« C’est une menace pour le système ferroviaire », a assuré Elisabeth Borne sur Franceinfo. Pour la ministre chargée des Transports, la dette de la SNCF, qui s’élève aujourd’hui à près de 55 milliards d’euros, est une question urgente. D’où vient la dette ? Que compte faire le gouvernement? Éléments de réponses.
- Comment la dette de la SNCF est-elle répartie?
Pour comprendre comment cette dette est répartie, il faut d’abord connaître la structure de la compagnie ferroviaire. En 2015, la SNCF a été divisée en trois établissements publics à caractère industriel et commercial (Epic) : SNCF, qui prend en charge le pilotage du groupe, SNCF Mobilités, chargée de transports des voyageurs et des marchandises et SNCF Réseau, qui gère les infrastructures du réseau ferré.
Selon le « Rapport sur l’avenir du transport ferroviaire » de Jean-Cyril Spinetta, rendu en février dernier au Premier ministre Edouard Philippe, c’est SNCF Réseau qui « concentre l’essentiel du déficit annuel du système ferroviaire français », avec une dette de 46 milliards d’euros en 2017. SNCF Mobilités affiche une dette de près de 8 milliards d’euros, à quoi s’ajoute des frais financiers de 1,3 milliard d’euros.
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Pourquoi la dette de la SNCF est-elle aussi haute?
Depuis plusieurs décennies, la situation financière de la SNCF inquiète. Mais depuis 15 ans, la dette de la compagnie a bondi. Le rapport Spinetta précise que la dette de SNCF Réseau a augmenté de 15 milliards d’euros entre 2010 et 2016. Cette accélération est due en partie aux quatre projets de lignes à grande vitesse ( LGV Est vers Strasbourg, LGV Sud Europe Atlantique vers Bordeaux, LGV Bretagne-Pays de la Loire et le contournement de Nîmes et de Montpellier).
Par ailleurs, le mauvais état du réseau a conduit le groupe à doubler ses dépenses de rénovation. Elles atteignaient l’année dernière 2,6 milliards d’euros, selon le rapport Spinetta.
Enfin, les frais financiers augmentent en mesure que la dette gonfle. En 2016, les frais financiers de SNCF Réseau atteignaient 1,4 milliard d’euros.
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Que faire de la dette?
Le gouvernement n’a pas exclu la possibilité de reprendre à son compte une part de la dette de la SNCF, en échange de « contreparties », a précisé Edouard Philippe sur France Inter.
.@EPhilippePM : « Je ne veux pas prendre un engagement sur la dette alors que rien n’a changé dans le fonctionnement de la SNCF » #le79inter pic.twitter.com/ZvNJRJfms6
— France Inter (@franceinter) 5 avril 2018
Les syndicats de cheminots, eux, réclament une reprise intégrale de la dette par l’État. Mais cela ferait exploser le déficit public, explique Libération. « Si l’Etat reprend à son compte les 47 milliards d’euros de dette de SNCF Réseau, il devra assumer, l’année de l’opération, une hausse de son déficit public de 2,1 points de PIB. Soit un déficit public total qui doublerait, remontant à plus de 4 % cette année-là. La dette publique, elle, frôlerait alors les 100 % du PIB, sans même compter le déficit courant » explique le quotidien. La question de la dette reste donc à résoudre.
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Et ailleurs en Europe?
Du côté de l’Allemagne, l’ouverture à la concurrence a eu lieu en 1994. Le gouvernement a fusionné les deux entreprises ferroviaires existantes et a crée la Deutsche Bahn. Il reprend alors l’intégralité de la dette, soit 70 milliards de Deutsche Marks (environ 35 milliards d’euros). Près de 130 000 salariés sont licenciés. Aujourd’hui, la Deutsche Bahn est vue comme un « modèle » pour le gouvernement français. En 2017, les bénéfices de la compagnie s’élevaient à 2,2 milliards d’euros, et son chiffre d’affaires à 41 milliards d’euros. Mais la Deutsche Bahn est confrontée à une dette de 20 milliards d’euros.
Et ailleurs en Europe, certaines privatisations nuancent le modèle allemand. La France n’est peut-être pas la plus mal lotie. Au Royaume-Uni, par exemple, le rail est privatisé depuis 1994. Le gouvernement avait promis un service plus efficace et moins coûteux. Plus de vingt ans après, difficile de dire que le pari a été tenu. En 2017, la dette du Network rails atteignait 46,3 milliards de livres soit près de 53 milliards d’euros. Les voyageurs dénoncent des tarifs trop chers et des dysfonctionnements réguliers. Certains demandent même à renationaliser le réseau ferroviaire, à l’image de Jeremy Corbyn. Dans cette vidéo, le leader du parti Travailliste est assis sur le sol d’un train bondé. « Il n’y a pas assez de trains » explique Jeremy Corbyn, « et ils sont incroyablement chers« . « N’est-ce pas une bonne raison pour demander la nationalisation? »
Video de The Guardian
Constance Cabouret