Vatican : un colloque sur la biodiversité mobilise scientifiques et directeurs de muséums d’histoire naturelle

Les lundi 13 et mardi 14 mai, des experts scientifiques se réunissent en colloque au Vatican pour parler de la préservation de la biodiversité.
« Nous avons besoin d’un argument solide pour convaincre les gens de l’importance de la biodiversité ». / Crédits : Brad Smith Creative Commons

Entre espoir et défaitisme après un rapport choc de l’ONU, des experts étaient réunis pour un colloque sur la préservation de la biodiversité intitulé « Arche de Noé pour le XXIe siècle », organisé par l’Académie pontificale des sciences. La grand messe des scientifiques intervient une semaine après la publication d’un rapport choc de l’ONU dénonçant le déclin de la nature et de ses espèces vivantes. Environ un million d’espèces animales et végétales sont déjà menacées d’extinction, et beaucoup pourraient disparaître « dans les prochaines décennies » rapporte la publication.  Les directeurs de muséums d’histoire naturelle se sont mobilisés, bien que pessimistes.

Besoin d’un argument solide

« Nous avons besoin d’un argument solide pour convaincre les gens de l’importance de la biodiversité« , relève Peter Raven, professeur de botanique à l’université de Saint-Louis aux Etats-Unis. « Or, si on évoque par exemple l’importance cruciale des micro-organismes pour la vie sur terre, y compris humaine, les gens « perdent tout intérêt« , déplore l’expert.

« Pourtant, sans les bactéries nous ne serions rien » affirme de son côté le directeur du Muséum d’histoire naturelle de Paris, Bruno David, en rappelant qu’elles sont dix fois plus nombreuses dans notre corps que les cellules humaines et qu’elles jouent un rôle indispensable, en particulier dans la digestion.

« La biodiversité c’est comme les rivets de la tour Eiffel : si vous en enlevez un, rien ne se passe, deux non plus, et ainsi de suite jusqu’à ce que la tour s’effondre, et vous ne saurez jamais lequel était le plus important« , observe M. David.

Anne-Cécile Kirry avec AFP

Une étude sanitaire juge le glyphosate « moins cancérogène que la charcuterie »

 

Un rapport parlementaire sur le glyphosate, l’herbicide très contesté, sera présenté aux sénateurs jeudi. L’étude réalisée par l‘Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques fait déjà débat après les déclarations d Pierre Médevieille Vice-président de l’Office qui juge que rien ne peut prouver la dangerosité du glyphosate. De nombreuses personnalités politiques ont réagi à ces déclarations accusant le sénateur d’être de connivence avec les lobbies.
En France le Roundup, l’herbicide vendu par Mosanto, est interdit à la vente aux particuliers depuis le 1er janvier 2019. / Crédit : Global Justice Now – Flickr

« J’affirme que si le glyphosate a certainement beaucoup de défauts, aucune étude scientifique ne prouve formellement sa cancérogénicité ni en France, ni en Europe, ni dans le monde » c’est ce qu’a déclaré Pierre Médevielle lors d’un entretien dans le journal La Dépêche. Vice-président de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, le sénateur UDI réfute tout lien entre les cancers et l’herbicide.

Pendant quinze mois, des parlementaires dont Pierre Médevielle ont été chargés, par la commission des Affaires économiques de l’Assemblée nationale et la commission du Développement durable du Sénat, d’enquêter sur l’herbicide. Les conclusions de ce rapport seront officiellement présentées jeudi au Sénat. Mais Pierre Médevielle, rapporteur du rapport, affirme déjà que le glyphosate est « moins cancérogène que la charcuterie« . Pour lui, le « climat d’hystérie »  autour du produit est une « névrose française« .

Pour réaliser cette étude, les parlementaires ont auditionné l’INRA et le CNRS pour avoir un point de vue scientifique sur le sujet. Ils se sont basés sur des études menées par l’Agence européenne de sécurité alimentaire de Parme à Bruxelles, agence que le parlementaire considère comme la « plus performante en Europe et probablement au monde« .

Depuis 2015, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), une agence spécialisée de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), a classé le glyphosate comme « cancérogène probable« . Mais selon Pierre Médevielle,  le glyphosate n’est pas une priorité. Des produits utilisés notamment en viticulture seraient « beaucoup plus dangereux« .

Un rapport déjà très contesté

Les réactions ne se sont pas fait attendre lundi matin après les déclarations de Pierre Médevielle.  Pour José Bové, figure du mouvement altermondialiste,  cette étude ne peut pas être prise en compte car « le glyphosate ne s’analyse pas seul, mais avec ses adjuvants« . Le député européen pense qu’ « il serait intéressant d’aller plus loin pour savoir si les parlementaires ont été approchés« . Au micro de RTL, il déclare que les « parlementaires ont repris le discours prémâché de Monsanto » et il accuse le groupe d’être le réel auteur de ce rapport, « une fois de plus on a un enfumage XXL« .

 

Le député Matthieu Orphelin, ancien porte parole de la Fondation de la Nature et l’Homme, rejoint l’avis de José Bové et met en cause les lobbies.

« Vous ne lirez pas cela dans le rapport, » tempère Cédric Villani

Le député LREM, Cédric Villani, est lui aussi vice-président de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologique et « regrette que le sénateur Médevielle, en s’exprimant prématurément et sous une forme qui ne reflète pas le rapport, ait contribué à ajouter de l’huile sur le feu ». 

Invité sur franceInfo, le mathématicien a tenu à mettre les choses au clair. Il estime que les déclarations de Pierre Médevielle sont à prendre à titre personnel et n’engagent pas l’Office. « Sur la forme, il s’exprime avant la conférence de presse officielle, et sur le fond, il a parlé de certains éléments du rapport, mais y a ajouté son opinion propre, ses conclusions propres ».

Il explique que le but de ce rapport « est de dépassionner et d’expliquer la complexité, d’expliquer pourquoi le glyphosate fait couler tant d’encre. Il y a des pratiques hautement contestables de Monsanto à l’égard du glyphosate. Et évaluer de façon sérieuse la nocivité d’un produit, c’est un travail extrêmement compliqué. »

Depuis le 1er janvier, les particuliers ne peuvent plus acheter de Roundup, le pesticide de Monsanto qui appartient au groupe Bayer. Le gouvernement s’est engagé à interdire le glyphosate « dans ses principaux usages » d’ici 2021, et pour tous les usagers d’ici cinq ans.

Poutchie Gonzales

 

 

 

 

 

 

Raoni en tournée européenne pour alerter sur la déforestation

Le légendaire chef indigène Raoni Metuktire entame aujourd’hui une tournée en Europe de sensibilisation aux enjeux de la déforestation en Amazonie.
Le chef indigène combat pour les droits des peuples indigènes depuis plus de 40 ans./ Geraldo Magela – Agência Senado – Creative Commons

Arrivé hier à Paris, il entreprend un voyage de trois semaines pour s’entretenir avec différents chefs d’États européens, ainsi que le Pape François. Il rencontrera le président français, Emmanuel Macron, et son ministre de l’environnement François de Rugy dans les prochains jours avant de se diriger, accompagné de trois autres chefs de la région du Xingu, en Belgique, en Suisse, au Luxembourg, à Monaco, en Italie et au Vatican où une rencontre avec le Pape François est prévue. 

Celui qui a autrefois écumé les festivals et salles de concerts avec le chanteur Sting pour alerter sur la déforestation en Amazonie, tentera de collecter un million d’euros pour la protection de la réserve de Xingu. Véritable « île verte », celle-ci abrite 25 communautés autochtones du Brésil. L’objectif : réhabiliter le périmètre de la réserve d’environ 1700 km. 

Le combat de toute une vie 

Raoni Metuktire combat la déforestation depuis plus de 40 ans. C’est le film « Raoni » réalisé par Jean-Pierre Dutilleux, sélectionné à Cannes en 1977 et aux Oscars en 1978, qui le fait connaître du grand public. Grâce à son abnégation et une tournée mondiale organisée en 1989 par l’association Forêt Vierge, dont le siège est à Paris, la Grande Réserve du Xingu a été créée et officialisée par un décret présidentiel brésilien en 1993. 

Depuis il continue son lutte pour la reconnaissance des droits des indigènes et la protection de leurs terres. Un combat qui s’avère de plus en plus difficile à mener depuis l’élection de Jair Bolsonaro comme président du Brésil en janvier dernier. Ce dernier entend ouvrir les territoires autochtones à l’exploitation minière et agricole ainsi qu’un assouplissement des normes d’octroi de permis d’exploitation forestière. 

LIRE AUSSI > Le poumon de la planète menacé depuis l’élection de Bolsonaro

Raoni Metuktire sera ce soir sur le plateau du journal de France 2 en amont de sa rencontre avec Emmanuel Macron.

Thomas Coulom

Amazonie : le poumon de la planète menacé

L’arrivée au pouvoir en janvier dernier de Jair Bolsonaro à la présidence du Brésil a accentué les inquiétudes des défenseurs de la forêt amazonienne.
La forêt amazonienne possède la plus grande diversité d’espèces de la planète./ Crédit : Véronique Debord-Lazaro – Flickr

Le président d’extrême droite revendique une stratégie d’exploitation des sols et des forêts de l’Amazonie ainsi qu’une volonté d’acculturation violente des populations autochtones. En campagne il avait prononcé ces mots dans un discours : « Les minorités devront s’adapter à la majorité ou simplement disparaître. » Il s’est aussi engagé à retirer le Brésil de l’Accord de Paris sur le climat si Brasília ne conservait pas la pleine souveraineté sur l’Amazonie. Le président a également mis en place un processus de militarisation de la branche environnementale du gouvernement, en nommant  des cadres de l’armée à des postes clés. Son objectif : « Mettre fin au cadre idéologique du secteur, dirigé par des ONG (…) » 

Pour rappel, la déforestation, qui avait baissé de manière spectaculaire en Amazonie de 2004 à 2012, a augmenté drastiquement: +54% par rapport à janvier 2018, d’après l’ONG Imazon. La forêt amazonienne possède la plus grande diversité de la planète. On y compte un nombre impressionnant d’espèces : 40.000 de plantes, 3.000 de poissons d’eau douce, près de 1.300 d’oiseaux, 370 de reptiles. C’est la plus grande forêt pluviale au monde, elle représente 50% de la surface des forêts tropicales. 63% de cette forêt repose sur le territoire brésilien. 

Selon les projections du Fonds mondial pour la nature (WWF), si son exploration se maintient à ce rythme, 55% de sa surface aura disparu d’ici 2020. 

Thomas Coulom