La Google car obtient son permis sans les mains

AFP PHOTO/NOAH BERGER / AFP / Noah Berger
AFP PHOTO/NOAH BERGER / AFP / Noah Berger

C’est une révolution pour le secteur automobile. L’agence américaine de sécurité des transports (NHTSA) a, le jeudi 4 février, annoncé que l’intelligence artificielle de Google conduisant ses véhicules pourrait désormais être considérée comme un « conducteur » :

« Dans le contexte du véhicule motorisé décrit par Google, la NHTSA considérera que le terme ‘conducteur’ fait référence au système de conduite autonome, et non à un des occupants du véhicule. »

Une petite phrase aux répercussions énormes. Nous sommes loin de l’Audi futuriste de Will Smith dans I robot (la Google car ne fait pas vraiment rêver), mais cette nouvelle technologie pourrait bien représenter un futur axe de l’industrie automobile.

Google a un tour d’avance

Le fait peut paraître anodin mais il change beaucoup de choses. Dans la course pour la voiture autonome que se livrent les géants de l’high-tech, Google vient de virer en tête. Interrogé par BFM Guillaume Crunelle, associé en charge de l’automobile chez Deloitte, est catégorique : « C’est un sacré coup d’accélérateur de l’Histoire, tout peut aller très vite. Google vient ici de gagner une bataille dans la course vers le véhicule autonome, car le document de la NHTSA ne parle pas de ‘Google car’, mais du ‘système de conduite autonome de Google’. Et ce système pourrait être implémenté dans bien d’autres véhicules que les Google Car ».
Se pose aux concurrents de Google le dilemme suivant : continuer à développer leurs propres systèmes de conduite intelligents en prenant le risque de voir ceux-ci écrasés par Google ou accepter la domination du géant américain ? L’algorithme de Google serait aux voitures ce que Windows est aux PC, un système d’exploitation incontournable.
De nombreux constructeurs de voitures « traditionnels » comme Mercedes, Volvo, Ford ou Kia ont eux aussi engagés des investissements massifs dans la voiture autonome. L’enjeu est de taille : en 2025, les deux tiers du chiffre d’affaires pourraient provenir des logiciels, de la télématique et des systèmes de sécurité. La voiture elle-même, produite par les constructeurs, ne pèserait que le dernier tiers. D’où le danger pour les marques automobiles de voir arriver sur le marché  des géants comme Google ou Apple et leur monopole sur Internet. En France, une voiture de PSA, produite en partenariat avec Thales et Valéo, a réussi à rallier Paris à Bordeaux toute seule en novembre dernier.

Technologiquement, Google ne sait pas faire de voiture mais mise sur l’intelligence artificielle. Paris gagnant lorsque l’on compare les résultats des voitures test. Le ratio kilomètre roulés de manière autonome/incidents (c’est-à-dire reprise en main par l’humain) est clairement à l’avantage de l’entreprise de Mountain View.

 

Si vous montez dans une Mercedes autonome, vous risquez d'avoir un accident à peu près tous les kilomètres (Crédits infographie Statista)
Si vous montez dans une Mercedes autonome, vous risquez d’avoir un accident à peu près tous les kilomètres (Crédits infographie Statista)

Faire sauter le feu rouge législatif

Entre 2014 et 2015, Google a multiplié par cinq le nombre de kilomètres parcourus sans reprise en main du véhicule. La voiture est bardée de capteurs et se repère elle-même dans l’espace grâce au GPS. D’après l’entreprise californienne, le « cerveau » du véhicule apprend constamment de ses erreurs. La Google car devra encore multiplier les tests pour atteindre les standards de l’industrie automobile et rassurer les assureurs mais elle progresse constamment. De fait, seule la conduite en ville reste encore un obstacle.

Ces bons résultats semblent avoir convaincu la NHTSA. En acceptant d’appeler « conducteur » un algorithme sophistiqué, les États-Unis prennent un temps d’avance. Les autres pays sont encore soumis à des règles strictes en matière de sécurité automobile. La convention de Vienne signée en 1968 rend obligatoire la présence d’un humain derrière le volant. Dans son article 8, elle précise que «tout conducteur doit être capable de contrôler son véhicule». Mais les choses pourraient bouger plus vite que prévu. Au États-Unis, quatre Etats, la Californie, le Nevada, la Floride et le Michigan, autorisent déjà les tests sur routes publiques. En janvier, Barack Obama a déclaré vouloir une réglementation fédérale sur le véhicule autonome. Un groupe de travail à l’ONU réfléchit à l’amendement de la convention de Vienne à l’horizon 2017.

De là à imaginer des applications mobiles type Uber proposant des services automatisés de taxis, il n’y a qu’un pas. Ces nouveaux marchés pourraient représenter des milliards d’euros.

Antoine Etcheto

Malgré une nouvelle affaire, les Levalloisiens toujours derrière Balkany

La chambre régionales des comptes vient de rendre un rapport étrillant la gestion de Levallois-Perret par Patrick Balkany BERTRAND GUAY / AFP
La chambre régionales des comptes vient de rendre un rapport étrillant la gestion de Levallois-Perret par Patrick Balkany BERTRAND GUAY / AFP

Un rapport de la Chambre régionales des comptes pointe du doigt la gestion de Levallois-Perret par Patrick Balkany. Une affaire qui vient s’ajouter à une mise en examen pour fraude fiscale, blanchiment de fraude fiscale et corruption passive. Pourtant, malgré ses déboires avec la justice, Patrick Balkany garde son aura auprès des Levalloisiens.

La vie semble paisible à Levallois-Perret. Dans cette ville des Hauts-de-Seine, pas un déchet ne traine sur les trottoirs, les squares sont fleuris, les haies taillées. Rien ne dépasse. Un constat qui tranche avec l’état des comptes de la ville. Dans un rapport que s’est procuré France Bleu 107.1, la Chambre régionale des comptes (CRC) étrille la gestion de la ville par son maire (LR), Patrick Balkany.

De nombreuses irrégularités 

Au total, c’est plus de 117 millions d’euros de dépenses que la municipalité aurait « oublié » d’inscrire dans ses comptes. Une manière de dissimuler la dette déjà astronomique de la ville. Autre élément reproché au maire Les Républicains, les avantages octroyés aux cadres municipaux. Selon les auteurs du rapport, ces avantages dépasseraient largement les seuils admis dans de nombreux domaines. Certains cadres bénéficieraient notamment de primes et d’heures supplémentaires qui représenteraient plusieurs milliers d’euros par mois.

Dans ce rapport, les magistrats mettent également en lumière une pratique très en vue à Levallois-Perret: les associations para-municipales. Elle bénéficient du statut d’association Loi 1901 tout en permettant à leurs salariés de ne travailler que pour la mairie. La CRC souligne notamment  l’existence d’un conseiller « occulte ». Renaud Guillot-Corail, ancien conseiller municipal ayant pris sa retraite en 2012, dispose d’un bureau adjacent à celui de Patrick Balkany.  L’homme travaille exclusivement pour la municipalité tout en étant salarié du Comité de Développement Économique et d’Échanges Internationaux de Levallois. Grâce à une augmentation de son budget, cette association para-municipale continue de faire travailler ce proche de Patrick Balkany. « C’est totalement faux, le budget ne cesse de diminuer depuis deux ans » se défend Renaud Guillot-Corail qui n’a pas souhaité en dire plus.

Le rapport fait aussi état d’un nouvel épisode dans la série Bygmalion. La municipalité aurait favorisé l’entreprise proche de l’UMP (ex-Les Républicains) dans l’acquisition d’un marché public. Malgré des tarifs onéreux, la société aurait été préférée à ses concurrents. La ville a payé 218 029 euros pour les services de consultants dont la municipalité n’a pas pu donner les traces d’une quelconque intervention, si ce n’est quelques diaporama.

Pas pire qu’un autre 

Si ce sandale est un nouveau coup dur pour Patrick Balkany, il n’a pas égratigné la popularité du maire. Dans les rues de la ville, malgré la nouvelle, les Levalloisiens restent solidaires. « Je continuerai à voter Balkany« , assure Nicole Richler, lunettes de soleil et chapeau sur la tête. « Il fait des petites magouilles comme tous les autres, mais lui il s’occupe bien de ses habitants« , rajoute-t-elle. L’argument du « tous-pourris! » est légion à Levallois.

Au Bagel frais, une petite enseigne de restauration rapide, l’avis de Cary et Sam Bouhadouz est sans appel. « De toute façon ils sont tous corrompus, au moins, lui, il nous chouchoute« , assure Cary. « Ces histoires c’est des miettes de pain par rapport aux autres« , renchérit son mari et associé. « Vive Balkany!« , finit-il par lâcher. Difficile de trouver des opposants. À la sortie d’une école, une maman d’élève se refuse même à tout commentaire. « Ca ne m’intéresse pas, on a un très bon maire et on est très content« , peste-t-elle avant de disparaitre dans l’établissement, passablement exaspérée.

Une faible opposition 

Sa popularité, Patrick Balkany la doit à la proximité qu’il a instaurée avec ses habitants. « Ce qu’il fait je m’en fous, je veux qu’il reste maire le plus longtemps possible. C’est grâce à lui que j’ai pu trouver une place dans une crèche pour mes enfants« , explique une jeune maman. De son côté, Josette, retraité, se félicite de l’implication du maire auprès des personnes âgées. « Tous les ans pour Noël, il organise une sortie en ville, c’est une très bonne idée! » explique-t-elle avec enthousiasme. Patrick Balkany ne lésine pas sur les moyens pour satisfaire ses administrés et il le lui rendent bien.

Ses opposants les plus farouches, il les côtoient au conseil municipal. « Nous ne sommes pas surpris par le rapport. C’est ce qu’on dénonce depuis le début« , affirme Anne-Eugénie Faure, conseillère municipale du groupe d’opposition « Une autre histoire pour Levallois » (PS, EELV). Elle promet que la question du rapport sera abordée lundi, lors du conseil municipal. Son groupe prévoit le vote d’un blâme contre Patrick Balkany. Si elle regrette que le groupe d’opposition « Levalloisiens – Renouveau de la Droite et du Centre », mené par Arnaud De Courson, ne les ait pas suivi après les nombreux scandales qui ont frappé le maire de la ville, elle reste persuadée que cette fois-ci le vent va tourner. « Toute l’opposition va monter au créneau« , assure-t-elle. De son côté, Arnaud De Courson ne mâche pas ses mots « Ce rapport est une copie conforme de celui de 2009. La Chambre régionale des comptes avait déjà souligné tous ces problèmes et donné ses recommandations, mais rien n’a été fait« . Il demande que la Justice soit saisie et que des sanctions soient prises. « Un blâme n’a aucune valeur juridique ça n’a aucun sens, il faut que le gouvernement agisse pour éviter ce type de dérives. » La mairie, quant à elle, n’a pas souhaité faire de commentaire.

Victoire Haffreingue-Moulart

Pour trouver du travail, mieux vaut chercher en centre-ville qu’en périphérie

Les zones où l’on cherche du travail ne sont pas toujours celles où l’on en propose le plus. C’est la conclusion d’une étude publiée par le think tank Terra Nova ce jeudi 11 février. Conséquence de la métropolisation de l’économie, la production de richesse s’est concentrée, entraînant de fortes disparités sur le territoire en matière d’offres d’emploi. Et les zones rurales ne sont pas les seules à en pâtir. Même au sein des métropoles, les écarts sont élevés entre centre-ville et aire urbaine.

Les offres d'emploi en centre-ville sont plus nombreuses et de meilleure qualité. (©Flickr Jean-Louis Zimmermann)
Les offres d’emploi en centre-ville sont plus nombreuses et de meilleure qualité. (©Flickr
Jean-Louis Zimmermann)

Ils se sont appuyés sur 6 000 annonces collectées dans les 15 principales agglomérations françaises. Le think tank Terra Nova s’est associé à l’entreprise spécialisée dans la recherche d’emplois en ligne Jobijoba pour analyser les offres d’emploi sur le territoire français. Verdict : au sein des métropoles, le centre-ville est nettement favorisé.

  • Il y a plus d’offres en centre-ville alors que la population y décroît

Selon les agglomérations, 50 à 60% des offres d’emploi se trouvent en centre-ville, alors que seulement un quart de la population y habite. Une concentration qui s’oppose à la périurbanisation de la société : depuis quelques années, la population s’éloigne du centre pour s’installer en banlieue. Aujourd’hui, les territoires attirant le plus la population sont les couronnes périurbaines. Par conséquent, le trajet moyen entre le domicile et le travail est de plus en plus long. Cette conclusion était l’une des hypothèses de départ de l’étude, mais Thomas Allaire, PDG de Jobijoba, ne s’attendait pas à de telles proportions : « On se doutait que ce chiffre serait élevé, mais pas au point de représenter 50 à 60% des offres d’emploi », a-t-il confié à France Inter.

  • Des emplois plus stables et mieux rémunérés

D’un point de vue qualitatif, les centres-villes sont également privilégiés. La part des emplois en CDI y est plus élevée que dans le reste de l’agglomération. Ainsi, sur la moyenne des 15 zones urbaines étudiées, les offres d’emploi sont des CDI une fois sur deux dans le centre contre deux fois sur cinq en banlieue. De même, le salaire moyen annuel brut y est supérieur, avec un écart moyen de 2 400 euros.

  • Des secteurs d’emploi différents

Cette différence en terme de type de contrat et de rémunération  provient principalement du fait que les principaux secteurs d’activité n’y sont pas les mêmes. En centre-ville, on note une forte présence des activités tertiaires avancées, de l’économie de la connaissance et de l’information ainsi que des fonctions sièges et support des entreprises. En banlieue, les secteurs comme l’industrie sont plus représentés, ainsi que l’économie résidentielle qui comprend notamment les services à la personne.

Laura Daniel

L’enfer de l’électrosensibilité

Alors que la 5G se déploie doucement sur le globe, avec Google qui veut étendre la cinquième génération de standards de la téléphonie mobile à l’aide de drones, les électrosensibles tentent de se faire entendre. 1 à 3% des Français souffriraient de la pathologie. CelsaLab leur donne la parole.

 


Expliquez-nous… l’électrosensibilité par FranceInfo

 

Il y a quelques jours, Google annonçait être en train d’expérimenter un système de drones solaire pour étendre le réseau 5G aux Nouveau-Mexique. Un projet respectable sur la plan technologique, mais qui fait fi des conséquences humaines. En France, les effets de la surexposition aux ondes commencent à interpeller l’opinion. Ce jeudi à l’Assemblée Nationale se tient un colloque pour la reconnaissance de l’électrosensibilité, une forme d’allergie aux champs électromagnétiques.

« Je n’avais même plus la force de porter la fourchette à ma bouche », se souvient Catherine Castaing. Cette mère au foyer a connu les pires moments de l’EHS (éléctrosensibilité) il y a un an. Pendant plusieurs mois, cette quinquagénaire été alitée, sans pouvoir dormir, tant ses douleurs, migraines et sentiments d’étouffement étaient importants. « Vous faites de la spasmophilie », expédiait son médecin.

Après des mois de calvaire cloîtrée dans sa maison oisienne, Catherine Castaing pousse la porte du Professeur Belpomme, un des seuls en France à reconnaître l’électrosensibilité*. « Coupez tous vos objets connectés, alerte le professeur, sinon pour vous c’est Alzheimer ». De retour chez eux, Catherine et son mari débranchent télévision, décodeur, téléphone, wifi, volet roulant, micro-ondes et même télécommande du garage. Pendant trois semaines, la famille coupe même tout courant, et vit à la bougie.

Licenciée pour ne pas supporter le wifi

Emeline aussi, souffre d’électrosensibilité. En un an, elle a déménagé trois fois. Dans le second logement, la famille s’est brouillée avec les voisins, qui refusaient de couper le wifi régulièrement. Depuis un an, elle a arrêté d’utiliser son téléphone portable comme le préconisait le professeur Belpomme. Mais la grosse difficulté, c’était l’environnement professionnel. Impossible de couper la wifi au bureau. Emeline enchaîne les malaises (que ces précédents médecins attribuaient à une banale agoraphobie). Après huit semaines d’arrêt maladie, Emeline perd son emploi d’ingénieur territorial.

Si Emeline et Catherine vont mieux aujourd’hui, pour l’une comme pour l’autre, les perspectives professionnelles son nulles. Et leur vie sociale est bouleversée. « Impossible d’aller chez des amis, ou de faire mes courses », déplore Catherine. Et leur nouveau mode de vie a un coût : en plus des consultations du professeur Belpomme (un centaine d’euros, pas toujours remboursée par la sécurité sociale), Catherine a investit dans un baldaquin en fibre de cuivre pour stopper les ondes : 1300 euros. Indispensable aussi, une housse pour les téléphones portables, mais aussi veste et casquette de protection, qui peuvent aller de 50 à 500 euros. Sans compter les compléments alimentaires à base de ginkgo biloba notamment, qui coûtaient presque 150 euros par mois à Emeline.

Pour tous les électrosensibles, la reconnaissance de la pathologie comme handicap est urgente. En Suède, en Autriche et en Allemagne, les maux attribués aux ondes sont reconnus comme « maladie ». L’OMS répertorie l’EHS depuis 2005. Première en France, en août dernier, la justice a accordé à un femme de 40 ans le statut d’handicapée à cause de son électrosensibilité. Un espoir pour les électrosensibles, alors qu’en 2016, le territoire français ne devrait plus connaître aucune zone blanche.

 

Marine Brossard