Décès de Goolaerts et Diop : la mort subite des sportifs est « un vrai sujet d’inquiétude » pour les cardiologues

hospital-1636334_960_720

Le coureur belge Michael Goolaerts, 23 ans, est décédé dimanche des suites d’un arrêt cardiaque. Samedi, Samba Diop, footballeur au Havre (L2), a été retrouvé sans vie à son domicile. Début mars, Thomas Rodriguez, milieu de terrain du centre de formation de Tours (L2), avait trouvé la mort en raison d’une malformation cardiaque. La question de la mort subite des sportifs est « un vrai sujet d’inquiétude », pour le cardiologue du sport Dominique Choquet.

Dimanche soir, à Lille, le coureur belge Michael Goolaerts, âgé de 23 ans, est décédé des suites d’un arrêt cardiaque. Il avait été retrouvé dans l’après-midi inanimé sur le deuxième des vingt-neuf secteurs pavés de la « reine des classiques », à laquelle il participait pour la première fois. Une autopsie du coureur sera pratiquée en France dans les prochains jours, a indiqué lundi le parquet de Cambrai qui a ouvert une enquête afin d’élucider « les circonstances » de ce décès. Samedi 7 avril, c’est le jeune espoir Samba Diop, footballeur du club de L2 du Havre, qui était retrouvé inanimé au domicile de ses parets, dans des circonstances encore inconnues. Début mars, Thomas Rodriguez, un milieu de terrain du centre de formation de Tours (L2) également âgé de 18 ans, avait trouvé la mort, en raison d’une malformation cardiaque. Les décès de ces jeunes sportifs de haut niveau surprennent et inquiètent. Le cardiologue du sport Dominique Choquet a accepté de répondre à nos questions.

Celsa Lab : Quelles peuvent-être les causes des morts subites des sportifs ?

Dominique Choquet : Il y a deux types de cas : les plus de 35 ans, et les moins de 35 ans. Dans le premier cas, on a quasiment toujours à faire à des infarctus. Dans le second, ce sont généralement des maladies du coeur pas faciles à déceler. La plus courante, c’est la cardiomyopathie hypertrophique. C’est une maladie du muscle cardiaque vraiment pas évidente à diagnostiquer, notamment parce qu’elle se confond souvent avec le coeur d’athlète. Quand quelqu’un fait régulièrement du sport, et notamment à haut niveau, il est parfaitement normal que son coeur « grossisse, qu’il y ait une augmentation de sa masse musculaire. L’évolution est similaire, on peut donc mélanger les deux. Toute la difficulté réside dans le fait de pouvoir distinguer la pathologie de la physiologie. Les morts subites peuvent aussi être provoquées par l’utilisation de substances, particulièrement le dopage. Ce n’est pas du tout exhaustif mais ce sont les deux causes principales.

Quels moyens existent-ils pour prévenir ces décès ?

D.C. Les sportifs, notamment de haut niveau, bénéficient d’un suivi très soutenu. Les footballeurs par exemple doivent faire minimum une fois par an une échographie cardiaque pour vérifier leur état de santé. Personnellement je trouve que c’est un peu trop, mais bon. Dans le football, on fait très attention. Globalement, pour prévenir les accidents, il vaut mieux respecter les dix règles d’or publiées par le club des cardiologues du sport.

Est-ce que le rythme demandé aux sportifs est à remettre en cause ?

D.C. Non, pas spécialement. On peut faire du sport de haut niveau. N’oublions pas que quelqu’un qui fait une mort subite, c’est quelqu’un de malade à la base. Le sport peut être une gâchette, un élément déclencheur, mais il n’est pas toxique. Un marathonien ou un cycliste par exemple peuvent déclencher une insuffisance respiratoire s’ils ne sont pas bien nourris, ou bien hydratés. Après, c’est une réalité que le sport est bon pour la santé mais surtout pratiqué à intensité légère à modérée, et de façon régulière. A plus haute intensité, le bénéfice diminue. Quoiqu’il en soit, cette question de la mort subite des sportifs est très importante pour les médecins du sport. Tous les ans, les cardiologues du sport se réunissent en congrès, et les meilleurs spécialistes de la question échangent autour de cette question, vrai sujet d’inquiétude.

Imen Mellaz

Paris-Roubaix 2018 : enquête ouverte après la mort de Michael Goolaerts

Une enquête a été ouverte sur la mort du coureur belge Michael Goolaerts, décédé brutalement dimanche soir suite à un arrêt cardiaque lors du Paris-Roubaix. Une autopsie du corps du jeune cycliste aura lieu dans les prochains jours en France, a indiqué lundi le parquet de Cambrai. « Selon les premiers éléments, c’est un malaise, sans doute cardiaque, qui a provoqué la chute, c’est pas la chute qui a provoqué son état », a ajouté le parquet. Michael Goolaerts participait pour la première fois à la reine des classiques.

 

Sébastien Rouet et l’AFP

 

Doublé Giro-Tour de France : mission impossible ?

Alors que la 100ème édition du Tour d’Italie (Giro) commence vendredi, les coureurs font face au même dilemme chaque année : choisir entre le Giro et le Tour de France. Le Colombien Nairo Quintana (Movistar) tentera, lui, le doublé. Rare sont ceux qui ont réussi à remporter les deux courses la même année.

Le Giro a toujours été dans l’ombre du Tour de France. Ses cols mythiques, ses « tifosis » passionnés ont été délaissés ces dernières années au profit du Tour de France. L’enchaînement des deux courses, à cinq semaines d’intervalle, a souvent poussé les favoris à faire un choix pour avoir une chance au classement général. Cette année, plusieurs coureurs vont tenter le doublé historique. Nairo Quintana s’est dit en « très bonne forme » physique avant d’entamer les deux tours mythiques. Le Français Thibaut Pinot (Française des Jeux) va également s’aligner au départ des deux courses. Mais le cycliste a fait un compromis : il jouera la gagne sur le Giro et visera les étapes sur le Tour. Car rafler la victoire sur les deux courses est difficile. Seuls sept coureurs ont déjà réussi ce doublé. Le dernier à l’avoir fait était Marco Pantani… en 1998. D’autres s’y sont cassés les dents depuis. L’Espagnol Alberto Contador avait essayé, en vain, en 2015. Il avait remporté le Giro mais avait souffert sur les routes de France (5e).

Les coureurs qui ont remporté le Giro et Le Tour de France la même année. Crédit: Gaël Flaugère
Les coureurs qui ont remporté le Giro et Le Tour de France la même année. Crédit: Gaël Flaugère

Remporter les deux courses est une tâche (quasiment) impossible. Les coureurs sortent essorés du Giro qui demande un effort physique important. Entre mai et juillet, date du Tour de France, les conditions climatiques ne sont pas les mêmes : « Les facteurs environnementaux jouent beaucoup. S’il y a de la pluie et de la neige sur le Giro on doit beaucoup taper dans l’organisme », souligne Frédéric Grappe, directeur de la performance de l’équipe Française des Jeux (FDJ). A la fatigue physique s’ajoute l’usure mentale. Les parcours, de plus en plus exigeants, demandent une concentration de chaque instant. Les coureurs redoublent d’efforts pour ne pas se faire piéger dès les premiers jours. Une cadence difficile à tenir sur plusieurs semaines : « C’est dans la tête que ça lâche. Ils ont le mental mais le cerveau envoie moins d’énergie », révèle Frédéric Grappe, également chercheur en science du sport.

Un temps de récupération court

Alors est-il devenu impossible de réitérer l’exploit de Merckx, Hinault ou Indurain ? « C’est difficile, juge Frédéric Grappe. Il y a peu de récupération entre les deux et on est sur des modèles de course sur trois semaines. » Le préparateur physique doit donc adapter l’entraînement des coureurs entre les deux tours. « La première semaine, le coureur assimile la charge de travail et évacue la fatigue. La deuxième semaine il roule juste pour préserver l’excitabilité musculaire. Ensuite, on restimule l’organisme en suivant un modèle de course proche de celui du Tour. Et avant le Tour il cherche à retrouver sa fraîcheur. »

Malgré toutes ces contraintes, Frédéric Grappe pense que cette performance sera bientôt réalisée. « Peu y arriveront mais on trouvera des moyens. Aujourd’hui on comprend mieux la récupération du coureur par exemple. La science permettra d’améliorer les modèles de performance. » 

Une pression médiatique épuisante

Les coureurs doivent aussi se plier aux exigences médiatiques. Constamment sollicités lors du Tour de France, ils doivent se soumettre aux nombreuses interviews pour soigner leur image. « La pression médiatique et l’engouement autour de la course y sont énormes. Pendant trois semaines les coureurs sont sous pression », a confié au Figaro Julien Pinot, entraîneur à la FDJ et frère de Thibaut Pinot. Le Tour de France reste une étape indispensable pour les équipes françaises. Soumises aux lois de leurs sponsors qui ont plus d’intérêts économiques en France, elles se doivent d’aligner leurs leaders sur le Tour. Mais l’Italie devient attractive depuis quelques années. Cette 100ème édition du Giro pourrait changer la donne. Preuve en est, la course sera diffusée dans son intégralité sur une chaîne gratuite (L’Equipe 21). Une première en 20 ans.

Chloé Tixier