Japon : élections anticipées à haut risque pour Shinzo Abe

Le Premier ministre japonais, Shinzo Abe, a dissout la chambre des représentants japonaise en vue d’asseoir sa légitimité et sa stratégie militaire face à la menace de l’arme atomique nord-coréenne. Mais sa victoire est loin d’être assurée.

Shinzo Abe, premier ministre japonais sortant./ Ambassades des Etats-Unis à Tokyo. Domaine public
Shinzo Abe, Premier ministre japonais sortant./ Ambassades des Etats-Unis à Tokyo. Domaine public

Pour les aspirants députés japonais, la campagne commence aujourd’hui. Alors qu’il restait un an avant les prochaines élections législatives, le premier ministre japonais Shinzo Abe a annoncé la dissolution de la chambre basse du Parlement le 28 septembre, pour organiser de nouvelles élections le 22 octobre.

Cette décision fait suite aux tirs de missiles nord-coréens de ces derniers mois, dont plusieurs ont survolé directement le Japon. « La sécurité de notre pays est de plus en plus menacée », a dénoncé le premier ministre. Pour lui, les élections anticipées sont l’occasion d’affirmer sa légitimité pour pouvoir remilitariser le pays.

L’enjeu militaire au centre du débat

Shinzo Abe a en effet annoncé vouloir abolir l’interdiction pour le Japon d’avoir une armée, et ce avant 2020. En 1947, après la défaite du Japon durant la Seconde Guerre Mondiale, les Etats-Unis ont forcé le pays a adopter une nouvelle Constitution privant l’empire de ses ambitions expansionnistes. L’article 9 de la Constitution indique que « le Japon renonce à jamais à la guerre en tant que droit souverain de la nation ».

Pourtant, depuis 1954, le pays s’est doté d’une force armée d’autodéfense en réinterprétant l’interdiction américaine comme une interdiction d’être belliqueux. « Le Japon peut bombarder des ennemis qui débarquent sur son sol, mais ne peut rien faire contre les base aériennes ou les dispositifs de lancement de missiles en Chine ou en Corée du Nord », explique Carl Schuster, spécialiste des opérations militaires dans le Pacifique, au micro de CNN. « Les forces japonaises peuvent se défendre, mais pas riposter. » Le droit de riposter, c’est précisément ce que Shinzo Abe veut obtenir à travers cette élection.

Une élection difficile

C’est un pari très risqué que fait le premier ministre. Le chef du gouvernement est directement issu du parti de la majorité dans la chambre basse, il risque donc de perdre sa place si le Parti Libéral Démocrate qu’il dirige échoue à séduire. Or, la popularité de Shinzo Abe est en chute libre suite à deux scandales de corruption impliquant sa famille. En juillet, il est passé sous les 30 % d’opinions positives.

« Abe avait réussi à conserver son soutien grâce aux conditions économiques favorables, un manque de rivaux crédibles, et grâce à sa position envers la Corée du Nord. Le principal risque aujourd’hui est un fort soutien pour le nouveau Parti de l’Espoir, qui pourrait canaliser les électeurs mécontents et amoindrir les espoirs d’Abe de rester en place », estime l’observatoire international BMI Research.

Trois jours à peine avant la dissolution de la chambre des représentants, Yuriko Koike, gouverneure de Tokyo, fondait le Parti de l’Espoir. Dans le paysage politique modéré du Japon, cette ancienne présentatrice TV est devenue cheffe de file de l’opposition. Une semaine plus tard, le parti nouveau né enregistrait 19 % des intentions de vote.

Yuriko Koike et Shinzo Abe se serrent la main avant le début des élections./ Domaine public
Yuriko Koike et Shinzo Abe se serrent la main avant le début des élections./ Domaine public

Plus que par amour pour Yuriko Koike, c’est pour s’opposer au premier ministre en place que les citoyens semblent  la soutenir. Son programme est à l’image de son cri de ralliement : « Mettons fin à la politique de Shinzo Abe ! ». De plus, Yuriko Koike veut également abolir la clause pacifiste de la Constitution, coupant l’herbe sous le pied de son rival.

Face à une adversaire sachant profiter de sa popularité déclinante, Shinzo Abe peut donc craindre la perte de sa majorité, et donc de son poste de premier ministre. C’est tout l’enjeu de l’élection du 22 octobre.

– Jean-Gabriel Fernandez

La Russie accuse les USA de « faire semblant » de lutter contre l’EI

L’armée russe, qui intervient en Syrie en appui des forces gouvernementales du pays, a accusé mardi les Etats-Unis de « faire semblant » de combattre les jihadistes du groupe Etat islamique (EI) afin de « compliquer » l’avancée des troupes du régime.

Selon le général Igor Konachenkov, porte-parole du ministère russe de la Défense, la coalition internationale menée par Washington a réduit ses opérations en Irak pour permettre aux combattants de l’EI de se replier dans l’est de la Syrie, où l’armée de Bachar al-Assad progresse dans la région de Deir Ezzor, la dernière aux mains des jihadistes.

« Tout le monde voit que la coalition menée par les Etats-Unis fait semblant de combattre l’Etat islamique, spécialement en Irak, mais continue de soi-disant combattre activement l’EI en Syrie« , a-t-il déclaré dans un communiqué. Depuis le début de l’intervention militaire russe en Syrie en septembre 2015, Moscou a à plusieurs reprises accusé les Etats-Unis de soutenir l’EI ou la branche syrienne d’Al-Qaïda, l’ancien Front Al-Nosra et actuel Front Fateh al-Cham, et appelé Washington à « arrêter de faire des avances aux terroristes« .

Clément Dubrul

De vrais faux Rodin devant la justice

A partir de mercredi, la cour d’appel de Paris jugera une société et son gérant pour avoir fabriqué et vendu à l’étranger des œuvres produites à partir de moules originaux d’Auguste Rodin, sans l’autorisation du musée Rodin.

Parmi les reproductions se trouvent notamment « Le Baiser », « Le Penseur » et même « La main de Dieu ». Certaines ont même été exposées à Venise, Genève ou encore Toronto. Quatre prévenus, dont Gary Snell, patron américain de la société Gruppo Mondiale, sont poursuivis pour avoir édité et commercialisé des oeuvres d’Auguste Rodin, sans dire qu’il s’agissait, en réalité, de simples reproductions.

La justice avait été saisie en mars 2001 d’une plainte pour escroquerie et contrefaçon du Musée Rodin de Paris qui détient les droits moraux de l’artiste.

En novembre 2014, à l’issue d’un premier procès, le tribunal correctionnel de Paris s’était déclaré incompétent, estimant qu’il n’était pas démontré que les sculptures aient été fabriquées, exposées ou vendues sur le territoire français. Le parquet avait fait appel de cette décision et obtenu un nouveau procès.

La société poursuivie, Gruppo Mondiale, aurait produit, selon l’estimation d’un expert judiciaire, quelque 1.700 bronzes tirés à partir de 52 œuvres d’Auguste Rodin (1840-1917), pour un préjudice estimé à 60 millions d’euros. Lors du premier procès, Gary Snell n’avait reconnu que l’édition d’environ 500 pièces.

Marie Lecoq

Grève des fonctionnaires : les raisons de la colère

Hospitaliers, enseignants, policiers, cheminots : ce mardi 10 octobre, neuf syndicats de la fonction publique appellent à la grève. Pour la première fois depuis 2007, ils sont parvenus à se mettre d’accord pour une manifestation commune. Retour sur les enjeux de la mobilisation.

Le gel du point d’indice

« En 2018, il n’y aura pas d’augmentation du point d’indice, déclarait en juin Gérald Darmanin, ministre de l’Action et des Comptes publics. Cela ne veut pas dire qu’il n’y en aura pas pendant tout le quinquennat ». Cette déclaration avait immédiatement suscité la colère des fonctionnaires. Une telle décision traduisant, selon certains syndicats, la baisse du pouvoir d’achat pour les salariés concernés. Une mesure « aussi injuste qu’inefficace (…) qui bloque la rémunération de 20 % de la population », avait réagi en juin Bernadette Groison (FSU).

La valeur du point d’indice, restée inchangée entre 2010 et 2016, avait connu une légère hausse (0,6%) en juillet 2016, ainsi qu’en février 2017 (0,6%).

La suppression de 120 000 postes

Sont concernés par cette annonce les agents de la fonction publique territoriale et la fonction publique d’Etat. « Les effectifs de la fonction publique hospitalière seront en revanche maintenus », a précisé le gouvernement. Plus précisément, cela correspondra à un volume de 50 000 postes non renouvelés dans la fonction publique d’Etat et d’environ 70 000 dans la fonction publique territoriale.

Le retour du jour de carence

Cette mesure, qui supprime la rémunération d’un premier jour d’absence pour congé maladie, avait été mise en place sous Nicolas Sarkozy. Le gouvernement entend par ce biais réduire l’absentéisme dans la fonction publique. Rétablir le jour de carence se traduit par l’absence d’indemnisation de l’employé le premier jour d’absence. Il sera alors indemnisé à partir du deuxième jour de son congé maladie qui dure trois jours au total. « Les fonctionnaires ne l’avalent pas, c’est une erreur de le réintroduire », avait alors réagi le secrétaire général de Force ouvrière (FO), Jean-Claude Mailly, à l’annonce de cette mesure.

La hausse de la CSG

« L’augmentation de la CSG (Contribution sociale généralisée) sera totalement neutralisée », a précisé hier le Premier ministre Edouard Philippe, invité sur Europe 1. La CSG est un impôt qui permet de financer la protection sociale, la hausse décidée par le gouvernement doit permettre de financer la baisse des cotisations sociales. Cette décision touche en particulier certains travailleurs indépendants, les fonctionnaires mais aussi les retraités. Ainsi, Alexis Corbière, député de La France insoumise déclarait en juillet dernier que « baisser l’ISF mais augmenter la CSG pour nos anciens, c’est honteux, immoral, scandaleux ».

A la veille de la journée de mobilisation aujourd’hui, Edouard Philippe a voulu rassurer les syndicats en précisant que cette hausse de l’impôt serait compensée. Il a ensuite détaillé cette compensation qui se ferait en diminuant les cotisations calquées sur les cotisations salariales et ensuite par un versement de primes.

Gérald Darmanin doit rencontrer les syndicats de la fonction publique le 16 octobre prochain. Il sera notamment question des salaires.

Léa DUPERRIN