Cannes : ces palmarès qui ont fait parler d’eux

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Moi, Daniel Blake, 2016

Cette année, c’est Ken Loach et son Moi, Daniel Blake, qui remporte la Palme d’or du Festival de Cannes. Un verdict dont la pertinence a été globalement remise en question par la presse depuis hier. Ce qui, en soixante neuf éditions, est loin d’être une première.

“Un palmarès frileux” pour L’Obs, “Une palme navrante et un palmarès inégal” selon Les Inrocks. Côté presse étrangère, il n’est pas non plus difficile de trouver des déçus. Comme avec ce journaliste du Los Angeles Times : “Depuis 11 ans que je me rends au Festival de Cannes, je n’ai pas souvenir d’une pire décision prise par un jury que ce prix”, évoquant Juste la fin du monde, réalisé par Xavier Dolan et qui a reçu le Grand Prix du jury. Ce n’est pas la première fois que les choix d’un jury du Festival de Cannes, sont largement remis en question par les critiques cinéma, ou par les spectateurs. Quand ils ne font pas polémique.

Affiche de la dolce vita
Affiche de la dolce vita, 1960

Immoral. En 1960, la dolce vita de Federico Fellini emporte la Palme d’or. Le film, jugé “immoral”, avait provoqué l’ire du Vatican et du monde ecclésiastique. Son scénario plongeait le spectateur dans la vie d’un journaliste italien, qui profitait pleinement de la vie mondaine de Rome. La presse de gauche se déclarera tout aussi sceptique, le qualifiant de “moralisateur”.

Satan. 27 ans plus tard, Maurice Pialat divise le public du Festival de Cannes en deux, recueillant d’un côté des huées, de l’autre des applaudissements nourris. Son long métrage Sous le soleil de Satan, qui raconte l’histoire d’une jeune femme qui tue son amant, sera vu par certains comme peu abordable. Il répondra dans son discours par une formule pour le moins directe : “Si vous ne m’aimez pas, je peux vous dire que je ne vous aime pas non plus”.

Tape-à-l’oeil. Alain Finkielkraut n’a pas attendu Nuit debout pour être polémiste. En 1995 dans Le Monde, il descend Underground, un film d’Emir Kusturica qui retrace l’histoire de l’ex-Yougoslavie, de 1941 à 1992. Sans être le seul à critiquer le versant politique et pro-serbe de l’oeuvre, le philosophe estimera que le jury a “honoré un illustrateur servile et tape-à-l’oeil de clichés criminels ».

Scènes de sexe. Plus récemment, en 2013, c’est La vie d’Adèle d’Abdellatif Kéchiche qui a inspiré de nombreuses Unes de journaux. Conditions de tournage douteuses, mauvaises relations entre actrices principales et réalisateur, scènes de sexe explicites…

Avec des avis qui sont tous négatifs, tous positifs, violents ou excessivement élogieux, la remise des prix est l’occasion chaque année d’échanges passionnés, dans la presse ou dans la rue.

Finalement, c’est peut-être le journaliste Vincent Manilève qui a raison. Dans un article publié lundi sur Slate, il relativise: “Les récompenses cannoises dépendent de la subjectivité de neuf personnes, pas d’un consensus critique”. Inutile de s’enflammer, donc.
Victorien Willaume

La visite d’Obama au Vietnam vue comme un signal à la Chine

Official White House Photo by Chuck Kennedy
Official White House Photo by Chuck Kennedy

En visite au Vietnam pour quatre jours, Barack Obama a annoncé la levée de l’embargo sur les armes létales, un acte symbolique qui scelle l’alliance diplomatique entre les deux anciens ennemis, et qui pourrait irriter la Chine.

Barack Obama a entamé sa première visite au Vietnam lundi. Reçu  par son homologue vietnamien Tran Dai Quang, il a annoncé la levée de l’embargo sur les armes américaines, un vestige de la guerre qui a pris fin en 1975. Après Bill Clinton en 2000 et Georges W. Bush en 2006, Barack Obama est le troisième président américain à se rendre au Vietnam.

Le retrait de l’embargo économique en 1994 avait lancé le processus de réconciliation entre les deux pays. Celui sur l’interdiction des armes pourrait ainsi marquer une nouvelle étape. Barack Obama a toutefois précisé que cet assouplissement concerne uniquement les armes létales. La levée sera progressive, suivant les efforts d’Hanoï en matière de droits de l’homme, sans qu’aucun des deux dirigeants ne précise les conditions.

Mais l’annonce pourrait irriter la Chine dont les prétentions en mer méridionale s’opposent à celles du Vietnam.

En 2014, l’installation d’une plate-forme pétrolière chinoise dans une zone maritime revendiquée par Hanoï avait déjà conduit à des émeutes meurtrières entre les deux pays. Un épisode qui décide aujourd’hui le gouvernement vietnamien à accélérer son processus de réconciliation avec son ancien ennemi.

Un voyage centré sur les questions économiques

Selon Jean-Vincent Brisset, directeur de recherche à l’IRIS, le cas du Vietnam est très symbolique de la situation en mer de Chine du Sud, où la Chine a levé le ton face à ses voisins. « Ce sont les riverains qui appellent Obama à l’aide, explique le chercheur, Les Etats-Unis entretiennent des relations très complexes avec la Chine, à la fois rival politique et partenaire économique. »


C’est un geste politique qui montre que désormais, la Chine est l’ennemi commun


D’après le spécialiste de l’Asie Pacifique, la Maison Blanche envoie un signal à la Chine : « Avant ce déplacement au Vietnam, tout le monde pensait que Barack Obama n’oserait pas franchir cette frontière. C’est un geste politique qui montre que désormais, la Chine est l’ennemi commun ».

Face au comportement chinois dans la région, les Etats-Unis manifestent leur inquiétude « ils [les Américains] participent à des missions maritimes et aériennes en Mer de Chine mais cela n’engage pas un affrontement direct avec les Etats-Unis. Reste à attendre la réaction de Xi Jinping » conclue-t-il.

Barack Obama a quant à lui assuré que cette annonce est motivée par un « désir de compléter le long processus de normalisation », d’après les faits rapportés par l’AFP.

La suite de ce voyage diplomatique sera centrée sur des questions économiques et l’accord de libre-échange transpacifique (TPP) qui inclut le Vietnam et onze autres pays de l’Asie Pacifique, mais pas la Chine. Mercredi, il se rendra à Hô-Chi-Minh-Ville (ex-Saïgon), cœur économique du pays.

Sonia Ye

Cannes : la Semaine de la critique, machine à détecter les nouveaux talents

Révélé hier, le palmarès de la sélection officielle cannoise aurait presque éclipsé les lauréats des sélections parallèles. Ce que l’on peut retenir du Festival de Cannes ne s’arrête pourtant pas à la Palme d’or. En témoigne cette année encore la discrète mais néanmoins très plaisante Semaine de la Critique. Retour sur une sélection moins médiatique.

 

Devant l’entrée de l’espace Miramar, à quelques centaines de mètres du palais des Festivals, Alejandro González Iñárritu fume cigarette sur cigarette alors que son premier film est projeté devant une audience encore indécise.

Suffisamment proche des fameuses marches pour en rêver un peu, trop loin de la compétition officielle pour se l’imaginer vraiment, le quartier général de la Semaine de la Critique reste assez méconnu.

C’est là, pourtant, que le réalisateur mexicain a pour la première fois séduit un jury de festival. Le 21 mai 2000, Iñárritu remporte le Grand Prix de la Semaine de la Critique pour son long métrage Amours Chiennes ; quinze ans plus tard, il gagnait l’Oscar du meilleur réalisateur.

 

Une sélection parallèle centrée sur les nouveaux talents

 

« C’est un formidable tremplin, et ça m’a permis d’apprendre à gérer l’angoisse », confiait cette année Iñárritu à propos de la Semaine de la Critique. Depuis 1962, cette sélection parallèle consacre ses ressources à la découverte de jeunes cinéastes, de formes novatrices et de sujets hétéroclites. Délaisser les strictes structures et les noms légendaires, voilà la vocation de la Semaine de la Critique, qui ne sélectionne que des premiers ou seconds films.

 

 

Présidé cette année par l’actrice et réalisatrice Valérie Donzelli (La guerre est déclarée), le jury a sélectionné sept longs-métrages et dix courts au total. Peu connus mais déjà repérés, les jeunes réalisateurs en compétition ont pour point commun une réelle volonté de créer leur cinéma de demain. Victoria, de Justine Triet, est ainsi parvenu à marquer spectateurs et critiques lors de la projection d’ouverture. « Rythmé, drôle et esthète », selon les mots de Télérama, cette tragi-comédie française a brillamment annoncé le ton de la Semaine de la Critique.

 

Comme Philippe Garrel, Jacques Audiard, Wong Kar-wai ou Ken Loach avant eux, les réalisateurs sélectionnés pour cette édition 2016 avaient là l’occasion de mettre un pied dans la cour des grands.

C’est cette année Oliver Laxe, pour son film Mimosas, qui a obtenu le Grand Prix Nespresso, distinction suprême de la Semaine de la Critique. Le long-métrage du réalisateur espagnol narre le périple mystique d’un homme mourant, à travers les montagnes de l’Atlas, au Maroc. Fort de ses questionnements métaphysiques, ses décors grandioses et sa mise en scène léchée, Mimosas a su éblouir le jury de la sélection parallèle.

 

 

Au palmarès, Albüm de Mehmet Can Mertoglu remporte lui le Prix Révélation, tandis que le court-métrage Prenjak, du jeune Wregas Bhanuteja, décroche le Prix Découverte. Quand le premier dresse le portrait au vitriol de la Turquie d’aujourd’hui, le second dépeint en douze minutes chrono l’une des faces cachées de la société indonésienne.

 

 

À respectivement vingt-trois et vingt-sept ans, les deux réalisateurs ont tous deux choisi de proposer des films incarnés, locaux et personnels, qui ont su convaincre. Il leur reste désormais à parcourir ces quelques cinq-cent mètres qui les séparent de la Palme d’or.

 

 

Agathe Touny-Puifferrat

L’Etat Islamique revendique le double attentat qui a fait 41 morts au Yémen

41 militaires yéménites sont morts lundi à Aden, la grande ville du Sud du Yémen, dans un double attentat revendiqué aujourd’hui par l’Etat Islamique. Un kamikaze a enclenché sa ceinture d’explosifs devant la base militaire Badr où de jeunes recrues attendaient devant le bureau d’enrôlement. Selon le chef des forces spéciales à Aden, cet attentat a fait 34 morts. Par la suite une explosion à l’intérieur de la base a tué sept autres militaires, portant le nombre de victimes à 41. L’engin explosif aurait été déclenché à disance selon le chef des forces spéciales de la ville. Aden est la capitale du gouvernement du président Abd Mansour Hadi, ce qui en fait la cible d’attaques récurrentes, de la part des rebelles houthis fidèles à l’ex-président Ali Abdallah Saleh, mais aussi de celle des groupes djihadistes Al Qaida et Etat Islamique, qui profitent du conflit pour étendre leur zone d’influence.

Claire-Marie Germain