La mission « Patrimoine en péril » menée par Stéphane Bern depuis septembre 2017 a atteint son objectif premier : récolter 15 millions d’euros. Mais comment cet argent va-t-il permettre de sauvegarder le patrimoine français ?
Les habitants de Saint-Ilpize (Haute-Loire) vont bientôt retrouver leur église. Voilà près d’un mois que Sainte-Madeleine est en travaux, après 2 ans de fermeture pour des raisons de sécurité.
Sélectionnée pour faire partie de la « Mission Stéphane Bern », cette église gothique du XIVe siècle, classée monument historique en 1920, a récolté 12 530€ de dons alors que 10 000€ espérés via le site de la Fondation du Patrimoine, partenaire de l’opération. « Nous-mêmes, association et municipalité, avons été surpris par la rapidité avec laquelle l’objectif a été atteint, précise Delphine Dupuis, membre du bureau de l’association des Amis de Saint-Ilpize. Je pense que cela s’explique par le fait que nous n’avions plus d’église. Célébrer dans un autre village l’enterrement de nos anciens qui ont passé leur vie dans ce village est douloureux pour les proches. »
Un versement proportionnel aux dons
Outre le Loto et les jeux de grattage, la Mission Bern aide également à mener des campagnes de dons et incite les entreprises à faire du mécénat. « Nous avons obtenu 7 000€ de subventions de la part de la DRAC (Direction régionale des affaires culturelles). Il nous restait 10 000€ à obtenir pour les travaux d’urgence de l’église, comme la consolidation des plafonds et des enduits de la nef », souligne Delphine Dupuis. « Mais le gros des travaux restent à venir… Le pourcentage attribué par la Mission Bern n’a pas encore été distribué », regrette-t-elle.
La souscription lancée avec la Fondation du patrimoine (le financement participatif) et le montant récolté servent de baromètre dans la répartition de l’argent récolté au Loto du patrimoine. « Plus le pourcentage des dons reçus grâce à notre souscription est élevé, plus le fond du Loto du patrimoine le sera aussi, en proportion de la somme espérée bien évidemment », se réjouit Delphine Dupuis.
Plus de la moitié du prix des tickets reversés aux gagnants
Pour un ticket à gratter vendu 15€, seul 1,52€ est reversé à la Fondation du Patrimoine et 10,80€ sont empochés par les gagnants. Du côté du Loto (3€), c’est 0,75€ qui part à la Fondation du patrimoine contre 1,65€ pour les gagnants, apprend-on dans un communiqué de la FDJ.
Les quinze millions d’euros de recettes générés par cette mission sont affectés à un fonds spécifique, « Patrimoine en péril ». Une belle somme dont se réjouit l’organisation, mais celle-ci tempère. Dans un communiqué, elle précise que « le Loto du Patrimoine ne pourra pas résoudre toutes les difficultés ni répondre à toutes les envies de réhabilitation ».
Des monuments prioritaires
Car tous les monuments, bien que participant à la même opération, ne sont pas tous logés à la même enseigne. 18 sites (ceux que l’on a pu apercevoir sur les tickets à gratter) sur les 269 projets sélectionnés sont classés prioritaires. C’est-à-dire qu’une partie du fonds leur sera reversée en priorité et dans une plus large mesure. Ils recevront entre 100 000 et un million d’euros chacun. C’est le cas du Fort Cigogne, à Fouesnant, en Bretagne, qui a lancé un appel aux dons pour récolter 3,6 millions d’euros. Combien recevra-t-il de la part de la FDJ ? Aucune réponse nous a été donnée à temps pour la parution de l’article.
La ville de Vieille-Chapelle dans le Pas-de-Calais fait elle aussi partie du « Loto du Patrimoine ». Elle a d’ailleurs entamé sa troisième et avant-dernière phase de travaux. « Nous espérons recevoir 257 000 euros pour la dernière phase, précise le maire Jean-Michel Desse. Au total, c’est 800 000 euros dont nous avons besoin ». C’est la ferme Sénéchal qui a été choisie par la commission Berne. Une fois réhabilitée, celle-ci sera transformée en maison pour autistes. « Participer au Loto du Patrimoine, c’était l’occasion de marier la sauvegarde de notre patrimoine à un projet social : une maison pour autiste. C’est quelque chose qui n’existe pas chez nous », se réjouit le maire.
Les dons collectés pour ce bâtiment ont été directement perçus par la Fondation pour le patrimoine, qui les a reversés à la commune. Celle-ci garde un pourcentage des dons collectés, dont le montant dépend de la somme reçue.
Quant à ce que va verser la FDJ à cette petite commune de 800 habitants, le doute plane. « Nous n’avons pas de contact avec la FDJ, poursuit l’édile. Notre interlocuteur reste la Fondation pour le patrimoine, qui m’a d’ailleurs contacté il y a une dizaine de jours. J’ai dû actualiser mon dossier pour pourvoir entamer la quatrième phase de travaux ».
La FDJ compte renouveler l’opération en 2019. Cette année, entre 3,2 et 4,4 millions de Français y ont participé.
N.G.