Retraites : le camp présidentiel déterminé à faire barrage à la proposition de loi de Liot

Les députés de la commission des Affaires sociales ont rejeté ce mercredi l’article 1 de la proposition de loi du groupe Liot qui visait à abroger le report de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans. Dans la foulée, le président du groupe Liot, Charles de Courson a annoncé vouloir déposer un amendement en session parlementaire le 8 juin pour rétablir l’article. Face aux oppositions, la majorité présidentielle et le gouvernement sont déterminés à empêcher le vote du texte. 

Crédit : Pixabay

À la question : quelle est la probabilité que la proposition de loi visant à abroger la réforme des retraites soit votée le 8 juin, la réponse de Yaël Braun-Pivet est sans équivoque : « faible ». Invitée au micro d’Europe 1 ce jeudi matin, la présidente de l’Assemblée nationale a assuré qu’elle prendrait « ses responsabilités » pour que ce « texte anticonstitutionnel » ne soit pas examiné dans l’hémicycle. « En séance publique, s’il y a un doute sur la recevabilité financière d’un amendement, c’est la présidente de l’Assemblée nationale qui est saisie, donc moi », et comme « je suis très cohérente (…) et que je me suis déjà prononcée, je ne changerai pas d’avis », a-t-elle réaffirmé ce jeudi matin. Autrement dit, même si elle a assuré ne « pas [avoir] encore pris de décision formelle », Yaël Braun-Pivet prévoit de censurer l’amendement qui vise à rétablir l’abrogation de la réforme des retraites à 64 ans. 

Et pour cause, si l’article 1 du texte – celui qui abroge le report de l’âge légal à 64 ans – a été rejeté mercredi en commission des Affaires sociales, le député et président du groupe Liot, Charles de Courson a annoncé qu’il comptait déposer un amendement qui le réintroduirait lors de la session parlementaire du 8 juin. Or, selon la présidente de l’Assemblée, cet amendement est  « inconstitutionnel », et l’article 1 n’aurait « jamais dû être voté en commission des Affaires sociales ». Yaël Braun-Pivet a notamment pointé du doigt le président de la commission des Finances, le député insoumis Éric Coquerel pour avoir « validé le texte malgré son inconstitutionnalité »

 

L’article 40, cheval de bataille du camp présidentiel

Depuis le dépôt de la proposition de loi le 23 mai dernier, l’ensemble du camp présidentiel n’a eu de cesse de dénoncer sa non-conformité au regard de l’article 40 de la constitution. Ce dernier interdit aux parlementaires de soumettre une proposition de loi ou un amendement qui conduirait à diminuer les ressources, ou à aggraver une charge publique. Or, en abrogeant la réforme des retraites qui permet à l’État de générer des recettes, cette loi conduirait à la diminution des ressources publiques. Dans un communiqué, les trois groupes de la majorité présidentielle (Renaissance, MoDem, et Horizons), ont notamment jeté l’opprobre sur une loi qui « conduit indéniablement à une charge annuelle pour les finances publiques de 7,9 milliards d’euros d’ici 2027 et de 15 milliards d’euros en 2030. La solution absurde de financement serait donc de demander aux Français de fumer deux fois plus chaque année et pendant les vingt prochaines années ! ».

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De son côté, la présidente du groupe Renaissance à l’Assemblée nationale, Aurore Berger, a dénoncé ce matin au micro de RMC/BFMTV « des scènes ahurissantes » en commission des Affaires sociales mercredi après-midi. L’ensemble des députés de la Nupes avaient notamment décidé de quitter la salle et de ne pas participer à la suite des débats après que le premier article abrogeant la réforme des retraites a été supprimé. « Compte tenu de la décision que vous avez prise de nous empêcher de véritablement discuter (…), on va vous laisser tranquille, on va vous laisser entre vous », avait déclaré Pierre Dharréville, député communiste. « Quand la démocratie parle, qu’un vote a lieu, mais qu’il ne leur convient pas, alors ils considèrent qu’il n’y a pas de démocratie », regrette Aurore Bergé qui accuse les députés insoumis de « fomenter » une obstruction parlementaire « massive, orchestrée, organisée ». Yaël Braun-Pivet a notamment évoqué le chiffre de « plus de 3 000 amendements déposés en moins de 10 minutes » dans l’objectif d’empêcher le vote du texte.

La majorité présidentielle accusée de « magouilles »

Une stratégie justifiée selon le député insoumis de Seine-Saint-Denis Alexis Corbière. Il dénonce le comportement du gouvernement qui « fabrique du dégoût, de l’abstention, des gens qui ne croient plus en la démocratie ». Et de déplorer le recours massif du gouvernement aux instruments constitutionnels, et au parlementarisme rationalisé : « [avec] le 49.3 [qui fait passer sans vote une loi], les députés ne peuvent pas voter ; [avec] le 47.1 [qui limite les temps de débats législatifs], non plus ; et l’article 40, on ne peut pas voter. En gros, en macronie, l’opposition n’a aucun droit. »

Invité sur France Info, le député insoumis de la Somme François Ruffin s’est également insurgé contre « toutes les combines et les magouilles » de la majorité parlementaire qui aurait, selon lui, tout fait pour que le texte soit rejeté en commission des Affaires sociales : « Il y a quand même eu une espèce de mercato chez les députés pendant la nuit pour savoir qui siégera en commission des Affaires sociales du côté des LR, pour être sûrs que les esprits libres qui pourraient parler en leur âme et conscience, voter tranquillement, soient écartés. »

Ambre Mathieu-Xerri

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Ultradroite : qui est Rémy Daillet, figure du complotisme, remis en liberté ?

Rémy Daillet-Wiedemann, soupçonné d’avoir commandité l’enlèvement de la petite Mia, est sorti mercredi 31 mai de la maison d’arrêt de Strasbourg (Bas-Rhin). Figure des milieux complotistes, l’homme de 56 ans est assigné à résidence avec un bracelet électronique.

Rémy Daillet est assigné à résidence et doit porter un bracelet électronique. © Jérémy-Günther-Heinz Jähnick

Une figure du complotiste remise en liberté. Notamment soupçonné d’avoir planifié des attentats contre l’Elysée en 2021, Rémy Daillet a vu sa détention provisoire prendre fin. Il est désormais assigné à résidence avec port d’un bracelet électronique.

  • Un ancien cadre du Modem

Rémy Daillet est le fils de l’ancien député centriste Jean-Marie Daillet. En octobre 2008, il devient responsable du Modem Haute-Garonne à Toulouse avant d’être exclu du parti en 2010. Les idées de Rémy Daillet sont jugées très conservatrices, notamment en termes d’éducation. Il plaide pour faire l’école à la maison. Rémy Daillet tient aussi des discours anti-avortement.

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  • Figure du complotisme

Après son expulsion du Modem, Rémy Daillet commence à côtoyer des cercles conspirationnistes. En plus d’être anti-avortement, il est opposé à la 5G et à la vaccination. Il est soupçonné d’être à la tête d’un groupe d’ultra-droite qui aurait prémédité des actions violentes et un coup d’état contre le gouvernement, nommé l’ «Opération Azur ».

Entre mai et octobre 2021, douze personnes de l’entourage de Rémy Daillet appartenant à l’ultradroite sont mises en examen. Leurs profils sont divers : ex-militaire, ingénieur chimiste, ex-candidat FN aux législatives 2012, agent de sécurité, intermittent du spectacle, etc. Plusieurs de ces personnes seraient proches du groupuscule néonazi « Honneur et nation ».

  • Affaire Mia

Le 13 avril 2021, l’enlèvement de la petite Mia, âgée de huit ans, survient dans les Vosges. Elle avait été enlevée par plusieurs hommes sur demande de sa mère qui n’en avait plus la garde. Cinq jours plus tard, la mère et la fillette sont retrouvées dans un squat en Suisse, saines et sauves.

Installé en Malaisie, Rémy Daillet est soupçonné d’avoir incité l’enlèvement. Mi-juin 2021, il est inculpé pour complicité d’enlèvement d’un mineur de 15 ans en bande organisée et association de malfaiteurs en vue de commettre le crime d’enlèvement de mineur de quinze ans en bande organisée.

  • Assigné à résidence

Depuis 2021, Rémy Daillet était en détention provisoire à la maison d’arrêt de Strasbourg (Bas-Rhin). Son avocat Dylan Slama avait déposé une demande de remise en liberté. La chambre de l’instruction de la cour d’appel y a répondu favorablement. L’homme de 56 ans est assigné à résidence et doit porter un bracelet électronique.

Julie Zulian/AFP

Ingérence russe : Marine Le Pen dénonce un « procès politique »

Des extraits du rapport de la commission d’enquête sur les ingérences étrangères ont fuité ce jeudi. Un rapport qui affirme « l’alignement » de l’ancien Front national (FN) au « discours russe ». Marine Le Pen dénonce un « procès politique ».

Crédit : Pixabay

Marine Le Pen a estimé que le rapport parlementaire de la commission d’enquête sur les ingérences étrangères qui a fuité jeudi, est « malhonnête et tout à fait politisé ». Le Rassemblement national (RN) y est notamment accusé d’être une « courroie de transmission » du pouvoir russe. La présidente du groupe RN à l’Assemblée avait été auditionnée la semaine dernière par cette commission sur d’éventuelles contreparties politiques en échange d’un prêt russe contracté par l’ex-Front national en 2014.

« L’alignement » du FN au « discours russe »

Des extraits du rapport, rédigé par la députée Renaissance Constance Le Grip, ont été révélés jeudi par RMC et Mediapart. La rapporteuse pointe du doigt « l’alignement » du Front national, l’ancêtre du RN, au « discours russe » au moment de « l’annexion illégale » de la Crimée en 2014. Or, d’après une enquête de Mediapart, le Front national avait contracté un prêt auprès d’une banque tchéco-russe de 9,14 millions d’euros la même année. Un emprunt qui aurait servi à financer les campagnes des élections européennes et départementales du parti d’extrême droite. Depuis les révélations de Mediapart, Marine Le Pen ne cesse de renvoyer la balle aux banques françaises et européennes « qui ne prêtent pas ».

Adopté par 11 voix pour, 5 contre, et une abstention, le rapport reproche notamment à l’ancienne présidente du RN d’avoir déclaré que les habitants de Crimée avaient voté « librement » leur annexion à la Russie en 2014. « La violation de la souveraineté et de l’intégrité territoriale d’un État, l’Ukraine, amputée d’une portion importante de son territoire, n’est ainsi manifestement pas intolérable pour les grands défenseurs des souverainetés nationales que sont madame Le Pen et le Rassemblement national », peut-on ainsi lire dans le rapport. « Il n’y a rien, en fait », a assuré la leader d’extrême droite, dénonçant « un procès politique » lors d’une conférence de presse dans le Pas-de-Calais.

Ambre Mathieu-Xerri

Alexis Landot, le grimpeur de la verticalité urbaine

©Lyam Bourrouilhou

Alexis Landot, grimpeur urbain de l’extrême, repousse les limites de l’escalade en défiant les gratte-ciel sans équipement et sans assistance. Il a gravi les plus imposantes tours de Paris : Montparnasse, Mercuriales, Total, Alto ou encore Ariane. Regard sur une discipline rare, pour les passionnés en quête d’adrénaline.

Ni baudrier, ni corde, ni assurage… C’est mains et pieds nus qu’Alexis Landot escalade les sommets urbains. Né à Paris, le prodige de la grimpe voit les gratte-ciels comme des montagnes à conquérir : « je n’ai pas de falaise à proximité de chez moi. J’ai alors transformé la ville en un terrain de jeu, comme je l’ai fait avec le parkour, étant plus jeune« , (ndlr : une pratique acrobatique qui consiste à franchir des obstacles citadins sans l’aide de matériel). Gravir les buildings devient son objectif.

Il quitte ses études de graphisme et s’entraîne environ cinq jours par semaine : « Je n’ai pas de coach. Je fais 80% d’escalade et 20% de renforcement musculaire, de la force pure en traction, et tenir le poids le plus lourd« , explique le jeune de 23 ans. Les buildings hauts d’environ 210 mètres nécessitent une bonne résistance physique sur la durée : « Je fais des aller et retour en bloc pendant 30 minutes sans m’arrêter« . Ces entraînements intensifs ne sont pas sans risques : le jeune homme a notamment souffert d’une tendinite au coude résultant d’un surentraînement.

Risquer la mort, mais de façon réfléchie

Alexis Landot trace son chemin de grimpe à l’état naturel, seul et sans assureur, afin de tout contrôler.  « Mes proches connaissent mon attrait pour la prise de risques contrôlée et me voient comme quelqu’un de prudent, mais qui prend des risques« , d’ailleurs chacune de ses ascensions est chorégraphiée.

Un tel exploit nécessite le contrôle des émotions : « Je ne pense pas à ce qui pourrait se passer. Je pense aux mètres qui me séparent de la fin. Quand je grimpe, je mets mes peurs de côté, une main, un pied, une main, un pied. tout est calme, je n’ai pas d’émotions. C’est pas le chaos, c’est l’ordre. Chaque chose à sa place, c’est génial ! » La réussite ou la mort, sans assurance, le grimpeur est maître de ses gestes. De caractère anxieux, il trouve une paix intérieure et une certaine tranquillité dans la grimpe urbaine.

Le deuxième « Spider-Man » français 

Le jeune homme est l’un des premiers élèves d’Alain Robert, célèbre grimpeur urbain surnommé le « Spider-Man », qui a gravi sa première tour à Chicago en 1994. Ce métier reste encore peu pratiqué dans le monde : « ça ne sera jamais démocratisé comme le ski hors-piste, en termes de pratique, mais peut-être plus dans les médias« .

À la fin de l’effort, Alexis atteint le sommet de l’immeuble, les doigts presque ensanglantés, il pousse un souffle de soulagement. Comme souvent, il est attendu en haut par la police et quelques heures de garde à vue. Cette pratique est illégale : « Je ne fais rien d’immoral. Je suis le seul à faire ça en France, donc il n’y a pas de souci« . Ses exploits physiques sont tolérés. Contrairement à l’escalade classique, l’escalade urbaine ne dispose pas de système de cotation pour évaluer la difficulté : « il faudrait créer une nouvelle échelle de cotations, mais on n’est pas assez nombreux à pratiquer ».

Alexis Landot est conscient qu’il peut influencer des jeunes à franchir le pas, mais il privilégie la réflexion individuelle : « Chacun est responsable de sa vie. Je suis le seul responsable de mes actes, de mes pensées et de mes actions. Je ne m’interdis pas de faire ma passion, par le simple fait que les gens peuvent prendre des risques. La société est la conséquence collective de nos actions individuelles. Le changement est individuel, ce n’est pas au groupe de changer pour nous ».

Un métier en dehors des sentiers tout tracés

Youtubeur, Instagrameur, grimpeur, athlète, sportif, Alexis Landot collectionne les casquettes. « Je ne fais pas d’argent avec ma passion, mais grâce à l’image qu’elle renvoie », précise-t-il. Il est vu comme un sportif sans pour autant participer à des compétitions. Sa pratique n’est pas encadrée par une fédération. « Je suis un sportif à part. J’aime l’escalade avant tout, c’est ce qui compte. Le sport, c’est entre nous et nous même, ça ne regarde personne », témoigne Alexis, qui aime profiter du sport seul. Le grimpeur ne reçoit jamais de proposition de sponsoring, car il est le seul dans sa discipline : « je n’insiste personne à la consommation, car ma communauté n’est pas faite pour l’achat de matériel de sport ». Il aime cependant gérer ses réseaux sociaux et converser par messages avec ses fans.

Alexis Landot continue d’écrire sa légende sur les buildings. Vivre, c’est avant tout prendre des risques. L’ascensionniste espère bien ouvrir de nouvelles portes, comme, le cinéma, l’événementiel, la publicité, ou encore tenir des conférences. Pour le jeune homme, ce n’est pas mission impossible.

Mathilde Debarre