Tolbiac : le président de l’université demande l’intervention des forces de l’ordre
Le président de l’université Panthéon-Sorbonne (Paris-1), Georges Haddad, appelle ce mercredi 11 avril a une intervention des forces de l’ordre sur le site de Tolbiac, occupé depuis fin mars, estimant que « la ligne rouge a été franchie » après des violences.

La « ligne rouge a été franchie »
« La gravité des violences constatées dans le centre Pierre-Mendès-France (Tolbiac) ne permet plus d’assurer la sécurité des personnes », selon le président de l’université Panthéon-Sorbonne, Georges Haddad, qui « considère que la ligne rouge a été franchie ». « Dès lors, j’ai demandé au préfet de police son concours pour rétablir le fonctionnement habituel du centre », indique-t-il dans un message envoyé mercredi matin aux étudiants, personnels administratifs et enseignants-chercheurs.
G. Haddad, qui s’était pourtant jusque là engagé à ne pas recourir à la force demande l’évacuation de Tolbiac. Il a pourtant bien vu les violences à Nanterre ou Lille. Il sait donc que des étudiant.e.s seront blessé.e.s
comment peut-il faire ça?
Soutien total à la @TolbiacLibre pic.twitter.com/ms9DpPlMhz— mathilde larrere (@LarrereMathilde) April 11, 2018
Le président avait fait savoir dans une lettre adressée lundi à la préfecture de police qu’à la suite de la « découverte de cocktails Molotov au sein de centre Pierre Mendès-France et des violences qui se sont produites dans la nuit du 6 au 7 avril, la sécurité du centre n’est plus assurée ».
Axelle Bouschon (avec AFP)
Les étudiants maghrébins plébiscitent la France
Les Marocains, les Tunisiens et les Algériens sont nombreux dans les universités françaises. Ce choix est encouragé par les liens anciens que leur pays entretient avec la France et la qualité de la formation.
Le nombre d’étudiants marocains a augmenté de 10% entre 2010 et 2014.
Ils se concentrent principalement dans les filières scientifiques et économiques. Il existe tout de même des différences. Les Algériens préfèrent les filières scientifiques et sont également les plus intéressés par les études de médecine, selon une enquête sociologique d’Abdelkader Latrèche publiée au début des années 2000.
Ces tendances s’expliqueraient par le développement de l’enseignement supérieur dans les différents pays du Maghreb (Maroc, Algérie, Tunisie). L’Algérie s’est attachée à promouvoir les matières scientifiques et techniques. Le Maroc et la Tunisie, eux, se sont davantage diversifiés dans les matières littéraires, juridiques et économiques. Les études en France sont donc le prolongement de l’enseignement que les étudiants ont commencé à recevoir au Maghreb, souligne Abdelkader Latrèche.
La France une destination réputée
Ces étudiants sont présents en grand nombre dans l’hexagone : 84% des étudiants maghrébins qui ont choisi de migrer sont en France.
Cela s’explique par diverses raisons, qui ne sont pas nécessairement liées à la langue qu’ils connaissent mieux que d’autres étudiants étrangers, comme les Chinois. Ils sont d’abord attirés par une formation de prestige. Plus de la moitié disent être venus en France pour la qualité du diplôme et le désir d’obtenir un sésame de valeur internationale.
Des liens anciens perdurent aussi entre les universités françaises et maghrébines qui ont été entretenus après la décolonisation. L’étude d’Abdelkader Latrèche met en avant le fait que les étudiants maghrébins viennent principalement de vieilles universités. C’est le signe que les anciennes relations sont toujours vives au début des années 2000. Ces liens ont même été renforcés par le développement de partenariats internationaux entre établissement d’études supérieures français et maghrébins. L’université de Tunis Dauphine, fondée en 2008, délivre par exemple des diplômes binationaux. Les enseignants des deux universités sont également amenés à donner cours dans les deux pays.
Autre motif d’importance, les étudiants maghrébins bénéficient de bourses. Plus de la moitié des étudiants étrangers titulaires d’une bourse en 2011-2012 venaient du Maghreb, selon Campus France. Cela concerne surtout les étudiants tunisiens et marocains.
Le soutien des familles
Ces causes matérielles et administratives s’accompagnent d’un soutien familial. 53% de ces jeunes disent que l’entourage a joué un rôle important dans leur décision de partir étudier en France, toujours selon Campus France. La migration étudiante peut en effet être considérée comme un investissement pour les familles. Etudier en France est considéré comme un moyen de s’insérer plus facilement sur le marché du travail et de s’élever socialement. Les proches qui peuvent alors s’impliquer économiquement, en fournissant une aide financière régulière, attendraient un retour du jeune une fois ses études achevées, selon Abdelkader Latrèche. Le thésard traduit cette investissement familial par une perspective « rentabiliste » de la migration.
Alice Pattyn et Elisa Centis
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Idir, étudiant à l’université de Créteil en double licence mathématiques et informatique est en France depuis 2013. Algérien d’origine, il est venu chercher en France une meilleure qualité d’enseignement que dans son pays natal. Il raconte ses galères administratives.
Qu’est-ce-qu’il faut faire pour étudier en France?
Il faut passer par Campus France. Il y en a dans plusieurs villes à Oran, à Alger et à Constantine, par exemple. Là ils nous font passer des tests. D’abord un test de français. Il faut avoir le niveau B2 pour pouvoir partir. Moi j’avais aussi passé le DELF [diplôme délivré par le ministère de l’Education nationale pour certifier de compétences en français des candidats étrangers NDLR] car je n’avais pas pu me rendre au test de langue de Campus France. Ils nous font également passer un test de connaissance en français. Ensuite il faut fournir des pièces justificatives comme les relevés de notes du lycée. Et dans ce cas il faut tout traduire en français. Puis il faut faire des dossiers pour chaque université où l’on souhaite postuler et adapter sa demande à chacune d’entre elles.
Et une fois les dossiers et les tests validés est-ce terminé ?
Non. Après on doit faire une demande de visa. Et justifier que quelqu’un pourra nous héberger en France. Moi j’ai de la chance, j’ai de la famille à Joinville chez laquelle je loge. Mais pour ceux qui n’en ont pas, ils doivent prouver qu’ils ont un budget de 7 000 euros au départ pour assurer leur hébergement.
Combien de temps tout cela vous a pris ?
A ce moment-là je faisais ma première année d’études de médecine en Algérie. Je n’avais donc pas beaucoup de temps. J’y ai passé une partie de mon année.
Une fois en France est-ce-que cela se passe mieux ?
On est toujours un peu dans les papiers. La carte de séjour que nous fournit la France doit être renouvelée tous les ans. Et pour l’obtenir il faut justifier d’un revenu mensuel de 615 euros par mois.
Comment faites-vous pour gagner cet argent?
Mes parents ne peuvent pas m’aider car ils n’en ont pas les moyens. Le coût de la vie en France est bien plus élevé qu’en Algérie. Du coup, je travaille à côté de ma licence 15 heures par semaine. J’ai un poste de vigile et je donne des cours de mathématiques.
Est-il simple de trouver un travail ?
Moi je n’ai pas eu trop de difficultés. Actuellement mon employeur est Algérien. Avant j’avais aussi travaillé pour le stade Roland-Garros. Mais une nouvelle fois ce qui pose problème ce sont les démarches administratives. Il faut obtenir une autorisation de travail. C’est la Direccte [Direction régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi NDLR] qui la fournit. On doit y apporter une déclaration de l’employeur, notre carte de séjour, notre passeport et notre certificat de scolarité. Certaines entreprises refusent de nous embaucher parce qu’elles estiment que faire les papiers prend trop de temps.
Propos recueillis par Elisa Centis
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