Des élus locaux critiquent l’évacuation des jardins d’Éole et de Stalingrad

Le président de la Seine-Saint-Denis s’oppose également

Stéphane Troussel, président du département de la Seine-Saint-Denis affirme ne pas accepter l’opération « sur la forme » ni « sur le fond« .

Il dénonce une action qui n’est pas pérenne « sans la prise en charge sanitaire et thérapeutique adaptée des personnes toxicomanes », rejoignant la proposition d’Anne Hidalgo de mobiliser les hôpitaux franciliens.

Stéphane Troussel ne considère « pas sérieux » l’argument du préfet de police qui justifie le déplacement des toxicomanes par l’absence de proximité immédiate d’habitations ou d’écoles dans le quartier des Quatre-Chemins.

 

 

Le Conseil d’Etat confirme la dissolution du CCIF et de Baraka City

Le Conseil d’Etat a confirmé vendredi la validité de la dissolution des associations Baraka City et CCIF par le gouvernement fin 2020. Le CCIF qualifie cette décision de tournant vers « l’arbitraire politique et répressif en France ».

Une décision qui avait fait grand bruit fin 2020. La dissolution en novembre et décembre dernier des associations Collectif contre l’islamophobie (CCIF) et Baraka City a été validée par le Conseil d’Etat vendredi. Cette décision vient confirmer l’action du gouvernement contre ces deux groupements l’année passée, à la suite de l’assassinat de Samuel Paty par un jeune extrémiste islamiste.

Le CCIF a réagi à cette annonce en fustigeant un « tournant majeur dans l’institutionnalisation de l’arbitraire politique et répressif en France » dans un communiqué. L’association a considéré que cette décision « ouvrait la voie vers le délit d’opinion ».

La fermeté du gouvernement à l’égard de ces deux associations avait créé la controverse. Elles étaient toutes deux accusées d’avoir participé à la campagne de lynchage contre le professeur d’histoire-géographie Samuel Paty, décapité en pleine rue à Conflans-Sainte-Honorine le 16 octobre 2020.

Le CCIF était allé jusqu’à déposer plainte en diffamation contre le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin devant la Cour de justice de la République. Gérald Darmanin avait qualifié l’association d’ « officine islamiste » œuvrant « contre la République ».

 

J. B. avec AFP

Bracelet anti-rapprochement : un dispositif encore imparfait pour les victimes

Un an après sa mise en place officielle, le bracelet anti-rapprochement fait l’objet d’un bilan mitigé. D’un côté, le gouvernement se félicite du renforcement de ce dispositif, de l’autre, certaines associations pointent ses faiblesses.

« Un dispositif renforcé. » Selon Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l’Intérieur et à l’initiative du Grenelle contre les violences conjugales en 2019, le bilan est positif : un an après son instauration, le bracelet anti-rapprochement (BAR) a fait ses preuves.

Eric Dupond-Moretti, le garde des Sceaux, qui devrait présenter un nouveau système de réalité virtuelle testé prochainement sur des auteurs de violences conjugales, devrait rendre compte des résultats obtenus au cours de l’année.

« Un dispositif qui doit encore faire ses preuves »

À l’heure actuelle, 341 BAR ont été prescrits par la justice et 268 sont activés, selon Marlène Schiappa. Et le dispositif va s’élargir aux auteurs de violences conjugales commises avant la mise en place officielle du bracelet, en 2020.

Mais pour Emmanuelle Bomba, juriste bénévole à la Maison des femmes de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), ce dispositif « doit encore faire ses preuves ». Elle pointe un nombre insuffisant de bracelet. À la maison des femmes, cinquante à soixante-dix femmes sont reçues chaque semaine. Parmi elles, vingt ont déposé plainte. À l’échelle du territoire national, les 1000 bracelets accordés aux magistrats ne permettraient donc pas au dispositif de se déployer.

Le problème, selon Emmanuelle Bomba, se pose bien avant : « Beaucoup de femmes viennent nous voir car elles n’ont pas de nouvelles de leur plainte déposée ». Ainsi, si le processus n’est pas lancé, il n’est même pas envisageable de penser au bracelet.

Ce dispositif est décidé par un juge, avec l’accord de l’auteur condamné pour violences et à ses frais. Ce qui explique en grande partie le fait que tous les bracelets n’aient pas été attribués.

Un modèle espagnol

Le bracelet, adopté fin 2019 par le Parlement, est inspiré du modèle espagnol, qui a permis de faire reculer de manière significative le nombre de féminicides. Depuis son instauration en 2009, l’Espagne assure qu’aucune femme protégée par un bracelet n’a perdu la vie.

Selon l’avocate spécialiste des violences conjugales, Janine Bonaggiunta, le constat n’est pas encore le même en France et « le dispositif n’a pas marché pour plusieurs de [s]es clientes car il y a eu des récidives ».

Alain Legrand lui, président du FNACAV, la Fédération nationale des associations et centres de prise en charge d’auteurs de violences conjugales et familiales, salue cette mesure qui permet d’éloigner les auteurs des violences des victimes. Pour autant, il ajoute que « le dispositif ne suffit pas en lui-même. Il doit être accompagné d’une prise en charge, d’un travail thérapeutique renforcé. »

Une nouvelle source de stress

Concrètement, le bracelet fonctionne grâce à la géolocalisation. L’auteur et la victime sont chacun équipés d’un boitier. Un périmètre, établi par le juge doit en permanence séparer les deux personnes. Si le conjoint ne respecte pas ce périmètre la victime est immédiatement contactée, ainsi que les forces de l’ordre qui doivent intervenir.

« C’est comme si elles étaient toujours liées à lui »

Ce qui peut être source de stress pour la victime, qui appréhende le déclenchement de cette alarme.  « Tout ce que souhaitent ces femmes, c’est de sortir de l’emprise de l’agresseur, ne plus entendre parler de lui. C’est comme si elles étaient toujours liées à lui », analyse Emmanuelle Bomba.

Aglaé Gautreau

 

A Saint-Quentin, l’Assurance maladie expérimente les consultations ophtalmologiques à distance

Pour répondre au problème des délais de consultations, l’Assurance maladie s’essaye à la téléconsultation ophtalmologique dans la ville de Saint Quentin, dans l’Aisne.

L’œil à Saint-Quentin, le praticien à Lille. C’est le pari du centre de téléconsultation ophtalmique Point Vision, installé dans la clinique privée de Saint-Quentin, dans l’Aisne. Les patients y sont accueillis en présentiel par un orthoptiste – un paramédical – qui effectue leur examen oculaire et leur prescrit une ordonnance le cas échéant, avant d’être mis en relation avec un praticien se trouvant à Lille, par visioconférence.

Pour l’Assurance maladie, l’objectif est simple : raccourcir les délais de consultation chez les spécialistes, qui explosent notamment chez les ophtalmologistes. « Chez nous, les délais moyens d’obtention d’un rendez-vous sont de quinze jours, alors que pour une consultation d’ophtalmologie classique, ils peuvent être de trois, quatre, voire cinq mois », affirme le docteur François Pelen, co-fondateur du groupe Point Vision qui a son actif une cinquantaine de centres d’ophtalmologie en France.

Réponse aux déserts médicaux

Ces délais d’attente ne sont pas sans conséquences. Ils amènent de nombreuses personnes à renoncer à un parcours de soins ophtalmiques. « Sur les 500 consultations que nous avons eu jusqu’à présent, nous avons relevé de nombreuses pathologies qui n’étaient plus suivies », explique François Pelen. « Il y’avait par exemple des patients avec un problème de cataracte, mais qui n’avaient pas vu de praticien depuis longtemps », assure-t-il.

Fonctionnant en coopération avec l’Assurance maladie, qui prend en charge les frais de consultations, le centre de Saint-Quentin est considéré comme un moyen de rapprocher les patients des praticiens. Alors que le nombre de jeunes arrivants ne suffit pas à compenser les départs à la retraite – toujours plus nombreux en milieu rural – le lien avec l’offre de soin s’est progressivement distendu. Près de 3,8 millions de Français vivaient ainsi dans un désert médical en 2018, contre 2,5 millions trois ans plus tôt, selon la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees).

Un tableau qui pousse Laurence Desjardins, directrice scientifique de la Société Française d’Ophtalmologie, à considérer positivement l’expérience dans l’Aisne. « C’est un bon début, il vaut mieux avoir ce genre de service que pas du tout », affirme-t-elle. D’autant plus que sur place, de nombreux examens peuvent être effectués par l’orthoptiste, notamment ce qui touche à l’acuité visuelle. « On forme les paramédicaux à être autonome, et à expliciter clairement les choses aux patients », assure François Pelen.

Limites de la technologie

La formation concerne d’ailleurs aussi les praticiens, qui sont surtout accompagnés dans la maîtrise outils numériques. « Pour ce qui est de la prise en charge du patient, il y’a très peu de différences entre le présentiel et la visioconférence », reconnait François Pelen. Un constant à nuancer pour Laurence Desjardins. « Quand un patient vient d’être diagnostiqué, et qu’il faut lui expliquer le traitement à suivre, le dialogue direct avec l’ophtalomogiste est quand même important », affirme-t-elle.

D’autant plus que le personnel médical sur place n’est pas à même de diagnostiquer tous les symptômes, qui restent cantonnés à la surface oculaire. « Il ne faut pas oublier qu’au niveau du fond d’œil, les machines ne voient pas l’extrême périphérie », précise Laurence Desjardins. « Pour les déchirures, les tumeurs, il faut tout de même se rendre chez le praticien », complète-t-elle.

Cette option est toujours possible, puisque selon le diagnostic, le patient peut être envoyé chez le médecin. Selon le co-fondateur de Point Vision, un praticien se déplace également « tous les quinze jours » afin de suivre les patients qui ne sont pas dans la possibilité de se déplacer. Mais encore faut-il avoir un tissu médical assez proche pour le permettre.

« Il faut avoir une couverture régionale pour assurer ces téléconsultations », reconnait-il. « Si le médecin est proche, c’est jouable, mais s’il est à plusieurs centaines de kilomètres, c’est plus difficile d’avoir une continuité de soins ». Pour le moment, aucune perspective de déploiement de cette expérience à grande échelle n’est donnée par l’Assurance maladie.

 

Mehdi LAGHRARI