La Fête de l’Humanité sous le feu des critiques pour avoir maintenu des artistes accusés de violences sexuelles

La fête de l’Humanité, se tenant du 12 au 14 septembre et affichant complet pour sa 90ème édition, a été visée pour avoir programmé des artistes accusés de violences sexistes et sexuelles. Compte tenu de la portée politique de l’évènement, et tandis que les festivals sont incités à lutter contre les violences notamment via des “safe place” (stands consacrés aux minorités, notamment aux femmes), cette publication a mis le feu au poudre.

 

« Fête de l’Humanité, Fête des agresseurs » : c’est ainsi que le compte Instagram @militanthémis, tenu par l’étudiante en droit Sirine Sehil, a pointé le festival se tenant du 12 au 14 septembre. Pour sa 90ème édition, l’événement organisé par le journal l’Humanité affiche complet et accueille jusqu’à 110 000 visiteurs par jour.

Le 10 septembre, la publication a pris la forme d’un appel conjoint entre le compte @militanthemis de l’étudiante en droit Sirine Sehil et quatre autres comptes féministes suivis par plusieurs milliers de personnes ( @metoomedia_ , @stopfisha, @mavoixmonchoixorg, surviv_hante). Il vise quatre rappeurs : Zamdane, TIF, Kalash et Vicelow, mis en cause par des témoignages et dans le cadre d’affaires judiciaires. Un avertissement mettant le feu au poudre, notamment par la portée politique de l’évènement.

Le collectif « NousToutes » a à son tour relayé l’information le lendemain. En charge d’une safe place sur le festival (stands consacrés aux minorités, notamment aux femmes), l’organisation affirme : « Notre présence n’est pas un signe de caution. #NousToutes sera sur place pour dénoncer et offrir un soutien aux victimes dans l’Espace Safe ».

Vicelow, Kalash, TIF et Zamdane mis en cause

 

Comptant à ce jour plus de 27000 « j’aime », le post le @militanthemis affirme que Vicelow a été condamné par la justice pour violences conjugales envers son ex-femme, et qu’il aurait également « fait l’objet de plusieurs dénonciations de danseuses pour harcèlement et agression sexuelle ».

Concernant Kalash, les militantes reviennnent sur le livre de son ex-compagne et mère de ses enfants Ingrid Littré – Sa vérité, relatant des violences conjugales. Le rappeur avait, en réaction, porté plainte pour diffamation.

Quant à TIF , il aurait été accusé pour viol et agression sexuelle dans des Tweets supprimés depuis, les militantes déclarant qu’il « aurait apparemment fait pression sur ses victimes ».

Zamdane, pour sa part, est pointé pour banalisation du viol dans plusieurs Tweets supprimés depuis des dénonciations pour violences sexuelles à son encontre, notamment : « c’est pas du viol si elle dort ».

En commentaires, la publication fait débat : de nombreux internautes soutiennent et s’indignent, d’autres s’interrogent sur le fait que les artistes mis en cause soient uniquement des rappeurs et personnes racisées, ce à quoi les comptes à son initiative répondent être des « femmes racisées queer » également engagées sur ce sujet.
« Déjà l’année dernière, nous avons bataillé pour faire retirer le concert de Heuss l’Enfoiré », déclarent-elles, ajoutant que le festival « les ignorait ».

« Silence radio » du côté de la direction de l’organisation du festival

Cette année encore, « silence radio » du côté de la fête de l’Humanité, relève @stopfisha : « Nous avons tout essayé pour discuter avec la directrice, sans résultat ». Les autrices de la publication déclarent avoir contacté l’un des organisateurs à propos de Vicelow dès le 10 juin, ce dernier disant « se renseigner », mais n’étant jamais revenu vers elles : « 3 mois après, il ne l’a pas fait ».

Néanmoins « la rédaction du journal l’Humanité a été avec nous », indique Hajar, co-gérante du compte @stopfisha.  » Ils nous ont accordé du temps, on leur a apporté les preuves et ils en ont été horrifié. Cela fait six mois que des personnes du festival essaient de faire déprogrammer des artistes, mais la direction ne donne pas suite ». « C’est pratique d’avoir des associations féministes sur place lorsqu’elles paient les stands, mais pas lorsqu’il s’agit de mettre la main au portefeuille et d’agir” dénonce-t-elle.

Sur place, « plusieurs militantes féministes ont décidé de mener des actions », notamment « concernant le concert de Kalash, qui n’a pas été déprogrammé », indique encore la militante.
Contactée concernant la publication, l’organisation du festival n’a pas donné suite.

«  On sait pertinemment que c’est des agresseurs » : la déception des festivaliers

Au-delà des réseaux, cette alerte interpelle les festivaliers se rendant actuellement sur le site de Brétigny-sur-Orge et du Plessis-Pâté pour assister à l’évènement. Nombreux sont ceux l’ayant découvert tardivement . Pour Inès, 25 ans, le déclencheur a été la raillerie d’un ami : « je n’ai pas compris pourquoi il nous disait qu’on faisait partie de la gauche « deux poids, deux mesures » car je n’en avais pas pris connaissance, c’est là qu’il nous a montré le post ».

Maintenant qu’elle a sa place, Inès s’y rend mais ne cache pas son exaspération quant à la scission entre les « valeurs de gauche » représentées par cet évènement, et le fait que le festival « invite des mecs dont on sait pertinemment que c’est des agresseurs ». La jeune femme pointe particulièrement Kalash, ne connaissant pas les autres artistes mais soulignant qu’elle avait « eu des échos » concernant les affaires impliquant cet artiste.

« Il est hors de question que je mette les pieds à leurs concerts », souligne t-elle tout en regrettant que ce problème concerne de nombreux festivals : « on entend parler de plus en plus de festivals qui programment des agresseurs, mais habituellement c’est fait un peu en amont et le festival est exposé et contraint de régler ce problème ».

« Ce n’est pas la première fois qu’un festival est accusé de programmer des artistes qui font l’objet de ce genre d’accusations. J’ai l’impression que c’est un peu banal de les programmer malgré tout », la rejoint Anna, 23 ans. La jeune femme se rend à cet évènement pour la première fois, découvrant que sa portée dépassant le simple festival de musique : « j’ai réalisé à quelle point sa dimension politique était forte, notamment avec tous les stands des sections du PCF », « c’est vrai qu’un festival avec une dimension politique aussi forte devrait être exemplaire sur la programmation des artistes » conclue-t-elle.

« J’ai été surpris et j’ai ressenti une certaine déception », explique quant à lui Lucas, 25 ans, dont cet évènement « ne change pas l’idée globale du festival » mais qui regrette un « manque de rigueur » dans l’organisation : « beaucoup d’autres artistes auraient pu être choisis, pour les faire monter, plutôt que des agresseurs ».

Quelles répercussions sur le festival ?

Le concert de TIF a été annulé et remplacé par un concert « en solidarité avec le peuple Palestinien », l’artiste ayant annoncé le 8 septembre « qu’il ne serait finalement pas présent à la fête de l’Humanité », comme l’explique une publication du festival, sans en avancer les raisons. Les trois autres rappeurs n’ont pour leur part pas été déprogrammés.

Sur place, Zamdane s’est exprimé sur ses accusation au début de son concert, déclarant qu’il regrettait ses tweets et exprimant « force et soutien pour toutes les victimes de violences sexistes et sexuelles ». Le rappeur a également annoncé porter plainte pour diffamation sur Instagram le vendredi 12 septembre.

En parallèle, des internautes continuent à interpeller le festival sous chacune de ses publications Instagram :  « Kalash est un mec qui a battu son ex, […] vicelow a été condamné par la justice », « Pourquoi autant d’agresseurs en tête d’affiche »?

Guadeloupe : comment expliquer le déclin des oiseaux ?

Depuis des mois, plusieurs données mettent en évidence une diminution inquiétante des espèces d’oiseaux en Guadeloupe, qu’elles soient menacées ou non. Parmi les plus concernés : le pélican brun, chassé par les habitants.

De l’imposant pélican brun au discret colibri, la Guadeloupe dispose d’une grande variété d’oiseaux sur son territoire. 295 espèces y sont recensées. Pourtant, leur nombre pourrait diminuer ces prochaines années, conséquence de la nette réduction des populations ces dernières décennies.

Parmi les plus espèces les plus concernées : le pélican brun, emblématique oiseau de l’île, qui a même donné son nom à la commune littorale du Gosier (l’oiseau s’appelle « Gwan Gosyé » en créole). Si jusqu’en 2020 les individus peuplaient encore la Guadeloupe, ils n’y nichent désormais plus, à l’exception d’une petite colonie qui s’est installée dans l’archipel des Saintes.

Victimes de la chasse

La population de pélicans bruns au Gosier a atteint son apogée dans les années 2010  mais, très vite, les habitants se sont permis de les chasser, gênés par leur nombre et leurs déjections. « Ils ont coupé les arbres où nichaient les oiseaux, ils les chassaient à coup de cailloux, on en a même retrouvés pendus », raconte Béatrice Ibéné, présidente de l’Association pour la sauvegarde et la réhabilitation de la faune des Antilles.

Les bécasseaux maubèches, très prisées par les chasseurs, ont elles aussi vu leur population chuter. En 50 ans, leur nombre a diminué de 95%. L’espèce est désormais complètement protégée.

En 2024, l’autorisation de la chasse de certains oiseaux accordée par la préfecture avait été au coeur d’un débat, avant d’être finalement autorisée par le ministère de la Transition écologique. Et ce malgré l’inscription de certaines espèces sur la liste rouge de l’Union internationale pour la conservation de la nature et les données qui mettaient clairement en évidence les diminutions des effectifs.

Le changement climatique aussi mis en cause

Au-delà de la chasse, les scientifiques considèrent que l’une des principales raisons de la diminution des oiseaux est le changement climatique, qui modifie leur environnement. Un phénomène est particulièrement observé dans les régions tropicales comme la Guadeloupe. Deux espèces de colibris souffrent par exemple du changement des régimes de pluie et de la disparition des insectes.

Cet été, une étude parue dans la revue scientifique Nature Ecology & Evolution expliquait que les chaleurs extrêmes liées au changement climatique avaient provoqué le déclin de 25 à 38% des effectifs d’oiseaux dans les régions tropicales entre 1950 et 2020.

Si la population des oiseaux en Guadeloupe continue d’inquiéter, il faut tout de même noter quelques avancées sur le sujet en 2025. Au mois de mars, trois arrêtés publiés par les ministères de la Transition écologique et de l’Agriculture ont mis à jour la liste des oiseaux protégés et les modalités de leur protection. 93 espèces supplémentaires ont été ajoutées, comme la colombe rouviolette et le chevalier solitaire, jusque-là autorisés à la chasse.

Toutefois, malgré la protection de davantage d’espèces, le changement climatique continuera de faire des dégâts.

 

Isaure Gillet

 

 

Découvrez les trois librairies-cafés parisiennes classées parmi les plus belles au monde

Le Used Book Café. Photo : Domitille Lefebvre.

L’association australienne 1000 Libraries a publié un classement des 10 plus belles librairies-cafés du monde. Parmi elles, trois sont situées en France, à Paris. Un coup de projecteur largement apprécié par les restaurateurs récompensés.

À midi, c’est déjà salle comble. Au Used Book Café, établissement du 3ᵉ arrondissement de Paris en apparence classique, les clients sont nombreux à vouloir profiter des boissons, des plaisirs sucrés et de livres.

« C’est très joli », commentent deux amies assises à une table en regardant les murs recouverts d’ouvrages. Tellement « joli » que l’association australienne 1000 Libraries l’a classé à la deuxième place de son « top 10 des librairies-cafés les plus belles du monde ». Soutenue par l’Institut français de recherche pour le développement et l’État, cette organisation vise à promouvoir la lecture et le lien social.

Tout s’est passé sur internet. 200.000 personnes à travers le monde ont pu voter pendant une période de 60 jours pour leur librairie-café préféré, choisi au préalable par l’association. « On m’avait informé qu’on était sélectionné », se souvient Cyrille Bruneau, propriétaire de la péniche L’Eau et les Rêves, arrivée quatrième de la compétition.

Les votants avaient le choix entre 16 établissements. Mais la beauté n’a pas été le seul critère de sélection, leur « inventivité » a aussi été prise en compte. Selon 1000 Libraries, ces librairies-cafés « ont résolu un des problèmes majeurs de la société contemporaine : la disparition de ce ‘troisième lieu’, ces espaces sociaux cruciaux entre la maison et le travail où les communautés naissent, les idées fleurissent et les relations s’épanouissent ».

Une question d’image et de réputation

À l’intérieur du Used Book Café, les livres sont à la disposition des clients. « Les gens peuvent soit emprunter ou acheter », indique Amine, responsable du café. Ce dernier a été créé par la marque de prêt-à-porter française Merci, dont la boutique se trouve d’ailleurs dans le prolongement du café.

Dans la salle, le public est aussi hétéroclite que la littérature rangée sur les murs. « On a des livres en français et en anglais », précise le responsable, qui ne peut se départir de la joie que lui procure une telle récompense.

« On est presque habitué à la beauté dans les cafés parisiens, mais celui-ci est en effet vraiment joli », remarque Helena, serveuse pour le Used Book Café depuis deux semaines. Pour elle, ce classement est avant tout une question de réputation : « Les Français sont en général des gens cultivés et avec ce concept et les livres disposés sur les murs, ça renforce cette idée qui plait aux touristes. »

Certains, téléphones en main, ne se gênent d’ailleurs pas pour prendre quelques photos dignes des réseaux sociaux tandis que d’autres dévorent leurs livres tranquillement. Dans un autre arrondissement parisien, l’ambiance est toute autre.

La librairie-café L’Eau et les Rêves flotte sur le canal de l’Ourcq dans le 19ᵉ arrondissement de Paris depuis 2018. Ici, le classement est accueilli comme un « vrai plaisir » par Cyrille Bruneau et Ila, la manageuse.

Publié il y a un mois, il n’a été relayé sur les réseaux sociaux qu’à partir d’hier. « Je ne savais pas qu’autant de monde connaissait », s’étonne Ila, qui apprécie particulièrement que la péniche ne soit pas un « lieu TikTok », où la clientèle vient autant pour le café que pour prendre des photos.

Des effets mitigés sur la fréquentation

Ce concept de librairie-café n’est pas nouveau. Il est né dans les années 1990 en Bretagne avec l’intention de redynamiser le marché du livre. Aujourd’hui, 110 librairies-cafés ont été recensées dans toute la France par l’Agence régionale du livre Provence-Alpes-Côte d’Azur.

« Depuis les articles parus hier [sur le classement], on a vu plus de monde venir », constate Amine, « il y a à la fois des gens du quartier qui ne connaissaient pas le concept et des étrangers ».

Un constat que ne partage pas Cyrille Bruneau : « La fréquentation est très variable en fonction de la fréquentation générale à Paris et on est très tributaire de la météo quand on est sur une péniche, donc on n’a pas de régularité assez suffisante pour dire si un évènement va nous impacter ou pas. »

Ce classement récompense également une troisième librairie-café parisienne, les Halles Saint-Pierre dans le 18ᵉ arrondissement de Paris. Contactés, ils n’ont pas souhaité nous rencontrer.

Les sept autres lauréats sont dispersés aux quatre coins du monde, allant de la Tunisie à l’Australie en passant par le Brésil ou encore les États-Unis.

Domitille Lefebvre

Tourcoing : après le lynchage d’un policier, le débat sur les peines minimales relancé

Un policier de la BAC a été violemment agressé à Tourcoing lors d’une opération de surveillance. L’affaire provoque une onde de choc politique et remet sur le devant de la scène la question des peines minimales, que certains souhaitent voir inscrites dans la loi dès la première infraction.

La scène glace le sang. Sur une vidéo qui circule depuis mercredi soir, on distingue un policier de la brigade anticriminalité (BAC), au sol, violemment frappé par plusieurs jeunes. L’agent, en surveillance dans une affaire de vol, a été hospitalisé avec de multiples blessures.

Gérald Darmanin, ex-maire de Tourcoing et garde des Sceaux démissionnaire, a réagi dès le lendemain. Dans un message sur X, il apporte son soutien aux « courageux » policiers et annonce vouloir « poursuivre ces voyous. »

Mais le ministre ne se contente pas de dénoncer : il relance l’une de ses propositions phares, celle d’instaurer des peines minimales pour les agressions contre policiers, gendarmes, pompiers et soignants. Une idée qui, selon lui, permettrait de garantir une sanction ferme et immédiate pour ces infractions.

Vers une peine minimale dès la première infraction

Cette proposition n’est pas sans rappeler le débat sur les peines planchers, instaurées en 2007 sous Nicolas Sarkozy. À l’époque, la loi prévoyait une peine minimale obligatoire en cas de récidive pour les crimes et délits passibles d’au moins trois ans de prison. Concrètement, un récidiviste encourait au minimum un tiers de la peine maximale prévue par la loi.

Le juge pouvait certes déroger à cette règle, mais uniquement en motivant sa décision. Dans les faits, ces dérogations sont rapidement devenues majoritaires : en 2010, seuls 38 % des dossiers éligibles donnaient lieu à une peine plancher.

Dès leur mise en place, les syndicats de magistrats ont dénoncé une atteinte au principe d’individualisation des peines et une mesure inefficace sur le plan de la prévention de la récidive. En 2014, le gouvernement socialiste a abrogé les peines planchers, au nom d’une justice plus proportionnée et moins automatique.

La différence avec la proposition actuelle est de taille : les peines minimales réclamées par Darmanin s’appliqueraient dès la première infraction, et non seulement en cas de récidive. Le garde des Sceaux veut que certaines atteintes graves – violences sur policiers, pompiers, soignants – soient systématiquement sanctionnées par de la prison ferme ou une amende élevée.

Un débat qui divise encore les élus

L’ex-Premier ministre François Bayrou a soutenu cette idée en juin, en appelant à « inscrire des peines minimales là où la loi prévoit des peines maximales ». À droite comme à l’extrême droite, le soutien est quasi unanime. Marine Le Pen réclame « des peines minimales pour effacer la culture de l’excuse et de la récidive ».

À gauche, en revanche, de nombreuses voix s’inquiètent d’un retour à une justice plus automatique, qui réduirait la liberté d’appréciation des magistrats. Elles redoutent également un impact direct sur la surpopulation carcérale, déjà à un niveau record. Au 1er mai, la France comptait 83 681 détenus pour seulement 62 570 places disponibles, un record absolu. Les syndicats pénitentiaires dénoncent des conditions de détention dégradées et préviennent qu’un durcissement systématique des peines pourrait aggraver la situation.