Le dilemme d’Asnières et Colombes : voter local ou voter En Marche ?

crédit : Louise Boutard
Asnières-sur-Seine représente les deux-tiers de la deuxième circonscription des Hauts-de-Seine.

Les 11 et 18 juin 2017, le futur de la deuxième circonscription des Hauts-de-Seine se jouera. Après quarante-cinq ans de gouvernance par la droite, cette circonscription qui réunit Asnières-sur-Seine et Colombes-sud était tombée aux mains du Parti socialiste en 2012. Aujourd’hui, parmi les quinze candidats, trois profils sortent du lot. 

crédit : Jean-Gabriel Fernandez
La deuxième circonscription des Hauts-de-Seine unit Asnières-sur-seine et Colombes-sud.

Le député socialiste sortant, Sébastien Pietrasanta ne se représentera pas. C’était la première surprise de ce scrutin dans la deuxième circonscription des Hauts de Seine.  L’homme qui avait réussi à faire naître l’alternance politique à la mairie d’Asnières-sur-Seine (2008-2014) et aux dernières élections législatives, laisse la place à sa suppléante, Chantal Barthélémy-Ruiz. La candidate devra défendre le premier bilan socialiste de la circonscription face à Marie-Dominique Aeschlimann (LR) et Adrien Taquet, proche d’Emmanuel Macron, pour la République en Marche (REM). Trois têtes d’affiches qui se disputent une circonscription divisée à tous points de vue.

Historiquement ancrée à droite, la circonscription est composée de trois cantons répartis sur deux communes dirigées par des maires Les Républicains (LR). A Asnières-sur-Seine, le maire de la ville et ancien député de la circonscription (2002-2012), Manuel Aeschlimann, est le mari de la candidate LR. Une commune d’importance en termes de démographie puisqu’elle compte plus des deux-tiers des habitants de la circonscription : 83 000 sur 115 000. Depuis le redécoupage en 2014, le sud de Colombes est également compris sur le territoire de la circonscription. La mairie est elle aussi aux mains de la droite depuis 2014, avec la victoire de Nicole Goueta (LR), ce qui assure à Marie-Do Aeschlimann un ancrage solide en vue de ces élections.

Pour Chantal Barthélémy-Ruiz (PS), c’est bien la candidate LR qui est sa “principale adversaire” à battre dans cette élection. L’ancienne maire adjointe de Colombes, actuelle députée suppléante et spécialiste du monde associatif local, connaît bien les enjeux de sa circonscription. Dans un billet sur le site de l’union départementale des élus socialistes et républicains, elle reconnaît “ne pas être favorite pour cette élection”. La candidate est peu aidée par les résultats des précédentes élections municipales et la dynamique post-présidentielle condamnant le bilan socialiste national.

Emmanuel Macron largement en tête à la présidentielle

Celui qui compte bien profiter de cette dynamique post-présidentielle, c’est le candidat de la République En Marche (REM), Adrien Taquet. A quarante ans, le candidat fait partie des candidats estampillés “société civile” par la majorité présidentielle. Proche d’Emmanuel Macron, co-fondateur de l’agence de communication Jésus et Gabriel, c’est à lui que l’on doit le slogan “En Marche !” ainsi que l’identité visuelle du mouvement.

Pour Adrien Taquet, la circonscription est un terrain ami. En effet, Emmanuel Macron avait récolté 33,77 % des voix à Asnières. François Fillon était arrivé deuxième avec 26,63 %, confirmant l’ancrage local du parti LR. Jean-Luc Mélenchon y faisait figure de troisième homme avec 19,74% des voix. Benoît Hamon, lui, n’avait convaincu que 7,89% des votants. A Colombes, c’est aussi Emmanuel Macron qui arrive en tête avec 30,51% des votants mais le duo le suivant sur le podium était inversé, Jean-Luc Mélenchon réalisant un score de 25,37% et François Fillon 20,47%.

Les enjeux de l’élection

Parmi les habitants de la circonscription, une question d’échelle se pose : voter pour un candidat ancré dans la circonscription depuis des années, ou bien voter à l’échelle nationale, pour le candidat de la majorité présidentielle. C’est pour l’instant la valorisation de l’ancrage local qui semble porter ses fruits, au grand damne des sympathisants En Marche!.

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2ème circonscription : En Marche face au problème du parachutage

Crédit: Gaël FLaugère
Adrien Taquet partage l’affiche avec Emmanuel Macron.

Malgré la moiteur de cette fin de mois de mai à Asnières-Gennevilliers, une quarantaine de sympathisant ou militants de la République En Marche s’étaient déplacés dans un bar de la ville pour échanger avec leur candidat, Adrien Taquet dans la deuxième circonscription des Hauts-de-Seine. Il s’agissait du tout premier  “Café Taquet” organisé par le mouvement désormais parti politique. Un événement “très En Marche”, souligne le candidat, pour son côté informel où le tutoiement est encouragé. La boisson en question est prise au bar La Rotonde à Asnières, bien loin de la brasserie du même nom appréciée par Emmanuel Macron et située dans le sixième arrondissement de Paris, mais la coïncidence prête à sourire.

Pour introduire la soirée, Adrien Taquet met les pieds dans le plat : “Je vais vous raconter pourquoi je suis là, et vous expliquer pourquoi Asnières et Colombes-sud.” C’est en effet l’ombre qui plane au dessus de la campagne du quarantenaire proche du président : celle du “parachute”. Cette expression qu’on utilise pour stigmatiser un candidat qui se présente à la députation sans attaches avec le territoire qu’il compte représenter à l’Assemblée. Face à cette accusation, Adrien Taquet offre quatres réponses :

  • L’élection législative est nationale : “un député incarne l’intérêt général et non pas l’intérêt particulier”, un statut renforcé depuis la suppression du cumul des mandats qui interdit à un maire d’être aussi député. De plus, il est cohérent de donner une majorité au président élu pour lui permettre de gouverner.
  • La compétence face aux problématiques du territoire: Il reconnaît être « parachuté », mais a tout de même vécu 25 ans dans les Haut-de-seine » Les problématiques que rencontrent le territoire ne sont pas très différentes des problématiques auxquelles j’ai pu être confronté par le passé en tant qu’entrepreneur et salarié. “Quand on est dans un territoire très agricole où le député est le seul lien avec Paris, ça peut poser des problèmes, mais ici nous sommes prêt de Paris” explique-t-il.
  • Le renouvellement des visages et l’intérêt d’ouvrir un territoire à de nouveaux regards sur les problématiques.
  • Les problématiques du territoire peuvent trouver des réponses dans le programme d’Emmanuel Macron. Et Adrien Taquet d’éggrainer la suppression du Régime Social des Indépendants (RSI), les emplois francs, la suppression de la taxe d’habitation, l’éducation, la sécurité…
Crédit: Gaël Flaugère
Adrien Taquet justifie sa candidature auprès des sympathisants de la circonscription.

Mais l’argumentaire peine à convaincre les militants. Confrontés sur le terrain à ce manque d’ancrage local de leur candidat, ils ont du mal à rassembler autour de sa candidature. Lorsqu’arrivent les questions, Jérôme Chicheportiche, 47 ans, lunettes carrées, bouc grisonnant et veste en cuir, prend la parole pour aborder cette problématique. Deux autres personnes feront part, elles-aussi de leurs inquiétudes au candidat vis à vis de ce sujet.

“Je suis un petit soldat d’ En Marche! depuis pas mal de temps, et on va se parler franchement. Tu n’existais pas (sur la circonscription) pendant qu’on faisait la campagne d’Emmanuel Macron. Et quand on tracte sur les marchés on nous demande : mais qui est Adrien Taquet ? Sur le terrain, on n’arrête pas de se prendre des “c’est un parachuté, il ne vient pas d’Asnières.”

Rapidement, les sympathisants commencent à débattre. Il y a là un point éminemment stratégique à discuter. Car cet argument est utilisé par les adversaires du candidat de la majorité présidentielle contre leur candidat, notamment du côté des Républicains où la campagne est menée par  Marie-Dominique Aeschliman dont la famille est largement connue des habitants de la circonscription. Un des slogans de sa campagne, “agir pour Asnières” trouve un écho parmi la population, au grand damne des militants En Marche ! “On ne peut pas lutter sur le côté parachutage face à la famille Aeschlimann qui, comme des Bernicles, sont collés à leur rocher” plaisante Jérôme Chicheportiche. “On ne va pas changer la culture des gens comme ça” se désole un autre militant.

Là est pourtant le défi auquel sont confrontés les militants. Faire changer une culture du vote qui donne la primeur au “local” lors de l’élection législative. Pas un amour, juste une “habitude propre aux petites cités” explique Jerôme qui a pensé à une solution : “Il faut faire du côté parachuté une force. Le parachuté, ça peut être aussi l’étranger qui vient nous sauver la vie”. Le militant de conclure : “Ce sera compliqué, c’est sûr, mais je ne serai pas là si ce n’était pas jouable. Par contre, il faut vraiment s’activer maintenant.”

Gaël Flaugère

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