Une étude sanitaire juge le glyphosate « moins cancérogène que la charcuterie »

 

Un rapport parlementaire sur le glyphosate, l’herbicide très contesté, sera présenté aux sénateurs jeudi. L’étude réalisée par l‘Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques fait déjà débat après les déclarations d Pierre Médevieille Vice-président de l’Office qui juge que rien ne peut prouver la dangerosité du glyphosate. De nombreuses personnalités politiques ont réagi à ces déclarations accusant le sénateur d’être de connivence avec les lobbies.
En France le Roundup, l’herbicide vendu par Mosanto, est interdit à la vente aux particuliers depuis le 1er janvier 2019. / Crédit : Global Justice Now – Flickr

« J’affirme que si le glyphosate a certainement beaucoup de défauts, aucune étude scientifique ne prouve formellement sa cancérogénicité ni en France, ni en Europe, ni dans le monde » c’est ce qu’a déclaré Pierre Médevielle lors d’un entretien dans le journal La Dépêche. Vice-président de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, le sénateur UDI réfute tout lien entre les cancers et l’herbicide.

Pendant quinze mois, des parlementaires dont Pierre Médevielle ont été chargés, par la commission des Affaires économiques de l’Assemblée nationale et la commission du Développement durable du Sénat, d’enquêter sur l’herbicide. Les conclusions de ce rapport seront officiellement présentées jeudi au Sénat. Mais Pierre Médevielle, rapporteur du rapport, affirme déjà que le glyphosate est « moins cancérogène que la charcuterie« . Pour lui, le « climat d’hystérie »  autour du produit est une « névrose française« .

Pour réaliser cette étude, les parlementaires ont auditionné l’INRA et le CNRS pour avoir un point de vue scientifique sur le sujet. Ils se sont basés sur des études menées par l’Agence européenne de sécurité alimentaire de Parme à Bruxelles, agence que le parlementaire considère comme la « plus performante en Europe et probablement au monde« .

Depuis 2015, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), une agence spécialisée de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), a classé le glyphosate comme « cancérogène probable« . Mais selon Pierre Médevielle,  le glyphosate n’est pas une priorité. Des produits utilisés notamment en viticulture seraient « beaucoup plus dangereux« .

Un rapport déjà très contesté

Les réactions ne se sont pas fait attendre lundi matin après les déclarations de Pierre Médevielle.  Pour José Bové, figure du mouvement altermondialiste,  cette étude ne peut pas être prise en compte car « le glyphosate ne s’analyse pas seul, mais avec ses adjuvants« . Le député européen pense qu’ « il serait intéressant d’aller plus loin pour savoir si les parlementaires ont été approchés« . Au micro de RTL, il déclare que les « parlementaires ont repris le discours prémâché de Monsanto » et il accuse le groupe d’être le réel auteur de ce rapport, « une fois de plus on a un enfumage XXL« .

 

Le député Matthieu Orphelin, ancien porte parole de la Fondation de la Nature et l’Homme, rejoint l’avis de José Bové et met en cause les lobbies.

« Vous ne lirez pas cela dans le rapport, » tempère Cédric Villani

Le député LREM, Cédric Villani, est lui aussi vice-président de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologique et « regrette que le sénateur Médevielle, en s’exprimant prématurément et sous une forme qui ne reflète pas le rapport, ait contribué à ajouter de l’huile sur le feu ». 

Invité sur franceInfo, le mathématicien a tenu à mettre les choses au clair. Il estime que les déclarations de Pierre Médevielle sont à prendre à titre personnel et n’engagent pas l’Office. « Sur la forme, il s’exprime avant la conférence de presse officielle, et sur le fond, il a parlé de certains éléments du rapport, mais y a ajouté son opinion propre, ses conclusions propres ».

Il explique que le but de ce rapport « est de dépassionner et d’expliquer la complexité, d’expliquer pourquoi le glyphosate fait couler tant d’encre. Il y a des pratiques hautement contestables de Monsanto à l’égard du glyphosate. Et évaluer de façon sérieuse la nocivité d’un produit, c’est un travail extrêmement compliqué. »

Depuis le 1er janvier, les particuliers ne peuvent plus acheter de Roundup, le pesticide de Monsanto qui appartient au groupe Bayer. Le gouvernement s’est engagé à interdire le glyphosate « dans ses principaux usages » d’ici 2021, et pour tous les usagers d’ici cinq ans.

Poutchie Gonzales