Roeder. Flickr-Creative Commons)

Les Américains démocrates installés en France n’ont qu’un nom en tête pour la course à la Maison Blanche : Bernie Sanders. Le 4 mars, 2 800 Américains avaient fait entendre leurs voix dans les primaires par le biais de l’association Democrats Abroad, qui représente le parti à l’étranger. Bernie Sanders l’a largement emporté avec 63 % des votes contre 36 % pour sa rivale, Hillary Clinton.

Entre 4 et 7 millions d’Américains vivent à l’étranger. Côté démocrates, certains électeurs votent à distance dans leur État d’origine, mais les membres de Democrats Abroad, eux, représentent un 51e État à part entière, comme la Floride ou le Texas. « À l’issue des scrutins organisés entre le 1er et le 8 mars dans plus de 170 pays où nous sommes présents, nous élirons 17 délégués, qui seront à la Convention nationale », explique Joseph Smallhoover, président de Democrats Abroad France. Côté républicains, les Américains de l’étranger votent tous dans le dernier État où ils ont été inscrits.

L’influence du socialisme français

« Les membres de Democrats Abroad sont souvent des personnes installées en France depuis vingt ou trente ans », explique Jean Eric Branaa, maître de conférences à l’université Paris II Panthéon-Assas et spécialiste de la politique américaine.  » Ils connaissent depuis des années la sécurité sociale pour tous et l’école gratuite. Pour eux, Bernie Sanders, c’est le candidat qui introduit ces idées dans leurs pays d’origine. »

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Il y a 30 ans, Kathleen Higgins Sanchez posait ses valises en France. Originaire du Minnesota, cette chercheuse en sciences de 55 ans n’a pas hésité une seule seconde avant de voter pour Bernie Sanders. « Je vois les choses différemment des gens qui n’ont jamais quitté les États-Unis. J’ai déjà connu des politiques socialistes et j’en ai vu les bénéfices », explique t-elle.  » Je n’ai plus peur du mot socialisme ». Julia Edward est arrivée en France il y a six mois pour travailler comme jeune fille au pair. Comme beaucoup d’autres étudiants, la jeune femme de 18 ans soutenait déjà activement le candidat avant son départ. «  Maintenant, je suis totalement convaincue. J’ai pu voir que le socialisme fonctionne et je suis sûre que certaines politiques peuvent être facilement instaurées aux États-Unis », témoigne-t-elle. Parmi les promesses préférées des Américains installés dans l’Hexagone : la réforme des impôts et de l’éducation, une refonte du droit du travail ou encore une politique étrangère pacifiste.

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La nouveauté contre l’establishment

A 48 ans, Elizabeth Schub Kamir a aussi donné sa voix à Bernie Sanders, malgré son envie de voir une femme à la tête des États-Unis. « Hillary Clinton a des idées trop conservatrices, surtout en matière d’affaires étrangères », confie la professeure à l’école internationale de création audiovisuelle et de réalisation. À l’inverse, c’est l’expérience de l’ancienne Première dame qui a séduit Suzy Glespen. «  Ça fait vingt ans que je soutiens Hillary Clinton. Elle a la maturité et l’expérience suffisante pour diriger le pays « , affirme la femme de 65 ans. « Elle a été sénatrice et a mené avec brio son mandat de secrétaire d’État. C’est certain qu’elle saura mener à bien ses projets à Washington. »

 » Clinton représente l’establishment américain que les expatriés ont parfois fui « , analyse Jean-Eric Branaa. « Pour autant, elle est appréciée et ceux qui ont voté Sanders sauront se mobiliser derrière elle le moment venu. »

Qu’ils aient voté Sanders ou Clinton, tous refusent de voir Donald Trump accéder à la présidence des États-Unis. « Les Américains à l’étranger ont plus à cœur que quiconque l’image de leur pays. Sanders a une bonne réputation et renvoie une image positive des États-Unis. A l’inverse, ils ont honte de Trump comme ils avaient eu honte de Bush père », résume le politologue. « Le succès de Trump n’aide pas à améliorer notre image », s’agace Elizabeth Schub Kamir.

À l’échelle mondiale, l’ancien sénateur du Vermont obtient 69 % des suffrages, soit environ 23 700 voix sur 34 500. L’influence du vote des Américains de l’étranger reste donc minime de part l’avance accumulée par Hillary Clinton. « Il n’y aura pas d’influence mathématique mais Sanders pourra au moins se vanter d’avoir su capter cet électorat particulier », conclut Jean-Eric Branaa.

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Cyrielle Cabot

Article initialement publié sur le Monde.fr le 21/03/2016

Manifestations à New York suite à la nouvelle relaxe d’un policier

Après Ferguson, New York. Pour la deuxième fois en moins de deux semaines, un jury populaire a décidé de ne pas poursuivre un policier blanc impliqué dans la mort d’un homme noir. De nombreux manifestants se sont réunis à New York pour exprimer leur indignation.

@l'obs
« I might be next » (« je suis peut être le prochain ») : un manifestant s’indigne dans les rues de New York suite à la relaxe du policier responsable de la mort d’Eric Holder, un afro-américain.

Depuis deux soirs, la colère gronde dans les rues de New York. La décision du grand jury de Staten Island de ne pas inculper Daniel Pantaleo, le policier impliqué dans la mort d’Eric Garner, un père de famille noir, a remué le couteau dans la plaie. Le 24 novembre, un autre grand jury prenait une décision similaire à Ferguson, dans le Missouri. En ne retenant aucune charge contre le policier qui avait abattu Michael Brown, un adolescent noir, de violentes manifestations avaient éclaté à Ferguson et dans tout le pays.

Eric Garner était soupçonné de vendre illégalement des cigarettes sur le terminal de Staten Island, à New York. Lors de son interpellation, l’homme, qui n’était pas armé, a été plaqué au sol. Daniel Pantaleo a placé son bras autour de son cou pour le maintenir. Eric Garner s’est plaint plusieurs fois de ne plus pouvoir respirer avant de perdre connaissance. Il est décédé quelques instants après son transport à l’hôpital. La scène de son arrestation a été filmée par des amateurs.

« Ferguson est partout »

Jeudi soir, les manifestants étaient plusieurs milliers à s’être rassemblés. Ils ont notamment pris d’assaut le pont de Brooklyn. Dans le cortège, on pouvait lire sur les pancartes « Le racisme tue », « Ferguson est partout » ou encore « La vie des noirs compte ».

Si les manifestations ont été beaucoup plus pacifiques que celles de Ferguson, les forces de l’ordre ont toutefois procédé, selon le New York Times, à plusieurs dizaines d’arrestations. Le maire de la ville, Bill de Blasio, a appelé au calme : « la frustration est compréhensible, a-t-il déclaré. Des siècles de racisme nous précèdent, mais en travaillant ensemble, nous pouvons nous détourner de cette histoire ». Sur Twitter, le maire new yorkais a reconnu son émotion suite à la décision du grand jury.

Réformer les méthodes policières

Jeudi soir, en parallèle des manifestations, un autre homme noir a été abattu par un policier à Phoenix, en Arizona. Lui non plus n’était pas armé. Une énième bavure qui vient s’ajouter à une longue liste de violences policières. Un article des Décodeurs du journal Le Monde explique que la police américaine, poussée par une puissante industrie de la défense, est de plus en plus militarisée.

En réaction à ces bavures policières, la démocrate Hilary Clinton a demandé une réforme du système pénal et des méthodes policières, déplorant que les Noirs aient « plus de chances d’être interpellés et fouillés par la police, inculpés et condamnés à des peines plus longues » que les Blancs. Suite au scandale de Ferguson, le président Barack Obama a quant à lui proposé d’équiper les policiers de caméras embarquées. Le ministre noir de la Justice, Eric Holder, a promis en début de semaine de « nouvelles règles rigoureuses –et des garde-fous solides– pour aider à mettre fin au délit de faciès, une bonne fois pour toutes ».

Fanny Zarifi