Barcelone : 350 000 Espagnols disent « non » à l’indépendance

Les partisans de l’unité espagnole ont manifesté, hier, dans les rues de Barcelone. Ils étaient plusieurs centaines de milliers à crier leur refus de l’indépendance, alors que le gouvernement espagnol et le pouvoir catalan sont dans une impasse.

 

Les rues de Barcelone se sont parées, dimanche, du drapeau espagnol, alors que les partisans de l’unité du pays manifestaient contre l’indépendance de la Catalogne. Ils étaient 350 000 selon la police locale et plus de 900 000 selon les organisateurs, à s’être rassemblé dans la capitale catalane. C’était la première manifestation des partisans du « non » depuis le référendum du 1er octobre. Celui-ci avait fait ressortir une large majorité de « oui », plébiscité à 90%, mais seulement 42% des Catalans y avaient participé.

« Vive la Catalogne! Vive l’Espagne! » scandaient les manifestants dans la rue, eux qui se considèrent comme la majorité silencieuse.

 

Pour le moment, la situation est dans l’impasse : le président de la région, Carles Puigdemont, a laissé entendre qu’il déclarerait l’indépendance de la région mardi, si le gouvernement espagnol ne répondait pas aux propositions de médiation. Les indépendantistes estiment qu’ils ont recueilli une majorité écrasante de « oui » à l’indépendance. Cependant, selon les sondages, les Catalans voudraient qu’un référendum en bonne et due forme soit organisé, mais le « non » l’emporterait.

De son côté, le chef du gouvernement espagnol, Mariano Rajoy n’envisage pas de dialogue tant que les séparatistes menacent de rompre avec le reste du pays. « On ne peut rien construire si la menace contre l’unité nationale ne disparaît pas», a déclaré Mariano Rajoy au quotidien El Pais, dimanche.

La ministre française des Affaires européennes, Nathalie Loiseau, a quant-à-elle annoncé ce lundi sur CNews que, si la Catalogne annonce son indépendance de manière unilatérale, elle ne « serait pas reconnue » par la France. « On ne peut pas résumer la Catalogne à la consultation que les indépendantistes [ont] organisée », a-t-elle justifié.

Clara Charles

 

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Des chauffeurs de VTC bloquent les locaux du nouveau Taxify

Plusieurs dizaines de chauffeurs de voitures de transports (VTC) ont bloqué le bureau de recrutement de Taxify à Paris, en début d’après-midi ce lundi. Ils dénoncent « l’arrivée agressive » de la nouvelle entreprise estonienne dans la capitale.

L'entreprise Taxify est déjà présente dans 19 pays, en Europe et en Afrique.
Taxify est déjà présente dans 19 pays, en Europe et en Afrique. (Karlis Dambrans/Flickr)

C’est un nouveau rebondissement dans le marché des voitures avec chauffeurs. Aux alentours de 13h, la station de recrutement de Taxify dans le 11e arrondissement de Paris a été bloquée par quelques dizaines de chauffeurs VTC. « Nous ne sommes pas d’accord pour qu’ils cassent les prix du marché, qui sont déjà déplorables », regrette Helmi Mamlouk, porte-parole du syndicat FO-CAPA VTC. Le blocage de la station de Taxify s’est poursuivi pendant une heure. Les locaux sont restés fermés tout l’après-midi.

Prix cassés

Taxify est le petit nouveau sur le marché des VTC, déjà extrêmement concurrentiel dans la capitale. L’entreprise, basée en Estonie, propose une offre à prix cassé sur tout le mois d’octobre. Une baisse de 50% sur les tarifs, qui représente des trajets très intéressants pour les passagers. Taxify assure aux chauffeurs une compensation pour juguler cette offre.

Déjà présente dans 19 pays, en Europe mais aussi en Afrique, Taxify bénéficie des investissements du géant chinois Didi Chuxing.

Arrivée à Paris la semaine dernière, l’entreprise entend faire sa place aux côtés de Uber, leader européen du secteur VTC. Ses tarifs, assure l’entreprise estonienne, sont 10% moins chers que ceux d’Uber.

Au conflit qui oppose les chauffeurs de taxis aux VTC, s’ajoute désormais l’affrontement des différentes plateformes.

Léa DUPERRIN

Catalogne : « Les indépendantistes ne comprennent pas les enjeux de stabilité européenne »

La rage continue de grogner entre les indépendantistes Catalans et le pouvoir espagnol depuis le vote pour l’indépendance du 1er octobre dernier. Les indépendantistes estiment notamment que la Catalogne, région la plus riche d’Espagne, contribue trop au budget du pays et ils refusent désormais de payer pour les autres régions.
Yann Echinard est maître de conférences en économie à l’Institut d’études politiques de Grenoble. Spécialiste de l’économie de l’Union européenne (UE), il considère que les indépendantistes catalans oublient ce que l’Union leur a apporté et qu’ils mettent en danger sa stabilité.

 

Comprenez-vous la position des indépendantistes catalans qui disent ne plus vouloir payer pour les autres régions espagnoles?

Non, et je ne le comprendrai jamais. Je suis assez effaré de voir comment la Catalogne joue la ligne de l’indépendance en oubliant complètement qu’elle a beaucoup bénéficié du choix de l’Espagne d’intégrer la Communauté européenne en 1986. La Catalogne a profité de sa situation géographique, car elle était proche des flux commerciaux de l’Europe : Barcelone est mieux placée que Madrid et elle est devenue une zone urbaine importante en attirant les investisseurs européens.

La Catalogne, telle qu’elle est aujourd’hui, serait-elle viable économiquement en tant qu’État indépendant ?

Oui, sans doute, mais seulement si l’on voit les choses de manière statique, ce qui est irréaliste. Si la Catalogne proclame son indépendance, on va se diriger vers un moment de grande instabilité dans la région. Si elle est identifiée par les investisseurs comme une zone à risques, il peut y avoir des mouvements pour la quitter. La Catalogne peut donc potentiellement être isolée et affaiblie économiquement.

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Quel est le risque si on laisse les régions européennes les plus riches se séparer des territoires les plus pauvres?

L’entrée de l’Espagne dans l’UE a permis au pays de rattraper son retard économique. Mais le boom créé s’est accompagné de fortes inégalités au plan territorial : les différences régionales se sont accentuées entre les zones qui ont profité de l’intégration économique et celles qui n’y ont pas réussi. C’est très fréquent au sein de l’UE.

Si l’on ne met pas en place des systèmes de solidarité territoriale à l’échelle de l’Union, on risque de très fortes tensions politiques. C’est l’inverse total de ce que l’on devrait faire. Les régions les plus riches doivent soutenir les plus pauvres.  Les indépendantistes Catalans ne comprennent pas les enjeux de stabilité européenne.

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Que se passerait-il au niveau de l’Union européenne si la Catalogne faisait sécession?

Nous serions face à une situation totalement inédite. Dans le scénario – peu probable à mon avis – d’une sécession de la Catalogne, il n’y aurait aucune reconnaissance du nouvel État à l’échelle de l’Europe, puisque c’est l’Espagne qui a signé la ratification à l’UE, et pas la Catalogne.

Elle devrait donc engager une nouvelle procédure pour faire partie de l’UE et nous rentrerions dans une machinerie politique qu’il n’est pas possible de prévoir. La crainte des États peut être la multiplication de ces stratégies régionales et donc un affaiblissement de l’Europe. La Belgique pourrait imploser, le Royaume-Uni se séparer, pourquoi pas aussi l’Italie… La hausse du nombre d’acteurs au sein de l’UE rendrait les choses très compliquées puisqu’on voit déjà que c’est difficile d’être à 28.

Que pensez-vous de la position de l’Union européenne qui refuse d’intervenir dans la crise ?

Nous sommes à un moment très particulier où on a atteint un niveau d’intégration jamais créé en Europe et même dans le monde, et en même temps, on continue de considérer que l’État est intouchable et qu’on ne doit pas se mêler des affaires intérieures des autres États membres.

C’était pareil pendant les discussions sur le Brexit : on a laissé le Brexit être une question britannico-centrée et on a laissé l’Europe à l’extérieur des discussions, alors que c’était le cœur du sujet. L’UE doit devenir un sujet de débat politique!

La France, l’Allemagne, l’Italie, le Luxembourg, la Belgique et les Pays-Bas, tous ceux qui ont participé au projet originel d’Union européenne, doivent se saisir du sujet. On ne les entend pas et c’est une erreur politique. On se plaint du déficit démocratique de l’Europe et en même temps nos dirigeants ne s’emparent pas de ces questions centrales pour faire entrer l’UE dans le débat politique. On laisse de côté des questions qui nous concernent directement.

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Propos recueillis par Clara Charles

 

Les 50 ans de la mort du Che : retour sur l’échec de sa révolution africaine

Célèbre cliché du Che Crédit Photo : Alberto Korda
Célèbre cliché du Che
Crédit Photo : Alberto Korda

Il y a 50 ans, Che Guevara mourait sous les balles de l’armée bolivienne. Mais avant de se rendre en Amérique latine, il passa quelques mois en Afrique dans l’espoir d’exporter la révolution. Retour sur un épisode peu connu de l’histoire du Che.

17 janvier 1961 : Patrice Lumumba, ancien Premier ministre de la République du Congo (aujourd’hui République Démocratique du Congo ou plus communément appelé Congo-Kinshasa), soutenu par l’URSS, est assassiné. Cet évènement marque le début d’une guerre civile entre les forces armées du Général Mobutu soutenu par les États-Unis et les combattants lumumbistes. A l’heure de la décolonisation, Cuba voit cette guerre civile comme l’occasion d’y venger Lumumba et d’exporter la révolution sur le territoire africain. Les espoirs du Che se concentrent sur le Congo, pays stratégique, qui avec ses neuf frontières, pourrait devenir l’épicentre de la révolution qui s’étendrait dans les autres pays. Fidel Castro accepte d’y envoyer Che Guevara qui souhaite retourner se battre.

La mission secrète

Che Guevara sous l’identité Adolfo Mena González en 1966. Une des nombreuses qu’il utilisait pour se déplacer. Crédit Photo : Museo Che Guevara (Centro de Estudios Che Guevara en La Habana, Cuba)

Le Che met alors en place une opération secrète. Il arrive en avril 1965 en Tanzanie (où s’organisent les rebelles) avec ses hommes, des Cubains noirs, pour éviter d’éveiller les soupçons. Peu nombreuses sont les personnes au courant de la présence du révolutionnaire en Afrique où il se fait appeler « Tatu » (qui signifie « trois » en swahili, car il était là en temps que médecin, troisième homme le plus important du corps expéditionnaire). Cela risquerait de mettre en péril la mission. Son objectif : aider militairement les lumumbistes à organiser une révolution.

Mais entre le départ du Che et son arrivée, la situation a changé dans le pays. Laurent-Désiré Kabila, à la tête des opérations congolaises, a perdu les territoires sur lesquels il avait la main, soit les 2/3 du pays. Certains lumubistes ont changé de camps et les forces du général Mobutu écrasent la rébellion grâce à l’aide des États-Unis. Il ne reste à Kabila que quelques poches dans l’est du pays. Ces défaites font éclater des divisions entre les rebelles, la révolution n’est plus donc une priorité, il faut d’abord se réorganiser.

De la désorganisation à l’échec

Che Guevara au Congo en 1965. Crédit Photo : Museo Che Guevara (Centro de Estudios Che Guevara en La Habana, Cuba)

Très vite, l’excitation de la révolution est remplacée par la frustration. Sur place, la situation est confuse. Le rapport de force a changé et les rebelles sont en position de faiblesse. Kabila est plus souvent à Dar es Salaam, en Tanzanie, qu’avec ses hommes sur le front. Le maquis est totalement désorganisé et les résistants africains ne sont pas aussi formés que les Cubains. « Dans ce mouvement révolutionnaire africain, tout était à faire : l’expérience, la préparation, l’instruction. Ça a été une rude tâche » déclara Fidel Castro lors d’une interview. Un fossé culturel se fait vite sentir. Che Guevara se plaint de l’indiscipline des rebelles congolais, de leur manque de compétence militaire, et du peu d’ardeur idéologique.

Mais tout a réellement basculé suite à l’attaque de Fort Bandera qui s’est soldée par une défaite. Quatre Cubains sont morts et dans la précipitation, les soldats n’ont pas pu récupérer les corps de leurs camarades. Or l’un d’entre eux portait un caleçon sur lequel était inscrit « fabriqué à Cuba ». Suite à cet épisode et grâce aux espions sur place, les États-Unis se rendent compte de la présence du Che au Congo, et Mobutu bombarde la zone occupée par les rebelles. La tension monte, les rebelles congolais craignent que Che Guevara se fasse capturer, ou pire, se fasse tuer. Après sept mois de mission, ses hommes et lui rentrent à Cuba. Il écrira dans son Journal du Congo « Ceci est l’histoire d’un échec ».

Sarafina Spautz

 

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