Les personnages de fiction noirs : critiques racistes ou question de goût ?

Fin mai, deux films très attendus ont fait trembler la toile. Disney a présenté son adaptation en live-action de « La Petite Sirène ». En parallèle, les studios Marvel ont sorti « Spider-Man : Across the Spider-Verse ». Ces deux productions ont suscité des réactions divergentes de la part des internautes. Biais racistes ou simples préférences personnelles ? Tentons de décrypter cette situation. 

En septembre 2022, Disney a créé une véritable agitation sur les réseaux sociaux en diffusant les premières images de sa version live-action du classique « La Petite Sirène ». Cependant, ce n’est pas la merveilleuse transformation aquatique qui a fait l’objet de la controverse, mais plutôt le choix de casting de l’actrice principale. En effet, la petite sirène sera jouée par une actrice afro-américaine, Halle Bailey, ce qui a suscité une vague de réactions discriminantes et de commentaires racistes en ligne.

Du mouvement #NotMyAriel est née une communauté opposée au film, revendiquant une sirène à la peau blanche similaire à la version animée originale. Malgré les déclarations du studio affirmant que la couleur de peau importe peu et que le choix de l’actrice repose sur ses talents, la communauté #NotMyAriel a continué à exprimer sa désapprobation envers le film. 

Une inégalité de traitement

Ce cas fait écho à un second film paru au cinéma ce mercredi 31 mai : « Spider-Man : Across the Spider-Verse ». Dans le film d’animation, le super-héros aux pouvoirs d’araignée est un personnage noir. On pourrait donc s’attendre à des réactions similaires. Mais c’est tout le contraire. En réalité, le film est acclamé par tous. Alors, quelles différences entre ces deux œuvres ? Il y en a très peu.

Les deux personnages étaient initialement représentés comme des personnes blanches. Par conséquent, on aurait pu s’attendre à des réactions similaires à celles suscitées par « La Petite Sirène ». Cependant, cela n’a pas été le cas. Contrairement à de nombreux films précédents, « Spider-Man: Across the Spider-Verse » a été une exception, car il a été bien reçu par le public. Cette réception positive dénote dans un contexte où les représentations de personnages noirs dans la fiction ont souvent été critiquées de manière virulente sur les réseaux sociaux.

Des personnages noirs souvent critiqués

La Reine Charlotte dans la série « Bridgerton », la reine Cléopâtre dans la série documentaire sur Netflix, l’agent 007 dans « Mourir peut attendre », ainsi qu’Aragorn dans l’adaptation de la saga « Le Seigneur des Anneaux » sur Amazon Prime, ont tous été au centre de controverses similaires. Et tous on fait un choix d’acteurs noirs pour incarner des personnages qui étaient initialement perçus comme étant blancs. Ce changement de casting ne suscite des réactions que lorsqu’il est appliqué dans ce sens.

En revanche, de nombreux films, y compris en France, ont vu des personnages initialement noirs être incarnés par des acteurs blancs, sans provoquer de polémique. Ce qui soulève la question du « whitewashing« , un phénomène répandu dans l’audiovisuel. De Gérard Depardieu dans « L’autre Dumas » à Jake Gyllenhaal dans « Prince of Persia », le phénomène ne date pas d’hier.

Une forme de racisme intériorisée

Alors pourquoi ces choix de casting suscitent-ils autant de débats ? Selon Marie-France Malonga, sociologue des médias et spécialiste de la représentation sociale et médiatique des minorités, c’est en grande partie dû aux préjugés et aux héritages racistes de l’époque de la colonisation. Ces habitudes profondément ancrées dans notre société alimentent la controverse lorsque des personnages autrefois représentés de manière exclusive sont réinventés avec plus de diversité. Elle témoigne dans Le Temps :

« Changer l’origine ethnique d’un personnage, c’est-à-dire ne même pas imaginer qu’un acteur issu d’une minorité raciale puisse avoir un rôle, et le faire incarner par un personnage blanc qui va éventuellement s’en donner l’apparence, renvoie au phénomène du blackface et des minstrel shows: des spectacles qui, aux Etats-Unis, reproduisaient la vie des esclaves dans les plantations, de façon grotesque, avec des acteurs blancs qui se grimaient en noir pour les caricaturer »

 

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En résumé, les débats sur la représentation dans le cinéma et les séries sont enflammés. En cause ? Les normes rigides et les stéréotypes prépondérants. Toutefois, certains applaudissent les changements vers une meilleure représentation, comme pour « Spider-Man : Across the Spider-Verse » et « La Petite Sirène » qui a déjà attiré 2,9 millions de fans.

Léa ZJ

Paris : la manifestation des agents d’accueil de la Philharmonie a tourné court

Ce jeudi 1er juin, la Philharmonie de Paris organisait un gala, dans un contexte tendu. Des employés en grève depuis octobre 2022 ont tenté de manifester, avec une « casserolade » qui n’aura pas duré plus de vingt minutes, suite à l’intervention des forces de l’ordre.

Après s’être déclaré en grève en octobre 2022 pour contester des conditions de travail qu’il jugeait insatisfaisantes, le dernier contrat de Mathieu n’a pas été renouvelé. « Pour moi, c’est une évidence qu’ils continuent à virer les gens qui ont fait grève. » Mathieu, 21 ans, est venu manifester ce jeudi 1er juin à la Philharmonie de Paris qui organisait un gala événement.

Pour rythmer la soirée, une « casserolade » était prévue par des agents d’accueil en grève qui, depuis plus de huit mois, tentent de faire entendre leur voix contre leurs conditions de travail. Jeudi 1er juin dans la soirée, la manifestation n’a duré qu’une vingtaine de minutes avant d’être rapidement dispersée par une large présence policière.

 

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Des employés écartés

Mathieu a travaillé à la Philharmonie en tant qu’agent d’accueil. Pendant un an, il a enchaîné des contrats mensuels pour y travailler. Pour lui, nombreux sont ses collègues qui subissent une discrimination après avoir exercé leur droit de grève en octobre dernier. « On a été trois à se faire virer en décembre, on ne nous a pas renouvelé nos contrats » constate-t-il.

C’est pour alerter sur cette situation qu’il s’est rendu, ce jeudi 1er juin, devant la Philharmonie, qui fêtait La nuit de l’Ourcq. Au programme : Mika et Benjamin Millepied, pour une soirée dont le prix des places s’élevait jusqu’à 1 700€ avec comme partenaires Total Energie et L’Oréal.

Une main d’œuvre sous-traitée

Pour le recrutement et la gestion de ces agents d’accueil, la Philharmonie fait appel à une entreprise de sous-traitance : City One. Les employés grévistes contestent ce qu’ils estiment être un mauvais traitement : des paniers repas à la valeur insuffisante, des salaires trop bas, des heures supplémentaires oubliées…

Thibaud de Camas, directeur adjoint de l’institution, confiait à Libération cette réalité difficile en novembre 2022 : « On peut être amenés à choisir une entreprise qui a des règles sociales dures. C’est en partie le problème qu’on a avec City One. » Christophe Pons, bottait en touche. Ce délégué syndical CGT de la Philharmonie affirmait :  » Nous avons pris conscience de l’illisibilité des bulletins de salaire. (…) Tout est mélangé, et c’est comme ça qu’ils grattent de l’argent sur le dos de ces jeunes ». Le représentant syndical résumait : « (Ils) sont mal accompagnés, mal managés, ils sont traités comme du bétail ». L’agence City One n’a pas répondu à nos questions.

La présence policière coupe court à la manifestation

Pour ces employés et ex-employés de l’agence, la lutte continue. Ils étaient une vingtaine ce premier soir de juin pour une « casserolade » comme cela se fait de plus en plus. L’ambiance était bon enfant, malgré la présence policière. Les gardiens de l’ordre ont confisqué au moins une casserole.

À 20h pile, la petite troupe s’est animée, avec bien peu d’ustensiles de cuisine. C’était en frappant dans leurs mains qu’ils scandaient « Même si Macron ne veut pas, nous on est là« . Autour, la présence policière s’est durcie, des agents à moto, garées plus loin, sont venus en renfort et leur nombre dépassait largement celui des quelques manifestants. Lourdement équipés, les policiers ont éloigné les manifestants du parvis de la Philharmonie et les ont encerclés pour les forcer à prendre le métro, n’ouvrant aucune autre issue. Au total, la manifestation n’aura pas duré plus d’une vingtaine de minutes.

shad de bary

Promouvoir le fleurisme aux Tuileries

À l’occasion de la 20e édition des Rendez-vous Jardin, organisés par le ministère de la Culture, les parcs et jardins de France ouvrent leurs portes du 2 au 4 juin, offrant aux visiteurs une immersion au cœur de la nature. En plein Paris, le jardin des Tuileries propose l’événement « Jardins Jardin ».

Les jardins des Tuileries ouvrent leurs portes tout le week-end aux curieux. Adèle G

À vos marques, prêts… plantez ! La 20e édition des Rendez-vous Jardin, organisés par le ministère de la Culture, c’est en ce moment. Du 2 au 4 juin, plus de 2 200 parcs et jardins ouvriront leurs portes, parfois à titre exceptionnel, partout en France. Le jardin des Tuileries a vu grand en organisant “Jardins Jardin”. L’objectif : « faire découvrir le fleurisme et promouvoir la biodiversité », explique Violette Kerichard, membre de l’organisation de l’événement.

La nature au cœur de la capitale

Au programme : une centaine d’exposants présents pour discuter autour du thème du végétal.

On veut montrer qu’il peut y avoir de la nature en ville : présenter la biodiversité, montrer les différentes fleurs et plantes qui peuvent pousser sur les balcons… En somme : ré-apprivoiser la nature.. », détaille Violette Kerichard.

Mais parmi tous les jardins exposés, les participants se pressent pour en découvrir un en particulier… Le jardin éphémère de Chanel, qui présente les secrets de la fleur d’oranger, à travers des visites guidées et des ateliers.

Chanel ouvre ses portes et dévoile aux visiteurs les secrets de la fleur d’oranger. Adèle G

Le fleurisme tente de se faire connaître

D’autres acteurs du monde des jardins sont présents, notamment l’Ecole nationale des fleuristes. Créée en 1950, l’école espère bien attirer plus d’élèves dans ses rangs à la rentrée prochaine. “C’est vrai que les jeunes n’ont pas forcément le réflexe fleurisme”, avoue Dorian Garcia, membre de l’Union nationale des fleuristes. Pour lui, le métier doit se réinventer et tendre vers plus “d’éco-responsabilité”. Il ajoute : “On voit que c’est une problématique qui touche de plus en plus. Pendant la période du confinement, on a eu beaucoup de reconversions de personnes, qui voulaient un travail plus en accord avec leurs valeurs, et tourné vers le végétal« .

Cette préoccupation écologique se retrouve chez certains exposants. Emma Havot est venue présenter un abri à insectes à l’allure futuriste. L’objet, conçu par le designer Alexandre Hesteve à base de matériaux recyclés, se veut un îlot de biodiversité pour la faune et la flore. L’objectif : “abriter, nourrir et pourvoir en eau la faune et la flore sur un territoire donné”, explique Emma Havot.

Crédit : Adèle G

Si l’invention n’est pas encore extrêmement répandue, l’exposante espère qu’elle se démocratisera et concurrencera les hôtels à insectes. Des abris néfastes, selon elle, car ils constituent des plateformes d’échange de parasites entre les insectes et servent parfois de mangeoires pour les oiseaux. Une manière, pour elle, d’évoquer le problème plus large de l’extinction des insectes : “Il y a beaucoup de sensibilisation à faire. Les gens ne se rendent pas compte de la gravité que représente cette extinction qu’on est en train de vivre.

Adele G

Saint-Denis : la Pride des banlieues célèbre les fiertés des quartiers populaires

Ce samedi 3 juin aura lieu la troisième édition de la Pride des banlieues à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), une marche militante visant à mettre en avant les revendications des personnes LGBTQIA+ des quartiers populaires.

Samedi 3 juin, le cortège de la Pride des banlieues défilera dès 14h dans les rues de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis). Crédit : La Pride des banlieues/Twitter

« Placer les marges au centre des luttes ». Telle est la volonté du collectif de la Pride des banlieues, créé en 2019 par des membres de l’association Saint-Denis au centre. L’objectif : déconstruire le supposé obscurantisme des quartiers populaires face aux questions LGBTQIA+ et rendre visibles les personnes LGBTQIA+ des quartiers populaires, notamment de Seine-Saint-Denis. Il s’agit de porter les revendications propres à ces territoires afin de « dégager des solutions aux problématiques vécues par les habitants de Seine-Saint Denis de façon autodéterminée », a expliqué Mihena Alsharif, membre du comité d’organisation dans un billet de blog sur Mediapart.

Pour cause, dans les quartiers populaires, l’homophobie et la transphobie sont souvent couplés à d’autres discriminations et les personnes concernées ne se sentent pas toujours représentées dans la traditionnelle Marche des fiertés parisienne. « Lorsqu’on est LGBTQI+ en quartiers populaires, aux LGBTphobies viennent s’ajouter le racisme, la précarité et l’abandon des services publics. Nos revendications prennent donc en compte ces enjeux qui s’intersectionnent », détaille Yanis Khames, l’un des coordinateurs de la Pride des banlieues dans les pages du média Komitid.

Un accès élargi à la PMA, la revendication centrale en 2023

Après une première édition en 2019 et une seconde en 2022, centrée sur la question du logement pour les personnes LGBTQIA+ des quartiers populaires particulièrement touchées par le mal-logement, cette année la revendication mise en avant est celle de la PMA pour tous et toutes. En effet, malgré l’ouverture de la procréation médicalement assistée aux femmes seules et aux couples de femmes en 2021, les hommes trans, qui peuvent pourtant dans certains cas porter un enfant, en sont toujours exclus. Le collectif pointe aussi du doigt les inégalités face au droit à la PMA, notamment pour les personnes non-blanches, qui font face à des délais d’attente plus longs pour accéder à un don de gamètes en raison de l’obligation d’appariement.

Plusieurs personnalités publiques ont d’ores et déjà apporté leur soutien à l’évènement comme l’humoriste Tahnee, l’acteur et réalisateur Océan, ou encore l’actrice Adèle Haenel.

L’année dernière, 10 000 personnes avaient rejoint le cortège dans les rues de Saint-Denis, soit trois fois plus qu’en 2019. Suite à ce succès, le collectif d’organisation de la marche est devenu un mouvement actif tout au long de l’année. Dans cette optique, Yanis Khames, a écrit un livre, intitulé Les marges au centre de la lutte (Double ponctuation, 2023) qui est sorti en mai dernier. Dans celui-ci, il pose les bases théoriques et pratiques du mouvement, afin d’expliciter leur démarche.

Marie SCAGNI