Alep : la trêve n’aura pas eu d’effets

A moins d’une heure de la fin de la « pause humanitaire » décrétée par la Russie à Alep, vendredi, encore aucun civil ne s’était aventuré dans les « couloirs humanitaires », ouverts depuis le début de matinée.

Décidée unilatéralement par les forces russes, soutien du régime syrien, la courte trêve instaurée par la Russie n’aura pas eu d’effets sur la situation humanitaire, dans la ville assiégée par Damas. Alors que les Nations Unies ont très vite déclaré ne pas être liées à l’initiative russe, les rebelles syriens, qui occupent toute la partie Est de la métropole, l’ont rejetée. Selon l’agence de presse officielle Sana, les forces rebelles auraient tiré sept roquettes sur l’axe d’évacuation du Castello, faisant trois blessés.

Cette « pause humanitaire », qui devait expirer à 19 heures (18h, heure française), devait permettre, outre l’évacuation de civils, le départ des combattants rebelles qui le souhaitaient vers d’autres régions sous leur contrôle. Elle intervient alors que les forces dissidentes ont lancé une vaste offensive, le 28 octobre, contre les quartiers Ouest contrôlés par l’armée de Bachar Al-Assad, aggravant encore la situation des habitants.

Le 22 octobre, un premier cessez-le-feu de trois jours mis en place par les armées russe et syrienne avait expiré sans avoir permis l’évacuation de civils et de blessés, ni le retrait de combattants des quartiers Est, où vivent au moins 250 000 personnes. Les habitants de la partie rebelle sont privés d’aide humanitaire depuis plus de trois mois et menacés de pénurie alimentaire.

Winny Claret

L’Afghane aux yeux verts du National Geographic va être expulsée du Pakistan

Le regard de Sharbat Gula a fait d’elle l’une des réfugiées les plus connues au monde. (Crédit : Art by Piyali/Wikimedia Commons)
Le regard de Sharbat Gula a fait d’elle l’une des réfugiées les plus connues au monde. (Crédit : Art by Piyali/Wikimedia Commons)

Célèbre pour avoir fait la couverture du National Geographic en 1985, la réfugiée Sharbat Gula va être expulsée vers l’Afghanistan lundi pour détention de faux papiers.

 

Le regard de Sharbat Gula a fait d’elle l’une des réfugiées les plus connues au monde. Mais trente ans après la publication de son portrait en Une du National Geographic, elle vit encore dans la clandestinité. Poursuivie au Pakistan pour détention de faux papiers, Sharbat Gula doit être expulsée dès lundi du pays pour retourner en Afghanistan, son pays d’origine.

Arrêtée la semaine dernière, la réfugiée avait été condamnée à 15 jours de prison et à une amende de 110 000 roupies (environ 950 euros), après avoir plaidé coupable. « Nous avons déjà payé l’amende imposée à Mme Gula par le tribunal et nous l’emmènerons en Afghanistan d’une façon digne lundi », a déclaré Abdul Hameed Jalili, conseiller chargé des réfugiés au consulat afghan.

A son arrivée, Sharbat Gula doit rencontrer le président afghan Ashraf Ghani à Kaboul où elle recevra les clefs de son nouveau logement. Un dénouement qui fait suite à de nombreuses réactions sur les réseaux sociaux.

Steve McCurry, l’américain à l’origine du célèbre portrait a réagi à l’affaire sur Instagram : « Elle a souffert tout au long de sa vie et son arrestation est une violation fragrante de ses droits humains ». Le photographe avait rencontré Sharbat Gula pour la première fois en 1984, dans un camp de réfugiés afghans, vers ses 13 ans. Aujourd’hui, c’est une mère de quatre enfants, analphabète, et son mari est décédé.

 

 

Les ONG ont condamné la pression mise par le Pakistan sur ces migrants. Depuis juillet, des centaines de milliers d’Afghans sont retournés à leur pays d’origine, malgré la guerre qui y perdure.

 

Simon Chodorge

Turquie : l’UE extrêmement inquiète après l’arrestation de députés pro-kurdes

Plusieurs députés du parti HDP et les co-présidents de la formation ont été interpellés dans la nuit de vendredi dans le cadre d’une “enquête antiterroriste”.

L’Union européenne “extrêmement inquiète”. La chef de diplomatie de l’UE Federica Mogherini exprime ce vendredi sa préoccupation, après l’arrestation de onze députés pro-kurdes environ et plusieurs dirigeants du parti pro-kurdes HDP (Parti démocratique des peuples), dont le président du groupe parlementaire Idris Baluken. Elle a par ailleurs convoqué une réunion des ambassadeurs de l’UE à Ankara (capitale de Turquie).

La réaction des Kurdes n’a pas tardé puisqu’une puissante explosion portant la marque des rebelles du PKK (organisation armée de l’opposition kurde en Turquie) a fait un mort et une centaine de blessés vendredi matin à Diyarbakir, la “capitale” du sud-est à majorité kurde de la Turquie.

Ces gardes à vue se déroulent dans un contexte de purges des opposants en Turquie, à la suite du coup d’Etat ratée de l’armée en juillet dernier. Le Président Recep Tayyip Erdogan en a profité pour renforcer encore plus son régime, notamment en instaurant l’état d’urgence. Cet état d’urgence, imputé aux réseaux du prédicateur Fetullah Gülen, a permis au Président d’arrêter des milliers de personnes ; militaires, fonctionnaires de toutes sortes, journalistes et citoyens lambdas vus comme opposants.

Le HDP est entré au Parlement turque en juillet 2015. Il avait alors réussi à rassembler au delà de la communauté kurde (15 millions de personnes), devenant un parti moderne ouvert aux femmes et aux minorités. Alors que le HDP dément un quelconque lien avec le PKK, M. Erdogan en a fait sa bête noire, tentant de décrédibiliser dans ses déclaration le parti devenu la troisième force politique du pays.

V.W

Brésil : Michel Temer, président depuis une semaine et déjà impopulaire


La grogne monte contre Michel Temer, nouveau président par intérim du Brésil, qui en une semaine a réussi à se mettre à dos une partie de la population Brésilienne. En cause : les conditions obscures de son arrivée au pouvoir ainsi que le plan d’austérité qu’il compte mettre en place.


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Le 12 mai dernier, Dilma Rousseff, présidente du Brésil était destituée provisoirement par un vote de la chambre des députés. Accusée d’avoir maquillé les comptes publics pour dissimuler le déficit du pays, la dirigeante du PT, le parti des travailleurs créé par l’ancien président Luis Inàcio « Lula » Da Silva, est remplacée le temps de l’enquête par son ancien vice-président Michel Temer. Depuis sa prise de pouvoir considérée par certains comme un « coup d’état », l’homme politique centriste a opéré un virage conservateur par rapport à la gouvernance de Dilma Rousseff.

Le plan d’austérité de Michel Temer révolte les étudiants et les artistes

Deux jours après son arrivée à la présidence, Michel Temer décide de supprimer le ministère de la culture. « Toute la classe artistique était révoltée » déclare João Pedro, étudiant en master de cinéma à Sao-Paulo. « C’est ce qui a lancé les manifestations. Tous les grands lieux culturels de la ville étaient occupés par la population ». Sous la pression de la rue, Michel Temer est revenu sur sa décision il y a deux jours. Le ministère de la Culture sera donc maintenu.

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Manifestation contre Michel Temer à Sao Paulo @AliceYanni
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Les femmes contre le coup d’état – Sao Paulo @AliceYanni

Mais la mobilisation ne cesse pas pour autant. En effet, d’autres réformes d’austérité sont toujours envisagées, à contrepied de la politique sociale de Dilma Rousseff. Le but : économiser 64.9 milliards de réais (17.03 milliards de dollars) selon le ministre de la planification Nelson Barbosa. «Le budget de l’éducation va diminuer drastiquement, ainsi que celui de la santé » explique João Pedro. « Le gouvernement veut fermer toutes les écoles qui se trouvent en périphérie de la ville » s’insurge Alice, étudiante française en sciences-politiques à Sao Paulo. « C’est un drame pour les gens pauvres qui devront faire des heures de trajet pour avoir accès à l’éducation », ajoute-t-elle. Du coup, certains collégiens occupent leurs établissements et de nombreuses facs sont bloquées. Tous les jours, des manifestations rassemblent des milliers de personnes dans les rues.  « Les droits sociaux conquis par le PT sont piétinés, se révolte João Pedro. Michel Temer veut effectuer un retour en arrière de vingt ans sur les avancées sociales du pays »

La destitution de Dilma Rousseff est considérée par certains comme anti-démocratique

A Sao Paulo, l’argument social ne convainc pas tout le monde. « C’est l’une des villes les plus développées du Brésil, remarque João Pedro. La classe moyenne y est très importante, ces gens-là se fichent pas mal des aides sociales. » Pourtant, ce n’est pas parce qu’ils n’approuvent pas la politique de l’ex-présidente que les paulistanos soutiennent Michel Temer. « Beaucoup de ceux qui participent aux manifestations pro-Dilma sont simplement insatisfaits d’une destitution qu’ils considèrent comme anti-démocratique. » explique-t-il.

Leda Cartum, est traductrice et écrivain à Sao Paulo. Elle n’aurait jamais voté pour Dilma Rousseff, pourtant, elle la défend aujourd’hui. « Dilma n’est pas plus corrompue que les autres. Elle l’est même moins, c’est pour ça qu’elle a été renversée », estime-t-elle. Si Leda admet que Dilma Rousseff a sans-doute effectué le pédalage budgétaire dont elle est accusée pour masquer le déficit des comptes publics, elle rappelle que l’ancienne présidente n’a jamais trempé directement dans des scandales de corruption : « au contraire de Michel Temer qui a été identifié comme l’un des récipiendaires de pots de vins dans l’affaire Petrobras» L’entreprise de pétrole avait été le cœur d’un scandale d’attribution de marchés frauduleux qui avait éclaboussé une bonne partie de la classe politique Brésilienne, dont le vice-président de l’époque. Comme beaucoup d’autres brésiliens, Leda n’hésite pas à qualifier la destitution de l’ancienne présidente de « coup d’état ». « Les politiciens menacés par le plan anti-corruption lancé par Dilma Rousseff ont orchestré sa chute » accuse-t-elle. Une hypothèse corroborée par la mise à l’écart récente d’un proche de Michel Temer, Romero Juca, accusé d’avoir tenté d’étouffer l’enquête sur le scandale Petrobras.

Un futur incertain

Alice s’inquiète : « Il y a une véritable effervescence depuis la destitution de Dilma. Personne ne sait ce qu’il va se passer dans un mois. » Pour João Pedro « Il faut des élections au plus vite. On n’a pas le temps d’attendre les cent-quatre-vingt jours de procès qui décideront définitivement du sort de Dilma Rousseff. » Selon un sondage récent, seuls 1 à 2% des brésiliens voteraient pour Michel Temer s’il se présentait aux élections. C’est dans ce contexte politique chaotique que se préparent les Jeux Olympiques, qui auront lieu dans deux mois et demi au Brésil.

Claire-Marie Germain