Aujourd’hui, être connecté rime avec smartphone. Les sites internet de la santé l’ont compris et lancent , les uns après les autres, leurs versions mobiles.
Les applications mobiles permettent de contrôler de nombreux éléments sur sa santé : rythme cardiaque, taux de diabète, de cholestérol etc… Souvent liés à des objets connectés comme la montre de Google, ou Samsung, ou encore la balance de Withings, les applications contrôlent la santé 24/24h, 7/7j.
La balance Withings est un gadget, que certains médecins considèrent comme relevant du bien-être pour le plupart des utilisations. Ces balances connectées permettent de connaître son taux de masse graisseuse, de masse osseuse, la quantité d’eau dans le corps etc… Quasiment tout l’intérieur de votre corps vous est accessible. Jean-Michel Cohen, généraliste à Lille reste sceptique. « Les patients que ces balances pourraient aider comme les victimes d’anorexie ou de surpoids ne l’utilisent pas systématiquement. » Pour le spécialiste, la balance connectée pourrait même devenir dangereuse. « La plupart des malades d’anorexie comptent chaque calorie avalée. Or lorsqu’une balance indique non seulement le poids, mais aussi la masse graisseuse d’une personne, certains malades pourraient vouloir atteindre le taux 0 ! »
Pourtant, toutes les applications et leurs objets connectés ne sont pas à jeter « loin de là », sourie le médecin. Et pour Guillaume Marchand, ces innovations peuvent même « sauver des vies ! » s’exclame -t-il. Cet auto-entrepreneur de DMD santé, qui note le sérieux de ces applications, pense notamment aux applications pour les cancéreux en rémission. En cours de création par Fabrice Denis, cancérologue à la clinique Victor Hugo, l’application permettrait de prévenir les malades du cancer du poumon de rechutes éventuelles et de les traiter le plus rapidement possible.
Il existe déjà de nombreuses applications aidant les malades à vivre au jour le jour avec leur maladie, comme Diabphone, qui permet d’enregistrer le programme de chimio, les traitements ainsi que les effets secondaires ressentis. Si les applications ne soignent pas, elles se placent en véritable accompagnateur des patients dans leur maladies.
L’autisme évoquant immédiatement une maladie infantile, on oublie qu’à l’âge adulte, les hommes et femmes atteints de cette pathologie se retrouvent très souvent exclus du monde de l’emploi. Mais certaines structures leur proposent d’exercer une activité quotidienne et rémunérée.
Aux Colombages, il y a des autistes qui ne sont ni malades ni patients. Ce sont des travailleurs. Cet établissement du 14ème arrondissement de Paris, gérée par l’Association française de gestion des structures pour personnes autistes est divisé en trois unités : un centre d’accueil de jour (CAJ), un centre d’accueil de jours médicalisé (CAJM), et enfin un établissement et service d’aide par le travail (ESAT). C’est dans ce dernier pôle que quarante adultes à qui l’on a diagnostiqué des troubles autistiques se retrouvent chaque jour pour exercer une activité professionnelle. Les Colombages leur proposent quatre ateliers : une section jardinage et espaces verts, le travail du bois et la fabrication de meubles, la restauration et la gestion des services de cantine au sein de l’établissement, et enfin le conditionnement avec la mise en place d’une chaîne de fabrication de petits objets, pour des prestataires extérieurs. C’est dans ce dernier atelier que le plus de travailleurs se sentent à l’aise. Ce vendredi 10 avril, ils sont une vingtaine à fabriquer des bracelets pour un bijoutier du Marais, client régulier. Du découpage des fils à l’emballage, les travailleurs s’occupent de toutes les étapes de la production, sous les indications de Flora Join-Lambert, leur « monitrice ». La scène donne l’impression d’être plongé dans une salle de classe, mais si Flora sait et doit se montrer ferme, elle ne rentre jamais dans la peau d’une enseignante ni ne se place au-dessus de ses travailleurs. Elle les vouvoie toujours, même lorsqu’ils la tutoient. Elle préfère demander plutôt que d’ordonner, et laisse à ses ouvriers une autonomie totale une fois leur tâche assignée.
40 travailleurs, 40 pathologies différentes mais pas tout à fait 40 autistes
Mais le vrai défi pour la jeune femme de 34 ans n’est pas seulement de s’occuper d’une vingtaine d’adultes toute seule, mais plutôt de savoir s’adapter à chacun d’entre eux. Car l’ESAT des Colombages est la parfaite illustration des déclinaisons de l’autisme, il n’y a pas deux travailleurs qui présentent exactement les même besoins, ni les même symptômes. A bien y réfléchir, tous les autistes présent dans l’atelier n’ont qu’un seul point commun : une politesse presque surnaturelle. Lorsque l’un des travailleurs se présente à vous, il vous parle avec un respect qui semble répété. Comme si il ou elle avait appris une leçon qu’il vous récitait. « En revanche on a un vrai problème, c’est que certains ne sont pas autistes, vous verrez », prévient la directrice du centre Charlotte Bonaldi. Du haut de sa quarantaine elle a déjà vécu plusieurs vies. Elle a pris soin d’enfants dans les rues au Brésil, a travaillé à la prison de Fleury-Mérogis, et s’est occupée d’un foyer pour jeune fugueurs dans le 15ème arrondissement de la capitale, entre autres. Mais dans chacune de ces aventures, la directrice a traîné une énergie et une présence impressionnante, renforcée par une vraie stature, ainsi qu’une allergie à la langue de bois. « C’est vraiment n’importe quoi parfois, on a des erreurs d’aiguillage, et ça ne devrait pas se passer comme ça ! », renchérit-elle.
Shanga et Benjamin, les deux faces d’une même pièce
Shanga lui, est bien autiste. Il a beaucoup de mal à s’exprimer, et doit composer avec un léger retard mental. Mais il se présente toujours en serrant les mains, demande s’il peut vous adresser la parole, et une fois lancé ne s’arrête plus. Il se pose des questions sur une possible réélection de Nicolas Sarkozy en 2017 et se demande si les gens veulent encore voter pour lui. Il estime que François Hollande quittera l’Elysée dans deux ans pour ne pas y revenir. Si l’autiste a un monde bien à lui, il vit également pleinement dans le nôtre. En général les travailleurs présentent comme Shanga des formes d’autisme assez sévères. Benjamin, lui, fait partie de ceux que l’on appelle « autistes de haut niveau ». Nombreux sont les politiciens qui envieraient sa diction, et les orateurs qui envieraient son langage. Le seul indice de son autisme ? Il est capable de nommer les treize plus grandes fauconneries de France et de vous décrire toutes les pièces d’une animalerie qu’il a visitée étant enfant -avec l’ensemble des règles de sécurité prononcées par le guide- le tout en moins d’une minute.
Un manque d’effectifs criant
Mais parfois les choses dérapent. Contrairement aux idées préconçues, les autistes ne manquent pas d’émotion. Bien au contraire, ils les ressentent parfois avec une telle force qu’ils explosent. Comme lorsque Shanga coupe la parole à l’un de ses collègues, et que celui-ci réagit en hurlant à en faire trembler les murs. Sans jamais qu’elle le pousse à la violence physique, on sent chez l’homme une rage qu’il ne peut pas contrôler. Après quelques minutes de discussion avec lui, il ressort qu’il regrette pleinement et sincèrement sa furie, mais elle le dominera pendant encore une bonne vingtaine de minutes. Puis c’est l’effet domino. Un esclandre éclate, dans l’atelier menuiserie, puis encore un autre chez les bijoutiers du jour, amenant Shanga à frapper une table de sa jambe jusqu’à en saigner légèrement. A son tour, après quelques minutes de répit, le jeune homme vient s’excuser de lui-même pour son attitude. Son comportement, comme celui de son collègue, n’a rien d’infantile, et il serait dangereux de les y réduire. Pendant ce temps-là l’équipe d’encadrement, dont le manque effectif devient criant dans une situation comme celle-ci, arrive tant bien que mal à apaiser tout le monde sans se laisser déborder.
Le travail ne guérira jamais l’autisme, mais les Colombages fournissent un véritable cadre à leurs travailleurs, pour vivre une vie au-delà de leur handicap. Et son modèle mérite clairement d’être décliné. Mais comme toutes les formes d’accompagnement d’autisme en France, celle-ci manque de moyens humains. L’animatrice en est d’ailleurs consciente : « j’ai entre 20 et 25 travailleurs à chaque atelier. C’est trop. »
Les rapports entre forces de l’ordre et ce que l’on a nommé « les cités » ont une part très importante dans la vie sociale et politique française. Ils ont longtemps été les symboles des fractures entre plusieurs franges de la société. Préjugés, défiance, violences mutuelles, la vie de la banlieue et des forces de police est parsemée de nombreux obstacles. Ce, surtout depuis les émeutes de 2005, qui ont été l’apogée de cette tension, latente, et qui prend alors une dimension concrète très forte. Néanmoins, dans les faits, cette rivalité semble s’être apaisée, une dizaine d’années plus tard. Qu’en est-il réellement ? Enquête pour tenter d’y voir un peu plus clair.
À Clichy-sous-Bois, les stigmates des quatre jours d’émeutes, en octobre et novembre 2005 sont encore visibles. Sur une place de parking, dans le cité du Chêne Pointu, foyer des affrontements entre forces de l’ordre et émeutiers, les résidus calcinés d’une probable voiture brûlée sont toujours présents. À une centaine de mètres de là, dans la cage d’escalier d’un immeuble insalubre et déserté, l’odeur de brûlé se mêle à celle de l’urine, comme pour rappeler qu’ici, l’amertume du présent se superpose aux flammes du passé.
C’était il y a un peu moins de dix ans, le 27 octobre 2005. Deux jeunes, Zyed Benna et Bouna Traoré, aux prénoms devenus tristement célèbres et qui demeurent taggés sur le crépis de certains immeubles, meurent électrocutés dans un transformateur EDF, à Clichy-sous-Bois, en Seine-saint-Denis.
L’indignation, à Clichy-sous-Bois, prend rapidement un tour violent. Des mouvements spontanés, dans les rues de la ville, au départ situés dans la cité du Chêne Pointu, tout près du collège Robert Doisneau où les deux victimes étaient scolarisées, ont lieu dès le soir du 27 octobre. Les émeutes font très rapidement feu de paille. Une vingtaine de villes connaissent des émeutes, jusqu’à la mi-novembre. Le 8 novembre, le Président de la République d’alors, Jacques Chirac, décrète l’état d’urgence.
Si tout a commencé à Clichy-sous-Bois c’est parce que cette ville est le véritable épicentre, point de départ d’émeutes qui ont embrasé une bonne partie de l’est de la région parisienne. La ville symbolise les dysfonctionnement de la banlieue, d’une manière générale : chômage de masse, quartiers enclavés, violence et problématiques liées au trafic de drogue …«Certaines banlieues ont leur propre police, c’est très compliqué d’intervenir dans ce cadre », explique Christophe Crépin.
Pendant les dix ans qui ont séparé les faits et le procès, la tension entre forces de l’ordre et banlieues s’est détendue. Dans les faits, force est de constater que les affrontements physiques entre les deux parties sont beaucoup moins nombreux, depuis la fin de l’année 2005. : « Aujourd’hui, il n’y a certes plus d’émeutes, mais ça ne veut pas dire que la violence n’est plus là », lâche Mehdi, 26 ans, et habitant de banlieue parisienne depuis sa naissance. « Provocation et humiliation, voilà comment ça se passe en banlieue ! C’est d’une violence inouïe et c’est quasiment à chaque contrôle », s’insurge Bryan, 23 ans, dont 18 passés en banlieue.
Un tissu associatif plein de bonne volonté
Aux lendemains des émeutes, associations et syndicats ont mis en branle un certain nombre de projets, pour éviter que ce genre d’événements tragiques ne se répètent. C’est, notamment, le cas de l’association AC Le Feu (Association collectif Liberté, Egalité, Fraternité, ensemble unis), fondée quelques jours après le 27 octobre 2005, à Clichy-sous-Bois. « Nous voulions redonner la parole aux habitants des banlieues, pour lutter contre certains clichés ambiants. Il nous fallait répondre autrement que par des voitures brûlées », explique son co-fondateur, Mehdi Bigaderne. Volonté d’apaisement, donc. Dimension nationale, aussi. L’une des premières actions de ce collectif, qui réunit aujourd’hui une quarantaine de membres permanents, fût de lancer des cahiers de doléances, dans toute la France. L’objectif affiché par le collectif était de répondre à l’affirmation de Nicolas Sarkozy, alors Ministre de l’Intérieur, pour qui « la priorité des Français [était] la sécurité ». « Dans nos cahiers de doléances, rappel évident de l’histoire de France, nous avons constaté que les problématiques de l’emploi et du logement revenaient avant toute chose. Nous les avons déposé au Sénat. Nous voulions marquer le coup, et montrer que nous étions des Français à part entière, et non pas des Français entièrement à part », ajoute Medhi Bigaderne.
En somme, l’idée portée par ce collectif, mais aussi par d’autres, tels que Banlieue +, ou le Bondy Blog, est de renouer le dialogue entre la jeunesse des banlieues, Clichy-sous-Bois au premier chef, et les forces de polices, de l’État. À Clichy-sous-Bois, laboratoire associatif révélant de l’ensemble des mesures nationales, l’association Au-delà des Mots a pour vocation de soutenir les proches de Zyed et Bouna, tant financièrement que moralement, tout en favorisant le dialogue avec les forces de l’ordre. C’est ce qu’affirme Medhi Bigarderne, aussi membre d’ADM (Au-delà des Mots) : « L’action de notre commissaire est volontariste, mais pas suffisante. Il ne faut pas oublier que les problématiques entre police et population ne s’arrêtent pas aux banlieues parisiennes, et même pas aux banlieues en général. Il faut élargir le champ, réfléchir de manière globale».
Une police qui revoie ses principes fondamentaux
De leur côté, les syndicats de policiers ne sont pas en reste. Christophe Crépin est gardien de la paix depuis une trentaine d’années, et travaille pour l’Unsa (Union nationale des syndicats autonomes), le premier syndicat de policiers de France. Pour lui, après les affrontements de 2005, la police a fortement remis en cause ses fondamentaux. « Pendant un certain temps, nous avons mis de côté la formation des jeunes policiers, par manque d’effectifs. Mais aujourd’hui, nous avons système de formation permanente et adaptée à la situation », estime-t-il. Pour lui, cette refonte du système de formation était absolument nécessaire, et vitale pour la sécurité des quartiers sensibles. Il salue le fait, croissant, que les jeunes de banlieue entrent de plus en plus dans la police nationale. « La fonction de policier ne peut que s’enrichir de cette mixité. On retrouve de plus en plus d’hommes et de femmes issus de toutes les formes d’immigration, et d’origine sociale », ajoute Christophe Crépin. Même si, pour lui, la solution pour apaiser le climat entre la banlieue, et les forces de l’ordre, ne peut relever que d’une politique nationale et sur le long terme. « Il faut que tous les acteurs sociaux travaillent main dans la main. Certains endroits devraient être rasés, pour tout reconstruire. La police ne peut pas épancher tous les maux de la société, ce n’est pas possible. Il faut repenser la politique de la ville », affirme-t-il, avec force.
Les associations et la police sont-elles donc prêtes à travailler ensemble, pour pacifier leurs relations, et éviter que des événements tels que ceux de 2005 ne se reproduisent ? Derrière ce volontarisme affiché, une réalité plus complexe semble émerger. En effet, chaque partie se renvoie la balle, comme pour affirmer que les efforts consentis par l’autre ne sont pas suffisants. « Il faut faire attention à ne pas se faire manipuler par certaines associations », estime Christophe Crépin. Comme en échos, Mehdi Bigaderne affirme que « les syndicats de police ont fait pression sur les pouvoirs publics, pour que les choses ne s’améliorent pas. Dans les faits, rien n’a changé, les scandales récents le démontrent ».
Une défiance persistante
Si associations et pouvoirs publics ont souhaité jouer la carte de l’apaisement, les tensions, elles, demeurent « Les contrôles d’identité sont systématiques. Rien n’a changé ! Ce sont toujours les mêmes qui se font contrôler », ajoute-t-il. Un sentiment que partage Sihame Assbague, porte-parole du collectif Stop contre le contrôle au faciès : « S’imaginer que que tout va bien dans le meilleur des mondes est une bêtise ! Il reste beaucoup de choses à faire, notamment continuer le combat contre le contrôle au faciès qui, je le rappelle, est illégal. Ce que je constate, dans les faits, c’est que cette méthode est encore très largement répandue ». Didier Lapeyronnie, sociologue spécialiste des banlieues, va dans le même sens : « Je pense que la politique du chiffre, imposée par le ministère de l’Intérieur ne permet pas l’instauration d’un climat de confiance. Les policiers sont stressés par cette politique, et les jeunes frustrés d’être toujours pris pour cible ». Cette mise sous pression mutuelle des deux parties, dans les quartiers sensibles serait donc au cœur du climat de défiance persistant.
Christophe Crépin, représentant de l’Unsa, réfute cette primauté de la politique du chiffre : « Nous ne sommes pas là pour faire des statistiques. Nous n’avons pas de quotas, on ne chiffre plus comme avant. Mais, même s’il n’y a pas marqué « terroriste » sur les visages, il faut quand même savoir que, sous couvert du procureur de la République, on contrôle un certain profil, un certain type de personnes ». Force est de constater que policiers et monde des banlieues se renvoient la balle en permanence. Certaines initiatives nationales voire internationales essaient de sortir de cette impasse.
Une police au dessus des lois ?
« Cela fait des années que nous exprimons nos préoccupations concernant les allégations de violation des droits humains par les forces de l’ordre françaises, notamment dans les banlieues où les victimes n’obtiennent jamais réparation », affirme Aurélie Chatelard, membre d’Amnesty International. Cet ONG a publié un rapport choc, en 2009, intitulé Les Policiers au dessus des lois. Elle pointe du doigt le fait qu’aucun chiffre officiel du nombre de personnes tuées par la police n’existe. C’est l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales, créé en 2003, par Nicolas Sarkozy qui comptabilise les violences, mais seulement sur les forces de l’ordre. « Pourquoi n’y-a-t-il pas un organisme indépendant chargé de répertorier les allégations de violence policière ? Ceci est une grave anomalie démocratique », s’emporte Aurélie Chatelard.
Aujourd’hui, dix ans après une série d’émeutes qui ont mis la banlieue française à feu et à sang, les actes violents entre forces de l’ordre et banlieusards sont en voie de disparition. Néanmoins, le climat tendu entre eux n’est guère apaisé. Certaines initiatives locales tentent d’apaiser ce climat délétère. Mais sans politique globale, la plus large possible, réclamée par les deux parties, cette tension ne semble pas prête de disparaître.
Le procès de Clichy-sous-Bois, prisme d’une problématique nationale
Dix années après, le procès des deux policiers, Stéphanie Klein et Sébastien Gaillemain, inculpés pour « non assistance à personnes en danger», s’est ouvert, le 16 mars dernier, à Rennes. La procureure de la République, Delphine Dewailly, prône la relaxe pour les deux gardiens de le paix. Et lorsque le jugement sera officiel, les familles des victimes ne pourront plus faire appel, concernant les infractions pénales, commises par les forces de l’ordre, lors de la mort de Zyed Benna et Bouna Traoré.
L’avocat des familles des victimes a bien mesuré l’enjeu national de ce procès, Me Mignard : « Cette situation absurde illustre l’apartheid mesquin qui régit les rapports sociaux dans ces cités où deux mondes vivent séparément et s’ignorent ». Il reprend à son compte le mot de l’actuel Premier Ministre, Manuel Valls, qui décrivait la situation entre les banlieues et le reste du territoire.
La tenue de ce procès à plus de 300 kilomètres des évènements est aussi la preuve qu’il revêt un caractère national. Peut-être aussi parce qu’il s’agit du seul procès inculpant les forces de police, par rapport aux émeutes de 2005, ce procès est scruté par les médias de tout le pays. Une chose est sûre, le verdict, rendu le 18 mai prochain sera un signal fort envoyé à ceux qui, en banlieue ou dans les commissariats de police, attendent des mesures « venues d’en haut », pour décanter une situation qui semble immuable depuis plusieurs décennies …
« Quand on entend le mot autisme, au début, on y croit pas ». Ce moment, Sylvie Philippon l’a vécu, trois fois. Ces enfants, Mathéo 9 ans, Lenzo 7 ans et Louna, 5 ans, sont tous atteints par la maladie. L’attente, les aller-retours à l’hôpital, l’incompréhension des médecins, l’impatience et la nécessité d’aller s’informer soit même, la maman âgée de 43 ans connaît ça par coeur.
Le poids de la culpabilité
Dès leur plus jeune âge, Mathéo et Lenzo ont été des enfants difficiles. Ils avaient du mal à se nourrir, dormaient très mal et pleuraient beaucoup. De psychologues en psychologues, Sylvie Philippon et son mari n’entendait qu’un seul discours : et si c’était eux, parents, qui avaient mal fait les choses, et si leur relation avec leurs enfants ne fonctionnait pas bien ? Sylvie en garde un souvenir blessant : « On nous en a fait porter la responsabilité, on nous a culpabilisés « .
Une vie professionnelle sacrifiée
Alors qu’ils étaient déjà débordés par deux garçons, la petite Louna pointe son nez. Bébé, elle aussi pleure beaucoup et fait de nombreuses crises. Alors que Louna a 18 mois, Sylvie et son mari s’alarment, elle ne parle pas, ne dit ni papa, ni maman. « Même lorsqu’elle se réveillait, elle ne nous appelait pas ». Louna se fait diagnostiquer autiste très vite, en septembre 2011. Au travers de livres, de rencontres, de groupe de soutien entre parents sur facebook et de formation parentale à l’hôpital, Sylvie acquière des connaissances sur l’autisme. Le comportement de ses deux fils l’inquiète, elle se met en tête de leur faire eux aussi diagnostiquer. En juillet 2013, le mot « autisme » revient pour Lenzo. Un an après, Mathéo est lui diagnostiqué autiste asperger. Très vite, concilier vies professionnelle et familiale devient impossible. Dès 2011, lorsque Louna a été diagnostiquée, Sylvie a pris un congé de présence parentale pour enfant handicapé. En 2014, elle décide de quitter définitivement son poste à la Chambre de commerce pour se consacrer à ses enfants. De son côté, le mari de Sylvie continue de travailler dans son entreprise de matériel médical. Entre eux, les dissensions se font parfois entendre. « Mon mari pense qu’il ne faut pas trop en parler, pour ne pas leur coller une étiquette. Moi je suis pour la transparence. Je le fais aussi pour eux : ils ont le droit de savoir ce qu’ils ont ».
Un manque de solution
Mathéo, Enzo et Louna sont scolarisés trois jours par semaine dans une école privée Montessori, spécialisée dans l’éducation sensorielle. Cela laisse le temps à Sylvie de mettre à profit son énergieet son dynamisme en s’investissant dans le milieu associatif. «J’essaie comme je peux de défendre la cause de l’autisme, j’apporte ma petite pierre à l’édifice». Mais financièrement, l’école privée et l’accompagnement de ses enfants par de nombreux spécialistes coûte cher. «Bien sur, on aurait pu scolariser nos enfants dans des écoles publiques. Ils auraient été suivis par des AVS ( auxiliaire de vie scolaire ). Mais ils ne connaissent pas tous très bien l’autisme et peuvent changer d’une année sur l’autre. Nous avons trouvé le suivi en école Montessori plus adapté». Ce qui inquiète le plus Sylvie, c’est l’après. Où iront ces enfants au collège ? Pour Mathéo, le problème va bientôt se poser. Autiste asperger, il rencontre des difficultés de sociabilisation mais n’a ni problème moteur, ni de problème linguistique. Il se trouve dans un entre deux, les IME ( institut médico-social) accueillent souvent des cas beaucoup plus sévères d’autismes. Cependant, la maman estime qu’un collège traditionnel risque d’être une expérience trop difficile pour lui. » Pour le moment, je n’ai pas de solution« .
La photographe Juliette Busch, étudiante à l’école des Gobelins, a rencontré la famille de Sylvie Philippon. Elle témoigne de son expérience au travers de ses photos.