La CEDH rejette la demande du plus ancien assigné à résidence de France

Kamel Daoudi est assigné à résidence depuis 14 ans, et sa requête à la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a été rejeté jeudi 14 septembre 2023. En cause : l’homme de 49 ans n’a pas encore épuisé tous les recours possibles de la justice française.

 

La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a rejeté jeudi la requête de Kamel Daoudi, qui dénonçait son assignation à résidence depuis 2008. Cet Algérien de 49 ans n’a pas épuisé l’ensemble des recours auprès de la justice française. Or, c’est l’une des conditions pour saisir le bras judiciaire du Conseil de l’Europe, qui rassemble 46 pays du continent

La Cour « déclare, à l’unanimité, la requête irrecevable » et la « rejette (…) pour non-épuisement des voies de recours internes », indique dans un communiqué la juridiction basée à Strasbourg, une décision « définitive ».

Soupçonné d’avoir préparé un attentat

Kamel Daoudi avait été condamné en 2005 en appel à six ans de prison et à une interdiction définitive du territoire pour « association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste » et avait été déchu de sa nationalité française. Membre présumé d’un groupe islamiste affilié à Al-Qaïda, il était soupçonné d’avoir préparé un attentat contre l’ambassade des États-Unis à Paris en 2001.

En 2009, la CEDH avait toutefois interdit son expulsion en raison du risque de torture en Algérie, pays qu’il avait quitté à l’âge de cinq ans. Cet ex-ingénieur informaticien, qui ne peut donc être ni expulsé, ni régularisé, a été assigné depuis avril 2008 à sa sortie de prison dans la Creuse, la Haute-Marne, le Tarn, la Charente-Maritime et le Cantal.

14 ans d’assignation à résidence

Il « fut astreint à se présenter deux à quatre fois par jour auprès des forces de l’ordre » et contraint de « respecter un couvre-feu nocturne à compter du 24 novembre 2016 », selon la CEDH. Il présenta plusieurs recours pour « excès de pouvoir » mais fut à chaque fois débouté.

« On bat tous les records. Cela fait plus de 14 ans qu’il est assigné à résidence. M. Daoudi a dû pointer 14 ou 15.000 fois. Qui pourrait encore survivre à un tel traitement? », a dénoncé jeudi sur France Inter son avocat, Emmanuel Daoud, avant la publication de l’arrêt.

« Il ne peut rien faire, il est emprisonné à ciel ouvert et dans un état d’assistanat permanent, sans pouvoir pourvoir aux besoins essentiels de sa famille », avait ajouté le conseil dont le client, marié à une Française, est père de quatre enfants français résidant dans le Tarn.

Des procédures françaises encore possibles avant les européennes

Il dénonçait notamment devant la CEDH les modalités de son assignation dans lesquelles il voyait « une mesure privative de liberté » qui violait l’article 5 (droit à la liberté et à la sûreté) de la Convention européenne des droits de l’homme. Il se plaignait aussi d’avoir été séparé de ses proches et critiquait l’équité des procédures engagées devant le juge administratif.

Mais, comme le souligne la Cour, « le requérant n’a pas formé de pourvoi en cassation contre l’arrêt de la cour administrative d’appel de Paris du 5 novembre 2019 ». Par ailleurs, « son pourvoi contre l’arrêt de la cour administrative d’appel de Paris du 6 avril 2023 est actuellement pendant devant le Conseil d’Etat ».

« Selon une jurisprudence constante, le recours pour excès de pouvoir est en principe une voie de recours à épuiser, la procédure devant être menée jusqu’au juge de cassation », justifie la CEDH, selon laquelle « aucune raison ou circonstances particulières ne dispensaient le requérant de se pourvoir en cassation ».

Avec AFP

La flèche de Notre-Dame de Paris sera visible pour les Jeux olympiques


Le nouveau superviseur des travaux de la cathédrale parisienne a rassuré sur l’avancée de la reconstruction du monument jeudi 14 septembre 2023. Philippe Jost souhaite que la flèche et la silhouette de la cathédrale soient visibles pour l’ouverture des Jeux olympiques en juillet 2024.

La reconstruction de Notre-Dame avance comme prévu en dépit de la disparition cet été du général Jean-Louis Georgelin, qui supervisait les travaux, et sa flèche et sa silhouette seront visibles pour la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques sur la Seine en juillet 2024, a assuré jeudi son successeur.

Pour sa première prise de parole depuis sa nomination la semaine passée, Philippe Jost, qui était auparavant le bras droit du général décédé brutalement en montagne, a également assuré sur franceinfo que la réouverture de la cathédrale, ravagée par un gigantesque incendie en 2019, était toujours prévue pour décembre 2024.

La disparition de Jean-Louis Georgelin « aurait pu » avoir un impact sur le rythme des travaux « mais, en fait, nous avons vraiment la détermination de poursuivre son œuvre. Nous le devons à beaucoup, mais nous le devons également à lui », a affirmé M. Jost.

Les restaurations intérieures « quasiment achevées »

« La silhouette de la cathédrale a complètement changé depuis l’incendie. J’espère que, lors des Jeux olympiques en juillet 2024, nous aurons retrouvé également cette grande toiture de la cathédrale et cette flèche au-dessus. Et chacun percevra à ce moment-là qu’on est vraiment très près de la réouverture quelques mois plus tard », a-t-il poursuivi.

La flèche, un « chef-d’oeuvre de charpente en bois », va s’élever jusqu’à 100 mètres de hauteur et sera visible « fin 2023 ». Elle sera dévoilée « au fur et à mesure qu’on aura recouvert cette flèche de sa couverture pour protéger la charpente en bois, « tout le long du premier semestre 2024 ».

A l’intérieur, Notre-Dame « est encore échafaudée mais, quand on entre, on est frappé par son éclat », les nettoyages et les restaurations intérieures étant « quasiment achevées aujourd’hui », a aussi révélé Philippe Jost.

Avec AFP

Comment le gouvernement entend remettre sur les rails le fret ferroviaire français

Après un déclin de son importance depuis les années 1990 et sous le coup d’une enquête de la Commission européenne, le fret ferroviaire français est en mauvaise posture. Le ministre délégué chargé des Transports Clément Beaune a défendu ses projets pour stabiliser et relancer la filière.

Le fret ferroviaire n’est pas au bout de ses peines. Pour la première fois depuis une vingtaine d’année, Fret SNCF en difficultés depuis les années 1990 retrouver des résultats positifs. La libéralisation progressive du secteur dans les années 2000 n’a pas été la réponse providentielle promise, et la part modale du fret ferroviaire repasse difficilement en 2023 au-dessus des 10%. Mais la filière ne voit pas encore le bout du tunnel. Depuis janvier 2023, la Commission européenne enquête sur l’entreprise pour des subventions non-conformes de l’État entre 2007 et 2019. Si la condamnation aboutit, Fret SNCF serait contraint de rembourser 5,3 milliards d’euros, une somme colossale qui condamnerait la filiale.

Le ministre délégué aux Transports Clément Beaune a été auditionné mercredi 13 septembre 2023 par une commission d’enquête sur le sujet à l’Assemblée nationale, et entend « organiser et sécuriser l’avenir du fret ferroviaire en France comme en Europe au moment de la transition écologique ». La décision du gouvernement est de négocier un accord avec Bruxelles plutôt que d’attendre 18 mois d’enquêtes et de risquer le pire. Le ministre se justifie: « face à une situation douloureuse, la réponse est d’apporter une solution rapide qui limite les risques. Ne jouons pas, sécurisons. »

Sauver l’opérateur central du fret ferroviaire

« Nous ne pouvons pas nous passer d’un opérateur national de référence », affirme Clément Beaune. L’accord doit restructurer Fret SNCF en deux entités séparées, une dédiée au transport de marchandise en lui-même et l’autre à la maintenance. 90% des emplois doivent être conservés, et les 10% restants doivent être redirigé vers d’autres opérateurs du fret ferroviaire, ou réabsorber par le groupe SNCF vers d’autres activités.

Cette restructuration aura toutefois un prix. 23 lignes opérées jusque-là par l’opérateur public vont être cédées d’ici janvier ou juin 2024, à d’autres opérateurs: « tout ce qui sera cédé reste dans le fret ferroviaire, à défaut du Fret SNCF », insiste le ministre. Ces actions visent à rassurer l’alliance 4F qui regroupe les acteurs du fret français, et à donner la visibilité demandée par le groupe en 2022.Il n’y aura « ni sabordage, ni abandon, ni résignation sur la fret ferroviaire français » martèle-t-il.

Revitaliser le secteur entier

Au-delà de sauver les meubles, « l’objectif est d’atteindre les 18% de part modale d’ici 2030 », voire de les dépasser, et donc de retourner à son niveau des années 1980. En clair, le but est de rattraper le retard pris sur le fret routier, et donc de ne céder aucune des 23 liaisons au transport par camion. La filière a toutes ses chances dans la recherche de transports moins polluants, en lien avec les ambitions de réindustrialisation: « les nouvelles industries plus vertes vont chercher des modalités plus vertes », souligne Clément Beaune.

Pour relever ce secteur endeuillé, les efforts passent d’abord par les financements. Les aides allouées chaque année depuis 2020 sont prolongées « au moins jusqu’en 2030 » et « amplifiées de 30 millions d’euros », ce qui amène le montant total à 330 millions d’euros annuels à partir de 2025. Du côté investissements, le ministre rappelle la promesse déjà faite au mois de mai : 4 milliards d’euros engagés entre 2023 et 2032, assuré au moins à moitié par l’État, le reste fourni par les régions et acteurs locaux. Ces sommes impressionnantes restent toutefois loin des 10 milliards d’euros nécessaires, selon les estimations d’un rapport sénatorial de 2022.

Mia Goasguen–Rodeno

Inceste: la difficile formation des enseignants

Alors que le gouvernement vient tout juste de dévoiler sa première campagne de sensibilisation aux violences sexuelles sur les enfants, dans lequel le mot inceste est prononcé pour la première fois. La secrétaire d’État chargée de l’Enfance, Charlotte Caubel, a quant à elle affirmé mardi 12 septembre, sur le plateau de l’émission Quotidien que les enseignants étaient « formés régulièrement au repérage des violences subies par les enfants ». Un propos qui fait réagir les concernés.

« C’est un manque que je ressens au quotidien, on se sent complètement démunis ! » assure Karim* enseignant dans un collège à Marseille. Ce dernier exerce depuis sept ans en SEGPA (section d’enseignement général et professionnel adapté des classes accueillant des jeunes élèves présentant des difficultés personnelles et scolaires importantes) et regrette le manque de formation sur les violences sexuelles. 

« Ce sont des élèves qui subissent d’autant plus les violences et ce n’est pas normal de ne pas avoir eu de formation sur cette question en formation initiale et continue », déplore-t-il.

« On ne comprend pas cette absence de formation »


Le Code de l’éducation nationale prévoit, depuis le 22 juin 2000, que les professeurs reçoivent obligatoirement une formation initiale et continue dans le domaine de la protection de l’enfance en danger. Pourtant, l’ensemble des témoignages convergent. Ils n’ont jamais bénéficié de cette formation sur les violences sexuelles. « J’ai effectué un signalement oral il y a quelque temps pour une élève de 14 ans, ce n’était pas une affaire d’inceste mais il s’agissait de violences sexuelles, elle fréquentait un adulte de 32 ans. J’ai signalé ce cas à la CPE mais on est assez seul dans ce processus », résume Pierre, un enseignant d’arts plastiques à Metz.

Le temps passé par les enfants dans les établissements scolaires est important et les enseignants se trouvent logiquement en première ligne pour détecter, repérer et signaler les violences sexuelles. Pour rappel, d’après la Ciivise (Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants) 160.000 enfants sont victimes de violences sexuelles chaque année en France. Un chiffre impressionnant qui nécessite une meilleure prise en charge.

Karim* a récemment effectué un signalement « on doit se débrouiller, le formulaire n’est pas évident à trouver et à compléter. On ne sait pas à qui l’envoyer, on ne connaît pas ses interlocuteurs, c’est vraiment flou », regrette-t-il.

Un plan d’action gouvernemental de lutte contre les violences sexuelles intrafamiliales a été mis en place depuis la rentrée scolaire 2021, dans lequel on retrouve un guide à destination des personnels et en particulier des enseignants. L’objectif de ce guide est d’améliorer la connaissance et la compréhension des violences sexuelles/ d’outiller les personnels afin de favoriser la libération de la parole et le repérage des élèves victimes et renforcer les actions de préventions, notamment en éducation à la sexualité.

« On ne sait pas vers qui se tourner donc on bricole »

Confrontés à ce manque de formation, d’outils mis à disposition pour écouter et accompagner les enfants victimes d’inceste, les enseignants se débrouillent seul pour repérer les victimes. « Ça fait des années que je travaille au rectorat de Paris et la question de la formation aux violences sexuelles n’est jamais venue dans les discussions, donc les propos de la ministre sont hypers violents pour nous ! », fulmine Elisabeth Kutas membre du syndicat Snuipp-FSU Paris et professeur des écoles. Toutes les trois minutes un enfant est victime d’inceste en France, entre un et deux élèves par classe est concerné, « on ne nous apprend pas du tout à les repérer, à les prendre en charge, à écouter la parole de l’enfant. On ne sait pas vers qui se tourner donc on bricole »

Les assistantes sociales et les psychologues sont essentiels pour repérer les enfants victimes et sont un soutien pour le corps enseignant. Certains professeurs décèlent des indices dans les copies des élèves, dans les comportements et plus rarement des élèves peuvent se confier. « J’ai de la chance d’avoir une assistante sociale et une équipe géniale qui intervient mais ce ne sont pas des gens internes à l’éducation nationale », explique l’enseignante.

Sollicité par notre média, le cabinet de la secrétaire d’État chargée de l’Enfance indique que les enseignants sont de plus en plus sensibilisés à cette question et qu’il existe des dispositifs pour lutter contre ce fléau.