Colère des scientifiques contre les coupes budgétaires dans la recherche

Une tribune signée par huit scientifiques de renom déplore un projet de coupes budgétaires pour la recherche. La communauté scientifique est en émoi.

Sept prix Nobel et une médaille Fields dénoncent dans une tribune publiée dans le Monde des coupes budgétaires dans la recherche. Présenté en commission des finances de l’Assemblée Nationale mercredi 18 mai, un projet de décret vise à supprimer une enveloppe budgétaire de 265 millions d’euros pour  la recherche et l’enseignement supérieur.

Mais ce matin encore, François Hollande invité sur France Culture, a assuré que l’action en recherche & développement restait une priorité.

Les principaux organismes de recherche sont particulièrement touchés comme le Commissariat à l’énergie atomique (CEA), le Centre national pour la recherche scientifique (CNRS) l’Institut national de la recherche agronomique (INRA) ou encore  l’Institut national de recherche en informatique et en automatique (Inria) pour une annulation globale de 134 millions d’euros. Selon Martine Cohen-Salmon, chargée de recherche au CNRS en biologie, c’est un coup dur « une baisse de budget c’est une baisse de niveau de recrutement .»

Le budget du CNRS de plus de 3 milliards d’euros est constitué de 2,1 milliards de masse salariale. Cette annonce nourrit ainsi des inquiétudes sur l’avenir du centre de recherche: « le niveau de recrutement des jeunes chercheurs est déjà catastrophique. Seuls un ou deux postes sont créés chaque année en premier grade, explique-t-elle, or les candidats ont un niveau équivalent au poste de directeur de recherche.»


une baisse de budget c’est une baisse de niveau de recrutement


Un phénomène à l’effet boule de neige « il y a moins d’étudiants aujourd’hui en biologie car il n’y a plus de débouchés, analyse Martine Cohen-Salmon, et c’est compréhensible, pourquoi s’engager dans une voie de garage! » Une menace de décrochage de la recherche en France amplifiée par la mondialisation de la concurrence « la plupart partent en tant que post doctorant à l’étranger où ils sont embauchés.  C’est d’autant plus avantageux pour les centres de recherche étrangers qui recrutent des chercheurs déjà formés. »

L’ANR n’a financé que 8% des projets en 2015

La ministre de l’Education Najat Vallaud-Belkacem et son secrétaire d’Etat Thierry Mandon, ont assuré via un communiqué que ces suppressions de crédits visent à « mobiliser en particulier leurs fonds de roulement disponibles et leurs trésoreries. Mais pour le CNRS cet argument n’est pas valable « un projet en biologie expérimentale et une étude en Histoire n’impliquent pas les mêmes moyens. »

Depuis 2005, l’Agence nationale de la recherche (l’ANR) créé pour remplacer deux dispositifs de financement, le fonds national pour la science (FNS) et le fonds pour la recherche technologique (FRT), est l’unique fonds public qui décide les budgets. Mais en 2015, seuls 8% des projets déposés par des chercheurs français ont été acceptés par l’ANR. Le 14 mars, lors de l’inauguration de l’Institut Pierre-Gilles-de-Gennes à Paris, François Hollande avait annoncé que l’ANR accepterait davantage de projets cette année.  Reste à voir sur quels critères les enveloppes seront réparties.

Des attentes politiques en contradiction avec la recherche

Pourtant, selon un classement établi par Thomson-Reuters  en mai 2016, le CEA, le CNRS et l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale) figurent parmi les dix premiers organismes de recherche en termes d’innovation dans le monde. Une dynamique dont les chercheurs craignent l’essoufflement.

« Il y a vingt ans les laboratoires étaient subventionnés par l’organisme de tutelle auquel ils étaient rattachés. Un financement complété par le privé si besoin. Aujourd’hui c’est l’inverse. » déplore Martine Cohen-Salmon.  Des restrictions budgétaires publiques qui vont de pair avec un autre problème « pour qu’un projet soit validé par l’ANR, il faut le tourner vers le développement. Or c’est totalement contradictoire avec la recherche qui ne peut pas donner de garantie, on ne sait pas ce que l’on va trouver à l’issue d’une recherche. »

Depuis sa création le budget de l’ANR est passé de 710 millions d’euros (M€) en 2005  à 535 M€ en 2014. Bien qu’il l’un des budgets les plus importants en Europe, elle est constante régression. En Allemagne les dépenses de recherche et développement ont augmenté de 75% en dix ans.

Sonia Ye

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Les droits des trans à l’international

Si en France les droits des personnes transgenres et transsexuelles restent encore l’objet de mille précautions, d’autres pays n’ont pas hésité à autoriser les personnes transgenres et transsexuelles à modifier leurs documents d’identité pour y faire figurer le genre auquel elles s’identifient. Tour d’horizon.

 

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L’Espagne est l’un des pays pionniers sur la question des droits des transgenres et transsexuels. Elle a autorisé en 2007 à toutes les personnes majeures de changer leur identité mais aux conditions que celles-ci aient subi d’abord un examen psychologique et aient une preuve médicale de leur changement de sexe. Toutefois, la loi a été assouplie puisque cette année un jeune garçon de 4 ans a réussi à changer son prénom Luken (masculin) en Lucía pour refléter l’identité féminine dans laquelle il se reconnaît depuis sa naissance.

(Lucia, une jeune fille transgenre de quatre ans, n’est plus Luken. C’est la deuxième fois que cela arrive au Pays Basque).

Peu de temps après, en 2012, l’Argentine adopte une loi plus complète encore : il est interdit d’exiger toute expertise médicale, psychiatrique, tout traitement hormonal, ou stérilisation au moment des démarches. Celles-ci sont accessibles même aux enfants.

 

En 2015 Malte suit le même chemin: l’île dispose d’une des législations les plus souples sur le sujet au monde. Les trans ont le droit de changer d’identité après un bref passage chez le notaire, sans âge minimum ni période de réflexion. Celles qui ne souhaitent pas que leur sexe soit mentionné sur leurs papiers d’identité peuvent également choisir d’y mettre un « X ». L’Irlande et la Colombie ont reconnu la même année les droits des trans, dès l’âge de 16 ans dans le premier cas. La Pologne adopte les mêmes résolutions en 2015, avec plusieurs restrictions toutefois : il faut être célibataire et bénéficier d’un certificat médical pour attester que la personne ne s’identifie pas dans le genre de naissance.

 

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Des droits toujours en suspens dans certains pays

Enfin, d’autres pays sont, comme la France, en train de débattre d’un projet de loi pour défendre les droits des trans. Ainsi, en Bolivie les transsexuels pourront bientôt modifier leurs papiers d’identité malgré une forte contestation de l’Église catholique. Cette démarche reste toutefois soumise à certaines conditions : être majeur, avoir subi un examen psychologique et posséder une preuve médicale de changement de sexe, ce qui laisse de côté les transgenres. Le Canada, à travers le premier ministre Justin Trudeau, s’est prononcé en faveur de l’adoption de lois luttant contre les discriminations contre les transgenres le plus rapidement possible.

 

Toutefois, tous ces pays restent des exceptions : au total, 79 pays considèrent l’homosexualité et la transsexualité comme illégales, voire un crime. Aussi la Russie a récemment interdit la conduite aux personnes transgenres. Preuve est faite que les droits des minorités sexuelles restent largement bafoués à l’international.

 

Myriam Mariotte

Carte : Léa Broquerie

Une bonne pression et un peu d’air? Bienvenue au festival Pint of science!

Démystifier la science, c’est le pari du festival annuel associatif Pint of Science qui a ouvert ses portes hier soir. Le principe : déguster une bonne bière dans différents bars de Paris tout en écoutant des conférences scientifiques. Une manière de vulgariser un domaine parfois jugé obscur. 

Vincent Lemaire avec le micro présente Augustin Colette avant son intervention.
Vincent Lemaire avec le micro présente Augustin Colette avant son intervention.

Il est 19h30 au Lieu-Dit, bar du XXe arrondissement de Paris, quand la conférence commence. Une vingtaine de personnes de tous âges est rassemblée pour écouter, une pinte de bière à la main, Augustin Colette, jeune chercheur à l’Institut national de l’Environnement Industriel et des Risques. Dans le cadre de la première soirée de Pint of Science, il est venu parler de pollution et de qualité de l’air. Le festival, créé en Angleterre il y a cinq ans par des chercheurs en neurosciences soucieux de vulgariser leur domaine, cherche à créer un cadre convivial pour parler de sujets scientifiques. Chaque année, partout dans le monde, des chercheurs et des étudiants doctorants viennent transmettre leurs recherches dans des bars qui proposent toute la nuit des pintes de bière. Des jeux comme des quizz ou des concours rythment la soirée pour gagner des goodies portant le délicieux logo de l’évènement : une bière moussue à lunettes.

Logo de Pint of Science en France

Un public mélangé, entre novices et scientifiques

Vincent Lemaire est doctorant dans le domaine de la géophysique. Il travaille sur les effets du changement climatique sur la qualité de l’air. C’est lui qui a invité Augustin Colette, son directeur de recherche, le sachant habitué à parler régulièrement dans des conférences. Il s’investit dans l’organisation de Pint of science depuis l’année dernière. Même s’il y a de nombreuses thématiques, c’est plutôt celle concernant la Terre qui l’intéresse.

« On a choisi de centrer nos trois soirées autour de la qualité de l’air et du changement climatique, puisque c’est d’actualité avec la COP 21, des insectes et des pesticides. Il faut trouver des titres accrocheurs et résumer le thème sur le site pour donner envie de venir voir. Il y a beaucoup de soirées Pint of science avec d’autres thématiques partout dans Paris pendant trois soirs. C’est important de se démarquer des autres. »

D’où un concours de dessin bien particulier pour terminer la soirée. Le but : imaginer la nouvelle machine du futur anti-pollution. Quentin Berché vient de gagner le concours. Il est venu avec sa compagne Elsa Lecoq par curiosité. Il travaille dans le bâtiment donc a priori dans un domaine assez éloigné des sciences.

« Je vois quand même dans mon métier les problèmes de perdition de chaleur et tout ce qui est nocif à l’environnement. »

Quentin Berché et Elsa Lecoq dégustent leurs bières tout en écoutant la conférence.
Quentin Berché et Elsa Lecoq dégustent leurs bières tout en écoutant la conférence.

Des jeunes gens novices mais quand même conscients des enjeux du changement climatique. C’est d’ailleurs pour cela qu’ils ont choisi cette soirée-là. Marion, 23 ans, professeure de français dans un collège, aurait même aimé en entendre un peu plus. Elle reste sur sa faim.

« C’est difficile de doser entre des scientifiques qui viennent à Pint of science écouter les conférences et des personnes qui ne connaissent pas grand-chose aux thématiques. Il faut parler à tout le monde » explique Vincent Lemaire.

Un joyeux mélange donc entre néophytes et érudits pour faire découvrir un monde scientifique bien vaste!

Florence Dauly.

Pint of Science, c’est ici.

Bis, la boutique qui rend la solidarité tendance

Offrir une seconde vie aux vêtements et une deuxième chance aux employés, c’est l’objectif que Bis Boutique Solidaire s’est fixé. Des vêtements de marque à prix bradés, des partenariats avec différentes associations pour aider les plus démunis et un tremplin pour les salariés : en conjuguant mode et réinsertion, Bis propose un nouveau concept solidaire qui séduit les clients. Une deuxième boutique a d’ailleurs ouvert cette année dans le 9ème arrondissement.

Il est 15 heures et la boutique située au 7 faubourg du Temple est en effervescence. Serge Bassetto, le responsable de 53 ans, s’affaire pour récupérer la livraison quotidienne de vêtements. De nombreux présentoirs défilent, remplis de pièces colorées de toutes tailles. Les employés déchargent d’énormes sacs bleus Ikea, pleins à craquer. Des jupes, des pantalons, des manteaux, des sacs ou des chaussures… Tous les jours, la boutique reçoit entre 500 et 600 pièces afin de proposer un large choix à la clientèle. Quelques curieuses parcourent déjà les nouveaux vêtements qui attendent d’être rangés, avant d’être arrêtées par le responsable : « Désolé mesdames, ceux-là ne sont pas tout de suite en rayon. Il faut bien qu’il en reste pour demain ! », plaisante-t-il.

Il faut dire que le succès est au rendez-vous pour la boutique solidaire. Des clients de tous âges viennent chiner les vêtements de seconde main, séduits par les petits prix et le concept. Loin de l’image de la friperie en bazar, remplie de pièces quelquefois en mauvais état, Bis se présente comme un magasin chic, proposant une gamme très sélective de prêt-à-porter. Les vêtements sont propres, repassés et triés par taille sur les portiques. Des lampes design au plafond, des pièces lumineuses et des cadres au mur : au premier abord, on est loin de se douter que cette boutique n’est pas comme les autres.

Un large choix de vêtements est proposé aux clients, et présenté comme dans un magasin traditionnel.
Comme dans un magasin traditionnel, un large choix de vêtements et de tailles est proposé aux clients. Des collections pour femmes, hommes, enfants : il y en a pour tous les goûts.

Un tremplin pour l’avenir des employés en réinsertion

Bis Boutique se différencie par son engagement et sa volonté d’agir comme tremplin pour les employés en réinsertion. Ils sont une quinzaine à être embauchés pour un contrat d’un an qui leur permet de se remettre sur le chemin du travail. Serge Bassetto est lui-même passé par le contrat de réinsertion chez Bis, avant de devenir responsable un an plus tard. Après trois ans dans cette entreprise, il est convaincu que c’est un concept d’avenir. « On veut juste que les gens soient impliqués dans leur futur, le but est aussi qu’ils se re-sociabilisent. La priorité, c’est les employés ». Ils ont des origines et des parcours différents – Bis rejette toute forme de discrimination et a d’ailleurs pour objectif d’employer le plus de profils différents possibles. En tant que boutique solidaire, l’aval de l’État et de Pôle Emploi est obligatoire. Des quotas doivent aussi être respectés pour garantir l’équité et la parité dans l’équipe : « On doit embaucher deux femmes, deux personnes au RSA, deux chômeurs, par exemple », ajoute Serge Bassetto. Les employés en réinsertion travaillent quatre jours par semaine et sont payés au SMIC. Bis leur offre également 50 euros de vêtements tous les mois.

Sur la façade de la boutique, le concept solidaire de Bis est expliqué aux clients.
Sur la façade de la boutique, le concept solidaire de Bis est expliqué aux clients.

Sonny, un jeune employé de 21 ans, travaille à la boutique depuis le mois de janvier. « Je suis arrivé ici après pas mal de petites galères. Mais je m’y plais, l’équipe est sympa et on soutient une bonne cause. Je pense que c’est vraiment un bon tremplin pour rebondir sur autre chose », confie-t-il. Et à l’avenir, Sonny projette de repasser son bac et de reprendre ses études dans le commerce à la fin de son contrat de réinsertion. A la caisse, Jamel accueille chaleureusement les clients et discute avec eux. Après un an passé à Bis Boutique, son contrat est sur le point de se terminer. Cette expérience lui a fait découvrir un concept solidaire où les employés sont à l’écoute de leurs clients, et regrette qu’il n’existe pas plus de magasins comme celui-ci : « C’est très différent d’une boutique lambda, on n’est pas derrière le client à vouloir faire du chiffre. L’ambiance est très décontractée et familiale ». A 39 ans, il souhaite maintenant continuer sa carrière dans le textile et le prêt-à-porter.

Un partenariat aidé qui s’engage à la fois pour les employés et pour les associations. Chaque année, environ 400 tonnes de vêtements sont envoyés à l’atelier où un tri est effectué, et à peine 40 tonnes sont gardées. Le reste est revendu à une plateforme de recyclage ou donné gratuitement à des associations pour les plus démunis. Rémi Antoniucci est à l’origine de ce concept. S’il s’occupe maintenant majoritairement des démarches à l’atelier, il souhaite pérenniser ce système pour continuer à le développer. Sa première boutique a ouvert il y a trois ans, et la seconde en mars dernier. « On aimerait ouvrir une nouvelle boutique tous les deux ou trois ans, explique Serge Bassetto, mais pour l’instant on reste sur Paris pour bien asseoir le concept d’abord ».

Les vêtements sont étiquetés avec le logo de Bis Boutique Solidaire dans l'atelier de tri, avant d'être acheminés vers les deux boutiques parisiennes.
Les vêtements sont étiquetés avec le logo de Bis Boutique Solidaire dans l’atelier de tri, avant d’être acheminés vers les deux boutiques parisiennes.

La friperie nouvelle génération

Un concept dans lequel les employés comme les clients se retrouvent. Michèle, 70 ans, est une habituée de la boutique solidaire. Elle connaît bien les employés et leur apporte même des petits cadeaux quelquefois. Avec des prix allant de 1 à 30 euros, elle trouve toujours une pièce qui lui fait plaisir parmi le choix de vêtements. « Je ne vais jamais dans des boutiques traditionnelles, j’aime bien que l’argent que je dépense arrive à des gens qui en ont besoin. J’étais tombée sur cette boutique par hasard la première fois, et j’ai tout de suite aimé le principe. Ce n’est pas juste de la consommation pure », explique-t-elle. Plus loin, une cliente drômoise de 30 ans s’est laissée séduire en passant devant la boutique. « J’ai remarqué l’aspect solidaire de la boutique comme c’était écrit sur la façade. Je suis entrée en pensant que c’était comme Emmaüs », raconte-t-elle, en fouillant parmi les portes-manteaux. Agréablement surprise par la présentation des vêtements et l’ambiance de la boutique, elle n’est pas déçue de s’être arrêtée et se prépare pour des essayages en cabine: « Cela ne ressemble vraiment pas à une vieille friperie. Les vêtements sont clean et vraiment pas chers. En plus tout est classé par taille. Je vais en parler à mes copines en rentrant ! ».

En entrant chez Bis Boutique Solidaire, Michèle se laisse toujours tenter par un nouveau vêtement.
En entrant chez Bis Boutique Solidaire, Michèle se laisse toujours tenter par de nouveaux vêtements.

Avec deux boutiques parisiennes qui ne désemplissent pas, et de véritables perspectives pour les employés, Bis Boutique Solidaire a encore un bel avenir devant elle.

Marie-Hélène Gallay