David Cameron marche sur la corde raide. Mercredi 3 février, devant le parlement britannique il s’est efforcé de convaincre les députés qu’un accord avec l’UE était indispensable. La sortie de l’Union divise profondément l’opinion et même le propre parti du premier ministre. Entre les eurosceptiques de l’Ukip et les pro-Europe, chacun y va de sa propre prédiction quant aux conséquences d’une telle rupture. Entre apocalypse économique annoncée et promesse d’un renouveau britannique, difficile d’y voire clair.
Si le Royaume-Uni sort de l’Union européenne à l’horizon 2018, quel horizon peut-on entrevoir pour les années à venir ?
Trois scénarios sont possibles.
- Selon le Bertelsmann stiftung, un think tank allemand (pro Europe), en sortant de l’Union européenne, le Royaume-Uni pourrait perdre jusqu’à 14% de son PIB arrivé en 2030. C’est l’équivalent de 313 milliards d’euros. Selon Open Europe (libéral), la perte du PIB atteindrait seulement – 2,2%.
- Deuxième scénario : si le Royaume-Uni signe des accords de libre-échange avec l’UE, lui permettant de maintenir le marché unique établi jusqu’ici, son PIB pourrait varier de +0,8 à -0,6% de son PIB, toujours selon Open Europe.
- Troisième cas de figure, le plus optimiste : le Royaume-Uni pourrait gagner 1,55% de son PIB à condition d’établir, une fois la sortie de l’UE négociée, des accords commerciaux avec le reste du monde, principalement l’Asie.
Plusieurs paramètres sont à prendre en compte si le Royaume-Uni sort de l’UE. Notamment l’impact probable sur les autres partenaires commerciaux de Londres. Le think tank allemand fait quelques estimations. L’Irlande pourrait perdre environ 1,74% de son PIB, le Luxembourg 0,64%, la Belgique 0,58% et la France 0,18%. L’Hexagone n’est donc pas le pays le plus menacé par ce retrait britannique du groupe des 28.
Quant aux exportations britanniques, il est nécessaire de se demander quels effets peuvent provoquer son retrait de l’UE sur l’économie du pays. Le marché européen occupe une part importante. Il représente 47% des exportations du pays, et 43% de ses importations. C’est d’ailleurs ce qui gêne le plus le premier ministre David Cameron, puisque l’UE reste un partenaire commercial important. D’autres statistiques, établis par la Regent’s University, montrent que 55% des échanges britanniques seraient réalisés avec les autres membres de l’UE. Ce qui représenterait un bénéfice annuel de 90 milliards de livres sterling.
L’adhésion à l’UE donne accès au marché unique. Par là, les barrières douanières sont abaissées, bien que le Royaume-Uni ne fasse pas parti de l’espace Schengen. La Norvège par exemple qui a fait le choix de rester hors de l’Union, paye chaque année 1,6 milliard d’euros pour accéder au marché commun.
Les taxes douanières vont donc considérablement augmenter si le pays part. Selon Open Europe, ces taxes augmenteraient de 4,5% sur les médicaments, 10% dans l’automobile et 20% sur le tabac et les produits alimentaires. Et selon The Economist, le cheddar, à titre d’exemple, pourrait se voir attribuer un droit de douane de 167€ pour 100 kg.
Parmi les risques encourus par le Royaume-Uni, vient celui de perdre de la valeur du côté de la place financière qu’occupe le pays actuellement. D’autres centres européens pourraient récupérer la place de la City londonienne.
Côté avantages, le Royaume-Uni serait libéré de certaines contraintes en quittant le groupe des 28. Notamment libéré des règles du travail, limitant la semaine à 48h pour les employés. Le Sun parle de 140 000 emplois créés si le Royaume-Uni échappe à la moitié des réglementations européennes. Quant au Bruges Group, il parle de 9 milliards d’euros perdus chaque année à cause de ces règles. Le départ du Royaume-Uni ne le forcerait plus à harmoniser sa législation en fonction de l’UE.
Enfin les pro-sortie mettent en avant une vieille marotte des anglais : l’Europe leur coûte plus chère qu’elle ne leur rapporte. Margaret Tatcher, en bonne fille d’épicier, avait en son temps négocié une ristourne avec l’Europe. Motif, les subventions européennes concernent essentiellement la PAC, et le climat britannique étant ce qu’il est les sujets de sa majesté n’en voyait pas beaucoup la couleur. Les Anglais ne sont pas ceux qui payent le plus. Malgré tout, la fin de l’adhésion représenterait rien que cette année près de 5 milliards d’euros d’économie.
Antoine Etcheto et Margaux Malinge