Loi de bioéthique: l’Assemblée vote la fin du « bébé-médicament »

Cette technique destinée à sauver des enfants atteints d’une maladie génétique posait de nombreuses questions éthiques.
L’Assemblée nationale interdit la pratique du « bébé-médicament ». Cette technique médicale permettait de concevoir un enfant indemne de la maladie dont souffre son frère ou sa soeur, et qu’il soit immuno-compatible avec lui ou elle.

C’est la fin du « bébé-médicament ».  L’Assemblée nationale a voté lundi soir un amendement proposé par Les Républicains mettant un terme à la technique dite du « bébé médicament », destinée à sauver des enfants atteints d’une maladie génétique mais qui posait des questions éthiques, dans le cadre de l’examen en première lecture de la loi bioéthique.

Dans cette technique, un enfant est conçu pour qu’il soit indemne de la maladie génétique dont souffre un frère ou une soeur et immuno-compatible avec lui (ou elle), ce qui peut permettre la guérison de l’enfant atteint grâce à un prélèvement de sang de cordon.

« Cette technique a été autorisée à titre expérimental par la loi du 6 août 2004. Mais, au regard de la transgression qu’elle représente, une telle possibilité ne saurait être maintenue dans le Code de la santé publique sans nécessité impérieuse », a plaidé la députée LR Annie Genevard dans son amendement.

Une majorité de députés ont voté l’abrogation de l’article incriminé

Rappelant que « cette pratique est arrêtée en France depuis 2014 », le rapporteur Jean-François Eliaou (LREM) avait recommandé cependant son maintien estimant que cette technique représentait « la seule possibilité pour traiter » certains patients. La ministre de la Santé Agnès Buzyn avait elle donné un avis de sagesse estimant ne pas avoir le recul suffisant pour s’exprimer sur le sujet, compte-tenu de son passé de médecin hématologue et de praticienne hospitalière.

« On voit bien l’efficacité de cette méthode mais il y a une interrogation sur l’utilisation d’un embryon et, à terme d’une personne, comme un moyen et non comme une fin puisqu’on va faire peser sur lui le poids de la possibilité de la guérison d’un autre enfant », a souligné Xavier Breton (LR). « Il s’agit de familles qui ont un projet parental, décident de faire un autre enfant et, dans le cadre, se voient proposer de chercher en plus, la compatibilité pour que ce nouvel enfant puisse éventuellement sauver son frère ou sa soeur. Mais ce ne sont pas des enfants fabriqués pour sauver un autre bébé », avait rectifié Agnès Buzyn.

 

Celsalab avec l’AFP

Convention citoyenne sur le climat : la publicité en ligne de mire

La Convention citoyenne sur le climat s’est ouverte vendredi dernier. Jusqu’à janvier 2020, les participants vont devoir faire des propositions de lois au gouvernement pour limiter les émissions de gaz à effet de serre. Parmi elles pourrait se trouver la réglementation de la publicité, accusée par les experts de participer au réchauffement climatique.
Vendredi 4 octobre, le premier ministre Edouard Philippe a livré un discours lors du premier jour de la Convention Citoyenne sur le climat. Une initiative souhaitée par Emmanuel Macron en marge du « grand débat ». (Photo by Ian LANGSDON / POOL / AFP)

 

Ils ont quatre mois pour légiférer sur le climat. Les 150 citoyens tirés au sort pour participer à la Convention Citoyenne sur le climat ont pour mission de proposer des textes de lois au gouvernement, qui feront ensuite l’objet d’un référendum, d’un vote au Parlement, ou d’un décret. Pour parvenir à cet objectif, les participants ont la possibilité d’auditionner de nombreux spécialistes sur leurs domaines d’expertise. L’une des premières à avoir été convié : la paléoclimatologue Valérie Masson-Delmotte, également co-présidente du groupe n°1 du GIEC depuis 2015. Au terme d’une conférence d’initiation aux effets concrets de l’activité humaine sur le climat, on lui a demandé LA mesure qu’elle prendrait en premier. « Je pense que la question de la publicité est à considérer,  a-t-elle répondu. Parce qu’on dit aux gens que d’un côté, il faut baisser les émissions de gaz à effet de serre, et de l’autre, on est submergés de publicité qui poussent à faire l’inverse. »

 

 

« Pour moi, il y a un encouragement permanent à une consommation massive par la publicité, et c’est quelque chose que les Français ont compris, développe Valérie Masson-Delmotte, qui se félicite de la réception positive des participants de la Convention à sa proposition. Mais surtout, il n’y a aucun encadrement de cette publicité. Quand on voit le nombre de pub pour de nouveaux SUV [NDLR : sport utility vehicle] ou des voyages avec avion qui vont à l’encontre d’une certaine conscience écologique, c’est inquiétant  », ajoute-t-elle. Pour cause, l’automobile est l’un des plus gros publicitaires en France. A commencer par Renault, qui, selon des chiffres de Kantar Media, a dépensé près de 95,8 millions d’euros en publicité rien qu’au 1er trimestre de l’année 2018.

 

Une « double pollution »

 

En 2001, dans un article pour la revue Ecologie et Politique, le géographe environnemental Estienne Rodary expliquait déjà qu’un changement en faveur du climat devrait concerner « non seulement la production, mais aussi la consommation ».« C’est le type de consommation actuel, fondé sur des faux besoins […] qui doit être mis en question ». Un avis que partage Thomas Bourgenot, porte-parole de l’association Résistance à l’Agression Publicitaire, pour qui publicité et impact négatif sur le climat vont de paire. « C’est une double pollution : d’abord intrinsèque, liée au numérique, aux prospectus, mais également extrinsèque, liée à une certaine surconsommation », explique-t-il.

Chez les experts et les militants écologiques, le message est donc le même : la publicité est une cause indirecte du réchauffement climatique. Et chez les politiques, des voix engagées commencent elles-aussi à se faire entendre. Dans son bulletin hebdomadaire diffusé sur les réseaux sociaux ce matin, François Ruffin, député de la Somme (80) assurait que l’« on ne peut pas aller vers une réduction de 40% des gaz à effet de serre d’ici 2030 sans rompre avec le productivisme-consumérisme, qui nous dit que le bonheur c’est le produit, c’est l’achat »

« Le lobby publicitaire est très puissant »

 

Selon des chiffres communiqués par le BUMP (Baromètre unifié du marché publicitaire), les investissements publicitaires devraient atteindre 12,3 milliards d’euros cette année. Un chiffre en hausse de 3,9% par rapport à 2018, qui témoigne de la puissance du marché. « Le lobby publicitaire est très puissant », affirme Thomas Bourgenot.« Nous avons déjà pu le constater lors du Grenelle pour l’environnement de 2012 auquel nous avons participé avec l’association », raconte-t-il. Résistance à l’Agression Publicitaire y avait effectué plusieurs propositions, qui portaient majoritairement sur les formats publicitaires. Ils réclamaient qu’ils soient revus à la baisse, ce qui « entrainerait une démarche active des citoyens pour aller vers la publicité, et non l’inverse », explique le porte-parole de l’association. Mais aucune de leurs propositions n’a été retenue. « Alors que celles de l’Union des annonceurs, oui », ajoute-t-il.

Pour Valérie Masson-Delmotte, la solution réside surtout dans la prévention et l’information auprès des consommateurs. « On arrivera jamais à une totale suppression de la publicité, assure-t-elle, mais je pense qu’il devrait y avoir un étiquetage sur chacune d’entre elles, pour informer sur l’impact environnemental de chaque produit ou service qu’elle promeut. Et il y a un réel manque de courage des élus sur ce sujet », martèle-t-elle.  

Le dernier espoir des anti-pub semble donc résider dans la Convention citoyenne sur le climat. Mais pourra-t-elle agir concrètement sur une réglementation de la publicité ? «J’ai peur qu’ils se heurtent à la même problématique que nous lors du Grenelle de l’environnement, regrette Thomas Bourgenot. Mais voir des citoyens s’emparer de ce sujet, c’est déjà un énorme pas en avant ».

 

Alice Ancelin

Mondiaux d’athlétisme : coup de chaud pour le Qatar avant la Coupe du monde 2022

Climatisé, le stade Khalifa a accueilli la quasi-totalité des épreuves lors des Mondiaux d’athlétisme au Qatar / Wikipédia

Les championnats du monde d’athlétisme organisés à Doha ont été la cible de vives critiques. Outre les soupçons de corruption et la faible affluence au stade Khalifa, ce sont surtout les conditions météorologiques caniculaires qui ont été pointées du doigt. Un avertissement de taille à trois ans du prochain Mondial de football, également contesté.

 

« J’ai promis à ma famille que je rentrerais sain et sauf, j’ai tenu ma promesse en abandonnant. » Cette phrase prononcée par le champion olympique du 50 kilomètres marche, Matej Toth, en dit long sur le calvaire qu’ont vécu certains athlètes lors des Mondiaux d’athlétisme organisés à Doha du 27 septembre au 6 octobre derniers.

Comme le Slovaque, ils sont plusieurs dizaines à avoir abandonné en cours d’épreuve entre le marathon et la marche, seules épreuves qui se déroulaient en dehors du stade Khalifa climatisé. Malgré des départs prévus après minuit, les coureurs et marcheurs ont du faire face à des conditions climatiques extrêmes.

Entre 35 et 40 degrés la nuit

L’organisation des Mondiaux avait décidé de déplacer les dates de la compétition de presque deux mois afin que les athlètes bénéficient de températures plus clémentes qu’en août. Elles ont finalement été supérieures de dix degrés aux moyennes de saison sur les dix jours de compétition. Le soir, le mercure a ainsi dépassé les 40 degrés avec un taux d’humidité avoisinant les 75%. Des conditions qui ont forcément eu un impact sur les performances des participants, habitués à concourir autour des 25 degrés.

Au-delà des simples performances des athlètes, la santé des athlètes en elle-même était mise en danger, comme l’explique le docteur Marc Rozenblat, membre du conseil national professionnel de médecine du sport : « L’activité sportive est basée sur l’échange de flux thermiques entre le corps chaud et l’environnement un peu plus frais. Quand la température extérieure devient supérieure à celle du corps [ndlr : environ 37 degrés], le cerveau et le corps ne suivent plus. On leur impose une augmentation du rythme cardiaque et du débit pulmonaire mais avec moins de récupération. Il y a alors un réel risque d’hyperthermie, de coma et même de décès pour les athlètes qui se donnent à fond comme si la température était plus raisonnable. »

Les quelques précautions prises n’y ont rien fait, que ce soit les tentes de la Croix-Rouge placées tous les 200 mètres ou les gélules ingérées par les athlètes pour surveiller la température corporelle. Le marathon féminin (voir tweet ci-dessus) a enregistré un record d’abandons puisque 28 des 68 coureuses n’ont pas franchi la ligne d’arrivée lors du premier jour de compétition. Certaines d’entre elles ont même été évacuées sur des fauteuils roulants. La gagnante, la Kenyane Ruth Chepngetich, a d’ailleurs réalisé le chrono le plus lent de l’histoire des Mondiaux, en 2h32.

Au 50 kilomètres marche masculin (voir vidéo ci-dessous), le champion du monde en titre Yohann Diniz fait partie des quatorze athlètes à avoir abandonné. Pour s’entraîner dans des conditions décentes et éviter la chaleur étouffante à l’extérieur, le Français en a d’ailleurs été réduit à fouler les couloirs de son hôtel. Le recordman de la discipline n’a pas mâché ses mots pour décrire sa situation, s’estimant être être pris pour un « cobaye ».

Des précautions à prendre pour le Mondial 2022

Dans un peu plus de trois ans, le Qatar accueillera la Coupe du monde. Pour la première fois de l’histoire du trophée, la compétition n’aura pas lieu en été mais juste avant l’hiver et tous les stades seront climatisés pour assurer une température légèrement supérieure à 25 degrés lors des matchs. Ce ne sera pas la première fois qu’elle se tiendra dans un pays chaud : en 2014, l’édition brésilienne avait été marquée par la mise en place de « pauses fraîcheur » pour permettre aux joueurs de s’hydrater lors des rencontres.

Bien qu’il s’agisse d’un sport nécessitant un effort différent par rapport aux courses de fond, le football et l’organisation de sa compétition phare au Qatar sont aussi sources d’inquiétudes. Marc Rozenblat préfère penser que le pays hôte tirera les enseignements de ces Mondiaux d’athlétisme : « La récente expérience a bien montré au Qatar qu’il est impossible de pratiquer le sport dans de telles conditions. De plus, il est évident qu’aucun risque ne sera pris avec les fooballeurs : ils s’entraîneront dans les stades climatisés où ils disputeront leurs matchs afin d’éviter tout effort sous des températures extrêmes. »