Le groupe d’électronique sud-coréen Samsung a rejeté mardi des accusations d’achats de voix auprès de membres du Comité international olympique (CIO). Ces paiements, datant de 2011, auraient visé à obtenir l’attribution des Jeux Olympiques d’hiver de 2018 à Pyeongchang au détriment de Munich et d’Annecy.
Dans un communiqué publié ce mardi, le géant sud-coréen a déclaré : « Samsung n’a jamais mené aucune activité illégale de lobbying afin d’obtenir la victoire de Pyoengchang« . Pourtant, la chaîne sud-coréenne SBS TV a affirmé avoir obtenu la copie de 137 courriels, dont certains entre des responsables de Samsung et Papa Massata Diack, fils de Lamine Diack, l’ancien président de la Fédération internationale d’athlétisme (IAAF) et ancien membre du CIO.
Déjà mis en cause pour des achats de voix afin de garantir à Rio l’attribution des JO d’été de 2016 et visé par un mandat d’arrêt international dans le dossier de dopage et corruption qui avait ébranlé le monde de l’athlétisme en 2016, Papa Massata Diack est cette fois soupçonné d’avoir promis de convaincre des membres du CIO de voter en faveur de Pyeongchang en échange d’argent et de contrats de parrainage.
Le CIO a indiqué que les informations concernant Lamine Diack « seront ajoutées à son dossier ouvert par la Commission d’éthique » et rappelle être « partie civile » dans l’enquête ouverte par la justice française à l’encontre du Sénégalais « qui a perdu son statut de membre honoraire en 2015 ».
Pour rappel, le 6 juillet 2011, Pyeongchang, écartée à deux reprises pour les JO de 2010 et 2014, avait obtenu dès le premier tour de scrutin l’organisation des JO de 2018, devant Munich (Allemagne) et Annecy (France)
A l’origine de la plainte déposée contre Mohammed Ben Salmane lundi soir, il y a un avocat pénaliste, Me Joseph Breham. En invoquant la Convention contre la torture, que la France a ratifiée en 1987, l’avocat accuse le prince héritier de complicité d’actes de torture.
Dans une interview accordée à « Celsalab », Me Joseph Breham revient sur la plainte qu’il a déposée contre Mohamed Ben Salmane pour « complicité d’actes de torture » de l’Arabie Saoudite au Yémen.
Arrivé dimanche à Paris pour une visite officielle, le prince héritier d’Arabie saoudite Mohammed Ben Salmane pourrait bien garder un goût amer de son voyage. La cause ? Cette plainte déposée par l’avocat pénaliste Joseph Breham pour « complicité d’actes de torture », en raison de l’implication de l’Arabie Saoudite dans la guerre au Yémen. L’avocat pénaliste représente une association yéménite de défense des droits humains. Que peut-on attendre de cette plainte ? Nous avons posé la question à Me Joseph Breham.
Que contient la plainte que vous avez déposée contre Mohammed Ben Salmane ?
Nous avons porté plainte contre Mohammed Ben Salmane pour des faits de torture au Yémen. La coalition menée par l’Arabie saoudite a sciemment attaqué des populations civiles yéménites. Selon Amnesty International, la coalition s’est rendue responsable de 60% des crimes commis. Selon le comité contre la censure des Nations unies, ces attaques sont une violation de la Convention contre la torture.
On peut également parler de crimes de guerre, mais nous avons préféré parler de torture pour des raisons d’ordre procédural : le crime de guerre peut bénéficier en France de la notion de compétence universelle, mais selon quatre critères. Notamment, le parquet peut s’y opposer. La convention sur la torture nous permet d’attaquer légitimement Mohammed Ben Salmane, et même nous en donne l’obligation, dès lors qu’il pose le pied sur le sol français.
La France est soupçonnée de soutenir indirectement les exactions commises au Yémen en vendant des armes à l’Arabie saoudite… Votre plainte peut-elle avoir des répercussions sur la France ?
Non, il ne devrait pas y avoir de répercussions sur la France. Il n’y a pas, sauf si l’on retrouve un morceau d’arme française sur des documents qui vont servir l’instruction, de répercussions possibles pour la France. Quant à la question des répercussions sur les relations diplomatiques entre la France et l’Arabie saoudite, je ne m’en préoccupe pas. Je m’occupe du droit international, ce n’est donc pas mon problème. Cela dit, j’ai l’espoir qu’Emmanuel Macron évoque le sujet des exactions commises au Yémen avec le prince héritier. Je n’ai cependant pas pas la prétention de penser que c’est ma plainte qui le décidera à le faire.
Que risque Mohammed Ben Salmane ?
La procédure va prendre plusieurs années. Mohammed Ben Salmane encourt désormais des poursuites judiciaires, une mise en examen et un jugement devant les juridictions françaises. Nous espérons que la plainte sera instruite par le Tribunal de grande instance de Paris. En théorie, les peines peuvent aller jusqu’à 20 ans de prison.
Vous n’avez rien suivi au conflit en Irlande du Nord ? Pas de panique, nous vous avons préparé une petite chronologie pour tout vous expliquer… En quatre grandes dates.
Vingt ans les accords de paix ayant mis fin au conflit en Irlande du Nord, cet épisode reste toujours présent dans les esprits… et dans les rues du pays. Crédit : CC
Depuis 1919, Britanniques et Irlandais, qui cultivent leurs rivalités depuis le début de l’occupation britannique en Irlande trois siècles auparavant, se livrent une guerre sans merci, sur fond de conflit religieux.
1921 : L’Irlande est coupée en deux
Des négociations ont donc lieu et amènent à un traité qui va couper l’Irlande en deux. Le Sud, catholique, devient l’État libre d’Irlande. Le Nord, divisé entre catholiques et protestants, reste occupé. La guerre continue entre les nationalistes catholiques et les loyalistes protestants qui gouvernent.
Les protestants profitent de leur position pour mener la vie dure aux catholiques. Par exemple, jusqu’en 1969, une loi leur permettait de voter plusieurs fois aux élections, du fait de leur richesse supérieure. Des marches pour les droits civiques sont donc régulièrement organisées. Face aux nationalistes, la police et les militants loyalistes moins pacifistes usent de la violence.
La situation se détériore quand les loyalistes et les nationalistes voient naître dans leurs camps des groupes paramilitaires. Attentats à la bombe, terreur, l’Irlande du Nord s’enfonce dans la guerre civile. Pour calmer le jeu, l’Angleterre, toujours puissance occupante, déploie son armée…
30 janvier 1972 : I can’t believe the news today…
Sanglant dimanche que celui du 30 janvier 1972, quand l’armée britannique tire sur la foule, pendant la marche de l’association nord-irlandaise pour les droits civiques. Treize hommes dont sept adolescents sont tués immédiatement. On déplore également de nombreux blessés par balle, ou écrasés par des véhicules.
Une enquête menée rapidement blanchit l’armée britannique en concluant qu’elle répondait aux tirs de l’IRA provisoire, la fraction radicale de l’organisation paramilitaire des nationalistes. Dans le même temps, des milliers d’activistes catholiques sont emprisonnés sans procès. Pour protester, certains entament des grèves de la fin, grèves auxquelles la Première ministre Margaret Thatcher ne cède pas. En conséquence, de nombreux activistes décèdent dans leurs cellules.
Les attentats de l’IRA, jusqu’alors circoncis au sol irlandais, vont alors se déplacer en Angleterre, à Londres, Manchester ou Warington, où deux enfants sont tués. C’est ce qui inspirera aux Cramberries leur célèbre chanson.
10 avril 1998 : l’accord du Vendredi Saint
Tony Blair arrive au pouvoir en 1997 avec l’intention de débloquer la situation. L’année suivante, le Good Friday Agreement (« Accord du Vendredi Saint ») est signé. Il prévoit la libération de prisonniers politiques et le désarmement des groupes paramilitaires. Un référendum valide cet accord à plus de 70%.
23 juin 2016: les Britanniques votent « oui » au référendum sur le Brexit
Sous l’impulsion du parti anti-européen UKIP et aujourd’hui porté par le gouvernement de Theresa May, les Anglais s’engagent pour le « leave » en 2016 et décident de sortir de l’Union européenne. Un choix qui fait craindre pour la stabilité de l’accord de paix d’après l’ancien Premier Ministre Tony Blair. Le Brexit « change la symétrie des relations entre l’Irlande, le Royaume-Uni et l’Europe », a-t-il affirmé lors d’une visite à Belfast mardi.
L’Irlande du Nord fête mardi les 20 ans de la signature de l’accord de paix, mettant alors fin à plus de trente ans de conflit entre catholiques et protestants. A l’occasion de cet anniversaire, le père Aidan Troy revient sur l’importance de ce pacte. Aujourd’hui curé de l’église anglophone Saint Joseph à Paris, il est devenu l’un des héros de la réconciliation lors d’un mouvement de protestation lancé dans une école catholique pour filles en 2001.
Aidan Troy, curé de l’Eglise Saint Joseph à Paris 8ème.
Où étiez vous pendant la période qui marque la fin du conflit et la signature des accords de paix?
J’étais en réalité à Rome en 1998, quand les accords ont été signés. Mais trois ans plus tard, en 2001, j’ai été envoyé dans le nord de Belfast, auprès de la paroisse d’Ardoyne. Deux mois avant mon arrivée, un affrontement avait éclaté entre catholiques et protestants à la Holy Cross School, une école primaire catholique réservée aux filles. Située dans un quartier protestant, elle était bloquée depuis mi-juin par des protestants. C’était impossible de rentrer, et les enfants n’avaient pas pu aller à l’école depuis. À mon arrivée au mois d’août, j’ai rencontré les parents de chaque communauté, mais aussi les responsables politiques, et tous étaient d’accord pour condamner ce blocus. Personne n’est mort, mais cela nous a rappelé combien l’accord de paix pouvait être sous tension encore.
Jugez-vous que la situation a évolué positivement entre catholiques et protestants depuis la paix signée en 1998 ?
L’évolution est constante oui, même si on peut toujours faire plus. Mais personne ne saurait contredire le fait que la situation s’est nettement améliorée en Irlande du Nord grâce à ces accords de paix. Je crois fermement que l’on continue aujourd’hui encore à faire de réels progrès.
Comment expliquez-vous alors qu’il reste encore des dizaines de « murs de la paix » à Belfast, ces façades qui séparent les quartiers protestants des catholiques ?
Les murs ne sont jamais bons. Mais ces gens de part et d’autre de ces murs de séparation, je les connais. Et ce serait malvenu de décider d’abattre ces murs d’un coup, sans leur consentement. Il faut d’abord travailler à créer plus de confiance entre les deux communautés. Ils ont besoin de cette confiance, ces murs sont comme une soupape de sécurité pour eux aujourd’hui. Mais j’espère et je prie pour qu’un jour très prochain ils puissent être démolis.
Quels sont les prochaines actions à mener en vue de fortifier la paix en Irlande du Nord ?
Ce qui me paraît le plus important c’est de s’occuper de l’université et de faire en sorte que plus de jeunes y aillent et soient éduqués. Depuis des dizaines d’annéee nous évoluons dans un système éducatif cloisonné, où catholiques et protestants ne se mélangent pas jusqu’à parfois leur majorité. Mais à l’université, tout le monde se côtoie. Et c’est pour certains la première fois qu’ils font la rencontre de personnes de l’autre communauté. Alors je pense que l’éducation est une priorité pour faire avancer les accords de paix oui, afin que les communautés apprennent à mieux se comprendre et s’accepter.