Jeunes handicapés: un chômage à 30%

pôle emploiEn France, seule une personne handicapée sur trois travaille et ce malgré la loi obligeant chaque entreprise de vingt salariés ou plus d’engager au moins 6% de personnes en situation de handicap. L’insertion professionnelle des handicapés se fait difficilement, en particulier pour les jeunes. Tour d’horizon.

Source: Insee, enquête Emploi 2015

Alors que la semaine européenne pour l’emploi des personnes handicapées s’est achevée il y a quelques jours à Paris, leur situation sur le marché du travail reste préoccupante. Selon les données de l’Insee de 2015 concernant les handicapés bénéficiant d’une reconnaissance administrative*, en France, seulement 43% de ces personnes sont actives : en emploi ou au chômage. Ces chiffres sont en décalage avec les réalités de l’ensemble de la population, dont 72% est active et dont le taux de chômage s’élève à 10%. C’est presque deux fois moins que pour les personnes handicapées.


Source: Insee, enquête Emploi 2015

L’insertion professionnelle des personnes en situation de handicap se fait tard, 46% réussissent à rentrer dans le monde du travail ayant 50 ans ou plus, contre 23% pour l’ensemble de la population. La situation des jeunes handicapées est particulièrement difficile. Seulement 25% des personnes en situation de handicap âgées entre 15 et 24 ans sont actives, tout en faisant des études plus courtes que l’ensemble de la population française. Leur taux de chômage avoisine les 30% et seulement 17% ont un emploi. Parmi toutes les personnes handicapées qui travaillent, 3% à peine ont moins de 25 ans.


Source: Insee, enquête Emploi 2015

Pour aider les personnes handicapées à s’insérer dans l’emploi, la loi du 11 février 2005 oblige toutes les entreprises de plus de vingt salariés à employer au moins 6% de personnes handicapées. Les sociétés ne respectant pas cette obligation doivent verser une contribution à l’Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph). En 2014, l’action de l’association a permis d’insérer 74 795 personnes handicapées dans l’emploi. Un chiffre en légère hausse par rapport à l’année précédente, mais loin d’être suffisant.


* Reconnaissance administrative de l’handicap : elle ouvre potentiellement droit au bénéfice de l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés. C’est sur cette catégorie de la population que se font les études statistiques concernant le handicap. Elle englobe les personnes atteintes de handicaps physiques et mentaux.

Malgo Nieziolek

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Alexis, le sport et le deal (4/4)

Alexis passe le plus clair de son temps chez lui.
Alexis passe le plus clair de son temps chez lui.

Se sentant délaissés, certains jeunes tombent dans l’exercice d’une activité illégale, comme Alexis, 21 ans, originaire de la banlieue parisienne. 

Alexis T. sort de la salle de sport devant laquelle il a fixé le rendez-vous en plein milieu d’après-midi. Cette salle, il y va cinq à sept heures par semaine depuis plusieurs années. La musculation a transformé son corps, notamment ses bras, qui contrastent désormais avec sa petite taille. Ses cheveux blonds et ses yeux bleus clairs lui donnent un air juvénile. Seul le collier de barbe qu’il arbore permet de lui attribuer son âge ; 21 ans. S’il est disponible à cette période de la journée, c’est parce que Alexis T. est un NEET. Il est sorti du système scolaire, et n’a pas non plus d’emploi.

Sur le trajet pour retourner chez lui, il croise plusieurs connaissances. Entre deux poignées de main, il explique les raisons de son décrochage scolaire. « Quand j’étais au lycée, mon frère battait ma mère. Je le battais pour la défendre, et cela avait un impact énorme sur ma scolarité. Je suis allé dans onze lycées différents, de l’internat privé catholique au lycée de ZEP ». Il arrête finalement les cours en début de première, à l’âge de seize ans. Il est ensuite placé en foyer, avant de prendre son envol, et son premier logement, au lendemain de son dix-huitième anniversaire.

Aujourd’hui, il habite dans un appartement en proche banlieue parisienne. Le loyer est payé par sa mère. C’est d’ailleurs le seul élément qui le lie encore à elle. « Si je ne dépendais pas financièrement d’elle pour avoir un logement, je ne prendrais plus aucune nouvelle », lance-t-il.

Dans son appartement, les vestiges de soirées antérieures sont encore présents sur la table. Le lit est défait, la vaisselle sale s’entasse. L’appartement est pourtant moderne et bien entretenu, à l’exception d’un mur, qui semble avoir été roué de coups. « C’est ce qui arrive quand je vais pas à la salle », commente Alexis. Les événements survenus à l’adolescence le poursuivent encore aujourd’hui. Il souffre d’un léger état de stress post-traumatique, qui le pousse à rester de plus en plus chez lui.

Assis sur son canapé, une cigarette à la main, il explique comment il subvient à ses besoins financiers mensuels. Sa mère lui paye son loyer, certes, mais aucun frais annexe. Et cela ne le dérange pas. « Qu’est ce qu’on appelle vivre ? T’as besoin de manger, dormir, et de faire quelque chose qui te rend heureux. Moi c’est la salle de sport ». Au moment d’emménager seul, il a calculé que ces dépenses s’élevaient à 250 euros par mois. Une somme facile à avoir selon lui, en témoignent les sachets de drogue qui jonchent la table basse. « Moi j’ai jamais touché à ces merdes là. À l’inverse, j’aide les gens qui les cherchent. Je les rapproche les gens qui font des grosses ventes, et eux ça les dérange pas de me passer cent balles en échange ».

Comme d’autres NEET, Alexis T. a choisi le deal, parfois plus simple d’accès que le marché du travail qu’il ne veut pas intégrer, faute de valeurs morales selon lui. “Humainement, le travail c’est pas fait pour moi. J’ai vu des personnes se faire détruire à cause de conneries comme le racisme ou autre. Les inégalités seront toujours là, et on peut rien y changer”, précise-t-il. Travailler au sein d’une association, aider les autres, lui plairait, mais il calque le modèle associatif au monde du travail, et considère que son travail serait vain.

Une chose est pourtant certaine, Alexis T. veut quitter Paris sur le long terme, mais à part cela, il n’a “aucune perspective d’avenir” et ne se voit nulle part dans dix ans.

L’ensemble du dossier à retrouver ici :

Les NEET, une catégorie sociale qui inquiètent les pouvoirs publics (1/4)

À Bagneux, donner une seconde chance aux NEET (2/4)

Le risque pour les NEET : basculer dans la pauvreté et l’exclusion (3/4)

Aline BOTTIN

Les NEET, une catégorie sociale qui inquiète les pouvoirs publics (1/4)

Jeune homme ivre sans-abri. CC0 Domaine public Gratuit pour usage personnel et commercial
En France, près de 30 000 jeunes NEET vivraient à la rue. Image libre de droit

Des jeunes perdus, exclus, à l’avenir incertain. Ils seraient très nombreux en France, près de deux millions. Mais leurs situations commencent seulement à être connues et leur détresse, prise en compte.  

En France, ils seraient près de 1,8 million à être hors-système. On les appelle les NEET (de l’anglais, Not in Employement, Education nor Training). Ils ne sont plus scolarisés, ni en éducation et pas non plus en emploi. Cette catégorie statistique, créée après la crise de 2008, représente 17% des jeunes de 15 à 29 ans en France.

D’après un rapport de France Stratégie datant de janvier 2017, les NEET sont généralement majeurs et plutôt issus de zone rurale. 24,4 % des 18-24 ans y vivent, contre 20,8 % en zone urbaine. Si 3% des 15-17 ans sont des NEET, la proportion monte à 16% pour les 18-24 ans et 20% pour les 25-29 ans. Parfois peu aidés de leurs parents, selon ce même rapport, ils seraient 190.000 à passer sous les radars institutionnels et privés de tout soutien familial. 30.000 d’entre eux vivraient même à la rue.

Il est cependant très difficile de cerner la variété des situations. “S’ils partagent des difficultés spécifiques, comme une plus grande exposition aux fluctuations économiques, les jeunes sont loin de former un groupe homogène”, précise le rapport.

Être NEET a de grave conséquences sur l’individu, la société, et l’économie

Dans un rapport de 2012, la Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail (Eurofound) pointe du doigt l’effet d’une telle situation sur les jeunes européens. L’étude révèle qu’être NEET a de grave conséquences sur l’individu, la société, et l’économie. Sont notamment mentionnés “ une plus grande distance avec le système de protection sociale (beaucoup fondé en France sur le statut de travailleur), une relégation future dans des emplois précaires, la délinquance, ou encore des troubles physiques ou mentaux”. Le rapport européen signale aussi les NEET sont plus exposés au risque “d’aliénation politique (tentation des extrêmes) ou sociale (assistanat)”.

Depuis 2014, les Etats-membres de l’Union européenne ont lancé la Priorité jeunesse en Europe, qui vise à encourager l’emploi des jeunes. Sur la période 2014-2020, le Fond social européen (FSE) s’est d’ailleurs engagé à investir au moins 6,3 milliards € pour soutenir l’intégration des jeunes dans le marché du travail.

Julien PERCHERON

L’ensemble du dossier à retrouver ici :

À Bagneux, donner une seconde chance aux NEET (2/4)

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Alexis, le sport et le deal (4/4)