Sobriété énergétique : les villes éteignent la lumière

Simultanément, Paris et Lyon procéderont à l’extinction des feux de plusieurs de leurs sites ce vendredi soir. Des décisions importantes qui interviennent au moment où la crise énergétique est de plus en plus redoutée.

Les enjeux climatiques sont, de plus en plus, des sujets de société prépondérants. Et les grandes villes françaises ont décidé d’agir. Paris et Lyon deux des trois métropoles les plus peuplés de l’Hexagone ont choisi de diminuer l’éclairage de leurs bâtiments publics. La tour Eiffel arrêtera de briller à partir de 23 h 45 au lieu de 1 heure du matin. Les musées municipaux ainsi que les mairies de la Ville Lumière cesseront d’être éclairés à partir de 22 heures. Anne Hidalgo, la maire (PS) de Paris, espère réaliser 10 % d’économies sur la facture d’énergie. Ce vendredi soir, pour l’équinoxe d’automne, la Métropole Grand Lyon lance l’opération « La Nuit est belle ». Dans la Ville des Lumières, 370 sites patrimoniaux seront éteint de 21 h à 6 h le lendemain.

L’hiver arrive et la crise énergétique avec. Ces décisions interviennent alors qu’Emmanuel Macron avait appelé à la « chasse au gaspillage » dès le 14 juillet dernier. Selon un rapport de l’Agence de l’environnement et de la maitrise de l’énergie (Ademe), l’éclairage public représente « 41 % des consommations d’électricité des collectivités territoriales » et « 16 % de leurs consommations toutes énergies confondues ». Éteindre la lumière est, de fait, une économie énergétique conséquente.

Lire aussi : Interview de Macron : la sobriété énergétique, la riposte du président

Un impact écologique et économique

Selon la Métropole Grand Lyon, l’initiative « La Nuit est belle » est une expérience : « C’est un événement ponctuel. L’objectif, il est avant tout de sensibilisation. On veut informer la population sur la pollution lumineuse et sa nocivité. » La démarche vise aussi à toucher les communes qui n’ont pas opté pour l’extinction : « On veut les accompagner sur le plan technique et leur montrer comment elles pourraient s’y prendre si demain, elles venaient à systématiser tout cela. »

L’objectif est donc d’inciter les différentes villes de la métropole à enclencher le processus d’extinction des lumières : « Il faut voir ce que ça coute d’aller éteindre. Le réseau est fait de sorte à ce que ce ne soit pas facile, il n’y a pas qu’un bouton sur lequel appuyer. Il faut mettre en place l’organisation et, au début, ça peut supposer de l’investissement. Mais c’est autant un gain économique qu’un gain écologique, notamment en termes de production de CO2. »

Le son de cloche est bien différent chez le syndicat de l’éclairage : « Il y a un petit peu d’hypocrisie. Pour vraiment protéger l’environnement, il faudrait déjà ne pas pointer les lumières vers le ciel. L’impact est plus économique qu’écologique. On sait que certains risquent de râler parce qu’ils tiennent à leur éclairage donc on brandit l’impératif écologique. Ça passe mieux. » Le syndicat préconise d’ « avoir un éclairage plus efficace et moins impactant ».

Éteindre pour mieux rénover

L’Ademe met aussi en lumière la vétusté de « plus de la moitié du parc » qui « est obsolète et surconsommatrice d’énergie ». Elle requiert donc de le rénover. Ce à quoi le syndicat de l’éclairage : « Éteindre, ça peut être une solution à court terme pour éviter les coupures d’électricité ou pour réduire le montant des factures. Mais ça ne peut pas être une solution pérenne. » Le principal écueil, « c’est que ces installations ont été construites il y a vingt, trente voire cinquante ans et le contexte n’était pas le même. […] On agit sur ce qui a été inchangé depuis trop longtemps. »

A partir de ce vendredi, la tour Eiffel arrêtera de scintiller à partir de 23h45 contre 1h auparavant.

Selon le syndicat, l’idéal serait d’avoir recours aux leds pilotables : « On est passé de l’éclairage traditionnel aux leds. Cela permet de diminuer par deux la consommation d’énergie. Si on passe aux leds pilotables, on divise encore par deux. Il faut profiter des économies que peuvent apporter l’extinction pour investir dans la rénovation des installations. » Mais cette rénovation lumineuse ne concerne pas que l’éclairage public.

Selon le Syndicat de l’éclairage, « l’éclairage public est la partie visible de l’iceberg ». La Métropole Grand Lyon insiste sur le fait de « travailler avec les entreprises, les industries. C’est de l’éclairage privé. » Chaque entité a son rôle à jouer, une fois la nuit tombée.

Dylan Berrached

 

Réchauffement climatique et empreinte carbone, quels enjeux pour l’habitat de demain ?

Du 22 au 24 septembre se tient à Paris la 1ère édition du Salon de l’immobilier bas carbone (SIBCA), où se rencontrent les géants du secteur. L’occasion de parler neutralité carbone et habitat de demain.

L’affiche de la première édition du Salon de l’immobilier bas carbone (SIBCA)

« L’immobilier bas carbone c’est une évidence parce que nous n’avons plus le choix ». Ce sont les mots de Julien Denormandie, ancien ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation, de la Ville et du Logement. En visite au Salon de l’immobilier bas carbone (SIBCA), le ministre a affiché son soutien aux acteurs d’un marché en pleine en expansion. « J’ai toujours cru en l’immobilier bas carbone », confit-il à CelsaLab. 

Fraîchement engagé aux côtés de la start-up Sweep, leader de la gestion de l’empreinte carbone des entreprises, Julien Denormandie explique : « La donnée climatique va devenir aussi importante que la donnée financière ». Il ajoute fièrement : « Il n’y a plus d’investissement sur lequel on ne demande pas l’impact environnemental. La France est championne du monde dans l’immobilier bas carbone ». Et pour cause, pendant son mandat, l’ancien ministre avait travaillé à la création de la réglementation environnementale « RE2020 », qui sert à mesurer les émissions de carbone des bâtiments neufs. Il conclut : «  Atteindre la neutralité carbone en 2050 est un objectif incroyablement ambitieux, mais incroyablement nécessaire ».

https://www.ecologie.gouv.fr/re2020-nouvelle-etape-vers-future-reglementation-environnementale-des-batiments-neufs-plus 

Des mastodontes face aux start-up

De part et d’autre du salon, les stands de Vinci, Bouygues Immobilier, Nexity ou encore BNP Real Estate, côtoient ceux de PME et de start-up. Comment de tels géants peuvent-ils alors prétendre à la neutralité carbone dans le secteur immobilier, quand le reste de leurs activités ne semblent pas concernées par de tels enjeux ? BNP Paribas avait par exemple été épinglé pour ses financements des énergies fossiles, à hauteur de 142 milliards d’euros entre 2016 et 2021. Bouygues et Vinci avaient, quant à eux, fait l’objet d’un scandale écologique et financier en 2014, dans le cadre du projet de la « nouvelle route du littoral » à la Réunion, entre malfaçons dissimulées et destruction de la biodiversité littorale. 

https://www.liberation.fr/environnement/climat/financement-des-energies-fossiles-par-les-banques-francaises-les-bons-et-les-mauvais-eleves-20220330_7XM7Y6HW2VH6RFF7ZAQSOQDI6E/ 

https://www.lemonde.fr/economie/article/2021/10/25/contentieux-retards-et-malfacons-a-la-reunion-les-affres-de-la-route-du-littoral_6099819_3234.html 

« Si on veut maintenir le réchauffement climatique à 1.5°, il va falloir que chaque français divise par cinq son empreinte carbone. » soutient Marc Lafont, directeur général de WO2, promoteur de bâtiments bas carbone. Il l’assure, c’est bien « l’envie de faire collective » qui fera bouger les lignes. Pour lui, ce sont ces entreprises traditionnelles, plus connues du grand public, qui représentent la plus grosse part du marché. Il ajoute : « C’est une excellente chose que nous soyons entourés d‘acteurs plus traditionnels de la construction. Ça montre que le bas carbone n’est plus un marché de niche, c’est l’affaire de tous ». Il dit compter sur la coopération de chaque acteur de l’industrie, dans l’optique d’abaisser l’émission de Co2 de chaque Français à deux tonnes par an, contre dix actuellement. Et cela devrait passer par le logement, l’immobilier traditionnel représentant 30 % des émissions de gaz à effet de serre.

La création d’un label pour encourager l’immobilier bas carbone

Alors, pour rendre l’immobilier plus pérenne, le secteur s’est regroupé autour d’un seul et même label : le BBCA (Bâtiment Bas Carbone). Depuis 2016, celui-ci permet aux acteurs de la chaîne de mesurer l’émission carbone d’un bâtiment. Ainsi, en France, on retrouve 450 constructions labellisées et 3 millions de mètres carrés certifiés bas carbone. En tête du classement, le groupe Nexity, suivi par le WO2 de Marc Lafont, dont 80 % des constructions sont certifiées, puis Bouygues Immobilier. Eric Pliez, maire du 20e arrondissement, croit dur comme fer à l’habitat bas carbone : « Si on peut rénover à Bagnolet, dans un quartier populaire comme on l’a fait, alors c’est possible partout ». 

 

Agnès Robini

Ukraine : Que sait-on des 436 corps découverts à Izioum ?

Près de 6 mois après la découverte du massacre de Boutcha au Nord de Kiev, un charnier a été découvert la semaine dernière à l’Est de l’Ukraine. Dans cette région occupée par les Russes depuis le début de la guerre, les experts tentent désormais de comprendre ce qu’il s’est passé. 445 tombes, numérotées, ont été découvertes.

Les 436 corps ont été déterrées du charnier d’Izioum afin de pouvoir être autopsiés (Photo AFP).

Le 11 septembre dernier, les forces ukrainiennes ont annoncé avoir repris la ville d’Izioum, à l’Est de l’Ukraine, qui était sous occupation russe depuis le début de l’invasion. Moins d’une semaine après, le 16 septembre, un charnier est découvert dans une pinède à côté du cimetière d’Izioum. Les enquêteurs ukrainiens et les observateurs internationaux tentent depuis, de reconstituer le déroulé des évènements.

436 personnes tuées pendant l’occupation russe

« 200 agents et experts » sont actuellement sur le site d’Izioum a annoncé Oleg Synegoubov vendredi dernier. Il a également expliqué que « les corps seront envoyés pour autopsie » avant d’annoncer que chaque personne retrouvée « fera l’objet d’une enquête et deviendra une preuve des crimes de guerre de la Russie devant les tribunaux internationaux« . L’identité de la plupart des corps reste toujours inconnue.

Les experts scientifiques sont aidés d’ONG indépendantes à Izioum, comme Human Right Watch (Photo AFP).

Izioum a été occupée du 24 mars au 12 septembre par l’armée russe, et d’après les premiers résultats d’enquête, les 436 corps exhumés ont bien été enterrés pendant cette période. Sur les réseaux sociaux, certains Russes essayent pourtant de faire croire le contraire, photos hors contexte à l’appui. Ils décrivent une situation « à la Boutcha«  – les Russes niant toujours leur implication dans le massacre perpétré en mars dernier au Nord de Kiev – en reprenant les mots de Dmitri Peskoy, porte-parole du Kremlin.

En réalité, la Russie est accusée d’avoir bombardé de nombreux bâtiments civils à Izioum. D’après les autorités ukrainiennes, de nombreux corps retrouvés seraient en fait des personnes tuées par ces bombardements, que les Russes auraient souhaité « nettoyer ». Plusieurs habitants d’Izioum, suspectés d’avoir été employés par les Russes en tant que fossoyeurs d’urgence ont été arrêtés selon Radio France.

Une fosse commune avec 17 soldats torturés 

À quelques mètres des corps des civils, une fosse commune a été découverte avec 17 soldats ukrainiens à l’intérieur. D’après les autorités, ces soldats ukrainiens auraient été exécutés, certains corps comporteraient des traces de torture. À Izioum, de manière générale, les corps retrouvés sont très marqués. « Il y a des cadavres avec les bras attachés dans le dos, un autre avec un corde autour du coup, explique Oleg Synegoubov. Il est certain que 99% des personnes ici ont succombé de mort violente ».

Après plusieurs mois en terre, la plupart des corps sont très détériorés. Les premiers constats sur place restent tout de même sans appel : cette personne a les mains attachées dans le dos (Photo AFP).

Toujours selon les autorités locales, certains corps ont « les mains liées« , ont subi des violences sexuelles ou encore « ont été de toute évidence torturées ou exécutées« . Igor Klymenko, chef de la police ukrainienne, a annoncé simultanément la découverte de six « salles de torture » à Izioum. Pour achever cette description horrifique du charnier, le gouverneur régional s’est étonné du nombre « d’enfants parmi les corps« , ce qui confirmerait une nouvelle fois que ces personnes ne sont pas mortes naturellement et donne du crédit aux accusions de bombardement d’écoles ukrainiennes contre la Russie.

À regarder aussi : Le témoignage d’un rescapé ukrainien à Izioum

La communauté internationale consternée par cette découverte 

Volodymyr Zelensky a immédiatement réagit à la découverte de ce charnier sur les réseaux sociaux. « La Russie ne laisse que mort et souffrance. Des meurtriers. Des tortionnaires. Privés de tout ce qui est humain », s’est-il d’abord exprimé dans une vidéo publiée vendredi dernier sur Telegram. Sur Twitter aussi, le Président ukrainien n’a pas mâché ses mots, qualifiant la Russie « d’état terroriste ».

De nombreux dirigeants de pays occidentaux ont réagit suite à cette découverte. L’Union Européenne, par la voix de son chef de la diplomatie, Josep Borrell, s’est dite « profondément choquée« . De son côté, Emmanuel Macron a condamné « avec la plus grande fermeté les atrocités commises à Izioum, en Ukraine, sous occupation russe ».

Marine Allain

Face à la crise énergétique, les cinémas pourraient réduire le nombre de séances

Les 6.193 salles sont invitées à éteindre leurs enseignes en dehors des heures d’ouverture, baisser le chauffage à 19°C, réduire la climatisation, ou encore adapter les horaires d’ouverture « en fonction des flux de public ». (LOIC VENANCE/ AFP)

La Fédération nationale des cinémas français (FNCF) a publié ce mercredi des recommandations pour leurs adhérents afin de leur permettre de faire face à la crise énergétique. Parmi elles, il est évoqué une réduction du nombre de séances ou encore une baisse de chauffage.

Les salles de cinéma doivent faire face à une nouvelle crise. Ce mercredi, la Fédération nationale des cinémas français (FNCF) a publié “La charte de tous les cinémas pour une réduction immédiate de la consommation d’énergie”. Soit, une liste de recommandations pour les cinémas afin de leur permettre de faire face à la crise énergétique.

Elle alerte ses adhérents sur la nécessité de « respecter l’objectif gouvernemental d’un chauffage maximal à 19°c” ou encore à “réguler les horaires d’ouverture en fonction des flux de public”.

Autrement dit, certaines séances comme celles du matin pourraient être amenées à disparaître, par manque d’affluence. “C’est important de prendre en compte les séances qui ne tournent pas. Écologiquement parlant, c’est une aberration de continuer à les proposer”, explique David Obadia, délégué général de l’Association française des cinémas art et essai (AFCAE) au CelsaLab.

Pourtant, face à ces alternatives, certains spectateurs sont réticents. “Je n’ai pas tellement envie d’avoir à apporter un plaid avec moi, lance Christophe en riant. On verra si la différence se ressent. Si c’est le cas, je préfère rester chez moi, au chaud”, avoue-t-il, un ticket froissé à la main. Quant à Mathieu, véritable cinéphile, la solution est déjà toute trouvée. “Au pire, on gardera nos vestes et puis c’est tout. C’est franchement pas la fin du monde”, assure-t-il confiant. Rien ne pourra l’empêcher de se rendre à sa séance hebdomadaire.

« Des mesures simples et pratiques”

“La charte de tous les cinémas pour une réduction immédiate de la consommation d’énergie” se divise en six points. Diminution de l’éclairage, réduction du chauffage et de la climatisation mais aussi une “nomination dans chaque cinéma d’un référent énergie”. De cette manière, cela permettrait de “vérifier que ces mesures sont bien mises en place” mais aussi de “sensibiliser les salariés et les bénévoles des cinémas à la mise en œuvre de cette charte”.

Pour cause, « avec la flambée des prix de l’énergie, des cinémas vont se retrouver avec des contrats qui auront augmenté de 400 voire 500% et c’est un énorme problème”, explique David Obadia, délégué général de l’Association française des cinémas art et essai (AFCAE).

Pour Marc-Olivier Sebbag, délégué général de la FNCF, le message est clair. « On ne peut pas dire : nous les gens du cinéma, ça ne nous concerne pas. On est impliqués avec le public, avec chaque spectateur et chaque maillon de la société. Il y a donc une volonté de faire adhérer les spectateurs à cette démarche », explique-t-il à AlloCiné.

“Je trouve ça logique”

Dans les salles de certains cinémas indépendants, la charte publiée par la FNCF reflète une réalité déjà bien présente. “Nous avons réduit nos séances depuis quelques temps puisque la pandémie nous a pas mal fragilisé”, confie Mathias*, agent de billetterie dans le cinéma indépendant l’Epée de Bois.

Mais si la montée des prix de l’électricité handicap le secteur, elle permet de faire adopter un comportement plus responsable et écologique aux salles de cinéma, comme le souligne Béatrice, amatrice de thrillers. “Je trouve ça logique. Je ne comprends même pas que la baisse de l’éclairage ou la fermeture des salles vides ne soit pas déjà appliquée. Et puis, tout le monde doit faire des efforts en termes d’écologie”, conclut-elle.

*le prénom a été modifié

 

Imane Lyafori