Liberté de la presse : où en est la France ?

A l’occasion de la journée mondiale de la liberté de la presse, retour sur la situation de la France et sur les enjeux auxquels elle doit faire face.

A l’échelle internationale, le 3 mai est la journée mondiale de la liberté de la presse. Cette année, l’UNESCO (Organisation des Nations Unis pour l’éducation, la science et la culture) a décidé de célébrer cette journée à Jakarta en Indonésie. Une décision quelque peu contradictoire avec le classement mondial de la liberté de la presse 2017 de Reporters Sans Frontières (RSF), qui introduit l’Indonésie à la 124e place sur 180 pays.

La France, l’élève moyen

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Sorti le 26 avril, le classement de RSF place la France à la 39e position.

Ci-dessous, l’évolution de la position de la France et de la Norvège dans le classement mondial de Reporter Sans Frontières sur la liberté de la presse depuis le premier rapport, en 2002.
(NB : plus le chiffre sur l’axe des abscisses est faible, meilleure est la position du pays
exemple : quand la France est 11e en 2002, elle est moins bien classée que la Norvège qui est 1e)

Si la France a gagné six places par rapport à l’année dernière, c’est en raison du nombre décroissant de journalistes morts durant l’année. La chute au 45e rang dans le classement de 2016 était due aux attentats de Charlie Hebdo du 7 janvier 2015. Pour faire son évaluation, RSF prend en compte le nombre de journalistes tués. Mais aujourd’hui la place qu’occupe la France reste tout de même inférieure à sa moyenne qui se situe à la 34e place.

Cette mauvaise « note » s’explique par différents facteurs. Ce sont par exemple les manifestations contre la loi El Khomri qui s’étalèrent surtout entre mars et juin 2016, à travers toute la France. Une enquête de Streetpress revenant sur les difficultés d’exercer le métier de journaliste sous état d’urgence, met en évidence les violences policières dont ont été victimes certains journalistes, les pressions et intimidations qu’ils ont subies, ou encore les restrictions voire entraves auxquelles ils ont été confrontées lorsqu’ils couvraient ces manifestations.

Le mois d’octobre a été, quant à lui, rythmé par la grève d’i-Télé. Les journalistes sont entrés en conflit avec la direction, incarnée par Vincent Bolloré, quand ce dernier a décidé d’embaucher Jean-Marc Morandini, alors mis en examen pour corruption de mineur. Un problème d’éthique qui révèle un conflit bien plus profond au sein de la rédaction. Les principales raisons de cette grève sont les suppressions de postes, le manque de ligne éditoriale claire et précise ainsi que les doutes concernant l’indépendance des journalistes par rapport aux intérêts économiques du Groupe Bolloré. Cette grève s’était soldée par la démission de plus de la moitié des journalistes. Un conflit révélateur d’un problème croissant en France : la concentration des médias par des multinationales, pouvant porter atteinte à leur indépendance.

La concentration des médias analysée par le Monde Diplomatique
La concentration des médias analysée par le Monde Diplomatique

Les enjeux d’aujourd’hui

Si la liberté de la presse est menacée par son appartenance à de grandes entreprises, cette situation est aussi la cause d’une défiance croissante envers ceux-ci. Les « fake news » se multiplient sur les réseaux sociaux et il devient de plus en plus difficiles de distinguer le vrai du faux. Dans ces conditions Le Monde a développé Décodex, un moteur de recherche, qui permet de vérifier si le site d’où provient l’information est fiable ou non. Les sites de « fact-checking » politiques se multiplient également, à l’instar de Politifact, qui a fait de la vérification des propos de Donald Trump l’une de ses principales missions.

Trump et les « fake news »

Les vidéos explicatives comme« Désintox » diffusé sur Arte et réalisé en collaboration avec Libération…

…Ou encore « Data Gueule » qui s’appuie sur des données pour décrypter un phénomène et l’expliquer, permettent ainsi de mieux comprendre dans quelle mesure les déclarations faites sont bien souvent incomplètes.

Plus encore, 37 médias français sont réunis pour créer CrossCheck, une plateforme « pour traiter avec précision les affirmations fausses, trompeuses ou prêtant à confusion qui circulent en ligne ».

Ces différentes initiatives portées par les médias traditionnels ont pour objectif de retrouver une crédibilité, notamment face aux théories du complot qui se propagent sur la toile, en espérant que leur statut de « médias traditionnels » ne les alimente davantage.

Sarafina Spautz et Maëlle Lafond

Pourquoi la Tchétchénie traque-t-elle les homosexuels ?

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Début avril, le journal russe indépendant Novaïa Gazeta a révélé que la Tchétchénie mène une purge à grande échelle envers les homosexuels : plus d’une centaine de personnes ont été arrêtées de manière arbitraire et torturées, trois seraient mortes. Cinq ministres européens ont écrit mercredi au ministre russe Sergueï Lavrov pour faire part de leur « profonde inquiétude ». Les autorités elles démentent. Comment expliquer cette traque ? Explication en trois points.

Emprisonnés et torturés parce qu’ils sont homosexuels. En Tchétchénie, société conservatrice, en majorité musulmane, le gouvernement organise depuis la fin du mois de mars une vaste purge, destinée à éliminer les homosexuels de la société, a révélé début avril le journal Novaïa Gazeta, un des derniers organes d’opposition au gouvernement russe. Mercredi, cinq chefs de la diplomatie de pays européens, dont la France et l’Allemagne, ont écrit à leur homologue russe Sergueï Lavrov pour exprimer leur « profonde inquiétude » concernant le sort des homosexuels en Tchétchénie.

Passages à tabac, privations, humiliations, soumissions à des chocs électriques, c’est ce qu’ont raconté ceux qui ont été relâchés des prisons secrètes, non loin de Grozny, la capitale du pays. Le but des tortures : que les prisonniers avouent connaître d’autres homosexuels, pour que ceux-ci soient arrêtés à leur tour. Cette répression ferait suite à des démarches entreprises début mars par des membres de la communauté LGBT (lesbiennes, gays, bisexuels et trans) en vue de l’organisation de Gay Prides dans des villes du Caucase du Nord. Après la révélation des arrestations et des tortures, le gouvernement tchétchène et son dirigeant, Ramzan Kadyrov, ont réagi par le biais du porte-parole, Alvi Karimov, qui a déclaré qu’ « il était impossible de détenir et de persécuter des personnes qui n’existent simplement pas dans la République ».

Qu’est-ce qui rend une telle situation possible dans ce petit Etat du Caucase, administré par la Russie ? Comment expliquer cette chasse à l’homme orchestrée par les dirigeants au pouvoir ? Explication en trois points.

1. Tchétchénie – Russie : les liens de la violence

Si l’histoire ne suffit pas à tout expliquer, elle est néanmoins nécessaire pour comprendre comment la Tchétchénie s’est développée, notamment dans ses relations avec sa voisine et ex-meilleure ennemie, la Russie. Celle-ci administre le territoire depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale entre les deux pays (1999-2000). La présence russe sur le territoire, elle, remonte à bien plus loin, dès le XVIème siècle.

Carte : La Tchétchénie

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Aude Merlin, spécialiste du Caucase du Nord de l’Université libre de Bruxelles, rappelle l’attitude de la Russie vis-à-vis de l’homosexualité : « Les pratiques judiciaires, policières et politiques, largement empreintes du passé soviétique en la matière, sont très répressives en Russie et ont poussé de nombreux homosexuels à quitter le pays ». Ainsi, avec une telle politique de répression mise à l’œuvre en Russie-même, il est peu étonnant que le jeu d’influence politique, judiciaire et culturel conduise à une reproduction des actes dans les Etats de la Fédération.

Mais si les associations de promotion des droits des personnes LGBT et de défense des droits de l’Homme dénoncent depuis un certains temps le traitement fait aux personnes homosexuelles en Russie, cela n’est jamais dans des proportions mises en place en Tchétchénie. C’est bien le régime en place qui appelle à l’élimination pure et simple des individus et qui organise les purges.

2. Ramzan Kadyrov, dictateur sans limite

Le président Tchétchène Ramzan Kadyrov

« La Tchétchénie est un  » État dans l’État « , où les lois russes ne sont pas appliquées (…) Ramzan Kadyrov a reçu un blanc-seing total de la part de Moscou en terme d’exercice de la coercition et de la violence (…) », affirme Aude Merlin. Fils d’un mufti, d’abord nommé Premier ministre par intérim par Vladimir Poutine après l’accident de voiture de celui de l’époque, il devient pleinement Premier ministre et accède ensuite à la fonction de président. Il est l’un des plus fervents soutiens de Vladimir Poutine, qui lui laisse en échange les rênes du pays pour gouverner comme bon lui semble.

– à voir : reportage d’Envoyé Spécial (France 2) :  » Tchétchénie, vitrine et arrière-boutique  » : ce reportage montre combien le culte de la personnalité du président est intense. lien : https://youtu.be/abQwCU2tI1Y

Comme son idole Vladimir Poutine, Ramzan Kadyrov est extrêmement attaché aux valeurs morales conservatrices et à l’imagerie guerrière et virile héritée de l’époque soviétique.

Un député britannique et ministre d’État au Bureau des Affaires étrangères et du Commonwealth, sir Alan Duncan, a récemment déclaré devant le Parlement britannique détenir des informations sur les persécutions des homosexuels. Selon ce député, Ramzan Kadyrov « « veut que la communauté gay soit éliminée d’ici le début du Ramadan« , (soit le 26 mai)» afin de purifier la Tchétchénie de ces « sous-hommes ».

3. Les coutumes tchétchènes

La société tchétchène est en elle-même largement intolérante avec les personnes LGBT. Dans ce pays où l’islam sunnite est la religion de 86% des habitants et où le chef de l’Etat promeut un retour aux pratiques les plus traditionnelles, l’homosexualité n’est pas la bienvenue. Les coutumes familiales exercent une pression très lourde sur les personnes, car si un individu faute, c’est toute sa famille qui est précipitée avec lui dans la honte.

Les crimes d’honneur sont encore très nombreux, comme l’explique un jeune homosexuel qui a été torturé par le régime tchétchène interrogé par France 2 : « Si les membres de ma famille venaient à apprendre que je suis homosexuel, ils me tuerait. Sans hésitation. parce que c’est une honte pour nous, les Tchétchènes, une honte qui ne peut être lavée que dans le sang ». Un autre, questionné par France 24, confirme : « Ils disent aux parents de tuer leurs enfants. Ils appellent ça laver l’honneur par le sang ».

Cette société machiste, homophobe et patriarcale fait également peser son poids sur les femmes, souvent réduites au rôle de mère et de femme au foyer. Entièrement dépendantes de leurs maris, elles subissent de nombreuses injustices, comme la perte de leurs enfants sans condition en cas de divorce, ou encore la polygamie, interdite par la Russie mais pourtant répandue en Tchétchénie. Une affaire datant de 2015 a défrayé la chronique, celle de Louisa Goïlabieva, jeune fille de 17 ans mariée de force à un proche de Kadyrov de trente ans de plus qu’elle et déjà marié. La jeune fille a été contrainte d’accepter sous la menace de représailles, ce que dément fermement le gouvernement.

Asmaa Boussaha

 

Une explosion dans une mine de charbon dans le nord de l’Iran

Une explosion accidentelle a bloqué mercredi au moins soixante-dix mineurs dans une mine de charbon près de la ville d’Azad Shahr dans le nord de l’Iran. « Quarante ouvriers sont coincés dans une partie de la mine, et trente à quarante dans une autre », a déclaré Pirhossein Koulivand, chef des opérations d’urgences d’Iran, à l’AFP.

Les équipes de secours sont en train de creuser un tunnel pour atteindre les personnes coincées,« mais la concentration de gaz rend leur travail difficile », a déclaré un responsable de la province de Golestan.

Jusqu’à présent, vingt-huit mineurs ont été admis dans différents hôpitaux de la région et douze autres sont sortis indemnes de l’explosion.

Malgo Nieziolek

Yémen : le chef d’une ONG « choqué » par l’ampleur de la crise humanitaire

Le chef de l’ONG Norwegian Refugee Council (NRC), Jan Egeland, s’est dit, mercredi lors d’une conférence de presse à Sanaa, « choqué » par l’ampleur de la crise humanitaire que connaît actuellement le Yémen. Sept millions de personnes sont menacées par « famine sans précédent ».« Les sévères restrictions d’accès au Yémen par voie aérienne, maritime et terrestre ont causé un effondrement économique dans ce pays », a indiqué M. Egeland, qui a appelé à leur levée.


Le Yémen est déchiré par un conflit depuis qu’une coalition arabe menée par l’Arabie saoudite a commencé en mars 2015 une campagne de bombardements pour repousser les rebelles chiites Houthis, soutenus par l’Iran, qui avaient pris le contrôle de la capitale Sanaa et d’autres régions du pays. Le conflit a provoqué la mort de plus 7 700 personnes en majorité des civils, et fait plus de 42 500 blessés. Toutes les médiations de l’ONU et sept accords de cessez-le-feu ont échoué.

Aglaé Watrin avec AFP.