Peut-on recycler nos smartphones ?

La réponse est oui. Depuis lundi, Bouygues en partenariat avec WWF France, propose de venir déposer son téléphone portable en boutique, pour qu’il soit ensuite recyclé. Une initiative également proposée chez Orange et SFR mais qui n’a pas beaucoup de succès.

Chaque année 24 millions de téléphones portables sont vendus en France. Crédits Photo : Anonyme
Chaque année 24 millions de téléphones portables sont vendus en France.
Crédits Photo : pixabay

La boutique Bouygues est presque vide. Au centre commercial So Ouest de Levallois-Perret, les gens n’ont pas besoin de faire la queue pour qu’un vendeur réponde à leur question ou règle leur problème. Ici l’opération lancée par l’opérateur n’attire pas la foule. « Depuis lundi seulement 7 téléphones portables ont été déposés au recyclage. Et ce ne sont même pas des smartphones, ces portables devaient avoir plus de 10 ans » se désole Sarah, vendeuse chez Bouygues. Et pourtant chaque année c’est environ 24 millions de mobiles qui sont vendus en France ce qui représente plus d’1/3 des habitants. 92% des foyers possèdent au moins 1 téléphone portable et pourtant seulement 15% d’entre eux sont collectés lorsqu’ils sont usagés. Ces chiffres tirés du rapport sénatorial de Marie-Christine Blandin montre l’urgence du recyclage des téléphones portables, qui eux sont devenus indispensables dans nos vies de tous les jours.

Comment recycler son smartphone ?

Plusieurs propositions s’offrent au consommateur désireux de faire un geste pour l’environnement :

  • Son opérateur

Comme déjà expliqué précédemment, Bouygues, SFR et Orange, proposent de reprendre les mobiles pour les recycler. Deux cas se distinguent :

Si le téléphone ne fonctionne plus ils le récupèrent pour l’envoyer directement au recyclage. Mais si celui-ci est « valorisé » (c’est-à-dire qu’il peut être réutilisé), l’opérateur le rachète au prix de l’argus pour l’envoyer se faire reconditionner. Ce rachat se fait généralement sous forme de bon, que le client pourra utiliser pour acheter son prochain portable.

  • La vente en ligne

Il existe aussi différentes boutiques en ligne qui proposent de racheter différents modèles de mobiles. Il suffit de taper le nom du modèle dans la barre de recherche et de préciser quelques caractéristiques techniques comme l’état dans lequel il est. Un prix est alors proposé.

Pourquoi ce n’est pas une pratique courante ?

Les freins psychologiques sont la raison principale. Le premier réflexe d’une personne va être de garder son ancien téléphone portable au cas où le nouveau tomberait en panne. Il y a également une raison sentimentale invoquée. Bien qu’il soit aujourd’hui assez facile de transférer photos et vidéos sur l’ordinateur personnel ou le cloud, garder son portable c’est aussi conserver les messages. Il y a donc un côté intime ancré dans l’appareil que le consommateur n’a pas forcément envie de dévoiler, ainsi que ses données personnelles, s’il dispose d’une garantie lui certifiant que celles-ci seront toutes effacées lors de la récupération. Par ailleurs, la petite taille du téléphone le rend très peu encombrant comparés aux appareils électroménagers, une personne aura donc moins le réflexe d’aller le faire recycler.

Et si notre consommation est aussi grande c’est en particulier à cause l’obsolescence programmée. Au lieu de durer 10 ans, un téléphone portable va avoir une moyenne de vie comprise entre 2 et 3 ans. Par conséquent le consommateur va donc s’adapter et en changer régulièrement, tous les 2 ans plus précisément d’après l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie. Et même si on compte 24 millions de portables achetés en France chaque année, ce problème de recyclage concerne les autres pays du monde puisqu’en 2016, plus de 2 000 milliards de mobiles ont été vendus.

Sarafina Spautz

Raquel Garrido, à prendre ou à laisser

Crédit photo : Wikimedia
Crédit photo : Wikimedia

Son désir de rouge remonte à l’enfance. Deux jours après le coup d’Etat du 11 septembre 1973 au Chili, qui renversa le gouvernement du président Salvador Allende, les parents de Raquel Garrido, Guillermo et Maria-Eugenia, ainsi que ses oncles et tantes sont emprisonnés. En cause ? Leur appartenance à l’organisation d’extrême gauche : mouvement de la gauche révolutionnaire. Arrive ensuite ce qu’elle appelle une « vie d’errance et d’exil », partagée entre le Canada, la France, le Brésil, avant de retourner quelques temps au Chili. Dans son lycée international, elle mène sa carrière de « militante », puis rejoint SOS Racisme, où elle devient vice-présidente à 22 ans. De 1993 à 2008, elle milite au Parti Socialiste puis le quitte, en même temps que Jean-Luc Mélenchon. Elle qualifie le PS « d’astre mort ».  Avocate depuis 2011, elle défend le président de la France insoumise et s’occupe des contentieux internationaux et du droit des affaires.

L’art de la polémique

Le 10 septembre dernier, la porte-parole de la France insoumise débarquait sur C8, dans l’émission de Thierry Ardisson, « Les Terriens du Dimanche ». C8, chaîne détenue par un certain Vincent Bolloré. Son arrivée avait déjà fait couler beaucoup d’encre. Mais c’était sans compter les révélations du Canard enchaîné, publiées ce mercredi. Raquel Garrido était connue pour son franc parler, et pour les nombreuses polémiques que ses tweets ont suscité. Désormais, une nouvelle page de son histoire semble s’écrire.

 

BIO EXPRESS

1974 Naissance au Chili
Mars 1975 Exil au Canada
8 septembre 1988 Arrivée en France
1993 Adhère au PS
2000 Mariage avec Alexis Corbière
2008 Quitte le PS
2017 Porte-parole «insoumise» de Jean-Luc Mélenchon

 

Marie Lecoq

Qui est Cardi B, la rappeuse n°1 aux Etats-Unis ?

L’Américaine de 25 ans cartonne avec son morceau, « Bodak Yellow« . Elle s’impose désormais comme l’artiste rap féminine la plus populaire outre-atlantique. 

La rappeuse Cardi B (c) The Source / Wikipedia
(c) The Source / Wikipedia

« I’m the hottest in the street, know you prolly heard of me » (je suis la plus populaire, je sais que vous avez probablement entendu parlé de moi) dégaine Cardi B dans son hit, « Bodak Yellow ». Elle ne croyait pas si bien dire. Depuis trois semaines, la rappeuse new-yorkaise squatte la première place du Hot 100 du Billboard, le classement des chansons, avec ce single. Cardi B est la deuxième artiste rap à atteindre cette place. Avant elle, il y a eu Lauryn Hill avec le morceau culte « Doo Woo (That Thing) », il y a 19 ans.

 »

Jeune femme de son époque, pour Cardi B, le succès est venu avant la musique. Il y a eu le strip-tease, dans un club new-yorkais du Bronx. « Je suis devenue strip-teaseuse pour m’échapper de mon petit-ami violent« , confie-t-elle. Déjà, elle se sert de son corps et de son image pour s’émanciper. La jeune femme acquiert une petite célébrité locale qu’elle cultive grâce à des vidéos et photos postées sur les réseaux sociaux.

D’abord star des réseaux sociaux

Elle y raconte sa vie, ses relations amoureuses et distribue des conseils. Son humour fait mouche tandis que son nombre d’abonnés grandit. Influenceuse précoce, elle gagne sa vie grâce à ses posts à grande audience. « Cardi B fait partie d’une nouvelle génération. C’est un stratège, les artistes doivent désormais être de bons commerciaux« , souligne Eloïse Bouton, co-fondatrice du site Madame Rap.

A ce stade, la musique est encore un rêve un peu fou pour elle. « J’ai toujours eu peur de suivre mes rêves car si je les suis et j’échoue, je ne pourrais plus rêver. C’est plus facile d’en espérer moins« , confie-t-elle au magazine Fader. Son manager repère son flow, il l’encourage à se frotter au rap. Cette première tentative la conduit non pas dans un studio d’enregistrement mais dans Love & Hip-Hop, une émission de télé-réalité qui suit les péripéties de célébrités à la carrière dormante, ayant déjà (un peu) trempées dans le monde de la musique.

Féministe revendiquée

L’émission est son tremplin, elle n’y reste qu’un an avant de la quitter pour se consacrer à sa carrière musicale. En mars 2016, sa mixtape Gangsta Bitch Music Vol. 1 sort avec son premier tube : « Foreva ». Son succès est nourri par son omniprésence sur les réseaux sociaux alors que les maisons de disque ne parient pas souvent sur les femmes dans le milieu très masculin qu’est le rap. « C’est très dur pour les femmes d’avoir une visibilité dans les radios et les magazines. Les maisons de disque font le choix de promouvoir certains artistes et les rappeuses souffrent de ce sexisme institutionnalisé« , explique Eloïse Bouton.

Dans ses chansons, Cardi B parle d’argent, de sexe… les thèmes classiques du gangsta rap. « Elle a choisi de s’approprier les codes du rap viril pour les détourner« , souligne la spécialiste. Féministe revendiquée, elle montre son corps modelé par la chirurgie esthétique et hyper-sexualisé dans ses clips pour se l’approprier, à l’image de Nicki Minaj se touchant le pubis dans « Side to Side ». Dans une de ses plus célèbres vidéos « A Hoe Never Gets Cold« , Cardi B s’exprime en soutien-gorge et jupe ultra-moulante. Elle assume s’habiller comme elle veut parce qu’une « salope ne prend jamais froid« .

Son succès, elle l’assume et le partage avec ses 11 millions d’abonnés sur Instagram, un réseau social de partage d’images. Elle communique directement avec ses fans, donne ses réactions, aussi bien musicales que politiques.

(Ne soyez pas naïfs les gars, Face de carotte [Donald Trump] utilise juste l’épisode du football comme une distraction de la Corée du Nord qui veut nous faire exploser.)

Son succès est aussi une bonne nouvelle pour la place des femmes dans le monde du rap. Eloïse Bouton se réjouit : « cela montre une évolution dans l’audience du rap. Les gens sont de plus en plus prêts à voir une rappeuse pour son art et pas comme juste comme une fille« .

 

Anaïs Robert

Affaire Merah : Pourquoi le procès n’est-il pas filmé ?

Le procès d’Abdelkader Merah (le frère du terroriste auteur de l’attentat de Toulouse en 2012) se tient actuellement à la cour d’Assises spéciale du tribunal de Paris. Extrêmement médiatisé, ce procès relance la question de l’enregistrement vidéo des audiences.

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Le tribunal de Grande instance de Paris, où se tient actuellement le procès d’Abdelkader Merah. (Crédit : CC)

Doit-on filmer et diffuser les procès à la télévision (en direct ou non) ? Cette question n’est plus posée dans certains pays où il est coutume d’enregistrer les audiences dans les tribunaux afin de les retransmettre à la télévision, lorsque celles-ci ne sont pas déjà diffusées en live. Ce fut le cas aux États-Unis durant la surmédiatisée affaire O.J Simpson ou encore en Norvège lorsque le terroriste d’extrême-droite Anders Breivik fut jugé.

En France, la question est épineuse et divise les praticiens du droit. Dans le cadre du procès d’Abdelkader Merah, la famille d’une victime avait déposé une requête afin que les audiences du procès soient filmées, avec comme argument la « portée historique » de l’événement. La réponse est sans appel : la demande est rejeté par le parquet de Paris pour qui l’affaire Merah « ne présente pas un intérêt proprement dit pour les archives historiques de la justice ». Il n’y aura donc pas d’enregistrement vidéo ni audio des audiences du procès.

Les procès peuvent être filmés depuis la loi Badinter de 1985, qui autorise « l’enregistrement audiovisuel ou sonore de l’intégralité des débats ». Peu d’affaires en ont bénéficié mais on peut tout de même citer les procès de Klaus Barbie, Maurice Papon ou encore celui d’un génocidaire rwandais en 2014.

Voir aussi : Procès Merah: les audiences filmées, entre intérêt historique et justice spectacle

Procès filmés: « Le risque est que les terroristes s’en servent comme tribune »

« Une tradition d’opacité »

D’après Me Isabelle Carbuccia, avocate au barreau de Paris et spécialiste du droit international et du droit américain, le refus de filmer les audiences en France est dû à plusieurs facteurs. « Il y a d’abord une contradiction avec la protection des données personnelles ainsi qu’avec le secret de l’instruction », explique-t-elle. « Une fois le procès terminé, le contenu des audiences est publié et même là les noms n’y figurent pas afin de protéger les personnes. Il y a aussi le droit à l’oubli : je me bats très souvent contre des grandes sociétés informatiques, des moteurs de recherches qui continuent d’exploiter des données personnelles ».

Mais l’avocate, qui travaille très souvent aux États-Unis, constate également qu’il y a une « tradition d’opacité » en France : « Aux États-Unis, il y a un objectif de recherche de la vérité basée sur une transparence complète et totale : les gens sont sous serment, et les procès sont régulièrement filmés pour assurer que rien n’est caché. En France, on accepte que les choses restent opaques, il y a une sorte de discrétion « .

Ce « souci d’opacité » conduit notamment à des pratiques dénoncées par certains avocats, comme par exemple la possibilité pour le juge de reformuler des déclarations faites par les personnes présentes dans la salle. Celles-ci seront consignées textuellement par les greffiers selon l’ordre du juge et sont donc susceptibles de ne pas être conformes à la réalité.

Par ailleurs, un avocat ne souhaitant pas être nommé évoque, lors d’un entretien téléphonique, « la nécessité de ne pas apporter trop d’importance à Abdelkader Merah par le biais de l’image ».

L’impossibilité de l’erreur à l’image

Si elle ne se prononce ni pour, ni contre l’enregistrement des procès, Me Carbuccia admet pourtant que cela pourrait amener certaines améliorations : « Il n’y a pas d’erreur possible lorsque vous êtes filmés. Cela éviterait les remarques déplacées ou désagréables de certains juges, les noms d’oiseaux qui peuvent échapper… ». Dans certains pays, rediffusion des procès est une partie intégrante de la vie d’une juge. « Aux États-Unis, les juges sont élus. La télévision est un moyen de faire campagne, il faut s’y montrer. Difficile, dans ces conditions, de refuser la diffusion d’un procès… ».

Pour Lucile S. jeune avocate dans un cabinet parisien qui désire rester anonyme, la télévision ne ferait qu’amplifier le côté « spectaculaire et voyeuriste » que peut parfois avoir un procès. « Je trouve que ce serait trop. Quitte à filmer un procès, autant qu’il soit utile et pas seulement diffusé en continu sans aucun commentaire. Utiliser les images dans des cours au lycée ou au collège pour expliquer le fonctionnement de la justice, ce serait déjà une bonne idée ».

Le parquet de Paris a définitivement mis fin à la question de la captation des audiences dans l’affaire Merah. La cour d’Assises spéciale fait cependant face à une demande bien plus compliquée : certaines personnes des parties civiles ont demandé que la vidéo de la tuerie perpétrée par Mohammed Merah soit diffusée durant le procès dans le but, selon elles, que les images parlent d’elles-mêmes.

Asmaa Boussaha